Voici ce matin le Gouvernement devant la représentation nationale pour soumettre à son approbation l'une des décisions les plus graves dont elle ait jamais eu à débattre. Il y a six mois, nous entrions en guerre contre cet ennemi invisible, venu de loin, qui a mis en quelques semaines la planète à genoux. Nous consentions une première fois à nous priver de nos libertés, à fermer nos écoles, à nous séparer de nos proches pour échapper à cette vague qui emportait tout sur son passage. Nous applaudissions nos soignants et nous comptions nos morts. Nous avons résisté, nous avons tenu, et nous avons cultivé l'espoir que le pire soit désormais derrière nous, que nous pourrions faire face en attendant un traitement, ou un vaccin.
Mais voici que l'Europe tout entière est en proie à une funeste réplique, avec une nouvelle déferlante aussi violente qu'inattendue ; voici la France et son Gouvernement placés devant un défi immense, celui de protéger les Français tout en assurant la continuité économique, sociale et politique de la nation. Sur cette ligne de crête, le Président de la République a fait le seul choix qui s'imposait, et à la vérité le seul qui nous restait : celui du reconfinement.
Ayons la lucidité de partager son constat, celui de l'aggravation exponentielle de l'épidémie. Ayons l'humilité de reconnaître qu'il n'y a pas de solution miracle. Le Président de la République en a fait hier la démonstration imparable : nos capacités de réanimation arrivent à saturation et ni un confinement sélectif, ni la meilleure stratégie de tests du monde ne suffiraient. Ils ne résoudraient rien. Nous devons être à la hauteur de nos responsabilités, au moment où tant de vies humaines sont en jeu. Au pays de l'humanisme et des Lumières, on ne transige pas avec la vie humaine.
Le Premier ministre nous a présenté la façon dont il entend mettre en oeuvre ce confinement. Les députés du groupe Mouvement démocrate MoDem et démocrates apparentés en approuvent les grands principes. Principe de généralité : pour que la règle soit comprise et que les Français y consentent, elle doit être la même partout, à Versailles comme à Bordeaux, et appliquée avec équité. Principe de continuité, économique et pédagogique : les écoles restent ouvertes, le travail continue grâce au maintien des dispositifs de soutien ; nous ne rendons pas les armes et le pays avance. Principe de réactivité enfin, car le dispositif sera adapté au fil de l'eau pendant les cinq semaines qui nous séparent du 1er décembre.
Vous avez souhaité présenter le détail et le contour de ces mesures au Parlement et solliciter son vote. Nous saluons cette initiative. Comme le veut la Constitution : « Le Parlement vote la loi. Il contrôle l'action du Gouvernement. Il évalue les politiques publiques. » L'Assemblée nationale n'a pas manqué à son devoir depuis les débuts de la crise. Les députés se sont pleinement mobilisés pour amender et voter les textes d'urgence, pour habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnances parfois, mais pour contrôler son action toujours, pour veiller à ce que les mesures de soutien soient appliquées dans leurs circonscriptions et pour faire remonter les difficultés rencontrées. Nous continuerons de le faire, jusqu'au bout, car nous ne gagnerons cette guerre qu'à condition que le peuple français y soit associé, par l'intermédiaire de ses représentants.
Vous allez voir défiler, à cette tribune, sur les réseaux sociaux, sur les chaînes d'information en continu, le long cortège des critiques avisés, des procureurs en verve, des professionnels de la profession et des faux prophètes. Vous les entendrez se perdre dans de vains réquisitoires.