Au moment de m'adresser à vous aujourd'hui pour évoquer la situation des établissements scolaires de ma circonscription, à Aubervilliers, à Pantin et en Seine-Saint-Denis plus largement, j'ai comme un sentiment de déjà vu – y compris lorsque je constate l'absence au banc du ministre de l'Éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Chaque fois que je le peux, je porte la parole des élèves, des parents et des enseignants qui ne supportent plus que vous négligiez une école qui devrait être prioritaire. Il ne se passe pas six mois sans que je demande, dans cet hémicycle, quand le Gouvernement accordera enfin aux établissements les moyens humains et matériels dont ils ont besoin. Il ne se passe pas un mois sans que j'écrive au ministre ou au recteur de l'académie de Créteil pour les alerter sur les difficultés d'un collège ou d'un lycée de ma circonscription.
Chaque fois l'on m'apporte les mêmes réponses, vagues et qui nient la réalité : « Tout va bien » ou « pas de vague », pour reprendre les mots de Christine Renon, directrice d'école à Pantin, qui s'est donné la mort l'an dernier, épuisée au travail.
Malgré toutes les alertes, malgré les drames, rien ne change, ou alors en pire, d'autant plus que la pandémie et ses conséquences sociales frappent mon département avec une violence particulière, accroissant les difficultés d'une école déjà au bord de la rupture. Or vous vous refusez toujours à prendre les mesures qui s'imposent.
Où sont les moyens et les mesures sanitaires nécessaires pour garantir la continuité des enseignements tout en préservant les établissements de la pandémie ? Où sont-ils alors que les bâtiments sont déjà trop exigus pour des élèves trop nombreux, que la médecine scolaire, la vie scolaire et les agents d'entretien sont réduits depuis longtemps à la portion congrue et que le ministre s'est refusé à systématiser le fonctionnement en demi-groupes ? Il a fallu une semaine de mobilisation des personnels pour obtenir que cette mesure soit appliquée dans les lycées, mais cela n'a pas été accordé dans les collèges. Le ministre et la hiérarchie se sont murés dans le déni, se contentant de rabâcher un protocole sanitaire inapplicable sur le terrain, faute de moyens matériels. Tout un symbole !
Où en est le plan d'urgence pour l'éducation en Seine-Saint-Denis ? Pourquoi ne recrutez-vous pas les enseignants nécessaires en nombre suffisant ? Il le faut si l'on veut éviter que la crise n'accroisse encore les inégalités scolaires et ne pénalise encore un peu plus les élèves déjà défavorisés. Les fédérations de parents d'élèves et les syndicats enseignants vous l'ont dit et répété. Le Président de la République a refusé l'embauche de nouveaux enseignants en considérant qu'ils ne servaient pas à redresser le pays et qu'une telle mesure aggraverait le déficit.
Résultat : comme chaque année, le non-remplacement – l'on devrait plutôt dire la pénurie – d'enseignants fait des ravages, les heures manquées s'accumulent. Je pourrais vous parler du collège Lavoisier de Pantin, où presque 150 élèves n'ont pas eu de cours d'anglais ni de français pendant des semaines ; du collège Rosa-Luxembourg d'Aubervilliers, où l'on manque de professeurs de mathématiques et d'histoire-géographie ; de classes qui auraient dû être ouvertes et qui ne l'ont pas été… La liste serait longue. Elle ne cessera de s'allonger tant que vous ne ferez rien.
Quand allez-vous donc enfin ouvrir les yeux sur cette réalité que vous ne voulez pas voir ? Quand allez-vous cesser de sacrifier la jeunesse de Seine-Saint-Denis, de mépriser les efforts des enseignants et des personnels de terrain ? Quand allez-vous mettre en oeuvre un plan d'urgence pour l'éducation dans ce département ?