« L'humanité fait la guerre à la nature ; c'est suicidaire car la nature rend toujours coup pour coup, et elle le fait déjà, avec une force et une fureur toujours croissantes. » C'est par ces mots qu'António Guterres, le secrétaire général de l'Organisation des Nations unies, a alerté la communauté internationale le 3 décembre, à l'occasion de la présentation par l'Organisation météorologique mondiale de son rapport annuel.
Celui-ci est alarmant, comme l'est celui du Programme des Nations unies pour l'environnement – PNUE – , également publié la semaine dernière. Selon l'Organisation météorologique mondiale, 2020 est en passe de devenir l'une des trois années les plus chaudes jamais enregistrées. Quant au rapport du PNUE, il fait apparaître le grand écart entre la production de combustibles fossiles prévue dans les différents plans de relance et les niveaux de production mondiaux nécessaires pour limiter le réchauffement à 1,5 ou 2 degrés.
Avec le projet de loi un peu fourre-tout dont nous entamons l'examen en séance aujourd'hui, vous vous êtes saisis de l'obligation de transposition d'un règlement européen relatif au parquet européen pour créer des juridictions spécialisées en matière environnementale et réformer certaines dispositions pénales censurées par le Conseil constitutionnel.
Nous y sommes opposés pour deux raisons.
Tout d'abord, nous déplorons que la création du parquet européen consacre la perte de souveraineté de la France en matière de répression des infractions financières, puisque le parquet national financier et les juridictions spécialisées seront dessaisis à son profit. En outre, cette création se fait à moyens constants ou réduits, car seulement cinq postes de procureurs européens délégués sont créés pour la France, contre onze en Allemagne ou vingt en Italie.
Elle porte également atteinte aux garanties d'un procès équitable et aux droits de la défense, du fait de l'attribution au procureur européen délégué de pouvoirs relevant en principe du ou de la juge d'instruction. L'analyse du statut de ces procureurs montre en outre que celui-ci n'offre pas toutes les garanties d'indépendance et d'impartialité requises par la Cour européenne des droits de l'homme.
Ensuite, les dispositions relatives à la justice environnementale sont soit insuffisantes, soit contre-productives.
En cette journée mondiale du climat, et alors que nous fêterons samedi les cinq ans de l'accord de Paris sur le climat, que les grèves et les marches pour le climat se sont multipliées ces deux dernières années, que les rapports du groupe d'experts intergouvernemental sur l'évolution du climat s'empilent sur les bureaux des ministères, la réponse que vous apportez avec ce projet de loi se résume malheureusement, de notre point de vue, à un effet de communication. Vous créez des juridictions spécialisées, mais sans moyens suffisants.
Ce n'est pas de mots dont nous avons besoin pour faire face au changement climatique. À quoi bon les graver dans le marbre de la loi, puisqu'ils resteront lettre morte ? Il faut des actes, des politiques à la hauteur de l'urgence. Il faut agir, comme l'exige avec force et justesse la jeunesse du monde entier, qui a saisi la justice en portant plainte contre cinq États, dont la France, pour inaction climatique. Il faut agir, car cela fait plus d'un demi-siècle que les scientifiques alertent sur la situation. Mais les dirigeants et dirigeantes des grandes puissances mondiales, dont la France, font la sourde oreille et poursuivent les politiques écocides qui sont les principales causes des catastrophes naturelles, lesquelles se multiplient d'année en année. Il faut agir, car, comme l'expliquait, sous cette législature, l'ancien ministre de la transition écologique et solidaire lors de sa démission, la « politique des petits pas » ne suffit plus et il faut passer à la vitesse supérieure.
Or en créant de nouvelles juridictions spécialisées sans leur accorder de moyens supplémentaires, vous n'agissez pas en faveur de la justice environnementale ; vous nous faites plutôt perdre, à tous et toutes, un temps précieux que nous n'avons pas.
De même, en permettant le recours à la convention judiciaire d'intérêt public pour les infractions environnementales, vous n'agissez pas en faveur de la justice, mais laissez prospérer le banditisme environnemental en col blanc.
Ce n'est pas en négociant des subsides auprès des gros pollueurs que vous récupérerez les 600 000 milliards d'euros que coûte, au niveau mondial, le non-respect de l'accord de Paris. Vous y parviendrez par une condamnation ferme, et des politiques publiques volontaristes envers les criminels environnementaux, qui devraient être sanctionnés par des amendes correspondant aux dégâts et aux préjudices causés.
Le 14/12/2020 à 14:53, Laïc1 a dit :
« L'humanité fait la guerre à la nature ; c'est suicidaire car la nature rend toujours coup pour coup, "
Inquiétant pour les conséquences du mariage pour tous...
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