La séance est ouverte.
La séance est ouverte à vingt et une heures.
Cet après-midi, l'Assemblée a commencé la discussion des articles de la troisième partie du projet de loi, s'arrêtant à l'article 11.
Rappel au règlement
Il se fonde sur l'article 100, alinéa 7, madame la présidente. J'ai bien conscience qu'il faut aller vite si nous voulons achever l'examen du texte avant vendredi à minuit, et je sais que ce n'est pas vous qui présidiez cet après-midi, mais il s'avère que, lors de la défense de mon amendement précédent, on m'a coupé la parole après seulement une minute et vingt secondes, et non au bout de deux minutes. Peut-être a-t-il été décidé en Conférence des présidents que les amendements doivent, pour ce texte, être soutenus en une minute, mais si tel est le cas, j'aurais préféré que nous soyons prévenus avant. Quoi qu'il en soit, j'ai été arrêtée avant d'avoir atteint la limite des deux minutes prévue par notre règlement.
Cet article vise à transférer les réserves de la caisse d'assurance maladie des industries électriques et gazières – CAMIEG – , qui est excédentaire à hauteur de 175 millions d'euros, à la CNAM – Caisse nationale d'assurance malade.
Il en va de même des réserves du régime de prévoyance de la caisse de retraite et de prévoyance du personnel de la SNCF – CPRP SNCF. Comme l'indique l'exposé des motifs de l'article, ce régime « dispose également de réserves [… ] pour assurer le financement d'une partie des besoins de trésorerie du risque vieillesse. La trésorerie du risque vieillesse du régime spécial ayant été reprise par l'ACOSS », l'Agence centrale des organismes de sécurité sociale, « le présent article procède logiquement à la centralisation au niveau du régime général des réserves servant à cet usage, estimées au 31 décembre 2019 à 176,6 millions d'euros ».
Nous nous opposons à ce que le Gouvernement se serve dans les caisses de régimes excédentaires à l'occasion du projet de loi de financement de la sécurité sociale.
En ce qui concerne le régime de prévoyance de la SNCF, il ns semble qu'il s'agit d'une anticipation de la réforme des retraites, qui n'est pas passée lors de son premier examen au Parlement et qui ne passera probablement pas non plus lors de la prochaine tentative – du moins l'espérons-nous.
La parole est à M. Pierre Dharréville, pour soutenir l'amendement no 810 .
Cet article vise effectivement à ponctionner les réserves de la caisse d'assurance maladie des industries électriques et gazières et du régime de prévoyance de la CPRP SNCF au profit de l'assurance maladie. Ces ponctions ont fait l'objet de débats et ont été contestées par un certain nombre d'acteurs au sein des organismes concernés, étant donné qu'elles leur sont bel et bien imposées et qu'elles sont relativement conséquentes.
Il est vrai que ces caisses sont excédentaires, ce qui est avant tout le signe de leur bonne gestion. Elles ont notamment résisté à une forme d'assèchement des ressources, qui touche également la sécurité sociale.
Ces organismes avaient donné leur accord pour une contribution mais pas pour une ponction : ce n'est pas la même chose. Ils proposaient aussi d'affecter les fonds disponibles soit à l'octroi de nouveaux droits, soit au financement de masques, soit à l'augmentation du niveau de couverture, soit à la révision du montant des cotisations. Or toutes ces options ont été balayées par la direction de la sécurité sociale, dont la seule proposition a été la ponction des fonds pour répondre à la crise.
Le groupe de la Gauche démocrate et républicaine propose donc de ne pas procéder de cette manière et d'engager de véritables discussions avec ces caisses.
La parole est à M. Joël Aviragnet, pour soutenir l'amendement no 1824 .
Dans le même esprit, il vise également à s'opposer au transfert des réserves de la caisse d'assurance maladie des industries électriques et gazières et de celles du régime de prévoyance de la caisse de retraite et de prévoyance du personnel de la SNCF. Je regrette que ces transferts aient été imposés, avec un manque flagrant de concertation.
La parole est à M. Thomas Mesnier, rapporteur général de la commission des affaires sociales, pour donner l'avis de la commission sur ces amendements identiques.
Par ces amendements, vous proposez de supprimer un article qui tire pourtant les conséquences d'une mutualisation bienvenue de la trésorerie des régimes de la sécurité sociale.
S'agissant de la caisse de retraite et de prévoyance des agents de la SNCF, sa trésorerie est déjà entièrement assurée par l'ACOSS : elle n'a donc pas besoin de conserver de telles réserves en cas de coup dur.
En ce qui concerne la CAMIEG, le montant prélevé apparaît particulièrement équilibré : la sécurité sociale ne ponctionne que la part des réserves qui servaient à la caisse pour couvrir des besoins de trésorerie, lesquels sont aujourd'hui largement assurés par l'ACOSS à hauteur de 175 millions d'euros. Le reste des réserves demeure disponible et servira à baisser les cotisations et à augmenter des prestations sociales pour les salariés pendant quelques années, ainsi qu'à faire face aux besoins de trésorerie non couverts par l'ACOSS.
Ces mesures ont été prises à la suite d'une large concertation avec les caisses. Je rends donc un avis défavorable sur ces amendements.
La parole est à M. le ministre délégué chargé des comptes publics, pour donner l'avis du Gouvernement.
Défavorable.
Je profite de ces amendements qui, au fond, questionnent la stratégie du Gouvernement relative aux retraites, car, monsieur le ministre des solidarités et de la santé, monsieur le ministre délégué chargé des comptes publics, je souhaiterais savoir où vous en êtes en la matière. En effet, l'équilibre de notre système de retraite, compte tenu de la situation budgétaire, inquiète fortement Les Républicains. Nous parlons d'un déficit de l'ordre de 30 milliards d'euros qui, en l'absence de réforme structurelle, aura pour conséquence une augmentation des cotisations ou une baisse des pensions par le biais d'une sous-revalorisation.
Les perdants de cette affaire sont bien connus. Or nous sommes là pour défendre le pouvoir d'achat des retraités. Étant donné qu'ils ne se remettront pas à travailler, c'est leur pouvoir d'achat et le montant de leur retraite qui sont en jeu pour les années à venir.
Les éléments dont nous disposons actuellement sont très inquiétants et il convient de prendre des mesures, mais je ne sais dans quelle direction le Gouvernement nous emmène sur cette question essentielle des retraites.
Je voudrais ajouter quelques remarques. Les réserves accumulées au fil des années par la CAMIEG sont non seulement le fruit d'une gestion particulièrement rigoureuse de son budget, mais aussi le résultat d'une limitation des niveaux de prestation par un décret qui oblige les assurés à contracter une mutuelle surcomplémentaire.
Les agents des industries électriques et gazières et leurs familles ne représentent environ que 1 % des assurés, mais, avec votre article, ils auraient à participer à hauteur de 20 % au total de la TSA – taxe de solidarité additionnelle – , qui constitue un prélèvement exceptionnel de 1 milliard d'euros pour l'année 2020. Cette mesure pose donc une vraie question d'égalité.
Adopté en commission, il émanait de Mme Brenier. Je lui laisse donc le soin de le soutenir.
La parole est donc à Mme Marine Brenier, pour soutenir l'amendement identique no 1105 .
Puisque l'objectif de la mesure figurant à l'article 11 est non seulement d'éviter la baisse du plafond annuel de la sécurité sociale, mais aussi de protéger les assurés contre d'éventuelles pertes de droits, il semblerait judicieux de récupérer l'argent de la CAMIEG et du régime de prévoyance de la CPRP SNCF dès que possible.
Cet article prévoit une ponction sur les réserves de la caisse d'assurance maladie des électriciens et gaziers au bénéfice de l'assurance maladie. Ces réserves devraient plutôt servir prioritairement à renforcer la protection sociale complémentaire des assurés de ce régime, notamment en matière de remboursement des soins. Nous demandons donc la suppression de l'alinéa 2.
L'amendement no 1094 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
La parole est à M. Pierre Dharréville, pour soutenir l'amendement no 965 .
Je préciserai d'abord que les ressources dont nous parlons sont issues des cotisations payées par des agents en activité de service dont le revenu moyen s'élève à 1 200 euros par mois : voilà ce à quoi nous nous apprêtons à toucher.
Cet amendement vise donc à réduire la ponction de 135 à 120 millions d'euros. Il s'agit d'une revendication des organisations syndicales représentant les électriciens et les gaziers. La somme libérée permettrait de financer une amélioration de la couverture santé complémentaire des agents de ces régimes, ainsi que le remboursement des achats de masques pour faire face à l'épidémie.
L'amendement no 965 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 11, amendé, est adopté.
La parole est à Mme Perrine Goulet, pour soutenir l'amendement no 2303 .
Il vise à obtenir un rapport du Gouvernement sur la mesure prévue à l'article 11. Nous venons d'en discuter, une ponction va être faite sur les réserves de la CAMIEG et de la CPRP SNCF, et l'exposé des motifs de l'article précise qu'elle s'effectuera en échange de « mesures d'amélioration des niveaux de prestations » pour les agents et d'une « baisse du niveau des cotisations ».
Ce rapport permettrait de vérifier l'effectivité de ces contreparties et ainsi de s'assurer que les agents d'EDF, d'Engie et de la SNCF bénéficient bien de cette amélioration des prestations.
Le statut de la CAMIEG le permettant, ces contreparties se concrétiseront par voie réglementaire. Pour le détail de la réforme je vous invite, chère collègue, à consulter l'annexe 9, qui contient toutes les informations que vous souhaitez. Je vous demande donc le retrait de l'amendement ; à défaut l'avis sera défavorable.
J'ajoute, madame la députée Goulet, que les deux textes réglementaires prévus sont prêts. Ils seront soumis au Conseil supérieur de l'énergie et seront publiés avant le 31 décembre 2020 pour une entrée en vigueur effective au 1er janvier 2021. Ils prévoient une baisse des taux de cotisation sur les actifs, les retraités et les employeurs.
Pour les actifs les taux de cotisations patronales et salariales baisseront de 25 % en 2021 et en 2022, puis de 5 % à partir de 2023. Le taux de cotisation de solidarité supporté par les actifs sera réduit de 17 %.
Pour les retraités, le taux de la cotisation d'équilibre baissera de 15 % en 2021 et en 2022, puis de 5 % en 2023.
En ce qui concerne l'amélioration de la prise en charge des frais d'optique, pour les assurées adultes elle s'élèvera à 5 euros pour les verres simples, à 29 euros pour les verres complexes et à 15 euros pour les verres très complexes. Pour les enfants, elle équivaudra à 5 euros pour les verres très complexes.
Enfin, les baisses de cotisations se traduiront, pour les salariés et les retraités, par une hausse des salaires et des pensions. Par exemple, rapporté au salaire brut, la baisse des cotisations s'élèvera à 132 euros par an, soit environ 11 euros par mois.
Les textes, comprenant les contreparties que vous évoquiez, sont prêts et seront publiés dans les prochaines semaines. Je demande donc le retrait de votre amendement.
L'amendement no 2303 est retiré.
L'article 12 est adopté.
L'amendement no 1640 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 13 prolonge les exonérations de charges patronales pour les employeurs agricoles qui emploient des travailleurs occasionnels demandeurs d'emploi jusqu'au 1er janvier 2023. Cette prorogation du dispositif dit « TODE » est une très bonne chose, mais insuffisante au vu de la crise sanitaire et de ses conséquences économiques ; il faut aller plus loin et le pérenniser.
Cet allégement de charges patronales spécifique aux salariés saisonniers agricoles a été créé pour faire face au dumping social auquel se livrent nos concurrents européens, notamment l'Espagne, l'Italie et l'Allemagne, dans les filières de la viticulture, de l'arboriculture, du maraîchage, de l'horticulture, de l'oléiculture, des pépinières viticoles, des semences, de la polyculture et de l'ostréiculture.
Depuis une dizaine d'années, les productions de fruits et légumes, par exemple, reculent dans notre pays face à l'agressivité de nos concurrents, qui pratiquent des prix très bas. Partout en France, les agriculteurs employeurs ont du mal à recruter, notamment en raison du coût de la main-d'oeuvre, plus élevé que chez nos voisins européens : en moyenne 27 % de plus qu'en Allemagne, 20 % de plus qu'en Espagne, 37 % de plus qu'en Italie. Ce dumping social est malheureusement toujours d'actualité.
Chaque année, plus de 900 000 contrats sont éligibles au TODE, soit 189 euros par saisonnier et par mois.
La France doit absolument maintenir la compétitivité de son agriculture, et ne peut pas accepter la lente délocalisation des productions pour des raisons de coût de sa main-d'oeuvre. Le lourd tribut payé par nos agriculteurs et nos viticulteurs, tant aux aléas climatiques de plus en plus accentués qu'aux taxes américaines sur nos exportations, nous obligent à consentir des efforts supplémentaires.
Il faut donc pérenniser le dispositif TODE.
Voilà un sujet qui nous a occupés pendant quelques séances les années précédentes ; nous avons mené quelques petites batailles, et nous avons fini par trouver un point d'équilibre. Il faut maintenant, en effet, pérenniser ce dispositif.
Année après année, nous notons des difficultés : cette année, il y a la pandémie, bien sûr, mais notre agriculture manque plus largement de compétitivité. Cela a été dit, nous rencontrons un problème de dumping ; les coûts en Espagne, en Allemagne sont bien moindres que chez nous. Nous en arrivons à des mouvements bien curieux, et l'on doit faire appel à de la main-d'oeuvre étrangère – en Corse ces dernières semaines, mais ailleurs aussi. Les viticulteurs, les maraîchers et nombre d'autres producteurs se trouvent pénalisés.
Il faut donc envoyer un signal fort et pérenniser cette exonération. C'est l'une des conditions du succès de notre agriculture, qui doit absolument conserver son attractivité et rester performante, alors qu'elle subit de très nombreuses contraintes supplémentaires ces dernières années. Nos agriculteurs sont d'accord pour s'adapter, pour se moderniser, pour respecter de mieux en mieux les normes environnementales ; mais encore faut-il qu'ils soient soutenus et accompagnés. Pérenniser le dispositif TODE irait dans ce sens.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Je voudrais revenir d'un mot sur la discussion précédente. Je regrette que le Gouvernement ne se soit pas exprimé sur l'article 11, alors que nous avions déposé de multiples amendements : son choix paraît donc être une mesure administrative qui n'est pas assumée politiquement. C'est un problème pour les personnes concernées. Je souhaiterais donc obtenir une réponse.
Sur les amendements nos 456 et identiques, je suis saisie par le groupe Les Républicains d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisie de nombreux amendements, nos 859 , 456 , 457 , 468 , 546 , 627 , 752 , 856 , 920 , 942 , 1074 , 1291 , 1368 et 1751 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 456 à 1751 sont identiques.
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement no 859 .
Il y a deux ans, nous avions mené un combat mémorable et, à trois voix près, nous avions débordé le Gouvernement. Le ministre de l'agriculture de l'époque n'en était d'ailleurs pas trop mécontent : voilà un sujet sur lequel un consensus pouvait émerger, autour de nos producteurs locaux, de fruits notamment.
