Nos territoires se trouvent véritablement au coeur de l'application de ce dispositif. Il s'agit de collectivités un peu particulières, qui disposent de la compétence sanitaire. Il faut rappeler qu'au titre de l'article 1er, le Premier ministre peut prendre des mesures particulières au regard de la situation sanitaire. C'est bien une analyse de la situation sur le plan sanitaire, en premier lieu, qui lui permet ensuite de décider. Ce qui est compliqué, dans nos territoires, c'est qu'il y a encore un débat pour déterminer où s'arrête la compétence de la Polynésie, compétente sur le plan sanitaire, et où commence celle de l'État, qui prend les mesures prévues par le présent projet de loi.
L'article 3 concerne les circonstances de l'état d'urgence sanitaire. Notre amendement no 34 proposera de préciser que de telles décisions sont bien prises dans le respect de la répartition des compétences de l'État et des collectivités. Je reconnais que la frontière n'est pas toujours très nette et fait toujours l'objet d'un débat. Nous avons ainsi déposé plusieurs amendements sur les deux derniers articles du projet de loi. Le but n'est pas de remettre en question les prérogatives de l'État, mais que les décisions soient prises en concordance avec le territoire.
Je profite de l'occasion pour saluer l'ensemble des équipes et des représentants de l'État dans nos territoires. En Polynésie, les choses se sont bien passées, grâce à une volonté réciproque de travailler ensemble dans des circonstances exceptionnelles, marquées par une pression importante et de lourdes responsabilités : il n'est pas évident de décider de telles mesures, et elles ne sont pas toujours acceptées ! Il est donc fondamental que cela se fasse en concordance, en accord avec la collectivité qui, elle, est compétente.
Je vous rappelle que nos territoires, la Polynésie comme la Nouvelle-Calédonie, ont un président, un gouvernement fait de ministres, une assemblée comme la nôtre. Celle de la Polynésie compte cinquante-sept membres, issus de l'ensemble du territoire, dans un parallélisme des formes avec ce qui se passe ici. Or il existe une volonté, dans notre territoire, de respecter cette organisation locale et les pouvoirs qui lui ont été conférés par notre Constitution, mis en oeuvre dans le cadre de lois organiques comme celle que nous avons révisée l'an dernier. Cette organisation est « sacrée », entre guillemets, en Polynésie comme en Nouvelle-Calédonie. Nous tenons au respect de ces compétences.
C'est la raison pour laquelle je vous demande d'être sensibles à nos amendements. La période qui s'ouvre aujourd'hui, et durera de juillet à octobre, représente pour nous un retour à la normale. En Polynésie, la première phase d'état d'urgence exceptionnelle a bien été comprise : nous avons laissé l'État prendre des décisions et rogner parfois légèrement sur nos compétences – c'est en tout cas ainsi que cela a été perçu. Mais nous entrons désormais dans une nouvelle phase, que je considère comme un état d'urgence allégé, même s'il n'en porte pas le nom : il s'agit bien de permettre à l'État de disposer d'un arsenal d'outils pour pouvoir intervenir rapidement.
De façon très pragmatique, je suis favorable à cette possibilité. Faisons simplement en sorte que cela se fasse dans les règles. Ce que la Polynésie et la Nouvelle-Calédonie demandent, c'est qu'au cours de cette nouvelle étape soit réaffirmé ce qui relève de la compétence locale en temps normal.
Tel est le sens de l'ensemble des amendements que nous avons déposés, et plus précisément, à l'article 3, de l'amendement no 34 de M. Dunoyer : que les mesures prises restent dans le strict respect de la répartition de nos compétences.