Intervention de Benjamin Griveaux

Réunion du mercredi 8 novembre 2017 à 16h20
Commission élargie : finances - affaires économiques - affaires étrangères

Benjamin Griveaux, secrétaire d'état auprès du ministre de l'économie et des finances :

Avant d'examiner les crédits de la mission « Économie », le projet de loi de finances 2018 doit être mis en perspective par rapport à la politique économique du Gouvernement. Conformément aux orientations qu'a fixées le Président de la République, cette loi de finances est une première étape absolument indispensable dans les réformes structurelles que nous engageons pour transformer notre modèle économique en profondeur. Cette transformation sera rendue possible grâce à la réorientation de l'épargne des Français vers l'investissement et l'appareil productif, mais aussi par l'incitation donnée aux acteurs économiques et à nos concitoyens d'entreprendre, parfois d'échouer, mais aussi – et c'est heureux – de réussir.

C'est le sens de la réforme de la fiscalité du capital et de la baisse des prélèvements obligatoires qui pèsent aujourd'hui sur les entreprises et les ménages. Mais c'est aussi le sens des réformes conduites par Muriel Pénicaud, dans le cadre des ordonnances sur le marché du travail, car nous devons avoir une vision globale de nos politiques publiques.

En alliant ces deux réformes structurelles – sur le capital et sur le travail –, nous relancerons notre machine économique. Les indicateurs sont favorables pour la première fois depuis longtemps : le taux de marge des entreprises est à son plus haut niveau depuis quinze ans et se rapproche de celui des entreprises allemandes. Pour autant, notre économie a toujours des difficultés. Elle souffre d'un déficit de compétitivité préoccupant, en témoigne la faiblesse de notre commerce extérieur et la diminution de notre part du marché mondial des produits manufacturés, qui est passée de 4,7 % en 2007 à 3,5 % en 2015. Notre tissu industriel est également fragile, même si l'année dernière fut la première depuis bien longtemps où plus d'entreprises et plus d'usines ont ouvert que fermé. Nous pouvons nous en réjouir collectivement. Mais l'emploi industriel continue de reculer, comme la part de l'industrie manufacturière dans le produit intérieur brut (PIB) qui était de seulement 10 % environ en 2015.

Pour répondre à ces défis, le projet de loi de finances pour 2018 porte un agenda offensif visant une croissance plus forte et une économie plus riche en emplois. Une économie conquérante, c'est d'abord une économie qui fait le choix de l'investissement dans l'avenir. L'ensemble du volet fiscal du projet de loi de finances vise à réorienter l'épargne des Français vers l'investissement productif. C'est le cas de la réforme engagée de l'impôt de solidarité sur la fortune (ISF) qui permettra d'encourager l'investissement dans la croissance de nos entreprises. La réforme de la fiscalité du capital sera également marquée par l'instauration du prélèvement forfaitaire unique (PFU) au taux de 30 % sur les revenus d'épargne. Pour sa part, l'impôt sur les sociétés passera de 33 à 25 % à la fin de ce quinquennat. Celaqui nous redonnera une forme de compétitivité fiscale vis-à-vis de nos partenaires européens et nous rapprochera de la moyenne européenne.

Une économie conquérante, c'est aussi une économie qui repose sur l'innovation. Dès cet automne, un plan de cession d'actifs a été lancé, avec les ventes de participations de l'État dans les sociétés Engie et Renault, la semaine dernière. Le fruit de ces cessions sera réinvesti dans un fond, doté de 10 milliards d'euros de fonds propres. Les revenus qu'il dégagera chaque année – entre 250 et 300 millions – seront dédiés à « l'innovation de rupture », afin d'investir massivement dans des innovations qui ont parfois des difficultés à trouver des financements auprès des mécanismes de marchés habituels, aux exigences de rentabilité plus court-termistes. Nous voulons nous inscrire dans le temps long car c'est, je crois, le rôle des pouvoirs publics.

Cette politique de l'offre est ambitieuse. Dans le projet de loi de finances, elle va de pair avec l'ensemble des mesures destinées à soutenir le pouvoir d'achat des ménages, comme la baisse de 3,15 points des cotisations salariales, chômage et maladie, qui sont basculées vers la CSG. Pour les plus modestes, des mesures significatives sont prises : élargissement du crédit d'impôt pour l'emploi des personnes à domicile, hausse de l'allocation adulte handicapé ou revalorisation du minimum vieillesse.