Il ne faut pas abandonner notre agriculture. En Lorraine, mon collègue Fabien Di Filippo et moi-même connaissons bien la mirabelle, un fruit formidable – et je sais que mes collègues ont, dans leurs régions respectives, des fruits remarquables.
À un moment où nous souhaitons favoriser la production locale et l'emploi local, nous devons donner à nos producteurs les mêmes armes que celles dont disposent leurs concurrents européens.
Si nous ne pérennisons pas ce dispositif, ils subiront un handicap majeur. Il est fondamental que nous nous retrouvions sur ce sujet, de manière à donner à nos producteurs les moyens de continuer à employer de la main-d'oeuvre locale. Sans le dispositif TODE, ils devront faire venir des gens de l'étranger pour assurer leur production, et nos produits ne pourront pas rivaliser avec ceux de nos concurrents.
Je vous invite donc à vous rassembler derrière ces amendements, pour soutenir nos producteurs locaux.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Thibault Bazin a rappelé à juste titre le petit combat épique que nous avions mené dans cet hémicycle, toutes tendances politiques confondues, en faveur de nos agriculteurs. Il s'en était fallu de trois voix, et le Gouvernement avait en effet été plutôt satisfait d'être battu.
Il faut marquer, une fois encore, notre intérêt pour l'agriculture française, pour les emplois français, dans une période très délicate où nos concurrents sont bien présents et les contraintes particulièrement fortes. Ce qui a été possible il y a deux ans peut l'être encore ce soir ! Parlementaires de tous les bancs, unissez-vous, et après des avis dont je crains qu'ils ne soient défavorables, rééditons ensemble le vote d'il y a deux ans. Ce serait un signal fort envoyé aux agriculteurs, aux viticulteurs, aux maraîchers français, qui ont besoin de main-d'oeuvre, et en priorité, quand c'est possible, de main d'oeuvre française ; notre économie en a besoin.
Dans le même esprit, je souligne l'importance de ce dispositif pour tous les professionnels de l'agriculture : sur une année, 73 000 entreprises en bénéficient, soit près de la moitié des entreprises du secteur de la production agricole employant des salariés. On dénombre plus de 900 000 contrats bénéficiant du dispositif, pour un volume d'activité de l'ordre de 150 millions d'heures par an.
La viticulture, l'horticulture, le maraîchage, les pépinières sont autant de secteurs confrontés à de graves difficultés économiques et à une concurrence exacerbée, alors que le coût du travail est supérieur en France à celui d'autres pays européens.
Le dispositif TODE mérite donc d'être pérennisé si l'on veut soutenir notre agriculture. Ce n'est pas une mesure de circonstance ! Nos agriculteurs ont besoin de visibilité. L'agriculture n'est pas une activité à court terme ; ils doivent savoir où ils vont.
Soyons tous derrière nos agriculteurs !
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
J'ai l'impression, parfois, que notre assemblée est atone, alors que l'enjeu est décisif. Si nous ne faisons rien, si nous ne votons rien, nous laissons d'abord la possibilité au Sénat de corriger la copie du Gouvernement – je préférerais, moi, que l'Assemblée nationale agisse – , mais nous envoyons surtout, dans ce contexte très tendu, un très mauvais signal à nos agriculteurs.
Il faut absolument pérenniser ce dispositif d'exonération.
L'article 8 de la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 procède à la suppression, à compter du 1er janvier 2021, du dispositif d'exonération lié à l'emploi de travailleurs occasionnels demandeurs d'emploi. Cette suppression serait particulièrement néfaste pour le monde agricole, déjà très fragilisé depuis de nombreuses années.
Pour de nombreux exploitants agricoles, le recours aux travailleurs saisonniers est indispensable. Cette suppression, si elle devait être confirmée, aurait pour effet direct de pénaliser financièrement nos agriculteurs. Une réalité douloureuse doit être rappelée : près de 25 % des agriculteurs vivent sous le seuil de pauvreté. La crise sanitaire à laquelle notre pays est actuellement confronté n'a fait qu'accentuer cette situation dramatique. L'interruption de l'activité de l'hôtellerie-restauration durant de nombreuses semaines a eu un impact évident sur de nombreuses exploitations agricoles.
Dans ces conditions, nous souhaitons que ce dispositif, dont la suppression doit intervenir dès 2021, soit pérennisé. Nos agriculteurs ont plus que jamais besoin d'être soutenus.
La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l'amendement no 1074 .
Cet amendement vise, comme les précédents, à pérenniser le dispositif TODE. C'est nécessaire pour nos agriculteurs, et notamment nos viticulteurs, qui emploient beaucoup de travailleurs saisonniers.
Traitons ce sujet une bonne fois pour toutes, plutôt que d'y revenir chaque année.
Cet allégement de charges patronales spécifique aux salariés saisonniers agricoles a été créé pour faire face à la concurrence de nos voisins européens, notamment l'Espagne ou l'Italie, qui profitent d'un coût du travail inférieur au nôtre, en particulier dans les filières de la viticulture, de l'arboriculture ou encore du maraîchage.
La prorogation de ce dispositif proposée par l'article 13 est une avancée que nous saluons. Vous justifiez cette mesure par l'impact de la crise sanitaire sur la compétitivité des entreprises de la production agricole : certains secteurs ont en effet été particulièrement affectés par la crise, du fait de leur dépendance vis-à-vis du secteur de l'hôtellerie et de la restauration ; ce phénomène va s'accentuer après les annonces, mercredi dernier, du Président de la République.
Néanmoins, et au-delà de la crise sanitaire, le dispositif TODE se justifie par les difficultés rencontrées par les producteurs agricoles pour recruter des travailleurs saisonniers, et par la concurrence d'autres pays européens, qui rémunèrent leurs saisonniers en deçà d'un SMIC français. Pour soutenir la pérennité des emplois et des productions, donc la compétitivité de notre agriculture, le groupe UDI et indépendants vous propose d'adopter cet amendement, qui vise à rendre définitives ces exonérations.
Au lieu de le prolonger d'année en année, la FNSEA – Fédération nationale des syndicats d'exploitants agricoles – demande que le TODE soit pérennisé pour apporter plus de visibilité aux employeurs agricoles.
Pendant le confinement, les Français ont redécouvert les beaux produits français ; ils ont cuisiné, consommé local et pris conscience de l'importance de notre modèle agricole. Nous devons soutenir ce secteur « quoi qu'il en coûte », pour reprendre une expression du Président de la République.
Monsieur le rapporteur général, en commission des affaires sociales, vous avez expliqué que ce report constituait un effort important ; nous le reconnaissons, mais les agriculteurs nous demandent de les soutenir. Faisons un geste fort.
Applaudissements sur les bancs des groupes UDI-I et LR.
La parole est à Mme Isabelle Valentin, pour soutenir l'amendement no 1368 .
Le dispositif TODE est essentiel pour notre agriculture puisqu'en France, la main d'oeuvre agricole coûte plus cher qu'en Allemagne – de 22 % – et beaucoup plus cher qu'en Espagne et en Italie.
Si l'on veut sauver la filière agricole, la viticulture et le maraîchage, comme l'a dit notre collègue, nous n'avons pas d'autre choix que d'aider et d'accompagner nos agriculteurs.
Si nous n'y prenons pas garde, nous allons perdre des filières entières, dans l'agriculture et la viticulture. Descendez dans le sud, vous verrez les hectares de champs et de serres autrefois consacrés au maraîchage et désormais abandonnés. Les exploitants agricoles ne trouvent plus de repreneurs, ni de salariés.
Cet amendement est de bon sens. Consommons français et soutenons l'agriculture française. J'espère que chacun votera en son âme et conscience. Le scrutin est public : vous serez donc regardés, mes chers collègues, par l'ensemble des Français…
« Oh ! » sur de nombreux bancs.
… , lesquels souhaitent consommer français.
Vous avez vanté l'agriculture française, les bons produits et l'importance de bien manger ; il faut maintenant joindre les actes aux paroles.
« Bravo ! » et applaudissements sur les bancs du groupe LR.
L'amendement no 1751 de Mme Nadia Ramassamy est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur l'ensemble de ces amendements ?
Nous abordons un sujet qui, chaque année ou presque, suscite de vifs débats au sein de cet hémicycle.
J'ai le souvenir, comme vous, des débats d'il y a deux ans, qui avaient permis de trouver un point d'équilibre – je vous remercie de le rappeler.
En revanche, à vous écouter défendre ces amendements, j'en viendrais presque à douter du contenu de l'article 13 ! Alors que le dispositif TODE devait prendre fin à la fin de l'année, nous prévoyons de le proroger de deux ans, parce que nous soutenons profondément les agriculteurs !
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur plusieurs bancs du groupe Dem.
Vous avez défendu les agriculteurs ; cette position est largement partagée sur ces bancs.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Je suis moi-même élu, comme beaucoup d'entre vous, d'un territoire rural.
Je rappelle qu'alors que ce dispositif devait prendre fin à la fin de l'année, nous proposons ici de le pérenniser pour deux années supplémentaires, ce qui constitue un effort absolument considérable, qui coûte 450 millions d'euros à la puissance publique. Avant cela, nous avons nettement renforcé les allégements généraux de cotisation dans la LFSS pour 2019, et adopté des dispositifs notables…
… en faveur des exploitants agricoles – les jeunes agriculteurs, notamment, bénéficient d'exonérations spécifiques, pour leurs cinq premières années d'exploitation. D'autres dispositifs sont en cours d'élaboration, ou devraient monter en charge, afin notamment de faciliter l'épargne et de rééquilibrer les relations commerciales entre les agriculteurs, les producteurs et les distributeurs.
N'inversons pas l'ordre des choses : nous sommes ici pour proroger de deux ans un dispositif sur lequel nous avions collectivement trouvé un point d'équilibre – ce point mérite d'être rappelé – , et apporter ainsi le soutien nécessaire aux agriculteurs, parce que certains sont fortement touchés par la crise sanitaire.
Sur les amendements en discussion, comme sur tous les suivants qui visent à étendre ou pérenniser le dispositif, avis défavorable.
Il est défavorable, pour les mêmes raisons. Monsieur le rapporteur général l'a dit : alors que le dispositif devait s'éteindre le 31 décembre, nous avons pris la décision de proposer au Parlement de le proroger pour deux ans.
Il y a deux ans, lors de la première prorogation, nous avions indiqué qu'il fallait travailler sur le calibrage du dispositif, en prenant en compte les effets des allégements généraux de cotisations et de la transformation du crédit d'impôt pour la compétitivité et l'emploi – CICE – en allégement pérenne.
Puisque les acteurs attendent de la stabilité et de la sécurité, et puisqu'à cause de la crise ce n'est pas le moment de modifier les règles, nous proposons de prendre deux ans pour poursuivre le travail et, en attendant, de ne pas revoir les critères du TODE.
Nous envoyons donc un signe de stabilité, et montrons que le Gouvernement a conscience de la crise, des difficultés et des craintes des agriculteurs, en prenant deux ans pour poursuivre le travail avec eux.
Avis défavorable sur tous les amendements, donc.
Nous avions déjà soutenu des amendements similaires il y a deux ans ; nous voterons donc pour ceux-ci.
Les problèmes des agriculteurs ne datent pas d'hier, ni d'il y a deux ans, et ne seront vraisemblablement pas résolus d'ici à deux ans ; ils ne sont pas uniquement provoqués par la crise actuelle. Nous souhaitons donc inscrire ces exonérations dans la loi de manière pérenne.
Messieurs les membres du Gouvernement, vous avez constaté, pendant la crise sanitaire, combien les Français souhaitaient que la production soit rapatriée en France. Si le Gouvernement et la majorité actuelle ne soutiennent pas notre agriculture, dans dix ans nous n'aurons plus d'agriculteurs, et il ne sera plus question de pérennisation !
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
L'agriculture nécessite de gros investissements. Ce n'est pas en deux ans qu'ils seront amortis, ni en adoptant des mesures de soulagement pour deux ans que l'on parviendra à les encourager !
Nous constatons chacun la situation dans les territoires. Descendez dans le Sud, et ouvrez les yeux ! Vous verrez le nombre d'exploitations qui ne sont pas reprises et d'hectares qui restent en jachère.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR et parmi les députés non inscrits.
Avec cette prorogation de deux ans le Gouvernement fait un saut de puce, dont acte ; mais nous nous retrouvons donc exactement dans la même situation qu'il y a deux ans. Ce sera encore à peu près la même situation dans deux ans, quoique la majorité aura peut-être changé après l'élection présidentielle de 2022.
Parlons de cela sans provocation. Même si, bien sûr, il nous faut prendre en compte l'impact de la covid-19, la question n'est pas conjoncturelle mais structurelle. Il n'y a aucune raison objective pour que les problèmes de dumping et les différences de traitement avec tant d'autres États, comme l'Allemagne, l'Espagne et tant d'autres se résorbent par miracle.
Tenons compte de la réalité : le secteur rencontre de vraies difficultés. Il faut aider les emplois français et l'agriculture française. Envoyons un vrai signal – plutôt que de faire un saut de puce de deux ans – et pérennisons ce dispositif « quoi qu'il en coûte », pour reprendre une expression chère au Président de la République.
Certes, 450 millions d'euros, ce n'est pas rien dans le climat budgétaire actuel, mais c'est une somme à la hauteur des enjeux économiques, sociaux et d'emploi : elle mérite donc d'être engagée.
Puisque les députés de tous les bancs ont déposé des amendements identiques, je les invite à se joindre à nous pour voter en faveur de nos amendements lors du scrutin public.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
La plupart des orateurs l'ont dit : vous proposez de proroger jusqu'en 2023 un dispositif dont la fin était prévue pour le 1er janvier 2021.
Ce n'est pas du tout comme cela que les choses viennent d'être présentées !
C'est tant mieux, je l'ai dit tout à l'heure, et les agriculteurs vous en remercient.
Simplement, proroger le dispositif, c'est faire comme si la situation était normale, ce qu'elle n'est pas. Les agriculteurs pâtissent de plus en plus des aléas climatiques et ils ont subi la crise sanitaire – comme beaucoup d'autres professions, je vous l'accorde, mais, pour eux, elle a frappé de plein fouet.
En outre, d'autres facteurs entrent en jeu : les États-Unis ont instauré des taxes de 25 % sur certaines de nos exportations – les vins notamment – , qui ne touchent pas les autres pays, comme l'Allemagne, l'Espagne et l'Italie.
Il nous faut donc donner davantage de visibilité et de lisibilité à nos agriculteurs, les encourager, et leur montrer notre soutien. Avons-nous vraiment besoin de nous bagarrer chaque année sur le TODE lors de l'examen du PLFSS en séance publique ?
Pérennisons le système une fois pour toutes, et montrons aux agriculteurs que nous sommes derrière eux, déterminés à les aider. Tout le monde s'en portera mieux.
Applaudissements parmi les députés non inscrits.
« Tout à fait ! » sur les bancs des groupes Dem et LaREM
en laissant croire que l'article 13 prévoyait la fin du dispositif le 1er janvier 2021. Ce n'est pas le cas : il vise à le proroger pour deux ans. Soyez honnêtes dans les exposés sommaires de vos amendements, cela vaudra mieux pour le débat !
