Intervention de Gérald Darmanin

Séance en hémicycle du mardi 27 octobre 2020 à 15h00
Projet de loi de finances pour 2021 — Administration générale et territoriale de l'État ; sécurités ; contrôle de la circulation et du stationnement routiers

Gérald Darmanin, ministre de l'intérieur :

… qui gangrènent les quartiers et concernent toutes les classes d'âge. Leur trafic augmente à l'échelle nationale, européenne et mondiale. Indépendamment de leur trafic, les stupéfiants font naître une délinquance de droit commun : cambriolages, agressions physiques, atteintes aux biens, règlements de compte, traite d'êtres humains et, parfois, financement de l'islamisme radical et du terrorisme.

La troisième priorité est la lutte contre les violences faites aux femmes et aux enfants. Le Président de la République en a fait la grande cause de son quinquennat. Nous devons agir sans relâche à l'accueil des victimes, singulièrement des violences intrafamiliales, malheureusement plus nombreuses dans cette période particulière de confinement ou de couvre-feu.

Si la discussion parlementaire ne permettra pas d'entrer dans le détail de tous les crédits du ministère de l'intérieur, j'évoquerai néanmoins deux dimensions importantes. D'abord, nous continuons de créer des emplois. Le plan visant à créer 10 000 postes dans les forces de l'ordre au cours du quinquennat, voulu par le Président de la République, est en cours de réalisation puisque 2 000 emplois sont créés chaque année. En 2021, 1 500 le seront dans la police, avec un effort tout particulier pour la sécurité publique – les policiers que voient les Français dans la rue – et 500 dans la gendarmerie.

Les postes que le ministère délégué chargé des comptes publics souhaite supprimer le seront dans l'administration centrale. Car, pour la première fois depuis quinze ans, je réponds ici à M. Viala, aucun poste ne sera supprimé ni en Lozère, ni dans la Creuse, ni non plus dans aucun autre département. La Lozère est passée de 130 à 90 postes d'agents publics en dix ans, ce qui montre bien la difficulté de maintenir la puissance administrative dans une telle situation. Alors que le nombre de postes a diminué sous les deux précédents quinquennats, au lendemain du grand débat animé par le Président de la République, le Gouvernement a estimé qu'un retournement de la politique salariale était nécessaire.

Les conditions de travail des agents revêtent une importance particulière, notamment pour les forces de l'ordre. Cela a été notamment évoqué cet été à propos de l'opération « Poignées de portes », lors de l'examen des crédits que vous avez bien voulu voter. Les résultats ont été mis en ligne ; chacun peut constater sur le site du ministère de l'intérieur, territoire par territoire, commissariat par commissariat, brigade de gendarmerie par brigade de gendarmerie, quelles actions nous menons, cela jusqu'au 31 décembre.

En renforçant, par l'abondement de crédits très importants – hors titre 2, comme on dit – , les moyens matériels des forces de l'ordre, nous mettons fin à l'effet ciseaux si funeste pour le ministère de l'intérieur, d'une augmentation générale de la masse salariale sans augmentation des moyens. Il s'agit d'un changement de stratégie budgétaire : nous augmentons fortement les moyens matériels et contenons les moyens salariaux, tout en donnant, je tiens à le souligner, autant aux gendarmes qu'aux policiers. Certes, contrairement aux policiers, les gendarmes ne sont pas représentés par des organisations syndicales, mais cela ne m'empêche pas de discuter avec les représentants élus de la gendarmerie nationale. Comme les policiers nationaux, ils sont à l'écoute des propositions du ministre de l'intérieur et de sa ministre déléguée. Je m'adresse en particulier ici au rapporteur spécial chargé de la police et de la gendarmerie, que je rencontrerai d'ailleurs tout à l'heure ; nous aurons l'occasion d'évoquer ces avancées très importantes pour nos forces de l'ordre, policiers comme gendarmes.

Quelques exemples concrets : les crédits consacrés à l'achat de matériels et d'équipements vont augmenter de 21 millions d'euros, qui permettront à la gendarmerie l'achat de gilets tactiques, demandés depuis longtemps, et à la police celui de housses modulaires. Une enveloppe de 33 millions d'euros sera consacrée à des équipements attendus par les policiers et les gendarmes pour la fin de gestion. Nous avons prévu 213 millions d'euros pour l'achat de véhicules, un sur quatre devant être ainsi remplacé au lieu de un sur huit en temps « normal », et pour le renouvellement du parc lourd des policiers et des gendarmes qui participent au maintien de l'ordre, certains véhicules ayant plus de quarante ans.

Être ministre exige aussi de s'occuper du bien-être de ses agents et de leur protection sociale, c'est pourquoi l'action sociale augmente de 10 millions d'euros. C'est un geste historique, et je m'engage à augmenter également l'action sociale l'année prochaine. Le ministère de l'intérieur accusait un retard par rapport aux autres ministères dans l'accompagnement des forces humaines, si j'ose dire. Les nouvelles dépenses numériques ont été citées à maintes reprises. Le budget immobilier va augmenter quant à lui de 31 millions d'euros.

En outre, le ministère de l'intérieur va participer à deux appels à projets dans le cadre du plan de relance. Le premier concerne les opérations d'investissement : nous allons être candidats auprès de Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la relance, et d'Olivier Dussopt, ministre délégué chargé des comptes publics, pour un total de 1,63 milliard d'euros, c'est-à-dire quasiment un quart du plan de relance immobilier, afin de financer des projets immobiliers de police et de gendarmerie, dont vous êtes nombreux à me saisir. Nous espérons que Bercy sera attentif à ces dossiers, à la condition évidemment qu'ils correspondent aux volontés du Parlement et du Gouvernement. Parmi les opérations visées, 330 relèvent de la police, 472 de la gendarmerie, 611 de l'administration préfectorale et 32 de la sécurité civile.

Le second appel à projets est celui placé sous l'autorité de Mme Amélie de Montchalin, ministre de la transformation et de la fonction publiques. Au titre du plan de relance numérique, nous allons demander beaucoup d'argent, plus de 100 millions d'euros, afin de réaliser de grands projets tels que la carte d'identité électronique, le réseau radio du futur ou France alerte, ce dispositif qui, dans des situations comme celle de l'accident de Lubrizol, remplacera les sirènes par des moyens d'interpellation de la population bien plus efficaces.

Voilà en quelques mots ce que je souhaitais dire. J'aurai peut-être l'occasion de répondre aux interventions des députés pendant l'examen des amendements.

Je précise en attendant, en ce qui concerne les élections, monsieur Savignat, que la décision revient au Parlement : c'est lui qui a voté l'inscription dans la loi de la date de mars 2021. S'il fallait la changer, sur proposition du Gouvernement, seul le Parlement déciderait.

M. Batut a évoqué la question de la réserve de précaution. Je partage son opinion ; quand j'étais à Bercy, j'ai baissé les crédits de 8 à 3 %. J'avais défendu l'idée qu'il fallait éviter, dans les projets de budget pour 2021 et 2022, de ne geler que des crédits qui ne pourraient pas être « dégelés » par la suite. Je m'engage donc pour les prochaines années, à geler de vrais crédits, c'est-à-dire ceux qu'on peut vraiment dégeler, et non ceux alloués aux dépenses courantes, notamment dans la gendarmerie.

Enfin, je partage entièrement la position de M. Viala quant à l'accompagnement des associations agréées. J'ai augmenté le budget concerné quand je suis arrivé au ministère de l'intérieur et je travaille avec mon collègue ministre des solidarités et de la santé pour débloquer l'argent que nous devons effectivement à ces associations.

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