Ce projet de loi de finances représente donc une première étape essentielle dans la reconstruction et dans ce que le Premier ministre appelle la « réparation » de notre économie nationale, mais il ne suffira pas. Avec Bruno Le Maire, nous poursuivrons cet effort dans le cadre d'un projet de loi « Pacte », acronyme pour « plan d'action pour la croissance et la transformation de nos entreprises ». Ce plan d'action passera en partie par la loi, mais pas uniquement. Il s'agira également de lever des obstacles, de petits verrous réglementaires, mais aussi de mieux coordonner l'action publique et de mieux utiliser nos instruments de politique économique dans certains secteurs.

Cette logique anime les six binômes composés d'un parlementaire et d'un chef d'entreprise qui, depuis le lundi 23 octobre au matin, occupent les étages qui étaient désespérément vides au quatrième niveau de l'Hôtel des ministres. Nous y avons créé un lieu de rencontre entre nos administrations, nos services, les parlementaires et les chefs d'entreprise qui constituent ces binômes pour les six chantiers. Sont également présents des représentants du monde de l'entreprise : corps constitués – avec les fédérations professionnelles qui sont nos « usual suspects » dans ces discussions intenses – mais aussi des personnes qui échappent à ce maillage des fédérations ont pourtant su, dans leurs secteurs d'activité respectifs, lever des verrous.

Nous aurons, j'en suis certain, l'occasion de revenir sur les différents chantiers dans le cadre du projet qui sera présenté devant votre Assemblée au printemps 2018. En amont, il donnera lieu à une grande consultation publique lancée en open data en janvier 2018. Le projet de loi détaillé ne sera pas en ligne, uniquement ses grandes orientations, et chacun aura l'occasion d'apporter sa pierre. Il était important de rappeler, en introduction, cette double logique du projet de loi de finances et de son prolongement, le futur Pacte.

J'en viens maintenant au rappel des grandes masses budgétaires de la mission « Économie ». Avec un peu moins de 1,9 milliard de CP et 2,1 milliards d'AE, les moyens de cette mission, constituée des programmes 134 « développement des entreprises et régulation », 220 « statistiques et études économiques », 305 « stratégies économiques et fiscales » et 343 « Plan France très haut débit », sont stables par rapport à la loi de finances initiale pour 2017.

À travers ses directions et les crédits hors personnel dont elles disposent – 1 206 millions en AE et 944 millions en CP, dont près de 370 millions de crédits d'intervention –, la mission « Économie » propose différents dispositifs d'accompagnement et de soutien à nos PME et entreprises artisanales. Au sein de cette mission, le programme Plan France très haut débit, dont le financement est actuellement assuré par le Fonds national pour la société numérique, basculera progressivement vers le programme 343 de la mission « Économie ». Le gouvernement a souhaité accélérer ce plan essentiel pour la compétitivité mondiale de nos territoires, afin qu'aucun d'entre eux ne sombre dans la fracture numérique. L'accès au numérique – cela fait l'unanimité dans cette assemblée – est un bien premier auquel chacun de nos concitoyens doit pouvoir accéder. Nous avons donc souhaité accélérer le plan : le bon haut débit pour tous devra être atteint à l'horizon 2020, comme l'a rappelé le Président de la République lors de la première conférence nationale des territoires qui s'est tenue au Sénat, et le très haut débit pour tous en 2022.

Le compte de concours financier « accords monétaires internationaux » est composé de trois programmes : 811, 812 et 813. Il est dédié à la coopération monétaire avec la zone franc qui nous lie avec l'Union monétaire ouest-africaine, l'Union monétaire d'Afrique centrale et l'Union des Comores. Il est destiné à garantir, en tant que de besoin, les deux fondements de cette coopération que sont l'ancrage de la parité du taux de change sur l'euro et la garantie de convertibilité illimitée. À cet effet, il retrace les opérations d'octroi et de remboursement des appels en garantie de convertibilité effectués au profit des banques centrales liées à la France par un accord monétaire international. Ce compte n'est doté que si la dégradation de la situation financière de tout ou partie de la zone franc l'exige, ce qui n'est pas le cas actuellement – nous pouvons collectivement nous en réjouir. De ce fait, pour 2018, la mise en oeuvre des accords monétaires internationaux de la France ne devrait pas entraîner de dépenses publiques.

Les crédits du compte de concours financiers « prêts et avances à des particuliers ou à des organismes privés » comprennent principalement les crédits d'intervention du Fonds de développement économique et social (FDES) et, pour une part marginale – 0,25 million –, les prêts d'installation des fonctionnaires prenant leurs fonctions à l'étranger. Ils sont stables par rapport à 2017.

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