Intervention de Agnès Thill

Séance en hémicycle du jeudi 26 novembre 2020 à 15h00
Accès au vaccin contre le covid-19 — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAgnès Thill :

Cette proposition de résolution s'inscrit parfaitement dans l'actualité, à l'heure où de nombreux laboratoires nous montrent une lumière grandissante au fond du tunnel, à mesure que de nouveaux vaccins nous sont présentés. La crise sanitaire, en plus d'affecter l'intégrité de nos concitoyens, entraîne une crise économique et sociale d'une ampleur inédite. Corollaire de cet enchaînement de malheurs, le moral de nos concitoyens devient très inquiétant et fait craindre le développement de maladies mentales. La perspective d'un vaccin est donc un vecteur d'espérance, et tout doit être mis en oeuvre pour en assurer l'accès à chacun de nos concitoyens.

Toutefois, nous devons nous interroger sur les nombreuses réserves qui se font jour vis-à-vis de ce vaccin. Selon un sondage IPSOS réalisé auprès de 18 000 personnes dans quinze pays différents, les Français seraient les plus réticents. Il semble que cette méfiance dépende de la temporalité de l'accès au vaccin : autrement dit, plus le vaccin serait découvert rapidement, moins nos concitoyens auraient confiance.

À certains égards, ce constat rejoint le travail de l'Institut Pasteur, qui ne s'est pas précipité pour présenter un vaccin, privilégiant sans doute l'efficacité et le sérieux de ses produits. En d'autres termes, mes chers collègues, l'accès au vaccin et les questions logistiques ne représentent que la moitié du travail : il convient de mener un autre travail tout aussi important, celui de la confiance.

Pour ce qui est de la proposition de résolution de notre collègue Vincent Ledoux, sur la forme, d'abord, il apparaît incohérent de présenter un texte traitant à la fois de l'accès universel au vaccin contre la covid-19 et de la transparence des investissements publics en matière de recherche et de développement – d'autant plus que nous avons déjà débattu de la transparence dans le cadre de l'examen du projet de loi de financement de la sécurité sociale, pas plus tard que mardi dernier.

Sur le fond, il nous paraît profondément irréaliste de demander aux membres de l'OMS d'acheter le brevet d'un vaccin pour le délivrer à la terre entière. Concrètement, comment l'OMS sélectionnera-t-elle un brevet parmi l'ensemble des vaccins présentés, et comment le laboratoire pour lequel les pays occidentaux se seront mobilisés pour offrir le vaccin à l'humanité sera-t-il choisi ?

Vous fondez la distribution du vaccin sur la production de richesses, mais ce n'est pas un indicateur pertinent pour la circulation du virus. Le groupe UDI et indépendants défend une vision beaucoup plus pragmatique, visant à favoriser l'accès au vaccin des pays les plus touchés par le virus, car le but du vaccin et de sauver des vies, et non pas de servir une idéologie – et encore moins les intérêts financiers qui peuvent réellement exister. Aucun pays touché par le virus, quel que soit son niveau de richesse, ne doit se voir empêché d'accéder au vaccin. À cet égard, il serait bien plus pertinent, selon nous, de créer un programme européen visant à assurer l'accès de ce vaccin aux pays les plus pauvres touchés par le virus.

Par ailleurs, il est bien de vouloir manifester de la générosité envers les pays du monde entier, mais n'oublions pas nos propres compatriotes ! Nous faisons partie des pays les plus touchés et notre priorité sera donc de fournir le vaccin d'abord à nos aînés et aux plus vulnérables, en respectant toujours le seul principe du libre choix individuel.

Attention, donc, aux tentatives d'imposer, et en particulier d'obliger nos concitoyens à se faire vacciner ! La pédagogie à coups de bâton, la coercition, ne constituent jamais un signal positif pour une démocratie et semblent être des moyens bien maladroits pour renouer la confiance indispensable entre les citoyens et les autorités. Une confiance, inutile de le rappeler, bien ébranlée par les errements manifestes de la gestion de la crise que nous vivons.

Enfin, en ce qui concerne la transparence des fonds publics octroyés pour l'investissement en matière de recherche et de développement, nous n'y voyons pas de problème a priori car, après tout, il s'agit d'argent public.

Nous considérons que la proposition de résolution n'est pas un outil pour formuler des voeux utopiques. Pour toutes les raisons que j'ai évoquées, en particulier celles relative à la cohérence, nous ne pourrons voter en faveur de ce texte.

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