Messieurs les membres du Gouvernement, il faut être attentif à cette question, importante pour les agriculteurs – et vous savez combien le groupe Mouvement démocrate et démocrates apparentés est attaché à leur avenir.
Le travail que nous n'avons pas réussi à accomplir en deux ans devra absolument l'être dans les deux prochaines années, …
… afin d'éviter de nous retrouver, en 2022, avec exactement les mêmes problèmes, chacun, sur les mêmes bancs, répétant les mêmes arguments.
Je vous rappelle qu'hier, des négociations sur la PAC – politique agricole commune – ont eu lieu. Alors que des oiseaux de mauvais augure annonçaient une catastrophe pour la France, les mesures que nous avons obtenues sur le premier pilier sont plutôt une réussite pour notre pays.
Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, LaREM et Agir ens.
Le budget de la PAC non seulement n'a pas diminué, mais il a même légèrement augmenté, et nous avons obtenu que les mêmes normes soient applicables de la même façon dans tous les États – cela fait déjà une source de concurrence déloyale en moins.
J'espère donc qu'entre les efforts européens sur la PAC et ceux consentis au niveau national par le Gouvernement, nous n'aurons plus, dans deux ans, à nous poser la question de la prorogation du dispositif.
Applaudissements sur les bancs des groupes Dem, LaREM et Agir ens.
La situation est assez amusante puisque, sur le fond, nous sommes tous d'accord : le TODE est la solution idoine pour les deux prochaines années, et il faut donc le prolonger pendant cette période.
C'est donc sur la forme que les oppositions nous attaquent, parlant de « sauts de puce », entre autres. Mais en réalité, il n'y a pas de sujet puisque nous souhaitons proroger le dispositif !
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Nous voterons bien évidemment contre l'ensemble des amendements soumis à scrutin public, parce que oui, nous soutenons les agriculteurs et les viticulteurs…
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Nous ne sommes pas nombreux à être paysans, dans cet hémicycle.
Je voudrais en tout cas vous dire le plaisir que j'ai à vous écouter toutes et tous défendre les agriculteurs et l'agriculture.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem et Agir ens.
Je vous en remercie.
Nous parlons de pérenniser des emplois dans l'agriculture. Pour atteindre cet objectif, plusieurs leviers sont possibles, outre les diminutions de charges permises par le TODE, qui sera prorogé de deux ans : il faut aussi prendre en compte la PAC, comme l'a rappelé M. Millienne, mais surtout les mesures qui apportent aux agriculteurs le revenu nécessaire à la rémunération de leurs salariés.
Le revenu qu'ils perçoivent, les agriculteurs doivent le tirer de leur activité, de leur métier.
C'est là l'objectif poursuivi dans le cadre de la loi du 30 octobre 2018, dite loi EGALIM ; il faut poursuivre le travail, continuer de l'améliorer, comme nous comptons le faire dans les deux prochaines années.
Messieurs les membres du Gouvernement, je demande que le Gouvernement s'engage à faire le nécessaire pour que les agriculteurs disposent du revenu leur permettant de faire face…
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe Dem.
Il est fallacieux de prétendre que ce PLFSS prévoyait l'arrêt du dispositif, alors que nous proposons d'emblée de le prolonger. Quant à dire, madame Valentin, que cette majorité ne soutient pas l'agriculture alors que nous prolongeons le TODE, que le budget de l'agriculture est sanctuarisé, que 1,2 milliard d'euros sont consacrés à l'agriculture dans le plan de relance et que la nuit dernière s'est conclue sur un succès de la diplomatie française dans les négociations sur la PAC et les moyens dédiés l'agriculture pour les six années qui viennent, franchement, vous auriez pu choisir un autre moment.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM, Dem et Agir ens.
L'amendement no 859 n'est pas adopté.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 170
Nombre de suffrages exprimés 163
Majorité absolue 82
Pour l'adoption 49
Contre 114
Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 2638 , 943 , 423 , 1034 , 1369 et 1886 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 423 , 1034 , 1369 et 1886 sont identiques.
Sur ces amendements identiques, je suis saisie par le groupe Les Républicains d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
L'amendement no 2638 de M. Julien Aubert est défendu.
La parole est à Mme Catherine Pujol, pour soutenir l'amendement no 943 .
Cet amendement de repli prend acte du refus du Gouvernement de pérenniser le dispositif d'exonération lié à l'emploi de travailleurs occasionnels demandeurs d'emploi. Par conséquent, nous souhaitons qu'il soit au moins prolongé jusqu'en 2026, afin d'atténuer les effets de cette suppression pour nos agriculteurs.
Je ne sais si l'art de la répétition a quelque bienfait sur nos collègues, toujours est-il que nous maintenons notre position sur le prolongement du TODE parce qu'il nous paraît essentiel. Pour développer leurs productions et organiser leurs exploitations, nos agriculteurs qui font vivre la grande ferme France ont besoin de visibilité sur ce qui va se passer dans les années qui viennent.
La parole est à Mme Josiane Corneloup, pour soutenir l'amendement no 1034 .
Pour poursuivre dans la répétition, la suppression du dispositif « travailleurs occasionnels demandeurs d'emploi » représente une augmentation de charges de 189 euros par saisonnier et par mois, pour 930 000 contrats. Partout en France, les agriculteurs employeurs ont eu du mal à recruter, notamment en raison du coût de la main-d'oeuvre, plus élevé en France que chez nos voisins allemands, espagnols ou italiens. Alléger les charges grâce au TODE présente donc l'avantage de faciliter les recrutements et de faire du gagnant-gagnant.
Les conséquences économiques de la crise sanitaire ne s'arrêteront pas en 2023, aussi cet amendement vise-t-il à prolonger le TODE jusqu'en 2025.
La parole est à Mme Isabelle Valentin, pour soutenir l'amendement no 1369 .
Répétons, puisqu'il faut répéter. Cet amendement de repli permet de donner de l'air à nos agriculteurs. En effet, tous ne bénéficient pas de la PAC. En tant que maraîchère, je puis vous dire que nous avons besoin de main-d'oeuvre saisonnière et que celle-ci coûte extrêmement cher.
Si on veut que les agriculteurs s'en sortent et qu'ils aient un revenu décent, il faut que l'État les accompagne, comme le font l'Espagne, l'Italie ou l'Allemagne. Pour alléger le coût de la main-d'oeuvre, nous proposons donc le maintien du TODE jusqu'en 2025.
Rappel au règlement
Sur le fondement de l'article 100 du règlement intérieur, relatif au bon déroulement de nos débats, je tiens à rappeler quelques règles.
Que certaines de nos interventions en agacent ou en ennuient certains, c'est une chose, mais que l'on puisse se permettre ces journées qui sans cesse se répètent – la « journée de la marmotte » pour ne pas la citer – n'est pas très convenable.
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
Nous sommes tous des parlementaires, et tous nos amendements méritent le respect.
Exclamations continues sur les bancs du groupe LaREM.
L'expression que je viens de citer a bel et bien été prononcée : le compte rendu en fera foi, chers collègues.
Sans doute notre groupe a-t-il quelques idées fixes, mais elles sont à la hauteur des enjeux agricoles. Halte au feu, donc ! Écoutons-nous les uns les autres, tout le monde y gagnera.
Applaudissements sur les bancs des groupes LR et SOC.
Article 13
La parole est à M. Alain Ramadier, pour soutenir l'amendement no 1886 .
Cet amendement vise à donner plus de visibilité aux agriculteurs sur le dispositif du TODE.
Premièrement, ce dispositif est fondamental en termes de compétitivité par rapport à nos voisins européens comme l'Italie ou l'Espagne.
Deuxièmement, les exploitants agricoles vont être fortement touchés, et pour plusieurs années, par la crise sanitaire, notamment du fait des mesures touchant les secteurs de la restauration et de l'hôtellerie.
Troisièmement, les agriculteurs travaillent sur un temps long et ont besoin de visibilité.
Fort de ces éléments, cet amendement vise à rallonger de deux ans le délai d'extinction du TODE.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Nos débats portent sur la pérennisation du TODE. Vous proposez une mesurette, qui, certes, vaut mieux que rien.
C'est vrai.
Mais nous souhaitons, nous, le prolonger plus durablement, car nous pensons que les conditions de travail de nos producteurs ne vont pas s'améliorer d'ici à deux ans.
Vous ne cessez de vanter les mesures que vous prenez en faveur des agriculteurs mais, sur le terrain, c'est du désarroi et du mécontentement que nous constatons.
À titre d'exemple, imaginez quelle est la réaction des agriculteurs quand la direction départementale des territoires annonce un nouveau retard de paiement des acomptes des aides de la PAC : rien que dans mon département, 950 exploitations vont ainsi se retrouver dans une situation difficile, sachant que leur situation financière est déjà dégradée par trois années de sécheresse consécutives.
Ce qui compte, ce sont les actes. Nos concitoyens, surtout dans le contexte actuel, ne croient plus dans les paroles déconnectées de la réalité. Et la réalité, c'est que ces exploitations vont voir le paiement de leur verdissement retardé d'un mois à cause de l'inaction des services de l'État.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 164
Nombre de suffrages exprimés 159
Majorité absolue 80
Pour l'adoption 46
Contre 113
Je suis saisie de plusieurs amendements, nos 574 , 699 , 712 , 726 , 886 , 1458 , 2640 , 2639 , 572 , 573 , 698 , 881 et 1457 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 574 , 699 , 712 , 726 , 886 , 1458 et 2640 sont identiques, de même que les amendements nos 572 , 573 , 698 , 881 et 1457 .
Les amendements nos 574 de M. Vincent Descoeur, 699 de M. Bernard Perrut et 712 de Mme Véronique Louwagie sont défendus.
La parole est à Mme Isabelle Valentin, pour soutenir l'amendement no 726 .
L'embauche d'un salarié occasionnel ouvre droit à une exonération des cotisations et contributions sociales à la charge de l'employeur, dont le champ est aligné sur celui de la réduction générale.
Ce dispositif qui devait être supprimé au 1er janvier 2021 va néanmoins perdurer jusqu'au 1er janvier 2023, comme le prévoit cet article 13 qui le limite néanmoins aux agriculteurs employeurs de main-d'oeuvre à titre individuel ou collectif – groupements d'employeurs ou groupements agricoles d'exploitation en commun, par exemple.
Cet amendement vise à inclure les 12 000 entreprises de travaux agricoles employeurs de main-d'oeuvre auxquels les exploitants agricoles délèguent des travaux qui entrent dans le cycle de la production animale ou végétale, qu'il s'agisse de travaux d'amélioration foncière agricole ou de travaux accessoires mais nécessaires à l'exécution des travaux entrant dans le champ de l'exonération.
Il s'agit d'un amendement de repli par rapport à l'amendement précédent, excluant la branche du paysage et concentrant la demande d'exonération sur les activités liées à l'alimentation.
Exclus depuis la loi de finances pour 2015, les entreprises du secteur bénéficieraient d'un coup de pouce fiscal de 15 millions d'euros, montant relativement peu élevé pour les finances de l'État mais non négligeable pour un secteur qui, comme beaucoup d'autres, a souffert de la situation sanitaire et de ses conséquences économiques.
Cet amendement est important pour nos territoires ruraux.
Cet amendement vise à inclure les 12 000 entreprises de travaux agricoles employeuses de main-d'oeuvre auxquelles les exploitants agricoles délèguent des travaux qui entrent dans le cycle de la production animale ou végétale, travaux d'amélioration foncière agricole ou travaux accessoires nécessaires à l'exécution des travaux entrant dans le champ de l'exonération.
La parole est à M. Thibault Bazin, pour soutenir l'amendement no 2640 .
Monsieur le ministre délégué, pourriez-vous nous expliquer ce qui va changer fondamentalement pour nos producteurs d'ici à deux ans en termes de concurrence étrangère ou de poids de la main-d'oeuvre, puisqu'il s'agit d'une filière où la part de la main-d'oeuvre, notamment des travailleurs saisonniers, est très importante. Quel levier comptez-vous actionner pour compenser l'extinction programmée du TODE ?
Je suis toujours étonné de constater que vous ne souhaitez pas donner de visibilité ni de stabilité aux agriculteurs. Comment pensez-vous les rassurer alors qu'ils doivent naviguer à vue ?
Les amendements identiques nos 572 de Mme Émilie Bonnivard, 573 de M. Vincent Descoeur, 698 de M. Bernard Perrut, 881 de Mme Agnès Firmin Le Bodo et 1457 de Mme Josiane Corneloup sont défendus.
L'amendement no 2639 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 2518 de M. Charles de Courson est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Avis défavorable. Comme nous le disions tout à l'heure, nous avons atteint, il y a deux ans, un point d'équilibre qu'il convient de maintenir.
L'amendement no 2518 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'amendement no 2514 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Sur l'article 13, je suis saisie par le groupe La République en marche d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à Mme Audrey Dufeu.
Je profite du délai d'attente à respecter avant le scrutin public pour demander une suspension de séance après le vote de l'article 13.
Je profite de ces cinq minutes de relative liberté pour inviter nos ministres à se lâcher et à répondre à nos questions.
Murmures sur les bancs du groupe LaREM.
Quelle est leur vision de l'évolution du contexte dans les deux prochaines années ? Quels leviers changeront d'ici là pour permettre de compenser totalement la suppression du TODE ?
J'avais déjà interrogé M. le ministre délégué chargé des comptes publics sur la situation des agriculteurs au sujet des retards de paiement de la PAC par les services de l'État. Il paraît que la PAC a été bien négociée, mais cela ne sert à rien si, ensuite, les aides ne sont pas versées, surtout quand on connaît les problèmes de trésorerie des agriculteurs.
Je m'arrête là pour laisser aux ministres trois minutes de temps de réponse.
Nous avons longuement débattu des aides européennes au moment de la loi EGALIM. Je tiens à rappeler que, quand nous sommes arrivés, en 2017, le versement des aides de la PAC avait trois années de retard ; sous l'impulsion du ministère de l'agriculture et du ministère des finances, ces trois années ont été payées et nous n'avons désormais plus de retard. Je me permets que même de rappeler l'action du Gouvernement actuel sur ce point !
« Très bien ! » et applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Agir ens.
Puisqu'il nous reste deux minutes, je pose une nouvelle fois la question des deux années à venir. Le bilan des deux années passées n'est pas négligeable. On a pu sauver la situation ; cela, personne ne le conteste. Vous nous proposez ce soir de prolonger le dispositif TODE pour deux ans. Effectivement, c'est mieux que rien ;
« Ah ! » sur les bancs du groupe LaREM
c'est un signal, personne ne dit le contraire.
Mais, malgré la covid-19, la crise n'est pas conjoncturelle, elle est structurelle ; les mêmes causes produisant les mêmes effets, nous nous retrouverons donc au même point dans deux ans. Même en prévoyant des dispositifs pour ceci ou cela – meilleure reconnaissance des producteurs, meilleure rémunération – , dont les effets restent à démontrer, les distorsions de concurrence avec d'autres pays existent et continueront d'exister.
