Nous sommes confrontés à un choc économique sans précédent dû à la pandémie de covid-19. L'examen de ce PLFR 4 intervient dans un contexte d'urgence et de grande incertitude pour l'économie française. Le coût global de la crise sanitaire est estimé cette année à 186 milliards d'euros, dont 100 milliards de pertes de recettes et 86 milliards de mesures d'aides d'urgence. Évidemment, le PLF pour 2021, qui avait pour but d'accompagner le déploiement du plan de relance, devient littéralement caduc, et les prévisions financières qui le sous-tendent sont anachroniques. Nous déplorons qu'aucun scénario de deuxième, voire de troisième vague ne soit formulé en amont – cela nous éviterait peut-être les lois de finances rectificatives successives à examiner en urgence.
Même après le net rebond observé au troisième trimestre, la reprise, fragile dans notre conjoncture déjà très volatile, se heurte au choc de la deuxième vague, qui ébranle encore davantage nos entreprises. Bien sûr, dans ce contexte, nous ne pouvons que soutenir fermement les nouvelles mesures sociales annoncées et l'effort d'élargissement des dispositifs d'accompagnement de nos entreprises, dont beaucoup sont au bord de la faillite. En ce sens, nous saluons naturellement le relèvement de 10,9 milliards d'euros des crédits du fonds de solidarité, les nouvelles exonérations de cotisations sociales à hauteur de 3 milliards d'euros et la hausse de 3,2 milliards d'euros du dispositif d'activité partielle.
Cette pandémie fait vaciller des pans entiers de notre économie ; les suppressions d'emplois et les faillites annoncées ne sont que la partie émergée de la crise, nos PME-TPE souffrent en silence mais elles n'en disparaîtront pas moins par milliers.
À cet égard, comme notre groupe l'expliquait dans son courrier du 30 octobre dernier au Premier ministre, il est contre-productif de continuer à pénaliser les commerces de proximité alors qu'ils se retrouvent en première ligne, entre autres dans les communes rurales et périurbaines. Cette fermeture du petit commerce de proximité est une démarche économiquement destructrice et sanitairement injustifiée, nous n'avons cessé de le démontrer la semaine dernière.
Vous défendez en permanence, monsieur le ministre, l'importance du dialogue et de la concertation entre les territoires et leurs parties prenantes : relevons donc ce défi qui semble une gageure en renforçant le couple maire-préfet ; laissons-les se concerter et décider, par exemple, combien de mètres carrés par client sont nécessaires pour limiter l'affluence tout en permettant l'activité et éviter la destruction d'entreprises et d'emplois, des destructions qui coûteront cher économiquement et socialement. Faisons confiance aux acteurs économiques locaux, qui s'efforceront d'instaurer des protocoles adaptés aux territoires.
La fermeture de rayons dans les supermarchés et le développement de la vente à emporter ne suffiront pas à contrer les géants du numérique. Il faut inscrire ce débat dans une logique d'équité, de proportionnalité et d'efficacité sanitaire. Aujourd'hui, il nous semble que ce n'est pas le cas. Ouvrons les yeux : les GAFA, qui ont publié leurs résultats trimestriels le 5 novembre, affichent une solidité impressionnante, en dépit d'une crise sans précédent qui a provoqué une baisse de 10 % du PIB américain et de 11 % du PIB français. Nous ne pouvons laisser mourir les commerces de proximité, et j'espère que le Gouvernement travaillera le plus tôt possible à leur réouverture en permettant à la fois la sécurité sanitaire et l'activité économique, c'est-à-dire le sauvetage de ces milliers d'entreprises et d'emplois si nécessaires à notre pays.
Tout au long de ces dernières semaines, le groupe UDI et indépendants s'est donc efforcé de faire des propositions au Gouvernement. Nous avons par exemple proposé de casser les chaînes de contamination économique en supprimant les privilèges des créanciers publics dans l'ordre de paiement afin que ceux-ci ne soient pas remboursés avant les fournisseurs – pour sauver ceux à qui les entreprises en difficulté laissent des ardoises. Si cette proposition était suivie, les salaires seraient payés et les entreprises sauvées. Vous ne l'avez pas retenue.
Une autre mesure nous paraît indispensable pour sauver nos PME-TPE : transformer leurs PGE en obligations Relance Covid. Ils deviendront ainsi des quasi-fonds propres remboursables sur quinze ou vingt ans, ce qui permettrait aux entreprises de retrouver leurs marges tout en sauvant des emplois et de relancer l'investissement, alors qu'elles sont aujourd'hui asphyxiées par une montagne de dettes.
Enfin, des mesures de soutien bien plus offensives dans certains secteurs nous semblent indispensables pour l'économie présentielle. Nous proposons ainsi d'instaurer un taux réduit de taxe sur la valeur ajoutée à 5,5 % pour l'ensemble des activités commerciales des secteurs de l'hôtellerie, de la restauration, des cafés et des bars jusqu'à la fin de l'année 2021 afin de leur permettre de survivre et de se reconstituer.
D'autres mesures doivent être prises pour rééquilibrer les inégalités de traitement que j'ai évoquées entre les plus grands et les petits : on pourrait par exemple envisager que la grande distribution, les plateformes de vente en ligne et les assureurs contribuent à un fonds de solidarité élargi en faveur des petits commerces, monsieur le ministre. Nous y reviendrons bien sûr au cours du débat.
Les perturbations économiques dues à la pandémie et à la riposte budgétaire offrent certes l'occasion de réorienter l'économie française en accompagnant nos entreprises, mais il faut se rendre à l'évidence : nous nous dirigeons vers la pérennisation de la dynamique confinement-reconfinement, par vagues épidémiologiques successives. Il faut l'anticiper et de nombreux autres PLFR seront dès lors nécessaires. Toutefois, je ne crois pas que nos entreprises et notre budget y soient prêts.
Le groupe UDI et indépendants soutiendra évidemment ce texte, mais en demandant au Gouvernement, à l'avenir, d'anticiper un peu plus pour permettre de sauver beaucoup plus.