L'histoire, en effet, regorge d'exemples qui illustrent combien les moments de crise peuvent être à l'origine de changements profonds et la source d'audaces dont nous ne serions d'ordinaire pas capables. La pandémie de covid-19 nous rappelle cette évidence : nous devons multiplier les stratégies d'alliance en renforçant nos politiques de voisinage immédiat, notamment avec nos partenaires méditerranéens. Avec la CEMER, c'est aussi en faveur de la cause du multilatéralisme que nous plaidons, dans une démarche de régionalisation cohérente et structurée autour d'une thématique qui a fait ses preuves ailleurs dans le monde.
Dès lors, quel format pour la CEMER ? Elle pourrait dans un premier temps se composer de la France, de l'Espagne et de l'Italie au Nord, du Maroc, de l'Algérie et de la Tunisie au Sud, sans exclure l'intégration future d'autres pays volontaires. À cet égard, je suis rentré ce matin même de Mauritanie – pays qui, sans posséder de façade méditerranéenne, a le coeur dans notre mer. L'objectif serait de privilégier une organisation Nord-Sud en format restreint, dans un ensemble géographique et géopolitique compact qui permettra d'éviter les dispersions du passé.
Se pose ensuite la question des énergies qui relèveraient de la compétence de la CEMER. Dans cette région forte de son ensoleillement, de ses vents, de ses courants marins, toutes les sources sont à étudier : solaire photovoltaïque, solaire thermique à basse et à haute température, éolien, hydraulique, hydroélectricité, géothermie, biomasse, biogaz, biocarburants ou encore hydrogène vert. Les énergies renouvelables sont nombreuses, chacune avec ses spécificités qu'il conviendra d'étudier avec l'ensemble des parties prenantes pour établir un partenariat juste et gagnant-gagnant au service d'une véritable stratégie globale.
Or cette stratégie ne pourra s'établir qu'en renforçant les partenariats scientifiques et académiques entre instituts de recherche et universités des deux rives capables d'apporter une expertise et de formuler des recommandations claires à l'ensemble des décideurs politiques ; c'est la base de tout projet. En ce sens, la CEMER formera un espace de savoir et d'échanges où pourraient se réunir autour d'une même table des décideurs politiques, des acteurs de la société civile et des experts des questions climatiques. Nos compatriotes de l'étranger, dont je suis un fier représentant, pourraient également y jouer un rôle de premier plan : ils constituent déjà une passerelle entre les deux rives.
En effet, l'innovation est le facteur essentiel qui permettra au secteur énergétique de fournir des solutions fiables, rentables et durables. L'objectif de la coalition est d'accélérer le développement des énergies et des technologies permettant de relever les défis d'une mobilité durable dans les secteurs de l'industrie, du transport et de la logistique. En Méditerranée, les écosystèmes marins sont soumis à d'importantes pressions et à des risques sans commune mesure avec d'autres régions, qui menacent la biodiversité, la sécurité alimentaire, les ressources naturelles et même la santé humaine. Ce sont les bases d'une pax mediterranea environnementale qu'il nous faut établir, la seule qui puisse assurer la sérénité et la prospérité de nos enfants.
Selon un format ad hoc qui pourrait reposer sur un consortium d'universités et d'entreprises volontaires, entre autres, la CEMER serait un espace de dialogue entre acteurs privés, entreprises comme organisations non gouvernementales, car leur participation facilitera notamment la recherche de fonds. Le soutien politique des différents États accompagnera naturellement ce projet en lui donnant sa force et sa crédibilité. De nombreux financements existent, à l'instar de l'Agence française de développement, de la Banque européenne pour la reconstruction et le développement ou encore de la Banque africaine de développement.
La CMER permettra d'ailleurs d'identifier tous ces projets qui se chevauchent parfois pour les fédérer enfin et, pourquoi pas, les labelliser. Il nous faudra néanmoins veiller à ce qu'une telle communauté s'appuie sur des partenaires compétents et forces de proposition en matière d'ENR. S'il doit être porté politiquement, il faut que le scientifique, le technique et l'économique côtoient le politique en bonne intelligence.
Vous l'aurez compris, la proposition de résolution que je vous soumets se veut le premier pas d'un projet ambitieux, la première pierre d'un édifice à la hauteur des défis écologiques que nous devons collectivement assumer et sur lesquels notre pays a le devoir de faire preuve d'audace. Après ce vote, j'irai moi-même faire une tournée des pays de ma circonscription pour essayer de convaincre mes homologues méditerranéens – je sais qu'ils sont déjà très attentifs.
Mes chers collègues, la cause climatique est transpartisane. Notre géographie fait de nous ce que nous sommes et définit, depuis l'origine de l'humanité, la nature des rapports que nous choisissons d'entretenir avec nos voisins. De Tunis à Barcelone, d'Alger à Gênes, de Marseille à Tanger, c'est la Méditerranée qui nous unit. Dans cette Méditerranée occidentale, dans ce Maghreb, dans cet espace du couchant, les énergies renouvelables sont une formidable opportunité pour éclairer notre avenir. Alors, mes amis, osons.