Madame Vanceunebrock, monsieur Chiche, vous savez que ce sujet me tient à coeur. J'avais moi-même déposé des amendements en première lecture, fondés sur un autre dispositif – une possession d'état légèrement tirée par les cheveux – , qui n'était pas suffisamment satisfaisant. Ces amendements n'ont donc pas été adoptés. En commission spéciale, je vous ai indiqué vouloir réfléchir avec vous à l'hypothèse d'une reconnaissance judiciaire de l'antériorité de la situation afin qu'en cas de conflit, la filiation de la deuxième maman, celle qui n'est pas gestatrice, puisse être établie. À mon grand regret, nous n'avons pas encore trouvé avec les services de la chancellerie de rédaction satisfaisante qui garantirait la constitutionnalité de cette disposition, dans l'hypothèse où elle serait votée.
Néanmoins, je tiens absolument à trouver une solution. Je sais les drames que représentent les séparations d'enfants d'avec leur mère, voire les séparations de fratries. De telles situations existent en France : des enfants d'une même fratrie sont séparés et ne peuvent pas se voir, d'autres sont empêchés de voir l'une de leurs mamans, en raison d'histoires de couple. Il peut arriver dans toutes les familles, y compris hétéroparentales, que les couples se déchirent, mais en tant qu'adultes, nous ne devons théoriquement jamais en faire peser la responsabilité sur les enfants et les priver de l'un de leurs parents. C'est une situation à laquelle il faut trouver une issue.
Je pense que vos deux amendements, madame Vanceunebrock, soulèvent une difficulté : à partir de la reconnaissance chez le notaire, vous proposez d'informer le procureur, mais il n'est pas prévu de vérification par le juge ou le procureur de la matérialité d'un projet parental antérieur. Il n'est pas vérifié que ce projet a bien existé. C'est la raison pour laquelle ce dispositif ne me semble pas suffisamment satisfaisant.
Monsieur Chiche, il en va de même pour votre amendement, car la disposition innovante et audacieuse que vous proposez, la reconnaissance judiciairement établie voire forcée, n'existe pas à ce jour dans le code civil. Un tel dispositif serait tout à fait novateur. C'est la raison pour laquelle je m'interroge et pose la question au garde des sceaux, en réservant mon avis personnel en fonction de sa réponse : ne faudrait-il pas prendre encore un peu de temps pour continuer à travailler sur ce dispositif ?
Nous savons qu'une proposition de loi très intéressante a été déposée par madame Limon, que je tiens à remercier très sincèrement pour son travail dense et fourni à ce sujet.