Intervention de Jean-Louis Bricout

Séance en hémicycle du vendredi 6 novembre 2020 à 15h00
Adaptation au droit de l'union européenne en matière économique et financière — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Bricout :

Ce texte d'adaptation du droit de l'Union européenne contient des dispositions diverses et porte sur la transposition de quinze directives et l'adaptation de onze règlements européens. Cela méritait peut-être mieux qu'un texte balai composé de dispositions qui n'ont rien à voir les unes avec les autres : il y est question de protection des consommateurs, de douanes, de systèmes financiers, de lutte contre le blanchiment de capitaux, de financement du terrorisme, de gestion du fonds européen agricole pour le développement rural – FEADER – , d'autorité de la concurrence, de droit d'auteur et droits voisins, de médecine vétérinaire, etc.

Ce projet de loi n'est justifié que par la nécessité de respecter les délais de transposition, ce qui est impératif pour des textes européens dont certains datent de plus de trois ans. Il met en lumière, dans certains cas, les retards de la politique du Gouvernement dans l'intégration de ces directives et règlements en droit français. Le projet de loi escamote le débat, et ne procède pas toujours à une transposition législative en bonne et due forme. En effet, il renvoie à de nombreuses ordonnances : quatorze articles sur vingt-huit demandent une habilitation en ce sens. Cette place prépondérante laissée au pouvoir réglementaire ne plaide pas en faveur de la publicité des débats et de la démocratisation des enjeux liés à l'Union européenne.

Ce texte nous revient en nouvelle lecture après l'échec de la commission mixte paritaire qui a mis en lumière le fait qu'il restait au moins deux points de désaccord entre l'Assemblée et le Sénat. Tout d'abord, l'article 24 sur la gestion du FEADER vient habiliter le Gouvernement à légiférer par ordonnances, afin d'attribuer la gestion des aides surfaciques et non surfaciques aux régions. En dépit de l'opposition initiale du Sénat, gardien traditionnel des prérogatives des collectivités territoriales, il semble que la nouvelle rédaction de l'article convienne désormais à nos collègues sénateurs.

A également fait débat la suppression par l'Assemblée de l'article 4 bis, introduit au Sénat, à l'unanimité des groupes, à partir d'une proposition de loi sur le libre choix du consommateur dans le cyberespace. Afin de débloquer la situation, le rapporteur du Sénat a proposé un compromis en CMP, que le rapporteur de l'Assemblée a refusé au motif d'un risque d'insécurité juridique.

En tout état de cause, ces questions importantes relatives aux services numériques méritaient sans doute mieux qu'une transposition dans un article additionnel et auraient à elles seules justifié l'examen en séance d'un texte dédié. Certes, rien n'interdit que la législation française anticipe l'action du législateur européen ; néanmoins, pour des raisons de cohérence, il ne serait pas absurde d'attendre que la Commission européenne ait présenté sa proposition : cela permettrait de mieux cadrer les propositions législatives nationales que l'une des deux chambres du Parlement français souhaiterait voir adopter.

Compte tenu de mes remarques préliminaires sur la nature de ce texte et des nombreux inconvénients qu'il comporte à côté de certaines dispositions utiles, le groupe Socialistes et apparentés s'abstiendra.

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