Comme le relève l'exposé des motifs de la proposition de loi, depuis plusieurs années, des vidéos mettant en scène des enfants à différents moments de leur vie sont publiées sur des plateformes telles que YouTube. Ils sont ainsi amenés à être filmés dans le cadre d'activités de loisirs, en train de relever des défis, de suivre des tutoriels, ou bien de tester, de déguster ou de déballer divers produits. En France comme à l'étranger, ces vidéos sont l'objet d'une grande popularité, notamment auprès des plus jeunes.
Véritable enjeu de société, ce phénomène nouveau constitue également un enjeu économique et financier important, que ce soit pour les familles, qui retirent parfois un revenu important des vidéos de leurs enfants, ou pour les marques, qui voient dans ces contenus une nouvelle opportunité publicitaire.
Ce type de vidéos ne fait aujourd'hui l'objet d'aucun encadrement légal et le but de cette proposition de loi est de combler cette lacune en s'inspirant du régime en vigueur pour les enfants du spectacle, dans le théâtre ou le cinéma, qui définit les horaires, la durée de tournage, les modalités de consignation des revenus.
En outre, ce texte souhaite responsabiliser les plateformes et créer un droit à l'oubli pour ces enfants.
Comme vous le savez, notre famille politique a toujours été attachée à la protection de l'enfance. Nous l'avons démontré à de nombreuses reprises. S'agissant des enfants du spectacle, nous avons été pionniers. La loi du 6 août 1963 modifiant et complétant les dispositions relatives à l'emploi des enfants dans le spectacle a structuré la législation dans ce domaine et celle-ci a été consolidée en 2007 et 2008, sous le quinquennat de Nicolas Sarkozy, notamment grâce au décret du 24 août 2007 relatif au suivi médical et au pécule des enfants employés dans les spectacles, la publicité et la mode.
Nous considérons que le travail des enfants est un sujet extrêmement important qui mérite toute l'attention du législateur. Internet est un espace particulier de liberté qui doit être préservé mais si la liberté d'entreprendre est essentielle, elle ne peut se faire au détriment des plus fragiles.
Au-delà de la protection juridique et économique, il est nécessaire de prendre la mesure des effets dévastateurs que peuvent avoir sur les enfants ces mises en scène de leur vie. Qu'il s'agisse de l'omniprésence des écrans, de la pression sociale de la célébrité ou du rythme qui leur est imposé, les conséquences sur leur santé et leur développement sont avérées.
Voici les raisons pour lesquelles, le groupe Les Républicains approuve les différents articles et votera ce texte.
En commission, le texte a reçu le soutien de l'ensemble des groupes, qui ont reconnu le besoin d'un cadre juridique. En revanche, on ne peut que regretter que l'adoption de certains amendements ait allégé les dispositifs prévus aux articles 3 et 4. Si la proposition de loi est peut-être devenue plus souple, sa version initiale paraissait plus protectrice des droits des enfants sur deux points : le cas des enfants n'entrant pas dans le cadre créé par l'article 1er du texte et la responsabilisation des plateformes.
L'article 3, qui encadre la diffusion de l'image des enfants sur les plateformes de partage de vidéos lorsque cette activité ne relève pas du droit du travail, apparaît essentiel. Une déclaration devra être faite auprès de l'autorité administrative dès que la durée ou le nombre de vidéos dépasse un seuil fixé par décret en Conseil d'État ou que l'activité génère un revenu important. Dans ces cas, un régime proche de celui prévu pour les enfants du spectacle pourra être appliqué. Ainsi, leurs horaires de travail seront encadrés et une partie de leurs rémunérations sera obligatoirement versée sur un compte de la Caisse des dépôts et consignations, et ce jusqu'à leur majorité.
En commission, l'article 4, qui encadre la responsabilisation des plateformes en ligne, a été entièrement réécrit. Les services de plateformes devront adopter des chartes visant à améliorer la lutte contre l'exploitation commerciale illégale de l'image d'enfants de moins de seize ans. On peut regretter que ce passage d'un système d'obligations à un système de chartes ait rendu le régime des plateformes moins contraignant.
Le Sénat, dans sa grande sagesse, a renforcé cette proposition de loi en la réécrivant. Il l'a clarifiée et a consolidé le régime de protection des enfants de moins de seize ans. La commission des affaires culturelles et de l'éducation, en seconde lecture, a préservé l'essentiel du dispositif. Le groupe Les Républicains, à l'unanimité, dans un consensus presque parfait, votera donc ce texte.