Intervention de Éric Coquerel

Séance en hémicycle du jeudi 15 octobre 2020 à 9h00
Projet de loi de finances pour 2021 — Article 3 (précédemment réservé)

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaÉric Coquerel :

J'ai bien compris que vos mesures visaient la compétitivité des entreprises. Mais depuis vingt ans, monsieur le ministre, la France a progressivement baissé l'impôt sur les sociétés, et a fait des cadeaux en tout genre aux entreprises, à coups de subventions. Pourtant, les délocalisations continuent, même en période de covid !

Vous nous racontez une fable, vous nous expliquez qu'on ne trouve plus d'ouvriers – sauf qu'avant que vous les affaiblissiez, nous avions des lycées professionnels extraordinaires ! À ce propos d'ailleurs, la politique du tout-apprentissage ne me semble pas la panacée, comparée à des lycées professionnels de qualité.

Bref, c'est une fable. La réalité, c'est ce que vous avez dit à la fin de votre intervention, monsieur le ministre : le libre-échange, particulièrement son cheval de Troie au sein de l'Union européenne, où il est sans doute le plus abouti au monde puisqu'il existe un grand marché libre et sans contraintes, sans harmonisation sociale et fiscale, qui permet à la même entreprise de faire le tour de chaque pays membre pour bénéficier des aides publiques qui y sont accordées. Vous aurez beau baisser les impôts, il y aura toujours un pays pour les diminuer plus que vous : c'est ça, le problème ! Tant que l'Europe ne prendra pas de mesures, y compris unilatérales, les délocalisations se poursuivront.

Mais si vous regardez le moyen terme, vous verrez qu'il y en a certains qui profitent de cette politique fiscale, et que ce ne sont pas les salariés. En douze ans, le SMIC a augmenté de 12 %, le salaire moyen de 20 %, les investissements des entreprises du CAC40 ont diminué de 5 % et les dividendes, eux, ont augmenté de plus de 100 % !

En réalité, donc, vous servez les dividendes. En disant cela, je ne vous accuse pas d'être un serviteur des actionnaires : je sais que vous pensez que cela va contribuer à rapatrier le capital, que le capital créera de l'emploi… – on connaît la suite. Mais ça ne fonctionne pas, monsieur Le Maire !

Nous en avons déjà discuté : tant que vous donnerez de l'argent sans conditions ni contraintes, tant que vous en appellerez au bon sens des entreprises, ça ne fonctionnera pas, parce que le bon sens des entreprises, des grandes entreprises, c'est l'augmentation du niveau de la rente capitaliste. C'est cela qui les anime. Si vous continuez dans cette voie, vous verrez que vous aurez toujours moins d'implantations en France.

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