Vous ne faites que reporter une question qui, inlassablement, année après année, PLFSS après PLFSS, reviendra sur le tapis. Nous proposons de la régler ce soir une fois pour toutes. Ce n'est pas votre souhait : tant pis, vous l'assumerez. Chacun prendra ses responsabilités.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 159
Nombre de suffrages exprimés 146
Majorité absolue 74
Pour l'adoption 144
Contre 2
L'article 13 est adopté.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à vingt-deux heures cinq, est reprise à vingt-deux heures quinze.
Il concerne un sujet éminemment important, notamment dans les territoires périphériques, mais peut-être encore plus dans les territoires urbains : les assistantes maternelles. Jamais il n'y a eu autant besoin de garde d'enfant : la vie moderne, où les deux parents sont contraints de travailler, le nombre de places limité dans les structures d'accueil – bien qu'elles se développent un peu partout – , confèrent aux assistantes maternelles un rôle de premier ordre pour permettre aux parents de concilier carrières et enfants.
La parenthèse de la covid-19 est une période très difficile pour elles : les exigences et les normes se sont drastiquement accrues, la prudence avec les enfants a redoublé. Surtout, elles ont dû faire face à des charges nouvelles ; or le niveau de rémunération d'une assistance maternelle – activité souvent d'appoint, de complément – reste très bas, bien en dessous du SMIC.
Avec quelques centaines d'euros de charges supplémentaires, parce qu'il faut du désinfectant, des lingettes, du gel hydroalcoolique, des masques – vous savez ce qu'a pu représenter, durant la pénurie, le coût d'une cinquantaine de masques – , il ne leur reste plus grand-chose à la fin du mois.
Nous sommes nombreux, à leur contact, capables de mesurer précisément, voire mathématiquement, ces difficultés. Nous proposons donc un geste concernant ces charges nouvelles, afin de les aider à garder un minimum de revenu décent, eu égard au travail important qu'elles accomplissent.
La parole est à M. Philippe Gosselin, pour soutenir l'amendement no 1274 .
L'amendement permet de rendre un hommage appuyé au travail remarquable des assistantes maternelles. Si les « assmats » n'étaient pas présentes dans les villes, dans les campagnes, dans tous les territoires, nous serions bien en peine. Quand je dis « nous », je pense aux jeunes parents, aux salariés ou aux indépendants, à toutes celles et ceux qui veulent des modes de garde complémentaires, parfois alternatifs. Il n'y a pas que les modes de garde collectifs ; il existe d'autres possibilités et les « assmats » en sont une part majeure. À cet égard, elles doivent être au coeur de nos préoccupations. Elles ont beaucoup souffert ces derniers mois, avec des conditions d'emploi très limitées ; si certaines ont beaucoup été sollicitées, parce qu'elles gardaient des enfants de soignants, ce n'est pas le cas de toutes.
Il faut le reconnaître, toutes n'ont pas été très bien indemnisées. Les parents employeurs ont parfois été appelés à la rescousse pour maintenir le niveau de certaines rémunérations ; en réalité, le compte n'y est pas. Aujourd'hui on leur demande – c'est légitime – un certain nombre d'éléments supplémentaires : des protections, des gestes, mais aussi un peu d'équipement. L'amendement vise à compenser le surcoût correspondant à ces équipements, qui sont structurels et pas simplement épisodiques. De tels achats sont en effet réguliers et non occasionnels, car les précautions à prendre sont durables. Or, pour le moment, rien n'est compensé en matière de salaire ou de participation aux frais.
Par l'exonération ici visée, nous proposons donc une compensation et un coup de chapeau très concret pour les « assmats », qui gardent les enfants au quotidien et qui permettent au pays de travailler.
Comme je l'ai indiqué tout à l'heure à l'autre côté de l'hémicycle, je partage avec vous la reconnaissance du travail fourni par les assistantes maternelles, notamment pendant le confinement, mais aussi au quotidien. La commission a cependant repoussé cet amendement dès lors qu'il ne précise rien d'autre que le principe général d'une exonération, laissant au pouvoir réglementaire tout le soin d'en fixer le niveau, ainsi que les cotisations qu'elle concernerait. Compte tenu de l'état des finances sociales cette année, la commission n'a pas pu accepter un dispositif aussi peu chiffré. Avis défavorable.
Ces propositions sont très importantes et mériteraient que l'on s'y arrête. Si elles ne sont pas suffisamment chiffrées, déposons un sous-amendement pour y remédier. Tout ce qui a été dit à propos des assistantes maternelles est vrai ; nous le partageons et vous le partagez également, monsieur le rapporteur général, monsieur le ministre délégué. Cette profession a été active pendant le confinement, volontaire, gardant les enfants de ceux qui travaillaient – le personnel hospitalier notamment. Ces propositions rejoignent celles formulées par le groupe Gauche démocratique et républicaine au sujet de la gratuité des masques. Nous pourrions faire un geste de gratuité concernant le matériel pour les assistantes maternelles, qui ont peu de revenus. Nous sommes favorables à la revalorisation de leurs salaires, bien entendu, mais nous pourrions déjà adopter des propositions leur permettant d'avoir gratuitement le matériel indispensable – gel hydroalcoolique, masques et blouses si nécessaire.
Nous avons envoyé plusieurs courriers d'alerte au Gouvernement à ce sujet, dès le confinement. Les services de Bercy sont à votre disposition, monsieur le ministre délégué, pour procéder au chiffrage ; en envoyant un SMS, il vous faudra moins d'une minute pour l'obtenir. J'en ai assez que les difficultés générées par la crise du covid-19 pour les gens qui travaillent soient balayées d'un revers de la main, au prétexte qu'on ne sait pas combien cela coûterait – trop peut-être.
On ajoute des aides sociales aux aides sociales : le « chèque déconfinement » pour les bénéficiaires du RSA, l'allocation de rentrée scolaire et bien d'autres dispositifs encore. Dans ces cas-là, il n'y a plus de limite ni de plafond ; on ne se demande pas combien cela coûte, on y va allègrement sans même en avoir débattu ici. Nous parlons de gens qui jouent un rôle très important dans notre économie : vous ne pouvez pas, avec des arguments aussi bas, les balayer d'un revers de la main.
Protestations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Si vous le voulez, nous pouvons suspendre la séance pendant dix minutes pour parler du chiffrage et faire le calcul ensemble. À mon avis, le résultat sera très proche de la réalité. Soutenez un peu les gens qui encore un minimum d'envie de travailler !
La parole est à Mme Mireille Robert, pour soutenir l'amendement no 2451 .
Cet amendement vise à sauver des filières viticoles essentielles et structurantes pour la vitalité économique de territoires ruraux, en alignant les droits de circulation des vins en méthode ancestrale à faible degré d'alcool sur ceux des vins pétillants peu alcoolisés. Une injustice historique serait ainsi réparée : bien que le degré d'alcool des vins en méthode ancestrale soit en moyenne de 7,5°, ils sont classés dans la même catégorie que les vins mousseux dits de « méthode traditionnelle », qui titrent entre 10° et 12° en moyenne. Le droit de circulation est fixé à 9,59 euros par hectolitre, contre 1,36 euro par hectolitre pour le cidre, le poiré, l'hydromel et les jus de raisin légèrement fermentés.
La méthode de production des vins en méthode ancestrale est également différente : ils sont élaborés par un processus de fermentation unique, sans ajout de liqueur de tirage ou d'expédition, à la différence des vins mousseux. Leur teneur en sucre s'en trouve considérablement réduite en comparaison des vins mousseux dits de « méthode traditionnelle ».
Un nombre limité de productions est concerné : les AOC – appellations d'origine contrôlée – Gaillac, Blanquette de Limoux, Clairette de Die et Cerdon, pour lesquelles un ajustement du droit de circulation ouvrirait des perspectives à l'export et une compétitivité renforcée face à la concurrence internationale. En effet, plusieurs pays de l'Union européenne – la Belgique, les pays d'Europe du Nord, le Royaume-Uni – appliquent une taxation réduite pour les vins et alcools inférieurs à 8,5°.
Cet amendement a été repoussé par la commission car les viticulteurs bénéficient de l'ensemble des mesures dont nous avons parlé depuis le début de l'examen du texte. Par ailleurs, l'amendement renvoie à une catégorie définie par arrêté, ouvrant la voie à la reconnaissance de la spécificité d'un grand nombre de productions viticoles susceptibles de nuire à la clarté de la loi à terme. Avis défavorable.
L'amendement no 2451 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Rires sur plusieurs bancs.
Mme Émilie Bonnivard soulignait les difficultés que rencontrent les entreprises du secteur touristique, hors zone de couvre-feu. Cet amendement a pour but de soutenir de manière analogue la filière viticole, à travers un double mécanisme. Il tend à exonérer, d'une part, les charges patronales des cotisations salariales agricoles selon trois paliers de perte de chiffre d'affaires, et, d'autre part, les cotisations les travailleurs non salariés du secteur, à raison de leurs pertes.
Bien sûr, de premières mesures de soutien ont été prises : la distillation de crise, l'aide au stockage ou encore le PGE, le prêt garanti par l'État. Néanmoins je tiens à souligner l'inquiétude des viticulteurs, car les perspectives économiques ne s'améliorent pas ; les échéances des prêts se rapprochent, puisque les PGE devront être remboursés ; les mesures d'urgence ne compensent pas les pertes de vente.
Au niveau national, les restrictions qui touchent le tourisme, les bars et les restaurants se répercutent directement sur le chiffre d'affaires des exploitations. Au niveau des exportations, aux incertitudes relatives aux taxes Trump ou au Brexit s'ajoutent désormais l'annulation des salons internationaux et une forte contraction des échanges.
Nous devons réagir vite et fort pour permettre aux vignerons de traverser cette crise : vite, parce que les difficultés de trésorerie s'aggravent, après plusieurs semaines de vendanges ; fort, parce que les viticulteurs n'ont pas mobilisé le dispositif de chômage partiel, ni au printemps ni à l'automne. Le travail du vivant ne s'est jamais arrêté et des dizaines de milliers d'emplois sont menacés. Dans mon département de l'Aude, j'ai pu mesurer l'urgence de la situation.
En soutenant les mesures volontaristes des membres du groupe d'études sur le vin, la vigne et l'oenologie, vous pouvez marquer la continuité de l'engagement du Gouvernement. Les vignerons, qui incarnent les terroirs, en appellent à vous.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Pour ma part, je vous ferai une réponse groupée sur les amendements nos 610 , 616 et 614 .
Le secteur viticole bénéficie, au même titre que les autres secteurs, de la prise en compte de ses difficultés par le biais d'une exonération de cotisations sociales, dont les conditions ont été améliorées au cours du débat parlementaire.
Le Gouvernement et la majorité ont également instauré un dispositif de distillation de crise à hauteur de 155 millions pour 2 millions d'hectolitres, dont 75 millions d'euros de crédits nationaux, pour permettre de réduire les stocks des exploitations avant les vendanges. Une aide au stockage privé de 15 millions d'euros, complémentaire à la distillation de crise, vise à faciliter le stockage des vins déjà vinifiés.
Au total, ce sont près de 250 millions qui ont été mobilisés pour la filière, sans parler des dispositifs prévus par le PLFSS, qui lui seront bénéfiques. Pour toutes ces raisons, l'avis est défavorable sur les trois amendements.
Sur la forme, ces trois amendements me posent des difficultés. Tout d'abord, ils prévoient un dispositif d'exonération des cotisations de 2021 en se fondant sur le constat d'une baisse d'activité en 2020.
C'est donc un dispositif d'exonération très différent de ceux adoptés dans le PLFR3, qui ont été reconduits tout à l'heure et qui prévoient des exonérations sur les cotisations de 2020 par rapport à la baisse d'activité de 2020. Nous avons donc prévu dans certains secteurs des dispositifs d'exonération avec des seuils, accompagnés d'un crédit de cotisations, pour permettre aux entreprises qui ont versé des salaires pendant le confinement, par exemple, d'avoir de l'avance pour honorer les échéances à venir. J'ai annoncé tout à l'heure que ce crédit de cotisations valable en 2020 le serait encore début 2021 pour ceux qui auraient besoin de davantage de temps pour l'utiliser.
Deuxième objection de forme, vous proposez dans ces amendements des dispositifs d'exonération comportant des seuils de déclenchement différents de ceux du dispositif général. Cela pose une difficulté juridique : si ces amendements venaient à être adoptés, il existerait des dispositifs d'exonération comportant des taux variables selon les secteurs d'activité. Je crains que la solidité juridique de la mesure soit mise à mal par cette inégalité de traitement, faisant peser un risque sur l'ensemble des secteurs bénéficiaires des exonérations autorisées au titre du PLFR3 et du PLFSS.
Concernant le fond, vous avez adopté tout à l'heure un amendement portant article additionnel après l'article 6 qui vise à prolonger, pour cette nouvelle période de restriction, des dispositifs d'exonérations et de crédits de cotisations. Avec l'adoption du sous-amendement du rapporteur général, nous avons veillé à intégrer le secteur de la viticulture parmi ceux bénéficiaires d'exonération, selon les mêmes seuils, et avec les mêmes liens de dépendance : ainsi, si un viticulteur montre que 50 % au moins de son activité est liée à un client unique, par exemple un restaurant ou une chaîne de restaurants, fermés à cause du couvre-feu, il bénéficie de l'exonération comme l'établissement qui fait l'objet de la mesure de fermeture ou de couvre-feu.
En outre, comme le rapporteur général l'a souligné, nous avons débloqué plus de 250 millions d'euros d'aides d'urgence, dont 127 millions ont été versés. Le reste le sera très prochainement, notamment dans le cadre des aides au stockage. Nous travaillons à des mesures de valorisation, en particulier la certification haute valeur environnementale – HVE – , qui seront prêtes pour le PLFR4. Si d'ici-là nous constations une nécessité d'abonder la filière pour des raisons spécifiques, nous y travaillerions ; je suis ouvert à la discussion, mais je ne connais pas suffisamment les chiffres pour savoir dès ce soir ce qui serait possible ou non.
Il existerait alors un dispositif d'urgence pour l'année 2020, seulement sur l'activité 2020, adossé aux fonds d'urgence que nous avons débloqués, et qui ferait bénéficier la viticulture des mêmes mesures d'exonération que les autres secteurs d'activité. Concernant les taux, je n'ignore pas que votre demande est justifiée par l'existence de situations différentes : malheureusement elle présente une fragilité.
Enfin, si l'année 2021 se passe mal, nous traiterons la viticulture comme les autres secteurs. Nous avons toujours procédé en apportant une réponse dans l'urgence, avec des reports d'échéance, avant d'appliquer des mesures d'exonération visant à régulariser la situation, sans jamais prévoir les périodes d'exonération à l'avance. Entre nous, j'aimerais être sûr, mais je ne le suis pas, que 2021 ne connaîtra pas de période d'exonération : cela signifierait que la situation serait rétablie, ce dont nous serions tous très heureux. Pour ces raisons, et sans préjuger du travail à venir, je demande le retrait de l'amendement no 610 , sinon l'avis sera défavorable. Il en ira de même pour les amendements nos 616 et 614 .
Je retire l'amendement no 610 et je remercie le ministre pour toutes ces informations.
L'amendement no 610 est retiré.
L'amendement no 616 de Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas est défendu. M. le rapporteur général et M. le ministre délégué ont émis un avis défavorable.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard.
