Nous allons nous prononcer dans un instant sur le vote des comptes sociaux de la nation. Les comptes sociaux, c'est le nom un peu barbare qui désigne l'effort collectif que notre pays choisit de consacrer tous les ans à la protection des Français face aux aléas de la vie. Protéger est un mot particulièrement adapté à la situation actuelle. Protéger et se protéger, c'est avant tout le combat des soignants face à la pandémie ; si je tiens une nouvelle fois à les remercier chaleureusement, nous devons aussi les aider et les soulager. Nul ne peut ignorer que la situation s'aggrave à nouveau de façon catastrophique.
La notion de protection a un corollaire : celle de responsabilité, c'est-à-dire le devoir de tous de protéger chacun, particulièrement les plus faibles. La responsabilité, c'est avoir le sens du bien commun ; c'est ce qui fonde le projet républicain et le contrat qui nous lie. Dans cette crise sanitaire qui nous touche tous, nous sommes et devons tous nous sentir responsables.
La réalité, c'est que nous avons parfois des débats très gaulois à propos de nos libertés. Nous les jugeons menacées ou en danger, nous en discutons souvent de manière passionnée en famille ou entre amis, nous en faisons même des tribunes. Nous vivons dans un pays où la liberté est inscrite au frontispice de nos mairies. Personne ne souhaite abdiquer sa liberté, et ce n'est pas un hasard si l'un de nos tableaux les plus célèbres est La Liberté guidant le peuple de Delacroix.
Dans ces temps troublés, n'oublions jamais que, comme l'a dit Victor Hugo, « tout ce qui augmente la liberté augmente la responsabilité ». Les interdictions, le couvre-feu, les conseils et le confinement ne sont que d'un effet médiocre sans la responsabilité. C'est la responsabilité de chacun pour respecter les gestes barrières, pour prendre des précautions parfois frustrantes, pour modifier ses façons de vivre, c'est la responsabilité de chacun qui, plus que des textes édictés dans l'austérité d'un cabinet, nous permettra de combattre collectivement cette pandémie. Il est de notre responsabilité de montrer l'exemple, de continuer à délivrer ce message de prévention, d'accepter les frustrations temporaires pour préserver la santé des plus fragiles. Il est de notre responsabilité de dire que cette épidémie n'est pas terminée, que nous avons encore des jours difficiles devant nous, que les efforts de chacun seront indispensables. Il est de notre responsabilité de dire que cette épidémie se combattra collectivement et qu'il est possible d'en venir à bout.
Le groupe Agir ensemble soutient donc pleinement le Gouvernement dans la mise en oeuvre de ce PLFSS. Certes, tout n'y est pas parfait, et je déplore que de trop nombreux amendements aient été jugés irrecevables ou même rejetés : certains points mériteront des ajustements.
Ainsi, nous aurions souhaité des engagements plus concrets au sujet de la chaîne du médicament. Il est urgent de prendre en compte les enjeux de l'attractivité, un préalable essentiel aux relocalisations, et il est tout aussi urgent de donner de la prévisibilité à l'ensemble du secteur par une programmation pluriannuelle. Le cas particulier des grossistes-répartiteurs est extrêmement inquiétant. Tous les ans, l'examen du PLFSS est pour nous l'occasion d'appeler l'attention sur leur situation mais, cette année, le modèle de régulation semble avoir atteint des limites, certains de ses acteurs se trouvant en très grande difficulté.
Pour ce qui est du Ségur, notre groupe souligne l'importance d'assurer une équité de traitement entre les secteurs dans la mise en oeuvre des revalorisations. Les acteurs du privé lucratif s'inquiètent à bon droit d'une éventuelle inégalité de traitement avec le public. Au demeurant, il faudra impérativement mettre en place un Ségur de la santé libérale et revoir la situation globale de ces professionnels qui n'ont pas démérité non plus face au covid-19.
Ce PLFSS n'en constitue pas moins à la fois une rupture et un début de rattrapage.
L'ONDAM pour 2020, à la hauteur de l'effort gigantesque de nos soignants, atteint 217 milliards d'euros. Il prévoit des revalorisations sans précédent en direction de l'hôpital et des EHPAD. J'ajoute que c'est une nouvelle promesse tenue du Gouvernement, pratiquement sans équivalent depuis des décennies.
La reprise de la dette hospitalière de 13 milliards d'euros est une excellente mesure venant mettre un terme à dix ans de gestion à courte vue de notre hôpital public, qui a dégradé la situation financière des établissements et empêché tout investissement dans les structures.
Cinq ans après la loi d'adaptation de la société au vieillissement – ASV – de 2015, la création d'une cinquième branche est une étape importante pour prendre enfin à bras-le-corps le défi du vieillissement et de la perte d'autonomie.
Dans le même temps, 150 millions d'euros s'ajoutant aux 80 millions d'euros destinés à la prime covid viendront renforcer dès avril 2021 l'attractivité des métiers du domicile. Je salue le travail de la ministre déléguée chargée de l'autonomie, Brigitte Bourguignon, dans ce qui constitue un progrès essentiel, tout en soulignant que ce n'est qu'un premier pas : pour bâtir un cadre rénové du domicile, nous attendons le Laroque de l'autonomie, mais surtout la loi relative au grand âge et à l'autonomie.
Le passage du congé de paternité à vingt-huit jours et le décalage de la prime de naissance constituent des progrès pour les familles. La branche famille a trop souvent été le parent pauvre du PLFSS ; ce n'est pas le cas cette année et il faut s'en féliciter.
Parce qu'il est urgent d'agir, le groupe Agir ensemble soutiendra pleinement cette loi de rattrapage. Il est cependant essentiel que les prochains PLFSS amplifient cette dynamique et donnent à notre système de santé les moyens nécessaires pour faire face aux enjeux sanitaires et sociaux du XXIe siècle.