Intervention de François Pupponi

Séance en hémicycle du jeudi 3 décembre 2020 à 15h00
Protection du peuple arménien — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaFrançois Pupponi :

… visant déjà majoritairement des Assyro-Chaldéens, ce qui a motivé au premier chef la proposition de résolution que nous examinons aujourd'hui, c'est l'agression brutale, délibérée et préméditée du Haut-Karabakh par l'Azerbaïdjan. Sur cette terre, qu'ils peuplent depuis des temps immémoriaux, les Arméniens ont fondé la République d'Artsakh, en vertu des droits imprescriptibles affirmés par la Charte des Nations unies, en particulier le droit des peuples à disposer d'eux-mêmes. C'est sur ce même fondement que les Arméniens du Haut-Karabakh ont organisé, en 1991, un référendum au cours duquel 99 % de la population s'est prononcée en faveur de l'indépendance et a dit oui à la proclamation d'une république baptisée quelques années plus tard « République d'Artsakh ».

Si la France avait été à la hauteur de ses traditions et de son rôle en tant que pays des droits de l'homme et des Lumières, elle aurait reconnu depuis 1991 cette république autoproclamée. Oui, mes chers collègues : nous aurions dû voter un tel texte avant que n'éclate ce conflit meurtrier et dévastateur. Nous aurions dû le faire, car l'Azerbaïdjan et son suzerain turc n'auraient alors peut-être jamais osé attaquer avec une telle impudence un État reconnu et en voie de reconnaissance par la communauté internationale. Nous aurions dû le faire car, en indiquant la voie, notre assemblée aurait encore une fois fait briller notre République au firmament des peuples opprimés. Mais il est encore temps de le faire pour les mêmes raisons d'abord, et pour d'autres raisons ensuite.

La première raison, c'est que notre appel à la reconnaissance de la République d'Artsakh par le Gouvernement français dans le cadre du processus politique de règlement du conflit – sans même parler de l'avènement possible de cette reconnaissance – constitue en soi une protection des populations autochtones du pays. Ce sont de telles considérations qui ont présidé à la reconnaissance du Kosovo ou du Timor oriental. Les Artsakhiotes n'ont jamais conçu la reconnaissance de l'État de droit qu'ils bâtissent depuis trente ans comme un colifichet dont ils pourraient s'enticher, mais bien comme une garantie de sécurité face à des puissances voisines et hostiles qui ont fait de l'arménophobie une véritable politique d'État.

Les Artsakhiotes ont dû quitter des pans entiers de leurs terres ancestrales, occupés aujourd'hui par l'Azerbaïdjan, parce que face au gouvernement de cette dictature, le seul choix qu'il leur restait était de partir ou de mourir. Nous ne pouvons admettre que ces gens soient « chassés comme des chiens » de leur pays, comme l'a dit explicitement le président Aliev, et nous ne voulons pas non plus qu'ils viennent grossir la cohorte misérable des trop nombreux réfugiés qui se pressent déjà aux portes de l'Europe.

La deuxième raison, chers collègues, est liée au fait que nous souhaitons préserver le patrimoine chrétien arménien de ces terres. Mais qui le préservera, si ce n'est ceux qui l'ont édifié ? Le patrimoine, ce ne sont pas seulement de vieilles églises qui seront au mieux transformées en musées, albanisées ou islamisées, et plus vraisemblablement détruites.

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