Nous abordons aujourd'hui la deuxième lecture du projet de loi relatif à la bioéthique dans l'hémicycle. Avant toute chose, permettez-moi de souhaiter que nos débats restent de la même qualité qu'en première lecture et en commission spéciale. Je me réjouis que nous ayons réussi, malgré les bouleversements de calendrier que nous connaissons tous, à organiser l'examen de ce texte avant la trêve estivale car nous nous devons d'avancer sur les différents sujets abordés par cette loi.
Vous m'avez confié la responsabilité des titres III et IV qui ont trait, d'une part, à l'articulation entre nos principes éthiques et les progrès scientifiques et, d'autre part, aux recherches portant sur les embryons et les cellules souches.
Le titre III porte sur la diffusion et l'utilisation des progrès scientifiques et technologiques. Le recours aux tests génétiques reste, et doit rester, limité aux seuls champs médicaux et scientifiques afin d'éviter leur utilisation à des fins industrielles, commerciales ou de simple convenance, avec les risques que cela comporte. Par ailleurs, je tiens à souligner qu'en commission spéciale, nous sommes arrivés à une rédaction équilibrée pour garantir le recours au traitement algorithmique des données massives de santé. Quant à l'utilisation des enregistrements de l'activité cérébrale, il me semble que mon collègue Jean-François Eliaou a déposé un amendement allant dans le sens de celui que j'avais moi-même déposé en commission spéciale, ce dont je ne peux que me réjouir.
Le titre IV porte sur les recherches sur les embryons et les cellules souches. Sur ce sujet, le présent projet de loi poursuit plusieurs objectifs, visant notamment à réorganiser et à clarifier, mais également à solidifier, le cadre législatif de ce type de recherches. De l'avis de tous les spécialistes, les thérapies innovantes, cellulaires et géniques ont connu de premiers grands succès et sont porteuses d'espoirs et d'ambitions thérapeutiques majeures pour l'avenir. Elles constituent la base de l'ère de la médecine personnalisée dans laquelle nous sommes entrés. Multiples, les pathologies concernées par ces recherches nous concernent tous : maladies rares, cancers, Alzheimer, Parkinson, maladies cardio-vasculaires ou encore troubles de l'audition ou de la vision.
Ces recherches sont une opportunité, non seulement pour les malades d'aujourd'hui et de demain mais, globalement, pour l'ensemble de notre société – et pour associer accroissement de la longévité et meilleure santé.
Alors, que fait le projet de loi pour encourager la recherche, mieux l'organiser et mieux l'encadrer ? Il vise d'abord à libérer la recherche en introduisant une distinction entre les régimes juridiques des protocoles de recherche sur l'embryon d'une part, sur les cellules souches d'autre part. Bien que n'étant pas revêtu de la personnalité juridique, l'embryon n'est pas considéré comme un simple matériau expérimental et les enjeux éthiques qui se posent ne sont tout simplement pas les mêmes que ceux concernant les recherches sur les cellules souches. Les recherches sur l'embryon restent encadrées par un régime juridique d'autorisation et par les principes et interdictions édictés par le code civil et par le code de la santé publique. Elles sont, de plus, explicitement distinctes des recherches sur les embryons destinés à être implantés et à naître, qui, elles, s'inscrivent dans le cadre des recherches impliquant la personne humaine – RIPH.
Les recherches sur les cellules souches, qu'elles soient embryonnaires ou pluripotentes induites, relèvent désormais d'un régime de déclaration. Ces cellules ne sont pas des embryons et n'ont pas vocation à le devenir. Il est donc logique de les inscrire dans des régimes d'encadrement différents.
Par ailleurs, le projet de loi clarifie les recherches portant sur les embryons dits transgéniques ou chimériques. Les grands interdits sont évidemment maintenus : interdiction de création d'un embryon à des fins de recherche ; interdiction des modifications des caractéristiques génétiques susceptibles d'affecter la descendance ; interdiction de modification d'un embryon humain par adjonction de cellules provenant d'une autre espèce.
Par ces différentes évolutions, le projet de loi permet d'encourager et de soutenir une recherche de pointe, tout en garantissant le respect de nos principes éthiques fondamentaux. Le texte dont nous débutons l'examen prend en compte les progrès de la science, permet leur accomplissement au bénéfice de la santé des patients – et la crise que nous traversons nous rappelle cruellement l'importance de l'innovation en santé – , tout en réaffirmant avec force l'éthique qui guide notre société et définit le cadre du possible et du souhaitable. Je salue cet équilibre auquel nos travaux, et ceux du Sénat, ont contribué.