Le projet de loi d'accélération et de simplification de l'action publique – ASAP – a connu une issue positive en commission mixte paritaire – CMP – mais l'une de ses dispositions n'y a pas été examinée, puisqu'elle avait été adoptée conforme par les deux chambres. Or elle pose problème.
Elle consiste en effet à exempter de prélèvements sociaux tout avantage accordé par un employeur ou par un comité social et économique lorsqu'il se rattache à des activités sportives, sans aucune condition ni restriction. Il va de soi que le Gouvernement n'a nullement l'intention de remettre en cause l'objectif de développement du sport, notamment dans l'entreprise. Mais la doctrine administrative admet déjà, par tolérance, l'exemption de cotisations et de contributions sociales pour certains avantages accordés par les comités sociaux et économiques – CSE – à des fins sociales, culturelles et sportives.
Cette disposition du projet de loi ASAP tel qu'il est issu des travaux de la CMP se traduirait par l'octroi d'une exonération sans que soient pris en considération les critères sociaux dans l'attribution des avantages – critères pourtant nécessaires afin de respecter la vocation sociale des CSE. De plus, cette exonération se limiterait aux seuls avantages sportifs, à l'exclusion des autres avantages accordés par tolérance ministérielle dans le domaine de la culture et des loisirs ou dans le domaine social. Il en résulterait donc des difficultés d'interprétation : nul ne saurait en effet définir précisément ce qu'est un avantage accordé au titre du sport ou du sport-santé.
En 2018, un amendement avait déjà été retiré compte tenu de la difficulté à légiférer correctement sur ce sujet. Une mission d'inspection conduite en 2019 a montré que les tolérances actuelles sont larges et ne donnent pas lieu à contestation, et que si les avantages accordés par les comités sociaux et économiques – d'autant plus s'ils sont exclus de l'assiette sociale – ne sont pas encadrés, ils risquent de n'être qu'un substitut à des éléments de salaire.
Il faut donc faire preuve de prudence et clarifier les régimes d'exemptions de cotisations sociales appliqués aux avantages accordés aux entreprises. Lors de l'examen du PLF, j'ai rappelé la doctrine concernant le montant maximum des cadeaux accordés par les entreprises à leurs salariés en lien avec leur activité, et notamment la nécessité, à laquelle nous allons nous atteler, de clarifier le nombre de fois où ces avantages peuvent être accordés – par exemple selon le nombre d'enfants ou lors de fêtes familiales, entre autres.
Le même travail doit être effectué concernant le sport. La difficulté que nous rencontrons est la suivante : les conditions sociales d'accès à la prestation et surtout son éventuelle exemption de cotisations sociales ne font l'objet d'aucun encadrement, et le montant annuel de ces avantages n'est pas plafonné, ce qui présente le risque qu'ils se substituent à des éléments de salaire.
C'est pourquoi nous proposons de saisir l'occasion du PLFSS, avec quelques jours d'avance, pour remettre cette disposition en cause, disons les choses clairement, et travailler à un encadrement adéquat de manière à garantir les exemptions, déjà prévues dans la doctrine mais qui méritent sans doute d'être inscrites plus formellement dans la loi, sans prendre le risque d'un système qui ne soit ni plafonné ni conditionné.