Intervention de Michèle de Vaucouleurs

Séance en hémicycle du jeudi 26 novembre 2020 à 9h00
Débat public sur le socle citoyen — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaMichèle de Vaucouleurs :

À l'initiative du groupe Agir ensemble, notre assemblée est aujourd'hui invitée à se prononcer sur une proposition de résolution visant à ouvrir « un débat national et citoyen sur la création, l'expérimentation, le financement, l'application et l'évaluation d'un mécanisme de revenu universel, baptisé "socle citoyen" », afin de l'inscrire dans la loi au plus tard en 2022.

L'instauration d'un revenu de base, quel que soit le nom qu'on lui donne, est une idée largement débattue. L'origine de ce concept est ancienne, puisque nous en trouverons une première trace dans l'ouvrage L'Utopie de Thomas More, écrit en 1516. Au cours de l'actuelle législature, nous avons déjà débattu d'une proposition de loi du groupe socialiste, qui visait à expérimenter localement un revenu de base inconditionnel, ouvert à tous dès 18 ans. Le Gouvernement travaillant alors en parallèle sur un revenu universel d'activité, la proposition de loi n'avait pas reçu un accueil favorable.

Dans le cadre de la proposition de résolution dont nous discutons aujourd'hui, nous n'aurons pas à statuer sur les modalités de l'instauration du socle citoyen, mais seulement à affirmer, au nom de notre assemblée, la nécessité de placer cette question complexe au coeur du débat public.

Le revenu universel d'activité, dont l'ambition est de simplifier les différentes aides sociales et de les automatiser pour lutter contre le phénomène de non-recours, ne nécessitait pas un large débat public. Toutefois, les conclusions de la consultation engagée sur le sujet par le Gouvernement, remises en décembre 2019, ont mis en évidence des attentes citoyennes allant au-delà de ces seules préoccupations techniques.

La première de ces attentes porte sur l'instauration d'un revenu individualisé dès la majorité. Les jeunes sont plus largement touchés que leurs aînés par la précarité : le versement aux moins de 25 ans d'un revenu minimum, associé à un accompagnement, constitue une possibilité à laquelle le Gouvernement semble s'être rallié. La création d'un revenu universel d'activité ne pourrait donc s'envisager qu'à condition d'y inclure les jeunes de 18 à 25 ans.

La seconde attente qui ressort de l'enquête sur le revenu universel d'activité a trait à son inconditionnalité. Nous passons en contrôles, en justifications, beaucoup de temps qui pourrait être plus utilement employé à l'accompagnement des allocataires à hauteur de leurs besoins. Enfin, la troisième attente exprimée par les citoyens est celle de l'universalité effective de ce revenu. Ce principe a le mérite de la simplicité ; il évite que le fait de bénéficier d'un soutien financier ne soit stigmatisé ; il facilite matériellement l'engagement associatif bénévole, ainsi que la sécurisation de trajectoires professionnelles qui sortent en partie des situations couvertes par la sécurité sociale ou par l'assurance chômage.

En dépit des avantages qui viennent d'être évoqués, d'aucuns craignent qu'un tel revenu ne détourne certains du travail ; d'autres ne comprennent pas l'idée qu'il soit versé même à ceux qui bénéficient déjà de ressources importantes. Sur ce dernier point, pour corriger ce qui serait en effet une anomalie tout en conservant à chacun ce revenu socle citoyen, une juste fiscalité touchant l'ensemble des revenus perçus est possible.

Compte tenu de la période d'incertitude économique que nous traversons et des inquiétudes qu'elle suscite au sein de la population, ce débat, plus que jamais, prend tout son sens. Toutefois, un revenu socle citoyen, individualisé, inconditionnel, universel, bouleverserait notre rapport à la relation d'aide, ainsi que la corrélation entre la valeur travail, à laquelle nous sommes profondément attachés, et les ressources dont un individu peut disposer. C'est pourquoi sa création doit faire l'objet d'un large débat national.

Pour l'ensemble de ces motifs, et sans présumer de ce qui pourrait être formulé et appliqué à l'issue, encore une fois, d'un vaste débat citoyen, le groupe Mouvement démocrate MoDem et démocrates apparentés est favorable à cette proposition de résolution, d'ailleurs cosignée par certains de ses membres, dont je suis.

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