Intervention de Agnès Thill

Séance en hémicycle du jeudi 26 novembre 2020 à 9h00
Justice de proximité et réponse pénale — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAgnès Thill :

La présente proposition de loi du groupe Agir ensemble vise à prendre en compte l'engagement pris par le Président de la République et le Premier ministre de restaurer une justice de proximité permettant de lutter contre les incivilités et la délinquance du quotidien. Le groupe UDI et indépendants est évidemment favorable à cet objectif. Nous rapportons tous, régulièrement, des comportements de plus en plus nombreux et de plus en plus violents qui minent la vie de nos concitoyens et de notre pays. Si nous avons bien entendu le Gouvernement sur ses grands projets sur le sujet, nous devons, pour le moment, nous contenter du texte que nous débattons à présent.

Il s'agit du vivre ensemble, de ce « penser à l'autre » qui a fui nos éducations depuis la prédominance du « moi d'abord ». Le vivre ensemble est en effet malade. Notre groupe soutient bien entendu la volonté de proximité et d'efficacité de la réponse pénale, une question que ce texte a le mérite d'aborder. Mais il ne contient rien de vraiment inédit même si la simplification de la procédure du travail d'intérêt général, la forfaitisation de certaines infractions ou encore la modification de la procédure de désistement d'appel sont de bonnes mesures d'ordre pratique. D'autres dispositifs proposés interrogent, en revanche, à commencer par la nouvelle contribution citoyenne : comment l'interpréter ? Comment s'assurer de la pertinence de ce dispositif hybride dont la nature se situe entre punition et réparation ?

À force, nous brouillons les repères du droit pénal dont la compréhension devient peut-être difficile pour tous les justiciables. De plus, nous n'avons aucune garantie d'effectivité pour les mesures proposées. Quel sera en effet le suivi de l'exécution de ces obligations ? Les parquets ne pourront jamais effectuer cette tâche supplémentaire.

Enfin, simplifier les modalités d'exécution du travail d'intérêt général : oui. Mais cela ne doit pas conduire à sa complète déjudiciarisation. En effet, si ses modalités peuvent être confiées au directeur de l'administration pénitentiaire, ce changement ne doit pas être le prélude de l'exclusion, à terme, du juge de ce dispositif, qui n'a rien d'anodin. Ainsi, force est de constater que les mesures contenues dans cette proposition de loi semblent assez loin de l'ambition de l'exposé des motifs : restaurer une justice de proximité luttant contre les incivilités et la délinquance quotidiennes en renforçant l'efficacité des réponses pénales. Compléter l'article 41-1 du code de procédure pénale par de multiples alinéas n'est vraisemblablement pas une avancée majeure en matière de simplification.

Ce texte est d'ailleurs pour nous l'occasion d'interpeller une nouvelle fois le Gouvernement sur le manque de moyens chronique dont souffre la justice. Tant que son budget ne sera pas significativement augmenté, bien qu'il le soit de manière inégalée depuis vingt-cinq ans avec ses 8,2 milliards d'euros, rien ne sert de proposer telle ou telle nouvelle mesure. Vous savez mieux que personne combien on court après un paquet de post-it dans les couloirs des tribunaux ! Quant à la la visioconférence, elle ne résout en rien ce phénomène ; bien au contraire, elle construit une justice inhumaine à travers un écran.

Le groupe UDI et indépendants votera néanmoins ce texte pour les quelques mesures de simplification qu'il propose et afin d'encourager les démarches qui vont dans le sens d'une politique pénale plus proche de nos concitoyens.

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