Devant la commission des affaires culturelles, j'ai évoqué un budget en trompe-l'oeil. Au regard des sombres perspectives qu'ouvre la crise sanitaire, ce propos n'a, hélas, rien de polémique. De fait, après la paralysie qu'elle a provoquée au printemps 2020, l'épidémie de covid-19 recèle la menace d'un l'effondrement de l'économie des sports et de la disparition de pans entiers du tissu associatif.
Aussi, j'invite le Parlement à sortir d'un volontarisme budgétaire de façade. Certes, le projet de loi de finances affiche une hausse des autorisations d'engagement de 5,5 % et des crédits de paiement de 12,5 %. Cependant, en réalité, cette dynamique comptable dissimule à peine le poids prépondérant de deux facteurs essentiels : d'une part, la croissance des crédits mobilisés en vue de la préparation des Jeux olympiques et paralympiques par le biais de la SOLIDEO ; à moindre degré, une obstination déraisonnable s'agissant du service national universel. En dehors de ces deux postes de dépense, le Gouvernement ne propose pas de réelles inflexions ni de nouveaux moyens dans le soutien apporté à la mission « Sport, jeunesse et vie associative ».
On m'objectera que le plan de relance pourvoira à tout puisque, d'après les engagements pris par le Gouvernement, il devrait en effet fournir au sport 120 millions d'euros supplémentaires et porter le nombre de missions effectuées au titre du service civique à 100 000. Toutefois, nous devons la vérité à ceux qui nous écoutent : France Relance constitue un instrument de financement ponctuel, dont les crédits pourraient d'ailleurs être consommés sur une période de deux ans.
S'agissant des missions du service civique, vous avez vous-même convenu devant notre commission, madame la secrétaire d'État, que la pérennisation de ces financements exigerait sans doute « un travail de conviction ».
S'agissant du programme 219, le montant des crédits de paiement marque en réalité une revalorisation médiocre des moyens affectés au sport puisque, à part un effort relatif pour les nouvelles maisons sport-santé, le PLF pour 2021 présente deux caractéristiques fondamentales : d'une part, une croissance du financement de la promotion du sport pour le plus grand nombre limitée à 1,22 % ; d'autre part, une stabilisation des crédits affectés au développement et même une légère baisse de 0,12 % en autorisations d'engagement.
En dehors de la place croissante prise par l'Agence nationale du sport dans l'animation des politiques publiques, je tiens ici à déplorer l'abaissement continu des plafonds d'emplois : en prévoyant 1 481 équivalents temps plein travaillés, ce PLF acte une nouvelle réduction du corps des conseillers techniques sportifs et, au-delà, accentue les mouvements de personnels qui, depuis plus d'une décennie, affaiblissent l'ensemble du ministère des sports.
Concernant le programme 163, le PLF pour 2021 se signale avant tout par un nouvel investissement inconsidéré dans le service national universel, avec comme objectif une cohorte de 25 000 volontaires. Or l'examen de la préfiguration réalisée en 2019 montre les lourdeurs organisationnelles de ce dispositif. Surtout, il pourrait demain susciter une dépense exorbitante alors que sa contribution à l'apprentissage à la citoyenneté et au sens de l'engagement reste à démontrer. Dans le contexte dramatique créé par la crise sanitaire, les ressources accaparées par le SNU pourraient être à l'évidence bien mieux employées, dans l'intérêt de la préservation des milieux associatifs et de l'engagement. Par contraste, les crédits du FDVA comme ceux du service civique stagnent. La dotation du FONJEP – le fonds de coopération de la jeunesse et de l'éducation populaire – bénéficie certes d'un petit million supplémentaire, une augmentation bien faible au regard des financements annoncés dans le plan de relance.
Sur bien des points, les travaux en commission le montrent, la programmation proposée appelle de profonds infléchissements. Par-delà les étiquettes et la loi d'airain du fait majoritaire, des convergences constructives sont possibles sur des diagnostics et des initiatives communes, fondées sur l'expérience du terrain : je pense ici à celles qui, à des degrés divers, manifestent l'intérêt à porter aux moyens d'intervention du fonds de développement de la vie associative. Le développement de la pratique d'une activité physique ou sportive constitue un enjeu de politique publique. Nous devons donc renouveler nos moyens d'action, ce qui implique d'évaluer le bilan de l'Agence nationale du sport mais aussi de favoriser l'accès aux clubs et aux associations sportives, par exemple au moyen d'un pass sport. C'est dans cette optique que je défendrai plusieurs amendements visant à employer au mieux les ressources du présent projet de loi de finances affectées au sport, à la jeunesse et à la vie associative.
À ce stade, au vu des doutes sur l'efficacité des crédits de cette mission et par opposition à certaines de ses priorités, j'émets, à titre personnel, un avis défavorable sur ce budget.