Avec Philippe Chassaing, co-rapporteur, nous vous interrogeons tout d'abord sur les prestations que la Banque de France effectue pour le compte de l'État, et qui lui sont remboursées sur des crédits du programme 305, pour 250 millions d'euros en 2018.
La majorité de la dépense couvre le secrétariat des commissions départementales de surendettement qui mobilise plus de 1 300 équivalents temps plein (ETP), sous statut de la Banque de France, soit 28 % des effectifs de son réseau.
Les dépenses de la Banque, à ce titre, ont diminué de 10 % en cinq ans, moins vite que le volume des dossiers de surendettement qui s'établit à la fin de cette année à 185 000, contre 231 000 en 2014. Cette baisse est la conséquence des lois de 2010 et 2013 qui ont régulé le crédit à la consommation.
Les coûts fixes de la Banque de France l'ont empêchée de s'y adapter rapidement, ce qui dégrade les indicateurs de coûts de traitement des dossiers. Je ne vous cache pas que nous nous posons la question de la fiabilité de ces indicateurs et que nous souhaitons que vous les réexaminiez.
L'État a cherché, dès 2013, à engager la Banque dans un plan de modernisation de son réseau, et à l'y inciter en diminuant les remboursements sur le programme 305 qui atteignaient 317 millions d'euros en 2012 et ont baissé de 21 %. Parallèlement, le législateur a simplifié le traitement du surendettement. Ce deal paraissait équilibré ; il a cependant été en trompe-l'oeil. En effet, la diminution des crédits a été privée de tout effet par la Banque qui a comptabilisé minutieusement les écarts entre les remboursements de l'État et ce qu'elle-même considère être ses « coûts complets ». Elle a exigé de compenser l'écart en baissant la part de l'État dans son dividende, ce qui s'est traduit par une perte de recettes dans le budget général. Un courrier du ministre Michel Sapin l'y a d'ailleurs autorisée. Il s'agit donc d'une contraction des recettes et des dépenses, contraire aux principes de la sincérité budgétaire et aux règles de la loi organique relative aux lois de finances (LOLF). Nous déplorons cette méthode qui nuit à la lisibilité de l'action de l'État et nous espérons qu'elle ne sera jamais réutilisée.
Depuis, l'État a établi contractuellement avec la Banque un objectif pluriannuel de baisse de la dotation, à l'appui du plan « Ambition 2020 ». La Banque doit profiter de départs massifs en retraites pour concentrer son activité et la gestion des dossiers de surendettement dans 35 centres de traitement partagé, contre 117 aujourd'hui. Une cible de 900 effectifs pour le traitement du surendettement est fixée pour 2020, en baisse de 31 % en trois ans.
Les effets de ce plan de modernisation se font attendre, mais la Banque de France est confiante qu'ils seront clairement visibles dans les douze à dix-huit mois à venir. Pourriez-vous indiquer comment vous vous assurerez que les économies réalisées par la Banque entraineront une baisse effective de la charge pour l'État ?
Par ailleurs, ces réformes posent la question du maintien d'implantations départementales de la Banque de France qui sont censées permettre l'accueil physique des personnes surendettées ou appuyer sa nouvelle mission d'opérateur national de la stratégie d'éducation financière. Sans mésestimer l'intérêt de cette mission, nous doutons qu'elle justifie, à elle seule, de maintenir un réseau surdimensionné. Au-delà de 2020, quels objectifs de réformes envisagez-vous pour la Banque de France et son réseau ?
Le même programme 305 rassemble les effectifs de la direction générale du Trésor et de son réseau international qui est essentiel à notre diplomatie économique. L'an dernier, 178 contrats de plus de dix millions ont été conclus par des entreprises françaises à l'étranger avec l'appui des services économiques des ambassades. L'action de ce réseau doit être mise en valeur, par un travail de pédagogie conséquent, articulé autour d'outils de pilotages plus performants.
Depuis dix ans, ce réseau s'est adapté à la contrainte budgétaire en diminuant ses effectifs d'un quart et en se redéployant pour mieux toucher les nouvelles zones de croissance. Mais nous identifions deux leviers d'optimisation. Le coût élevé d'expatriation des agents publics pèse sur la masse salariale, alors que recruter des personnels localement est deux à trois fois moins onéreux. Certains de nos partenaires européens y ont beaucoup plus recours que nous, sans pertes de qualifications. En outre, la complémentarité des réseaux de l'État à l'étranger est aujourd'hui inaboutie et doit progresser. Ceci nuit à la lisibilité de l'action de l'État et à son efficience. Le Premier ministre a annoncé qu'il réunira début 2018 le comité interministériel des réseaux de l'État à l'étranger. C'est bienvenu – ce sera la première fois depuis 2009. Ces deux pistes vous paraissent-elles pertinentes ?
Enfin le programme 220 Statistiques et études économiques apporte 455 millions à l'Institut national de la statistique et des études économiques (Insee), essentiellement pour rémunérer des effectifs qui ont baissé d'un quart depuis 2000. L'appellation « institut » est trompeuse, car il s'agit d'une simple direction ministérielle : ses crédits sont entièrement soumis à l'annualité budgétaire. Cette absence de visibilité pluriannuelle ne facilite pas la bonne mise en oeuvre des orientations stratégiques. Or l'Insee fait face à des défis en matière de ressources humaines, avec des départs en retraite importants appelant à modifier les processus de travail, à renforcer la formation des nouveaux entrants et, sans doute, à revoir le périmètre des implantations territoriales. Une bonne programmation de l'investissement permettrait également à l'Insee de se saisir résolument de l'ensemble des opportunités offertes par le Big Data. Il parait donc nécessaire de dégager plus de marge d'investissement ou de soutenir l'Institut dans d'éventuels programmes d'innovation étayés par une stratégie de modernisation.
Messieurs les ministres, comment envisagez-vous d'appuyer la transformation de l'Insee durant la législature ?