Je suis très heureux de vous retrouver pour la nouvelle lecture du projet de loi de finances pour 2021.
Nous sommes, quelques semaines plus tard, dans un contexte différent de celui qui avait présidé à l'examen du texte en première lecture. Nous avons réussi le confinement – je dis « nous », mais ce sont les Français qui ont fait preuve de sens des responsabilités, puisqu'ils ont accepté des mesures de restriction sanitaire qui nous ont permis de ralentir la circulation du virus tout en maintenant un niveau d'activité économique élevé. Pendant le deuxième confinement, la perte d'activité aura été de l'ordre de 12 % pour le mois de novembre ; lors du premier confinement, elle avait été de 30 %. Je dis tout de suite que cela n'est pas un prétexte à un troisième confinement ; c'est au contraire une incitation à poursuivre nos efforts en matière sanitaire de façon à conjuguer lutte contre la circulation du virus et maintien de l'activité économique.
Nous avons également enregistré de bons chiffres pour la consommation. Lors du week-end du Black friday, la consommation a été supérieure de 30 % à celle du week-end précédent, et les chiffres dont nous disposons montrent que cet événement promotionnel a été aussi réussi en 2020 qu'en 2019, avec notamment une forte consommation de biens d'équipement. Quant au reste de l'économie – en particulier le bâtiment, les travaux publics, l'agroalimentaire – , l'activité y reste soutenue. Nous sommes en train de réussir le pari de lutter contre la circulation du virus tout en maintenant le niveau d'activité économique le plus élevé possible.
Néanmoins, trop d'incertitudes demeurent, sur le front sanitaire comme sur le front international, pour réviser nos chiffres de récession pour 2020. Certains instituts, vous le savez, évaluent la récession pour 2020 à -9 % ou -10 % du PIB, mais nous maintenons, par souci de prudence et de responsabilité, une estimation à -11 %. Nous anticipons en revanche un fort rebond à +6 % en 2021, et je suis heureux de constater que la plupart des instituts économiques, tout comme la Banque de France, confirment notre ambition de revenir, à la fin de 2022, au même niveau d'activité économique que celui de 2019, avant la crise.
Parmi les incertitudes, il y a le Brexit. Je tiens à dire aux représentants de la nation qu'il aura d'abord un impact négatif sur les Britanniques et l'économie britannique, et que celui sur l'économie française devrait rester limité : nous l'évaluons à 0,1 point d'activité en 2021. Bien sûr, beaucoup d'entreprises seront touchées, mais nous les accompagnons depuis plusieurs mois, nous les aiderons à remplir les formalités de douane nouvelles, nous serons à leurs côtés : les 150 000 entreprises qui exportent vers le Royaume-Uni seront accompagnées, et chacune d'entre elles est importante. Toutefois, cela n'engage pas l'ensemble de l'économie française. Un secteur est particulièrement inquiet, celui de la pêche ; le Président de la République a dit très clairement que nous le soutiendrions et que nous en faisions un point dur de la négociation, mais, encore une fois, le Brexit n'emporte pas de conséquences pour l'ensemble de l'activité économique de la France. C'est la Grande-Bretagne qui sera pénalisée par le Brexit, c'est l'économie britannique qui sera pénalisée par le Brexit, bien plus que l'économie française. Je tiens à rappeler qu'on ne peut pas à la fois vouloir sortir du marché unique et, en même temps, vouloir en garder tous les bénéfices, à savoir près de 500 millions de consommateurs et l'activité qui va avec ; il faut assumer les choix politiques et les conséquences de ces choix.
Dans ces circonstances, notre stratégie économique pour 2021 restera la même que celle qui nous a guidés, le Président de la République, le Premier ministre et moi-même, depuis le début de cette crise, laquelle n'a pas d'équivalent dans l'histoire contemporaine de la France. Il faut soutenir les secteurs qui en ont le plus besoin, avec attention, efficacité et constance, mais il faut, dans le même temps, engager sans délai la relance qui doit permettre à l'économie française de sortir plus forte en 2022.
Le premier temps de la crise économique a été intégralement consacré à la protection des entreprises, à la protection des salariés et à la protection du pouvoir d'achat des ménages français. Ces premiers mois nous ont permis de sauver des centaines de milliers d'emplois, de protéger de la faillite des dizaines de milliers d'entreprises et de maintenir le pouvoir d'achat des Français – car ce sont l'État et les entreprises qui ont absorbé le choc, beaucoup plus que les ménages français, même si je ne néglige pas qu'une partie des Français parmi les plus fragiles ont été les plus touchés. Ce fut le premier temps de la crise : celui de la protection totale, efficace, de notre économie, des salariés et du pouvoir d'achat des Français.
Nous entrons maintenant dans le deuxième temps de la crise, durant lequel il faut continuer à soutenir les secteurs qui restent fortement touchés par la crise et simultanément engager la relance dans des secteurs qui, eux, se portent bien, commencent à se développer, ont besoin d'innovation, ont besoin d'investir, ont besoin de prêts participatifs, ont besoin de recréer de la richesse et de recréer des emplois. C'est le deuxième temps de la crise : celui dans lequel nous entrons aujourd'hui avec l'examen, en nouvelle lecture, du projet de loi de finances.
Ensuite viendra un troisième temps – j'aurai l'occasion d'y revenir – , lorsque la croissance sera de retour, lorsque la France aura retrouvé son dynamisme économique, où il faudra engager le rétablissement des finances publiques françaises.