Intervention de Valérie Rabault

Réunion du mercredi 8 novembre 2017 à 9h05
Commission élargie : finances

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaValérie Rabault, rapporteure spéciale de la commission des finances, de l'économie générale et du contrôle budgétaire pour les comptes spéciaux :

Merci, monsieur le secrétaire d'État, pour votre exposé, mais vous faites exactement comme vos prédécesseurs : vous nous demandez de voter un compte « Participations financières de l'État » dont le montant ne varie jamais. C'est dire si l'objectif que vous nous proposez en demandant de l'approuver est sans doute très irréalisable. Nous avons refait l'historique, que vous trouverez, chers collègues, à la page 19 du rapport spécial : chaque année, à deux exceptions près, c'est, quoiqu'il arrive, un montant de 5 milliards d'euros que le Parlement a dû voter, même s'il y avait beaucoup plus de cessions ou de recapitalisations.

Vous souhaitez que ce budget soit sincère, monsieur le secrétaire d'État. Las, je crains qu'il ne le soit pas. Le reproche ne vous est pas particulièrement adressé : l'an dernier, nonobstant la recapitalisation d'Areva, c'était aussi un montant de 5 milliards d'euros qui était inscrit, dont chacun savait qu'il n'était pas exact. Cette année, vous envisagez de créer un fonds d'investissement. Pour l'instant, nous n'avons aucune idée de ce à quoi il ressemblera, mais nous avons compris qu'il vous fallait vendre 10 milliards d'euros de titres pour le créer, ce qui est supérieur à 5 milliards d'euros. Il eût donc au moins fallu que vous indiquiez un montant de 10 milliards d'euros en recettes et de 10 milliards d'euros en dépenses. Vous n'en avez rien fait, et vous nous proposez donc ce montant de 5 milliards d'euros, comme vos prédécesseurs. C'est, en quelque sorte, demander au Parlement de voter n'importe quoi… Certes, vous avez raison de ne vouloir donner aucune information aux marchés, mais, ce faisant, vous n'en donnez aucune non plus au Parlement, ce qui est plus gênant : vous lui demandez de voter sans qu'il dispose d'aucune information !

Quant à la création de ce Fonds pour l'innovation de rupture, le projet de loi de finances soumis à notre examen ne comporte aucun détail. Ce que nous avons lu dans la presse ou entendu lors d'auditions de M. Le Maire nous évoque une sorte d'usine à gaz. Vous nous proposez de vendre 10 milliards d'euros de titres du portefeuille de l'État, avec lesquels vous créerez un fonds, investi en on ne sait quels autres titres. Et c'est le rendement de ce nouveau fonds qui sera investi chaque année dans l'innovation, soit un rendement théorique fixé par le Gouvernement, comme pour les programmes d'investissements d'avenir – un taux de 2 % est retenu –, soit les dividendes perçus. Nous aimerions évidemment savoir comment cela fonctionnera.

En tant que rapporteure spéciale, je souhaite vous faire une autre proposition. Actuellement, les dividendes des titres détenus sont versés non au compte d'affectation spéciale (CAS) mais au budget général de l'État. C'est une absurdité. Ne serait-il pas plus simple de modifier la loi organique relative aux lois de finances (LOLF) afin de décider qu'ils seront versés au CAS « Participations financières de l'État » et de faire en sorte qu'à la fin de l'année un certain montant soit restitué au budget général, tout en permettant une vraie gestion patrimoniale, avec la possibilité de réinvestir les dividendes pour soutenir l'innovation ? La création d'une usine à gaz serait évitée.

Par ailleurs, certains risques ne sont pas portés à la connaissance du Parlement, qui tiennent à l'évaluation, à des options de vente et d'achat en portefeuille et aux pactes d'actionnaires, dans le cas où l'État n'est pas majoritaire. Tous ces sujets sont passés sous silence dans ce projet de loi de finances. Je souhaiterais pour ma part une véritable analyse – mais nous la ferons dans le cadre de la loi de règlement. J'entends bien votre souci de respecter la confidentialité et le secret des affaires, mais le Parlement mérite d'être éclairé.

Le deuxième point porte sur le compte sur la Grèce. Sont inscrits 148 millions d'euros en autorisations d'engagement et 167 millions d'euros en crédits de paiement, mais, depuis 2015, nous ne rendons plus cet argent à la Grèce. Autrement dit, la Banque de France encaisse les intérêts, en reverse une partie à l'État et nous ne les restituons pas à la Grèce, puisque le plan a été interrompu. Depuis l'interruption du plan d'aide, la France a donc encaissé 1,164 milliard d'euros, et amélioré son solde budgétaire sur le dos de la Grèce.

Dernier point, le montant inscrit dans le compte de concours financiers est de 16 milliards d'euros, soit 60 % de plus que les 10 milliards d'euros de la politique agricole commune (PAC) pour 2018 – nous finançons les avances de la PAC en faveur des agriculteurs en lieu et place de l'Union européenne. Cela signifie qu'il y a des retards extrêmement importants. Pouvez-vous nous en dire un peu plus sur la manière dont ils seront soldés ?

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