Je regrette que l'amendement no 610 ait été retiré, je l'aurais volontiers voté, comme je voterai les nos 616 et 614. En effet, la filière viticole a réellement besoin d'aide : elle a été particulièrement touchée par la crise sanitaire. Dans l'Hérault, par exemple, deux exploitants sur trois sont viticulteurs. La filière a enregistré une perte de chiffre d'affaires d'au moins 1,5 milliard d'euros. Malgré cela, les entreprises vitivinicoles ont continué à rémunérer leurs salariés pendant tout le confinement, pour entretenir la vigne ; elles n'ont quasiment pas eu recours au chômage partiel.
Heureusement, le secteur de l'hôtellerie-restauration a pu reprendre ses activités avant l'été, permettant aux viticulteurs de vendre une partie de leur stock, mais les exportations n'ont pas repris aussi vite. Comme je l'ai déjà souligné tout à l'heure, les vins français sont taxés à 25 % par les États-Unis depuis octobre 2019, alors qu'il s'agit de leur premier marché à l'export – c'est le ministère de l'économie, des finances et de la relance qui le dit. Entre octobre et novembre 2019, les exportations de vins français aux États-Unis se sont effondrées de 44 %. Le vin est victime d'un conflit qui lui échappe totalement, le conflit Airbus, et personne ne se sent véritablement concerné. J'estime que pour soutenir les petites entreprises vinicoles, pour lesquelles les cotisations sociales représentent une charge très importante, il est indispensable d'adopter des mesures de soutien pour 2021.
Mme Catherine Pujol applaudit.
Depuis que je siège dans cet hémicycle, j'entends parler de la viticulture comme d'une activité agricole comme les autres, qui doit être traitée comme telle. Pourtant, il existe des différences fondamentales. Certaines ont déjà été citées. J'ajouterai que les cultivateurs de petits pois et de carottes encaissent l'argent de leur vente dans un délai raisonnable après la récolte, et qu'il n'en va pas de même pour la viticulture. Certes, nous proposons une exonération en 2021 calculée selon le chiffre d'affaires de 2020, mais c'est parce que le monde viticole vit ainsi, avec des décalages importants. Nous n'avons pas été entendus sur les autres dossiers ; j'aimerais que pour une fois, sur celui-là, nous fassions entendre que la viticulture, qui présente de vraies spécificités, ne doit pas être traitée comme les autres filières agricoles.
Ensuite, le Premier ministre a lui-même reconnu que les aides que nous avons instaurées en faveur de la viticulture comportaient des failles. Les trois amendements que nous soutenons visent à les combler. Peut-être le PLFR4 nous apportera-t-il enfin une réponse – ce ne sera pas la certification HVE ! En attendant, les mesures que nous proposons correspondent aux attentes des acteurs de terrain, qui semblent avoir été entendus par le Premier ministre.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM et parmi les députés non inscrits.
Nous avons retiré l'amendement no 610 , mais, monsieur le ministre délégué, j'appelle votre attention sur le no 616. Il s'agit d'un amendement de repli, qui concerne les chefs d'entreprise agricole. Le secteur va mal. Les viticulteurs n'ont quasiment pas recouru aux aides auparavant, et n'ont pas bénéficié du chômage partiel, puisqu'ils ont cultivé leurs vignes jusqu'à la récolte. Le tourisme ne reprend pas ou très peu. Les bars et les restaurants sont fermés, les salons professionnels annulés. Ces entreprises n'auront pas de gros résultats à la fin de l'année, et les exonérations que nous proposons sont proportionnées : cela ne représentera donc pas une perte incroyable pour le budget de l'État. De grâce, écoutez ces chefs d'entreprise : on ne peut pas les laisser sans aucune aide.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe LR. – Mme Manuéla Kéclard-Mondésir applaudit également.
Je répondrai d'abord à M. Perea. À la suite de l'intervention du Premier ministre, deux modifications sont à noter. D'abord, le dispositif d'urgence a été augmenté de 80 millions d'euros, passant de 170 à 250 millions. Pardonnez-moi de le souligner, mais ce n'est pas négligeable. Ensuite, nous avons veillé à intégrer la viticulture dans le dispositif d'exonération, y compris lorsque l'exploitation est dépendante d'une entreprise fermée.
Par ailleurs, je ne dis pas que la viticulture est une activité agricole comme une autre. J'ai expliqué qu'il fallait veiller, dans le dispositif d'exonération, à adopter les mêmes mesures pour tous les secteurs d'activité économique, et non pour tous les secteurs agricoles. Le principe d'égalité doit être respecté, quand bien même il ne vous convient pas.
Concernant l'intervention de Mme Mauborgne, le fait d'avoir intégré la viticulture dans la liste des secteurs dits S1 et S1 bis, notamment pour les chefs des plus petites exploitations, généralement de moins de dix salariés, leur permet souvent d'avoir accès au fonds de solidarité et aux aides prévues dans ce cadre pour les entreprises, les chefs d'entreprise et les indépendants. Il s'agit d'une première réponse. Je répète que nous travaillons sur le PLFR4, qui comportera un dispositif HVE : il faudra très certainement travailler à des modalités particulières. Si la conjoncture devait être mauvaise l'année prochaine, nous y reviendrions, de même que pour tous les autres secteurs économiques, comme nous l'avons toujours fait.
Je maintiens donc la demande de retrait, sinon l'avis sera défavorable. Sur la forme, il faut préserver des dispositifs d'exonération qui répondent aux mêmes critères pour tous les secteurs, afin de ne pas fragiliser tout l'édifice ; sur le fond, je prends l'engagement d'aller plus loin, notamment avec le PLFR4. Et je rappelle que l'amendement que vous avez adopté, sous-amendé par le rapporteur général, satisfait déjà en partie les demandes que vous avez exprimées ce soir.
L'amendement no 616 est adopté.
Applaudissements sur divers bancs.
L'amendement no 614 de Mme Marie-Christine Verdier-Jouclas est défendu.
L'amendement no 614 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Les articles L. 731-25 et L. 731-35 du code rural et de la pêche maritime permettent aux chefs d'exploitation agricole dont les revenus professionnels sont inférieurs à un seuil donné de bénéficier d'une modulation de leurs taux de cotisations maladie, maternité et prestations familiales. Parallèlement, dans le souci de favoriser le renouvellement des générations en agriculture, l'article L. 731-13 prévoit une exonération partielle de cotisations sociales pour les jeunes agriculteurs devenant chefs d'exploitation. Cette exonération est dégressive durant cinq ans.
Le cumul de ces deux dispositifs, taux réduits et exonération jeunes agriculteurs, n'est pas permis. Cela aboutit à ce que dans certains groupements agricoles d'exploitation en commun – GAEC – familiaux, par exemple, les jeunes agriculteurs, bénéficiant de l'exonération partielle qui leur est réservée, sont redevables, à revenu égal, de davantage de cotisations que leurs aînés. C'est surtout le cas à compter de la troisième année après l'installation, étant donné les modalités d'exonération partielle.
Cette anomalie doit être corrigée. Pour conserver le dispositif d'exonération partielle de cotisations des jeunes agriculteurs, indispensable pour inciter à accroître le nombre d'installations, cet amendement propose de permettre le cumul de l'exonération partielle des jeunes agriculteurs avec la modulation des taux des cotisations, en fonction des revenus des chefs d'exploitation. Puisque ce cumul est déjà possible pour les bénéficiaires de l'ACRE – aide aux créateurs et repreneurs d'entreprise – , pourquoi ne pas l'autoriser pour les jeunes agriculteurs, pour favoriser le renouvellement des générations dans nos campagnes ? La plupart des agriculteurs ont plus de 55 ans.
Je veux compléter les propos de notre excellente collègue. Ces amendements identiques visent à mettre fin à une forme d'injustice et à rendre le dispositif très performant, grâce au cumul de deux mesures, celle qui concerne les agriculteurs dont le revenu est modéré et celle qui profite aux jeunes agriculteurs.
Cela a été très bien dit, il peut y avoir, dans certains GAEC familiaux, une différence d'imposition très élevée au détriment du jeune par rapport au reste de la famille. Il faut donc permettre le cumul des deux dispositifs. C'est une mesure de justice et de soutien aux jeunes agriculteurs.
Je défends également cette mesure, proposée par les jeunes agriculteurs et dont j'ai parlé avec l'ensemble des organisations syndicales à l'occasion de mon rapport sur la mission « Agriculture, alimentation, forêt et affaires rurales ».
Il y a une anomalie : un jeune agriculteur a droit à une déduction de 65 % des cotisations sociales la première année, de 55 % la seconde, de 35 % la troisième, de 25 % la quatrième et de 15 % la cinquième, mais s'il est associé à son père et que l'exploitation connaît de mauvais résultats au bout de la troisième année, le père paiera moins de cotisations que le fils que l'on a voulu pourtant encourager à se lancer dans l'agriculture.
Cet amendement de bon sens corrige cette situation anormale.
Comme mes collègues, je défends cet amendement qui répare une injustice, en instaurant l'égalité dans les exploitations familiales.
Nous rencontrons de plus en plus d'agriculteurs, qui, à quelques années de la retraite, se posent des questions pour leurs enfants. Certains même leur déconseillent de reprendre le flambeau, à cause des difficultés du secteur et du contexte socio-économique. Ces discussions sont parfois tendues dans les foyers agricoles. Des jeunes se posent la question de la reprise de l'exploitation, même s'ils ont la vocation et la passion de ce métier. Mais, parmi les freins et mécanismes dissuasifs qui existent, l'un peut être corrigé par l'amendement que nous défendons en nombre, car nous souhaitons collectivement favoriser l'installation des jeunes agriculteurs.
Derrière cela se pose la question de la transmission, qui est essentielle dans les territoires : il s'agit de l'avenir des productions locales, de notre alimentation. Nous ne pouvons pas déconnecter la question de l'alimentation de proximité de celle de la transmission des productions, et nous devons nous donner les moyens d'agir.
Nous n'avons pas encore évoqué l'enjeu des agricultrices, qui sont de plus en plus nombreuses à souhaiter s'installer. Il faut agir sur la modulation de la cotisation maternité afin de les aider, notamment au moment des projets de naissance, qui doivent rester un bonheur et non devenir un obstacle à l'installation, et lors des 1 000 premiers jours de l'enfant – car cet amendement est cohérent avec les politiques publiques menées.
M. Philippe Gosselin applaudit.
Nous avons déjà débattu, en commission, de cet amendement, qui a été repoussé. Outre qu'il renforcerait encore la spécificité des exonérations dont bénéficie le secteur agricole au moment où nous prolongeons le dispositif TODE, il revient sur le principe général visant à éviter autant que possible le cumul d'exonérations ciblées.
D'autres outils, comme un droit d'option entre les deux exonérations ou un renforcement des primes d'installation pour les jeunes agriculteurs, pourraient être étudiés. En l'état, votre dispositif ne paraît pas répondre au problème de façon adéquate, si bien que l'avis est, comme en commission, défavorable.
J'entends la volonté du rapporteur général d'éviter de faire du sur-mesure et du cas par cas pour ne pas trop s'écarter de la règle générale. Nous serions plutôt enclins à soutenir cette position, mais nous vous suggérons quand même de faire dans la dentelle sur ce sujet. Il n'est absolument pas logique que dans certains cadres comme les GAEC familiaux on connaisse des taux de cotisation différents pour des situations identiques, avec les plus jeunes qui paient plus que certains de leurs aînés.
Sans cumul des exonérations, des injustices se produisent. Ces amendements visent à y remédier, sachant que le dispositif ACRE permet déjà le cumul, et donne satisfaction.
Un peu de dentelle ne nuirait pas au principe général et permettrait même de l'éclairer.
Monsieur le rapporteur général, vous avez dressé un parallèle avec le dispositif TODE, mais les bénéficiaires comme le champ couvert ne sont pas du tout les mêmes. L'amendement vise simplement à réparer une anomalie.
La parole est à Mme Josiane Corneloup, pour soutenir l'amendement no 884 .
La démographie médicale est inquiétante et notre pays rencontre des difficultés pour recruter et former de nouveaux médecins. Dans le même temps, certains médecins choisissent de poursuivre leur activité après l'âge légal de départ à la retraite : il est essentiel d'encourager ce type de démarches, notamment dans les zones sous-dotées en matière de soins.
L'amendement vise à diminuer les charges sociales de ces médecins, afin de leur envoyer un signal positif. Ce serait un acte incitatif fort.
Nous débattons de ce sujet presque chaque année. Dans les précédentes lois de financement de la sécurité sociale, nous avons réalisé des avancées : ainsi, depuis le 1er janvier 2020, les médecins cumulant l'emploi et la retraite dans une zone peu dense sont exonérés de cotisations au régime des prestations complémentaires vieillesse, dès lors que leur revenu d'activité est inférieur au seuil de 80 000 euros, contre 12 000 puis 40 000 euros auparavant. Il y a déjà eu des avancées depuis le début du quinquennat, donc l'avis est défavorable.
Monsieur le rapporteur général, vous semblez vous étonner que le débat revienne chaque année, mais il reviendra probablement l'année prochaine ! En effet, même si des efforts ont été consentis et des plafonds revus, le désert gagne. Le désert médical touche toujours plus de nos collectivités, de nos territoires, de nos concitoyens. Il est de plus en plus difficile de trouver un médecin, un dentiste ou un kinésithérapeute dans certains territoires.
L'objet de notre interpellation est de faire prendre conscience que les petites oasis qui existent, et qui d'ailleurs se réduisent, masquent la progression des déserts médicaux. Il faut s'atteler à la lutte contre les déserts médicaux. Cet amendement n'est qu'un élément modeste de la réforme globale que nous attendons et appelons de nos voeux.
Je ne m'étonne pas que ce débat, tout à fait légitime, soit récurrent, mais nous avons progressivement augmenté le seuil de revenu donnant droit à une exonération de cotisations, fixé, depuis le 1er janvier dernier, à 80 000 euros. L'augmentation du seuil de 12 000 à 40 000 euros n'avait pas entraîné d'effet notable, mais il faut attendre pour évaluer le passage à 80 000 euros.
Quant à la réforme que vous attendez, nous l'avons votée l'année dernière dans cet hémicycle : la loi du 24 juillet 2019 relative à l'organisation et à la transformation du système de santé vise à former davantage de médecins et à répondre au problème des déserts médicaux. Néanmoins, il faut toujours dix ans pour former un médecin et la réforme que nous avons faite aurait dû être conduite bien avant.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
L'amendement no 884 n'est pas adopté.
La parole est à M. Jean-Carles Grelier, pour soutenir l'amendement no 858 .
L'idée selon laquelle l'apprentissage est un excellent moyen de former les jeunes et de les conduire à l'emploi est largement partagée sur ces bancs. La plupart des collègues présents sont sûrement confrontés, dans leur circonscription, au fait que de nombreux jeunes recherchent un maître d'apprentissage. Avec la crise sanitaire, des dizaines de milliers de jeunes et de parents sont inquiets.
