Si vous saviez à quel point je suis attaché à la loi relative au devoir de vigilance des sociétés mères et des entreprises donneuses d'ordre ! Cinq ans de combat, contre une partie du patronat – aujourd'hui, l'ensemble du patronat réclame son extension au niveau européen – , mais aussi contre un gouvernement qui n'en voulait pas vraiment. C'est une victoire de la société civile et du Parlement, qui a nécessité du courage politique et de la persévérance.
La loi a été votée deux jours avant la fin de la dernière législature. Depuis, elle ne cesse de prospérer : sur le plan intellectuel, elle est étudiée dans le monde entier ; sur le plan politique, elle est à l'ordre du jour chez nos voisins allemand et espagnol, ainsi que dans six autres pays européens. Il y a deux mois, la direction générale de la justice et des consommateurs de l'Union européenne a déposé un rapport proposant de reprendre la loi française dans une directive européenne. Les syndicats européens réclament même un règlement. Récemment, les églises d'Europe ont rejoint le mouvement, avec l'ensemble des ONG. Bref, la société civile et les grands pays européens adoptent le devoir de vigilance.
Nous demandons à l'Assemblée nationale que la France, qui a été pionnière en adoptant la loi, la fasse respecter. Je précise pour M. de Courson que l'amendement ne concerne pas seulement quelques entreprises : un tiers des entreprises se sont assises sur les lois de la République à ce stade. Il ne propose pas non plus du reporting, contrairement à celui de Mme Peyrol qui vient d'être adopté, mais une obligation, comme le permis de conduire est une obligation pour conduire sur la voie publique, afin que les entreprises qui ne respectent pas ces conditions ne puissent pas bénéficier des aides publiques.
Si j'insiste, c'est parce que l'Union européenne demande à la France une évaluation de la loi. Je ne voudrais pas avoir à dire, quand je suis sollicité à Berlin, à Madrid ou à Bruxelles, que nous avons donné des millions d'euros à des entreprises qui ne respectent pas une loi visant à lutter contre le travail forcé de vingt-huit millions de personnes et d'un million d'enfants, à lutter contre les écocides, les atteintes à l'eau et à l'environnement, et contre tout ce qui fait les Rana Plaza, visibles et invisibles, qui souillent notre planète.
Le simple respect de ces conditions est désormais défendu par le patronat français comme un horizon de compétitivité et d'attractivité et une chance pour l'éthique européenne. Nous ne pouvons pas souiller ce récit républicain et humaniste en versant des millions d'euros à des entreprises qui n'ont pas respecté les lois de la République.