… qui consacre l'avortement comme un acte à part, stigmatisant et culpabilisant.
Il est difficile d'être réunis ce matin sans penser à ce jour de novembre 1974 où Simone Veil est montée à cette même tribune pour défendre son projet de loi ; difficile aussi de ne pas penser à la célèbre plaidoirie de Gisèle Halimi. Il y a quarante-cinq ans, la France a reconnu à toutes les femmes le droit de disposer librement de leur corps.
Alors, pourquoi légiférer aujourd'hui ? Les professionnels de santé et les associations qui accompagnent les femmes nous alertent depuis de nombreuses années sur les entraves à ce droit. Mes collègues Marie-Noëlle Battistel et Cécile Muschotti, que je salue, ont réalisé, au nom de la délégation aux droits des femmes et à l'égalité des chances entre les hommes et les femmes de notre assemblée, un travail de longue haleine auprès des femmes et de l'ensemble des professionnels. Pour ma part, j'ai mené des auditions pour élaborer cette proposition de loi et organisé des rencontres de terrain. Nous avons entendu toutes les parties.
Nous le savons, nous ne parviendrons pas à faire taire les obscurantismes les plus sombres ; tel n'est d'ailleurs pas notre objectif. Mais nous savons aussi que 75 % des Françaises et des Français se disent favorables à une interruption volontaire de grossesse sans restriction.
Le travail collectif et transpartisan que nous avons mené sur ce texte est un signal important. En dépit de nos appartenances politiques et de nos convictions personnelles, nous nous sommes réunis autour d'un même objectif : faire progresser les droits des femmes et adresser un message fort au monde entier. Je tiens à remercier les députés de tous les groupes qui ont cosigné la proposition de loi, ainsi que celles et ceux qui ont contribué à l'enrichir en commission.
La proposition de loi que je vous présente comporte cinq articles, contre deux à l'origine. Elle prévoit des avancées majeures pour les femmes et pour l'accès à l'IVG, grâce à trois leviers principaux.
Le premier levier est temporel. Nous le savons, le rapport d'information de la délégation aux droits des femmes l'a montré et les auditions que j'ai menées l'ont largement confirmé : les délais actuels sont trop limités, ce qui complique le parcours des femmes pour accéder à l'IVG.
Nous entendons d'abord agir sur le délai d'IVG, en le portant de douze à quatorze semaines de grossesse ; tel est l'objet de l'article 1er. Chaque année, 3 000 à 5 000 femmes de notre pays sont contraintes de partir avorter à l'étranger du fait du dépassement des délais légaux. Et combien d'autres ne peuvent assumer les nombreux frais que cela implique, en matière de déplacement, d'hébergement et de coût de l'intervention ?
À celles et ceux qui en appellent à la responsabilité des femmes, je veux rappeler qu'aucune d'entre elles ne reporte sa décision par distraction, par manque de temps ou par plaisir.