L'amendement vise à offrir à un artisan qui aurait formé par la voie de l'apprentissage un jeune pendant deux ans un régime d'exonération de cotisations patronales, à la condition qu'il lui propose un contrat de travail à durée indéterminée dès la fin de l'apprentissage. L'objectif est d'offrir au jeune, au-delà de son temps de formation, une perspective d'emploi et d'avenir. Cet avantage bénéficierait à la fois au monde de l'artisanat et à tous les jeunes en quête d'une formation et d'un métier, qui est souvent un beau métier.
Nous avions déjà examiné cet amendement l'année dernière et la commission l'a encore repoussé. Toutefois je reconnais sa qualité, et nous partageons sur tous les bancs le souhait de favoriser l'apprentissage.
Je ne rappellerai pas ici l'ensemble des mesures prises en faveur des apprentis depuis l'entrée en fonction de notre majorité, mais sachez que, dans le cadre du plan de relance, une aide de 5 000 euros est versée pour tous les apprentis mineurs, majorée à 8 000 euros pour les apprentis majeurs. Sont concernés tous les apprentis préparant un diplôme de niveau master ou inférieur, dont le contrat est conclu entre le 1er juillet 2020 et le 28 février 2021, et toutes les entreprises de moins de 250 salariés. Cette aide prévoit la prise en charge à 100 % du salaire d'un apprenti de moins de vingt ans, le taux passant à 80 % ensuite. Il y a également une aide plus large destinée à l'embauche des jeunes, à hauteur de 4 000 euros par embauche.
Votre dispositif n'étant cumulable avec aucune autre aide, il présente une garantie de sérieux, mais je ne suis pas sûr qu'il soit plus favorable que les mesures déjà mises en oeuvre. L'avis est donc défavorable.
L'amendement no 858 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Contrairement à Mireille Robert, qui a énuméré des breuvages tous plus formidables les uns que les autres, je ne suis pas certaine de vous faire rêver avec cet amendement, d'autant que je n'ai pas son accent mélodieux. Néanmoins, je vais faire rêver de nombreux Français, vivant dans les circonscriptions d'Amélia Lakrafi, de Roland Lescure, de M'jid El Guerrab ou de Meyer Habib, qui ne peut être là ce soir.
Ces Français vivent en dehors de l'espace économique européen et possèdent un petit logement en France, dont ils tirent un petit loyer qui complète leur revenu ou leur pension de retraite – ou qui constitue un capital retraite parce qu'ils ne peuvent accéder à une caisse de retraite dans le pays qu'ils habitent.
Évoquons maintenant des éléments qui font moins rêver : ce revenu subit des prélèvements sociaux, lesquels rapportent à l'État environ 50 millions d'euros, soit peu de chose à l'heure où l'on ne parle qu'en milliards. Ces Français sont donc discriminés par rapport à leurs homologues de l'espace économique européen en matière de prélèvements sociaux sur les revenus immobiliers. Le fait d'aligner leur régime ne vous causerait qu'un manque à gagner de 24 millions d'euros – je ne vous demande pas beaucoup, monsieur le rapporteur général, monsieur le ministre délégué – mais ferait infiniment plaisir à tous ces ressortissants qui se sentent l'objet d'une profonde discrimination.
La commission a repoussé cet amendement pour les mêmes raisons que les années précédentes.
J'y vois un amendement d'appel concernant une situation sur laquelle nous pourrions effectivement engager une réflexion collective. En attendant la réponse du ministre, je vous invite à retirer cet amendement ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
S'il s'agit d'un amendement d'appel, je constate en tout cas Mme Genetet y est très attachée. Nous avons parlé à plusieurs reprises de la disposition proposée, et j'estime pour ma part qu'au-delà du PLFSS, les lois financières contiennent des dispositions favorables aux Français de l'étranger, plus précisément aux contribuables non-résidents.
À l'initiative de Mme la députée, un amendement a été adopté, qui supprimait la dernière étape de la réforme de la fiscalité des non-résidents. Cet amendement, auquel nous avions travaillé ensemble, me semble aller dans le bon sens. Sa discussion avait été l'occasion d'évoquer l'assujettissement aux cotisations sociales et l'application aux ressortissants hors Union européenne de la jurisprudence dite Schumacker, dont le Gouvernement souhaite maintenir l'application à l'échelle de l'espace européen plutôt que la voir étendue au monde entier.
Il y a certainement encore beaucoup à faire, tant au sujet des régimes fiscaux qu'au sujet des régimes de cotisations sociales pour les non-résidents – et, parmi ces derniers, pour les Français de l'étranger. Sans vouloir trop m'avancer, il me semble que nous pourrions envisager une réflexion fondée sur une distinction entre les Français résidant à l'étranger et ceux qui sont uniquement bénéficiaires ou titulaires de revenus au titre du régime des non-résidents. Dans l'immédiat, comme l'an dernier, je demande le retrait de cet amendement et émettrai à défaut un avis défavorable.
Je remercie M. le rapporteur général et M. le ministre délégué et, compte tenu des réponses encourageantes qu'ils m'ont faites, je retire mon amendement.
L'amendement no 110 est retiré.
Cet amendement vise à rectifier une injustice que subissent les Français non-résidents établis en Polynésie française. Ils sont affiliés à un régime obligatoire de protection sociale, la caisse de prévoyance sociale, et leur domicile fiscal n'est pas en France. Pourtant, ils ne sont pas exonérés de CSG – contribution sociale généralisée – ni de CRDS – contribution au remboursement de la dette sociale – , ce qui fait qu'ils sont soumis à une double imposition.
Cette inégalité de traitement est d'autant plus importante que la loi de financement de la sécurité sociale pour 2019 du 3 décembre 2018 prévoit une exonération de ces prélèvements pour les Français résidant au sein de l'espace économique européen et en Suisse.
Les articles 1 et 6 de la Déclaration des droits de l'homme et du citoyen de 1789 posent le principe d'égalité devant la loi fiscale : le même régime fiscal doit s'appliquer à tout contribuable placé dans une situation identique. Par ailleurs, la Polynésie française et l'État ont signé en 1957 une convention fiscale tendant à éliminer les doubles impositions et à établir des règles d'assistance mutuelle administrative pour l'imposition des revenus de capitaux mobiliers. Or cette convention ne couvre ni la CSG ni la CRDS, ces cotisations sociales n'ayant été respectivement créées qu'en 1991 et 1996.
L'objet de cet amendement est donc de corriger cette inégalité de traitement entre les Français, qu'ils soient établis dans l'hexagone ou dans les pays et territoires d'outre-mer.
L'amendement no 1304 , repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
Cet amendement a été déposé par Julien Dive.
Le foncier non bâti, qu'il s'agisse des terres arables, des prairies, des zones humides ou encore des forêts, constitue une ressource indispensable à la fois pour la biodiversité et pour l'environnement. Il fait toutefois l'objet d'une taxation extrêmement défavorable, ce qui a pour conséquence une tendance à artificialiser les terres dans l'objectif de les vendre au prix des terrains à bâtir.
Dans ma circonscription, la pension de retraite d'un agriculteur est en moyenne de 750 euros net par mois, ce qui fait que les retraités agricoles ont besoin de revenus complémentaires. C'est précisément pour ces retraités qu'il est indispensable d'adapter les prélèvements sociaux grevant les revenus fonciers issus de la mise en location de leurs terres.
Aligner les taux de prélèvements sociaux de ces revenus fonciers sur ceux appliqués aux retraités permettrait de mieux prendre conscience de la vraie nature de ces revenus, celle d'un complément de retraite et non d'un investissement à caractère patrimonial. Je précise qu'afin d'éviter une dénaturation de cette mesure, qui ne doit bénéficier qu'aux propriétaires les plus modestes, il faut circonscrire le bénéfice des taux réduits de CSG aux revenus fonciers inclus dans un seuil de revenu global.
Les bailleurs ruraux ont un rôle important pour le renouvellement des générations en agriculture et l'installation des jeunes. Il est nécessaire de donner envie à ces propriétaires de louer par bail rural leur foncier à des jeunes qui veulent s'installer. Pour cela, il est proposé d'abaisser à 3,8 % le taux de la contribution sociale généralisée sur les revenus fonciers tirés de la location de terres par bail rural à un jeune ayant suivi le dispositif à l'installation et exploitant une surface totale inférieure à 1,5 fois le seuil de surface défini par le schéma directeur régional des exploitations agricoles – SDREA.
Notre foncier bâti, très divers, est une ressource précieuse, notamment pour le maintien de la biodiversité. Il serait injuste de continuer à lui appliquer une taxation très défavorable, qui se traduit pour certains propriétaires par la tentation de vendre leurs biens au prix de terrains à bâtir. Si nous voulons sauver notre agriculture et favoriser l'installation de jeunes exploitants, nous devons adopter cette proposition.
Cet amendement identique, que j'ai déposé avec Hervé Pellois, vise donc à abaisser à 3,8 % le taux de la CSG sur les revenus fonciers tirés de la location de terres par bail rural à un jeune ayant suivi le dispositif à l'installation et exploitant une surface totale inférieure à 1,5 fois le seuil de surface défini par le SDREA. Il faut donner envie aux propriétaires ruraux de louer leur foncier par bail rural à des jeunes cherchant à s'installer. Cela réduira la tension sur les prix du foncier, appelée à s'accroître au cours des prochaines années en raison d'un départ massif à la retraite d'exploitants agricoles. On estime qu'à l'heure actuelle, plus de 130 000 exploitants sont âgés de plus de 55 ans, que le foncier qu'ils possèdent représente un quart de la surface agricole utile française et que les deux tiers d'entre eux n'ont pas encore de repreneur identifié.
Ces amendements ont été repoussés par la commission pour plusieurs raisons, à commencer par celle de leur coût. Si celui de l'amendement no 857 n'est pas chiffré, on sait que la création d'un nouveau taux de CSG à 6,6 % sur les revenus de remplacement des retraités avait conduit à un effort public de 1,5 milliard d'euros. Cette seule moitié de votre amendement coûterait donc environ 1 milliard car, si le point de CSG a une valeur cinq fois moindre sur les revenus du patrimoine que sur les revenus de remplacement, l'assiette que vous proposez est trois fois plus large.
L'abaissement de la CSG sur les revenus de remplacement, que nous avons voté il y a deux ans, porte déjà sur le revenu fiscal de référence, qui lui-même intègre les revenus fonciers dans son calcul. Ce dispositif répond donc déjà à votre préoccupation concernant les agriculteurs les plus modestes, tout en excluant ceux dont les ressources patrimoniales ne justifient pas l'application d'un taux réduit. C'est pourquoi j'émets un avis défavorable sur cet amendement.
Pour ce qui est des amendements nos 713 et 1018 , la justification d'un seuil dérogatoire à la CSG relève toujours de conditions de revenus spécifiques. Or l'abaissement de taux que vous proposez s'appliquerait à l'ensemble des exploitants agricoles, qu'ils soient aisés ou beaucoup plus modestes, pourvu qu'ils louent leurs terres. Une telle disposition créerait donc un énorme effet d'aubaine. Avis également défavorable.
Lors du débat de la semaine dernière sur le PLF, nous avons déjà évoqué la question de la fiscalisation des revenus fonciers agricoles. L'avis du Gouvernement sur des amendements similaires à ceux que nous examinons avait été défavorable, pour des raisons très proches de celles évoquées par M. le rapporteur général. Cela avait été l'occasion de souligner que, dès lors qu'il y a plus de départs à la retraite que d'entrants dans le secteur de l'agriculture, la tension se trouve plutôt du côté des propriétaires, qui peuvent avoir du mal à louer. Ce n'est pas en les faisant bénéficier d'un régime fiscal ou social favorable qu'ils trouveront plus facilement des candidats à la location de leurs terres. Avis défavorable.
Tout en sachant que certains de nos collègues sont beaucoup plus compétents que moi sur cette question du foncier agricole – je pense par exemple à Julien Dive ou, de l'autre côté de l'hémicycle, à Dominique Potier – je me permets d'intervenir pour évoquer une réalité qu'on ne peut nier, celle des cessions de foncier agricole qui passent sous les radars, évitant ainsi le contrôle de la société d'aménagement foncier et d'établissement rural – SAFER. Afin de limiter ce phénomène préoccupant, pour ne pas dire ce fléau qu'est l'accaparement des terres par des sociétés étrangères – certaines vont jusqu'à rapatrier à l'étranger les productions obtenues sur les terres françaises – nous devrions inciter les agriculteurs partant en retraite à conserver leurs terres plutôt qu'à les vendre, comme nous le faisons actuellement : j'y vois une question mettant en jeu notre souveraineté.
Sur l'amendement no 356 , je suis saisie par les groupes Socialistes et apparentés et Gauche démocrate et républicaine d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Je suis saisie de quatre amendements, nos 658 , 791 , 1120 et 356 , pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 658 , 971 et 1120 sont identiques.
La parole est à Mme Marine Brenier, pour soutenir l'amendement no 658 .
Le présent amendement vise à étendre l'exonération de cotisation patronale aux actions gratuites attribuées par des entreprises de taille intermédiaire – ETI.
Cet amendement faisant l'objet d'un scrutin public que je n'avais pas demandé, je vais le présenter. Il s'agit d'étendre l'exonération de cotisations patronales aux actions gratuites attribuées par les entreprises de taille intermédiaire au sens de l'article 51 de la loi 2008-776 du 4 août 2008. Je précise que, contrairement aux amendements qui le précèdent, mon amendement ne propose pas une substitution, mais une extension de l'exonération existante.
L'avis est défavorable aux amendements identiques visant à remplacer les PME par des ETI, les premières n'ayant pas vocation à être exclues de ce dispositif.
L'amendement n° 356 ne présente pas le même inconvénient, puisqu'il intègre les ETI dans le dispositif sans en exclure les PME. Il me semble toutefois qu'il aurait vocation à être présenté dans le cadre du PLF plutôt que dans celui du PLFSS, compte tenu notamment de la nécessité de compenser cette exonération, si elle venait à être adoptée. Je vous invite donc à retirer cet amendement, qui aura plus sa place dans le PLF.
Même avis défavorable sur les trois premiers amendements, pour les mêmes raisons. Pour ce qui concerne le no 356, j'en demande de retrait en indiquant qu'un amendement sera proposé par le Gouvernement en deuxième partie du PLF pour, comme vient de l'évoquer M. le rapporteur général, résoudre ce problème et prévoir la compensation auprès de la sécurité sociale.
Je le maintiens, madame la présidente, car je ne comprends pas les arguments invoqués.
Cet amendement a aimanté mon regard, car une sorte de passion saugrenue s'est emparée de la majorité depuis déjà quelque temps en faveur des actions gratuites. Un amendement adopté au débotté dans un précédent PLFSS a déjà ramené le taux applicable à ces actions de 30 % à 20 %. La logique était celle d'un contournement du salaire au profit d'une forme de rémunération assez étonnante, qui profite principalement à des gens qui ont déjà une rémunération relativement élevée.
Vous choisissez à nouveau aujourd'hui une logique d'exonération galopante, qui prive la sécurité sociale de ressources et dont les objectifs sont discutables et contestables. Je ne me satisfais donc pas, monsieur le ministre délégué, que vous ayez l'intention de réintroduire cette mesure dans le PLF si elle n'était pas approuvée cette fois-ci. Nous nous opposons fermement à cette logique et à l'extension aux ETI d'un dispositif que nous contestons de manière générale. Je ne vois pas comment vous pouvez le justifier.
C'est la cerise sur le gâteau – le gâteau des actionnaires, bien sûr, pas celui des RMIstes ! Cette mesure, qui n'a pas d'étude d'impact, coûtera des millions, alors que le déficit de la sécurité sociale est abyssal. Quand il s'agit de diminuer les prélèvements sur les retraites, de pérenniser des exonérations pour les agriculteurs, de verser des primes aux éducateurs des maisons d'enfants à caractère social et aux assistantes maternelles, c'est toujours impossible ; mais quand il s'agit de rémunérer les actions, tout devient possible, et peu importe le déficit de la sécurité sociale ! Ça ruisselle, ça ruisselle grave pour les actionnaires ! Voilà votre vrai visage : pour cela, il y a toujours de l'argent.
Mme Caroline Fiat applaudit.
Je n'ai pas compris l'argument du rapporteur général, qui expliquait qu'une exonération de charges ne relevait pas du PLFSS. Peut-être pourra-t-il nous éclairer, car cela me paraît important.
Pour ce qui concerne les PME, ce levier a fonctionné. Nous déplorons tous que les ETI soient en nombre insuffisant – il suffit de comparer la matrice des entreprises en Allemagne et en France. Cette mesure est un bon moyen d'encourager l'actionnariat dans les ETI et il est dommage que la réponse ait été un peu lapidaire.
Je le répète : il est important, si nous voulons avancer sur cette question – et nous venons d'avoir un engagement du ministre délégué – de le faire plutôt dans le cadre du projet de loi de finances, ce qui permettra une juste compensation pour le budget de la sécurité sociale. Je ne doute pas que ce point rencontrera l'attention de chacun sur ces bancs.
J'insiste sur ma demande de retrait. La question sera traitée dans la deuxième partie du PLF, comme l'a dit le rapporteur général, avec un engagement de compensation pour la sécurité sociale et un mécanisme de sécurisation juridique de l'entrée en vigueur de ces dispositions. À défaut de retrait, j'émettrais malheureusement un avis défavorable.
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 142
Nombre de suffrages exprimés 138
Majorité absolue 70
Pour l'adoption 29
Contre 109
L'amendement no 356 n'est pas adopté.
Cet amendement tend à revenir sur l'allègement de la fiscalité sur les actions gratuites, entériné par la majorité à l'occasion du PLFSS pour 2018 sans aucune étude d'impact. En effet, au moment de débats en séance, la perte de recettes a été chiffrée à 120 millions d'euros par an.
À l'inverse, nous faisons des propositions pour créer de nouvelles ressources et permettre de financer des prestations sociales utiles pour nos concitoyens. Le dispositif d'actions gratuites, qui permet, comme son nom l'indique, l'attribution gratuite d'actions, concerne essentiellement des salariés très bien rémunérés de grands groupes et des dirigeants.
Nous pensons qu'il existe d'autres priorités : la revalorisation des pensions de retraite, des allocations familiales ou des aides personnalisées au logement. Outre qu'elles ont un coût non négligeable pour les finances sociales, les actions gratuites sont un outil de contournement du salaire qui profite à une minorité. C'est pourquoi nous proposons de ramener la contribution patronale au taux de 30 %.
La parole est à M. Joël Aviragnet, pour soutenir l'amendement no 1147 .
Avis défavorable pour cet amendement, qui va dans le sens inverse de la distribution de la valeur au sein des entreprises et qui conduirait, en outre, à augmenter la fiscalité de ces dernières, qui n'en ont pas besoin en ce moment.
Défavorable.
Je soutiens les amendements qui viennent de nous être exposés, car il faut que nous fassions des pas de géant pour comprendre – plus vite, si possible – que la politique que nous menons depuis trente ans est morte et mortifère.
« Quarante ! » sur quelques bancs du groupe LaREM.
Quarante si vous voulez, c'est à peu près la même chose. Avec ce que nous voyons tous les jours dans nos territoires, et même à Paris, il est insupportable de faire toujours des cadeaux aux mêmes. Je soutiens donc ces amendements, pour les raisons qui viennent de nous être indiquées.
Mme Jeanine Dubié et M. Joël Aviragnet applaudissent.
C'est autant le médecin que le rapporteur général qui s'exprime pour vous rappeler, monsieur Lassalle, qu'il convient de porter le masque. Nous avons tous ici un devoir d'exemplarité : chaque fois que nous nous exprimons, nous devons porter le masque sur la bouche et sur le nez.
Je suis saisie de deux amendements, nos 1926 et 1930 rectifié , qui peuvent faire l'objet d'une présentation groupée.
La parole est à Mme Delphine Bagarry, pour les soutenir.
L'amendement no 1930 rectifié est un amendement de repli par rapport au no 1926. Dans son rapport sur la protection sociale des travailleurs indépendants, le Haut conseil du financement de la protection sociale fait le constat que la plupart des indépendants, qu'ils soient micro-entrepreneurs ou indépendants classiques, ont une faible capacité à dégager des revenus, notamment dans leurs premières années d'activité. Ces difficultés se révèlent encore plus prégnantes cette année, où le confinement a réduit à zéro le revenu de certaines entreprises ayant parfois vu le jour seulement quelques jours ou quelques semaines auparavant.
Ces entrepreneurs se trouvent aujourd'hui face à une situation d'autant plus injuste que l'aide aux créateurs et repreneurs d'entreprise, qui assure aux personnes concernées une exonération partielle de cotisations sociales, ne prévaut que pendant un an. Cet amendement vise donc à allonger le bénéfice de l'ACRE, afin qu'à l'avenir, l'exonération de charges au profit des indépendants dure au moins trois ans, comme c'était le cas auparavant.
L'amendement de repli no 1930 rectifié propose de porter à deux ans la durée du bénéfice de cette mesure, ce que préconise également le Haut conseil de la protection sociale dans ce même rapport de septembre 2020 sur la protection sociale des travailleurs indépendants.
Je soutiendrai totalement la position que vient de défendre notre collègue. Voilà une bonne démarche ! S'ils manquent d'idées, ceux à qui on ne cesse de faire des cadeaux pourraient créer une grande fondation pour aider les jeunes entrepreneurs ou micro-entrepreneurs à prendre leurs premiers marchés, à faire leurs premières démarches dans le maquis dans lequel ils se trouvent et dans la situation que nous vivons. Imaginez comment cela pourrait marcher si quelqu'un ayant une telle puissance de feu le faisait.
Je marchais avant vous, en faisant moins de tapage ! J'ai fait 6 000 kilomètres, pendant que vous restiez chez vous.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
J'ai mis neuf mois pour le faire, tandis que l'autre, il a fait deux fois le tour du salon, il a dit « En marche », et ça a marché.
Rires.
Protestations sur quelques bancs du groupe LaREM.
Il faut dire les choses, sinon on fait semblant de parler.
Je soutiens cette démarche, parce qu'en faisant une fondation de ce type, ce capitaliste, au lieu d'être obligé de se cacher avant de voir ses enfants s'entre-tuer sur sa tombe, entrerait peut-être un jour au Panthéon.
Sourires.
J'ajoute que ces entrepreneurs qui ont de bas revenus ne bénéficient pas, comme les salariés, des allégements que nous avons votés en début de mandature. De ce fait, il existe une vraie différence entre les micro-entrepreneurs qui ont de bas revenus et les salariés de bas salaires.
C'est encore plus prégnant maintenant et il me semble que l'on pourrait en appeler à la solidarité nationale, voire à la solidarité professionnelle, en faisant en sorte que les entrepreneurs qui ont les revenus les plus élevés puissent contribuer. Cela me semble être une question de justice et d'équité envers tous les travailleurs français.
M. Jean Lassalle applaudit.
Les amendements nos 1926 et 1930 rectifié , successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.
La désertification rurale ne concerne pas uniquement les services publics ou les médecins, elle touche aussi les vétérinaires. L'objectif de cet amendement est de faciliter l'exercice des vétérinaires d'élevage retraités en les faisant bénéficier d'une exonération de cotisations sociales dès lors que les revenus annuels qu'ils tirent de leur activité n'excèdent pas 45 000 euros.
Je veux saluer l'action du Gouvernement qui, pour lutter contre la désertification vétérinaire, a ouvert une nouvelle voie d'accès aux écoles vétérinaires dans Parcoursup. Il ne s'agit toutefois que d'une solution de moyen ou long terme. En attendant l'augmentation du nombre de professionnels formés, je propose une solution de court terme pour les vétérinaires d'élevage, qui sont les garants de la sécurité sanitaire, animale d'abord, et de l'alimentation ensuite.
La commission a déjà repoussé un amendement à la rédaction quasi-identique. Pour les mêmes raisons – inefficacité du dispositif, effets d'aubaine, nécessité de limiter les niches sociales – l'avis sera à nouveau défavorable.
Défavorable.
Je veux soutenir mon collègue : avec le rapporteur général, il y a toujours quelque chose qui ne va pas ! Les vétérinaires sont une espèce en voie d'extinction et je me réjouis comme vous, monsieur Daniel, qu'on ait entrepris d'en former davantage – plus rapidement que les médecins, je l'espère. J'ai la chance d'avoir toujours été soigné par un vétérinaire, ce sont des praticiens au diagnostic solide qui sont quand même ceux qui s'y connaissent le mieux en espèce animale !
Rires.
On retrouve là la même problématique qu'avec la désertification médicale. Beaucoup de filles entreprennent des études vétérinaires, elles y réussissent très bien et c'est tant mieux. Mais comme leurs homologues médecins, elles préfèrent souvent faire des mi-temps et sont moins investies dans les territoires ruraux, d'où le malaise souligné par M. Daniel. Les cabinets sont aussi de plus en plus importants, ce qui fait que les vétérinaires doivent effectuer de longs trajets : à chaque fois qu'ils font 80 kilomètres, c'est autant de temps où ils ne soignent pas les animaux. Il faut que le Gouvernement prenne toute la mesure de ce problème. Je suis très favorable à cet amendement.
L'amendement no 1076 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Delphine Bagarry, pour soutenir l'amendement no 2192 .
Nous en revenons là au financement de la cinquième branche. Dans son rapport La branche autonomie : périmètre, gouvernance et financement, Laurent Vachey appelle à limiter l'exonération de cotisations sociales des aides à domicile aux seules personnes en perte d'autonomie, ou l'ayant déjà perdue. C'est ce que fait cet amendement en supprimant le critère d'âge.
Nous considérons que cette mesure de justice sociale permettrait aussi de lutter contre l'âgisme : l'âge ne range pas automatiquement une personne dans une situation incapacitante. En outre, elle contribuerait à une juste répartition de l'effort entre cotisants sans pénaliser les personnes dépendantes.
Votre amendement est quelque peu insolite, puisqu'il consiste à supprimer une exonération de cotisations sociales, en l'occurrence pour les personnes âgées de plus de 70 ans.
Nous avons largement débattu en commission et dans l'hémicycle du soutien aux aides à domicile : votre amendement contribuerait à diminuer nettement leur employabilité. Il ajouterait à l'inverse une charge pour nos aînés alors même que cette exonération est déjà limitée par un plafond de 650 euros. Avis défavorable.
L'amendement no 2192 , repoussé par le Gouvernement, n'est pas adopté.
Je suis un petit peu têtue, ça n'est que la quatrième fois que je présente cet amendement. Mais je sens que cette année, ce sera la dernière et que vous allez le voter, d'autant plus qu'il concerne la priorité de ce quinquennat.
En France, les femmes gagnent en moyenne 24 % de moins que les hommes. L'an dernier, on pouvait considérer qu'à partir du 5 novembre, en raison des inégalités salariales, les femmes travaillaient bénévolement jusqu'au 31 décembre. Elles représentent 80 % des travailleurs pauvres et sont touchées de plein fouet par la course à la précarisation. Malgré les lois successives en matière d'égalité professionnelle, les écarts de salaires cessent de se réduire.
Face à ce constat inadmissible, nous proposons de supprimer les exonérations de cotisations sociales patronales pour les entreprises ne respectant pas leurs obligations en matière d'égalité salariale. Non seulement celle-ci est nécessaire par principe, mais en améliorant les conditions de vie de nombreuses personnes, elle contribuerait à renflouer les caisses de la sécurité sociale gravement mises à mal par les mesures d'austérité et les dispositifs d'exonération des gouvernements successifs.
N'oublions pas que pendant le confinement, beaucoup de femmes n'étaient pas chez elle mais sur leur lieu de travail habituel, raison supplémentaire pour que leur salaire ne soit pas inférieur à celui des hommes.
Faisons donc en sorte que les employeurs ne jouant pas le jeu ne puissent bénéficier d'exonérations de charges.
Demande de retrait ou avis défavorable, madame Fiat. D'abord, l'élaboration d'un plan, à défaut d'un accord, sur l'égalité professionnelle est déjà une obligation d'ordre public dans le code du travail. Ensuite, le cumul que vous opérez entre une sanction – qui de surcroît existe déjà – et une conditionnalité va à l'encontre du principe selon lequel on ne sanctionne pas le même fait par deux moyens différents. Enfin, pour revenir sur les modalités de sanction elles-mêmes, les entreprises, depuis 2018, sous l'action de notre majorité, sont désormais tenues de publier un index de l'égalité entre les femmes et les hommes et de respecter une série d'indicateurs, faute de quoi l'employeur peut être sanctionné dans des proportions allant jusqu'à 1 % du montant des salaires versés sur une année. Votre intention me semble donc déjà satisfaite.
Même avis pour les mêmes raisons.
Eh bien, ce code du travail, devenu si volumineux, il n'y a qu'à le foutre en l'air et en écrire un autre. Je ne sais combien il pèse, tant il contient d'âneries dépassées. C'est incroyable ! Pour que ma collègue n'ait pas à revenir une cinquième fois défendre une cause aussi évidente que celle de l'égalité des salaires, je voterai son amendement.
Chers collègues, pour que vous compreniez bien, je vais lire la disposition que nous proposons d'ajouter dans le code de la sécurité sociale : « La réduction est supprimée lorsque l'employeur n'a pas conclu d'accord ou de plan relatif à l'égalité professionnelle dans le cadre des obligations définies aux articles L. 2242-1 et L. 2242-3 du code du travail. » Autrement dit, il ne s'agit que des employeurs qui n'ont pas joué le jeu de l'égalité des salaires entre hommes et femmes !
À cette heure avancée, nous sommes dans cet hémicycle une majorité de femmes, preuve que nous sommes bien au XXIe siècle et que l'époque où les employeurs redoutaient d'embaucher des femmes de crainte qu'elles refusent de travailler après dix-huit heures est bien finie. J'ose donc espérer que cet amendement sera adopté. Il ne mange pas de pain. Son principe est simple : pas d'exonérations de charges en l'absence d'accord sur l'égalité salariale. Si vous voulez montrer que c'est bien la priorité du quinquennat, votez-le donc, chers collègues de la majorité ! Je ne comprendrais pas que vous ne le fassiez pas.
Mme Fiat a pratiquement tout dit. J'ajouterai seulement que l'égalité de salaires entre hommes et femmes rapporterait 6,5 milliards à la sécurité sociale, ce qui n'est pas rien.
Vous avez évoqué, monsieur le rapporteur général, les index publiés par les entreprises. A-t-on pu en tirer des conclusions ?
L'amendement no 123 n'est pas adopté.
La parole est à Mme Jeanine Dubié, pour soutenir l'amendement no 1020 .
Cet amendement de Jean-Félix Acquaviva a pour objet d'étendre les exonérations de charges patronales prévues pour les entreprises implantées en zone de revitalisation rurale – ZRR – à celles situées dans une zone de développement prioritaire – ZDP. Ce dernier dispositif, récemment créé par la loi de finances pour 2019, s'applique tout particulièrement à la Corse, île-montagne subissant un phénomène de double contrainte, où les entreprises subissent des surcoûts par rapport au continent pouvant représenter jusqu'à 9 % du chiffre d'affaires par an compte tenu des spécificités locales : étroitesse du marché, coûts du transport, difficulté de recrutement, surstockage.
Notre amendement tend d'une part à favoriser le développement économique et l'emploi dans ces zones et, d'autre part, à améliorer le dispositif nouvellement créé afin d'intensifier ses bienfaits en termes de nouvelles activités ou d'embauches sur l'île. Depuis sa création en effet, force est de constater qu'il ne rencontre pas un franc succès, car les avantages prévus sont de faible ampleur. Il faut l'aligner sur le dispositif des ZRR.
Précisons que notre excellent collègue Acquaviva est retenu en Corse car il doit présenter demain un nouveau dispositif de retraitement des déchets. Son amendement, que je soutiens, a été très bien défendu par Jeanine Dubié.
Madame Genevard, tout le monde sait ici votre exceptionnelle qualité de présidente de séance mais certains ignorent peut-être que vous avez présidé ces deux dernières années l'Association nationale des élus de montagne, poste ardu : si nos compatriotes sont déjà difficiles à vivre, nos montagnards le sont plus encore car ils se sentent menacés, un peu à l'image des marins, parce qu'ils affrontent tous les deux la nature – et la Corse a l'immense mérite de mêler montagne et mer. Vous avez accompli un excellent travail, madame la présidente, et à l'issue d'un week-end à Corte que vous n'oublierez jamais, vous avez su, sous les acclamations d'élus de tous bords, passer le relais à Jeanine Dubié qui, parce qu'elle est très secrète, n'aurait peut-être pas mis en avant ses nouvelles fonctions.
L'amendement no 1020 n'est pas adopté.
Sur l'amendement no 1931 rectifié , je suis saisie par le groupe Socialistes et apparentés d'une demande de scrutin public.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
La parole est à M. le ministre délégué, pour soutenir l'amendement no 1931 rectifié .
Le projet de loi d'accélération et de simplification de l'action publique – ASAP – a connu une issue positive en commission mixte paritaire – CMP – mais l'une de ses dispositions n'y a pas été examinée, puisqu'elle avait été adoptée conforme par les deux chambres. Or elle pose problème.
Elle consiste en effet à exempter de prélèvements sociaux tout avantage accordé par un employeur ou par un comité social et économique lorsqu'il se rattache à des activités sportives, sans aucune condition ni restriction. Il va de soi que le Gouvernement n'a nullement l'intention de remettre en cause l'objectif de développement du sport, notamment dans l'entreprise. Mais la doctrine administrative admet déjà, par tolérance, l'exemption de cotisations et de contributions sociales pour certains avantages accordés par les comités sociaux et économiques – CSE – à des fins sociales, culturelles et sportives.
Cette disposition du projet de loi ASAP tel qu'il est issu des travaux de la CMP se traduirait par l'octroi d'une exonération sans que soient pris en considération les critères sociaux dans l'attribution des avantages – critères pourtant nécessaires afin de respecter la vocation sociale des CSE. De plus, cette exonération se limiterait aux seuls avantages sportifs, à l'exclusion des autres avantages accordés par tolérance ministérielle dans le domaine de la culture et des loisirs ou dans le domaine social. Il en résulterait donc des difficultés d'interprétation : nul ne saurait en effet définir précisément ce qu'est un avantage accordé au titre du sport ou du sport-santé.
En 2018, un amendement avait déjà été retiré compte tenu de la difficulté à légiférer correctement sur ce sujet. Une mission d'inspection conduite en 2019 a montré que les tolérances actuelles sont larges et ne donnent pas lieu à contestation, et que si les avantages accordés par les comités sociaux et économiques – d'autant plus s'ils sont exclus de l'assiette sociale – ne sont pas encadrés, ils risquent de n'être qu'un substitut à des éléments de salaire.
Il faut donc faire preuve de prudence et clarifier les régimes d'exemptions de cotisations sociales appliqués aux avantages accordés aux entreprises. Lors de l'examen du PLF, j'ai rappelé la doctrine concernant le montant maximum des cadeaux accordés par les entreprises à leurs salariés en lien avec leur activité, et notamment la nécessité, à laquelle nous allons nous atteler, de clarifier le nombre de fois où ces avantages peuvent être accordés – par exemple selon le nombre d'enfants ou lors de fêtes familiales, entre autres.
Le même travail doit être effectué concernant le sport. La difficulté que nous rencontrons est la suivante : les conditions sociales d'accès à la prestation et surtout son éventuelle exemption de cotisations sociales ne font l'objet d'aucun encadrement, et le montant annuel de ces avantages n'est pas plafonné, ce qui présente le risque qu'ils se substituent à des éléments de salaire.
C'est pourquoi nous proposons de saisir l'occasion du PLFSS, avec quelques jours d'avance, pour remettre cette disposition en cause, disons les choses clairement, et travailler à un encadrement adéquat de manière à garantir les exemptions, déjà prévues dans la doctrine mais qui méritent sans doute d'être inscrites plus formellement dans la loi, sans prendre le risque d'un système qui ne soit ni plafonné ni conditionné.
Cet amendement vise à maintenir le droit en vigueur concernant l'assiette des cotisations sociales. En effet, l'article 37 bis du projet de loi ASAP issu du Sénat, la navette étant terminée, ouvrirait la voie, par son imprécision, à des stratégies d'optimisation de la part des entreprises, qui seraient préjudiciables aux ressources de la sécurité sociale et aux droits des salariés. Il prévoit en effet un abattement d'assiette pour toutes les dépenses engagées au titre de la pratique sportive des salariés. Or une doctrine administrative bien établie permet déjà d'exonérer ces dépenses engagées par les entreprises en faveur de la pratique sportive de leurs salariés lorsqu'elles sont encadrées, raisonnables et décidées par un comité d'entreprise distinct du dirigeant.
La mesure en question n'est donc pas satisfaisante et aurait pour seul effet d'appuyer au contentieux des pratiques abusives. C'est pourquoi il me semble parfaitement judicieux de rétablir la rédaction antérieure de la disposition relative à l'assiette des cotisations sociales. Avis très favorable.
Puisque je suis cité dans l'exposé sommaire de l'amendement, je me permets de revenir sur l'intention qui était la mienne à l'époque, en 2018. Il s'agissait bien de sécuriser le dispositif. Le ministre délégué a d'ailleurs rappelé que la doctrine administrative admet l'exonération de certains avantages « par tolérance », ce qui prouve bien que l'on peut s'attendre, en fonction des territoires et des modalités de contrôle, à des disparités, voire à des distorsions.
Outre la sécurisation du dispositif, ma proposition visait à élargir le champ de ses bénéficiaires, les entreprises de moins de cinquante salariés en étant aujourd'hui exclus.
Il ne s'agissait pas à l'époque de taxer ces avantages mais bien de les conforter. La prudence nous enjoint à rétablir le droit existant tout en tirant parti des conclusions de la mission d'inspection de 2019, dont je n'avais pas reçu les observations à l'époque.
Monsieur le ministre délégué, les deux chambres – le Sénat puis l'Assemblée – ont adopté, contre l'avis du Gouvernement, un amendement au projet de loi d'accélération et de simplification de l'action publique. Et, alors que la CMP tenue cet après-midi s'est montrée conclusive – je ne devrais pas le dire – vous proposez un amendement au PLFSS qui, en quelque sorte, percute le travail des deux chambres ? Au reste, nous ne connaissons pas encore les conclusions de la CMP, mais le cas échéant vous pourriez très bien déposer un amendement sur ce point lorsque nous aurons à les examiner.
Vous revenez donc sur la mesure visant à favoriser les activités sportives en excluant de l'assiette des prélèvements sociaux tout avantage accordé par un employeur ou un comité d'entreprise se rattachant à ce type d'activités.
Vous avez présenté plusieurs arguments mais, dans le contexte actuel où de nombreuses activités sportives sont soumises à des contraintes non négligeables en raison de la crise sanitaire, vous pourriez déposer un amendement constructif. Plutôt que cette simple opposition, c'est une solution alternative qu'il faut trouver, par exemple en précisant les contours de l'assiette sociale.
J'estime que votre façon de procéder en utilisant le PLFSS n'est pas très sport, si vous me permettez l'expression.
Vous mériteriez presque un carton jaune, mais le rejet de votre amendement suffira !
Je trouve l'argumentation du Gouvernement tout à la fois audacieuse et frileuse. Elle est audacieuse car, comme vient de l'indiquer M. Bazin, un amendement au projet de loi ASAP a été adopté et pourrait avoir fait l'objet d'un accord entre les deux chambres en CMP, au vu et au su de tous les parlementaires.
Elle est frileuse parce que voilà des années que nous débattons des avantages accordés au sport en entreprise. De quoi parle-t-on ? Tout simplement des dizaines de milliards d'euros que nous consacrons chaque année au remboursement des arrêts de travail liés à des maladies professionnelles et à des accidents du travail. Or dans toutes les entreprises qui encouragent l'activité physique et sportive, le taux d'absentéisme et le nombre d'arrêts de travail chutent – ce sont autant de gains pour la sécurité sociale.
Nous essayons d'avancer sur ce sujet. Une circulaire a été signée par les ministres compétents il y a quelques mois et l'amendement du sénateur Michel Savin a formalisé la disposition dans la loi. Je trouve regrettable que nous revenions en arrière à l'occasion du PLFSS et je voterai contre l'amendement du Gouvernement. S'il était adopté, j'invite le Gouvernement à reprendre le travail sur ce sujet, parce que les gains sont réels. Pourquoi toujours financer le curatif alors qu'il serait beaucoup plus intelligent de financer le préventif ?
Applaudissements sur quelques bancs des groupes LaREM et LT.
Je m'étonne de deux points. Le procédé, tout d'abord : M. Bazin a expliqué que la méthode employée est pour le moins surprenante. D'autre part, je ne peux pas m'empêcher de rapprocher les propos que je viens d'entendre de la décision envisagée par le Gouvernement et par le rapporteur général il y a quelques instants concernant les actions gratuites. Vous affirmez que la disposition sur laquelle vous souhaitez revenir encouragera les pratiques abusives, mais d'autres pratiques abusives vous choquent moins !
Je m'étonne un peu de cet amendement. Comme cela a été dit, nous ne savons pas ce qui s'est décidé en CMP : peut-être la disposition a-t-elle été modifiée, ou non. Quoi qu'il en soit, l'amendement du Gouvernement vise à rétablir l'état existant du droit, alors que le projet de loi ASAP avait introduit une nouveauté. Sans doute fallait-il la retravailler, mais pas au point de revenir à l'existant !
De surcroît, dans le cadre de la mission que le Premier ministre m'a confiée sur le financement du sport, j'ai alerté le Gouvernement sur le fait qu'en l'état actuel – même si vous parlez de « tolérance », monsieur le ministre délégué – les textes sont un frein au développement du sport en entreprise.
Mieux vaudrait donc retirer cet amendement pour le retravailler et trouver une solution intermédiaire entre la disposition adoptée dans le projet de loi ASAP, dont on peut entendre qu'elle est mal construite et doit être revue, et le retour en arrière que vous nous proposez aujourd'hui. Nous sommes tous d'accord pour rouvrir la discussion et trouver une solution, pas forcément pour rétablir le droit existant en passant outre les débats sur le projet de loi ASAP et la décision du Parlement. Je voterai donc contre l'amendement.
M. François Cormier-Bouligeon applaudit.
Que le procédé soit particulier, j'en conviens. Si je présente cet amendement ce soir, c'est aussi parce que nous avons une idée précise de ce qui a été discuté en CMP. Ce n'est pas une boîte noire, vous le savez : les uns et les autres peuvent évidemment poursuivre la discussion à l'extérieur, y compris après la séance.
Je conviens bien volontiers que la situation n'est pas confortable. Néanmoins, je préfère une situation inconfortable à une situation de risque. La disposition qui pourrait être issue des travaux de la CMP et qui a été adoptée conforme – ce qui permet de penser que la CMP, puisqu'elle est conclusive, ne l'a pas modifiée, puisque l'article voté conforme ne lui était pas soumis – autorise à donner de la clarté à sa lecture.
Cette disposition est risquée. Je ne le dis pas par plaisir et je n'enlève rien aux propos de M. Cormier-Bouligeon sur l'intérêt de la pratique du sport en entreprise et ses bienfaits en termes de prévention, mais le risque de contentieux existe, du fait notamment de l'absence de plafonnement. En outre, l'absence de conditions applicables à l'attribution de ce type d'avantages contrevient à la vocation sociale des comités sociaux d'entreprise.
Le danger juridique existe donc, à plusieurs niveaux. Mme Goulet propose le retrait de l'amendement pour qu'il soit retravaillé mais, à cause du phénomène d'entonnoir, je ne pourrai pas le redéposer tel quel au Sénat. Je préfère donc qu'il soit adopté et je m'engage, si c'est le cas, à mettre à profit la navette et le texte du PLFSS pour envisager des solutions. Nous rencontrons la même difficulté de rédaction que M. Christophe a connue en 2018, difficulté que confirme le rapport de l'inspection générale de l'administration – dont, mea culpa, je vous adresserai une copie, monsieur le député : comment circonscrire la disposition pour en assurer la sécurité juridique et la plafonner pour veiller à ce que les conséquences financières ne soient pas excessives et qu'il n'y ait aucun effet de substitution avec le salaire ?
Je ne vous propose pas d'adopter cet amendement afin de supprimer la disposition pour solde de tout compte : au contraire, nous devons poursuivre ce travail. Mais malheureusement, la disposition n'est pas calibrée juridiquement, et entraînerait présenterait un risque trop important. Voilà pourquoi j'appelle l'Assemblée à adopter cet amendement, et je m'engage à poursuivre le travail pour mieux définir la solution.
Nous allons procéder au scrutin. Sept orateurs se sont déjà exprimés : je regrette, monsieur Lassalle, mesdames Dufeu et Fiat, de ne pouvoir autoriser d'autres interventions.
Je mets aux voix l'amendement no 1931 rectifié .
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 133
Nombre de suffrages exprimés 113
Majorité absolue 57
Pour l'adoption 66
Contre 47
L'amendement no 1931 rectifié est adopté.
Prochaine séance, demain, à neuf heures :
Suite de la discussion du projet de loi de financement de la sécurité sociale pour 2021.
La séance est levée.
La séance est levée à minuit.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra