Nous voici réunis pour une nouvelle étape de la grande course budgétaire commencée il y a plus de deux mois.
Dans une période de crise où l'incertitude du contexte sanitaire est omniprésente, il est essentiel pour le Gouvernement à la fois de fixer le cap de la reprise économique par l'intermédiaire du plan de relance, de tenir les engagements pris et d'adopter une démarche sincère et consensuelle, fondée sur la collaboration avec l'ensemble des parlementaires, car c'est la condition de sa réussite. Le projet de loi de finances que Bruno Le Maire et moi-même vous présentons satisfait ces conditions.
Comme vous le savez, ce budget est la clef de voûte du plan de relance que nous avons déjà eu l'occasion de présenter. Je rappelle que, sur le montant total de 100 milliards d'euros du plan de relance, l'État financera directement 86 milliards d'euros, dont 66 milliards de crédits budgétaires et 20 milliards de baisses d'impôts. Les crédits de la mission « Plan de relance », que vous avez adoptés en première lecture, notamment, s'élèvent à 36,4 milliards ; 22 milliards d'euros de crédits de paiement ont été prévus pour l'exercice 2021.
La baisse des impôts de production est l'autre vecteur majeur de la relance. Elle s'élève à 20 milliards d'euros sur deux ans, principalement au bénéfice des ETI et des PME. Elle soutiendra d'abord les secteurs de l'industrie manufacturière et du commerce, conformément à nos engagements.
Le reste du plan de relance sera financé par d'autres acteurs, comme la sécurité sociale ou l'UNEDIC, à hauteur de 8,7 milliards d'euros, notamment au titre du Ségur et de l'activité partielle de longue durée. Quelque 5,5 milliards d'euros seront en outre financés par la Banque des territoires et Bpifrance.
Enfin, le plan de relance bénéficiera d'un financement historique de la part de l'Union européenne, à hauteur de 40 milliards d'euros. Un cap a été dans la solidarité entre partenaires européens, nous ne pouvons que nous en réjouir.
Par ailleurs, ce projet de loi de finances contient des mesures exceptionnelles pour accompagner la sortie de crise de notre économie, tout en marquant la continuité de l'action du Gouvernement.
Hors plan de relance et mesures d'urgence, nous poursuivons ainsi nos investissements dans les chantiers d'avenir en augmentant les moyens de l'éducation nationale de plus de 1,3 milliard d'euros, et ceux de la recherche et de l'enseignement supérieur de 400 milliards d'euros. C'est un geste en direction de nos jeunes, dont la réussite professionnelle, nous le savons, conditionne les caractéristiques futures de l'emploi dans notre pays. Il fait écho au choix, rappelé par Bruno Le Maire à l'instant, de consacrer la moitié des crédits du plan de relance dédiés à la rénovation des bâtiments publics d'État, aux universités et aux infrastructures servant à la jeunesse.
De surcroît, le ministère de la culture et le ministère chargé de l'égalité entre les femmes et les hommes, qui assurent la conduite de deux axes essentiels de la politique du Gouvernement, verront leur budget augmenter de 150 millions d'euros – venant en complément des 2 milliards d'euros versés au titre du plan de relance – pour le premier et de 40 % pour le second.
En matière de transition énergétique, là encore, nous poursuivons et renforçons nos efforts. Ce budget contient en effet des mesures importantes pour préserver la biodiversité, réduire les émissions de gaz à effet de serre et adapter les territoires au changement climatique et au développement des circuits courts. Outre l'effort considérable financé par le plan de relance, à hauteur de 30 milliards d'euros, les moyens du budget du ministère de la transition écologique augmentent, à périmètre constant, de 550 millions d'euros.
L'importance de l'enjeu rend évidemment indispensable une évaluation de l'impact de l'ensemble des mesures budgétaires sur l'environnement. C'est la démarche que nous avons engagée pour la première fois, à l'initiative des parlementaires – je pense notamment à Bénédicte Peyrol – , au travers du budget vert. Ainsi, nous rendrons compte chaque année au Parlement et aux Français de l'impact environnemental du budget de l'État.
Au-delà, nous continuons et continuerons encore notre effort de baisse des prélèvements obligatoires. Le projet de loi de finances pour 2021 concrétise les baisses d'impôts importantes décidées par le Gouvernement.
La suppression de la taxe d'habitation sur les résidences principales se poursuit. En 2020, 80 % des foyers ne paient plus de taxe d'habitation. À compter de 2021, les contribuables qui y restent assujettis commenceront à bénéficier d'une exonération progressive qui aboutira à sa suppression définitive et totale pour les résidences principales en 2023.
Les entreprises continueront, elles aussi, à bénéficier de baisses d'impôts, puisque le taux d'impôt sur les sociétés poursuit sa diminution, jusqu'à représenter une baisse de 25 % en 2022, conformément à nos engagements.
Au total, les impôts auront diminué de 45 milliards d'euros à la fin de l'année 2021, la moitié de cette baisse bénéficiant aux ménages et l'autre moitié aux entreprises.
Vous le savez, cette période de construction du budget pour 2021 a été marquée par l'incertitude sanitaire et les incertitudes économiques consécutives. Nous avons donc dû adapter les grands équilibres sur lesquels s'appuient nos lois financières, au fur et à mesure des informations nouvelles dont nous disposions, guidés dans cette démarche par le principe de sincérité. Celui-ci s'apprécie en effet en fonction des informations disponibles et des prévisions qui peuvent raisonnablement en découler. Nous avons souhaité tenir chaque assemblée informée au mieux des éléments dont nous disposions à chaque étape de la navette.
En définitive, par rapport à la présentation initiale du PLF pour 2021, le taux de croissance pour 2020 a été révisé de -10 à -11 %, et l'accroissement du déficit public de 10,2 % à 11,3 %. Quant aux prévisions de croissance pour 2021, elles ont été dégradées de 8 à 6 %. Ce sont des choix prudents dans le contexte d'incertitude actuel. Nous adapterons une nouvelle fois le scénario de finances publiques pour 2021 dans quelques minutes, pour prendre en compte les mesures d'urgence nécessaires déjà évoquées.
La nouvelle prévision de déficit public pour 2021 est fixée à 8,5 % du PIB, contre 6,7 % initialement prévus. Cette dégradation s'explique d'abord par l'effet mécanique du nouveau scénario macroéconomique, les recettes attendues des prélèvements obligatoires devant notamment chuter de 22 milliards d'euros. Elle s'explique aussi par les dépenses supplémentaires de soutien face à la crise sanitaire, notamment le réarmement des principaux dispositifs d'urgence, qui sont portés à 20 milliards d'euros, dont 13,4 milliards n'étaient pas encore budgétés.
Ces 20 milliards d'euros se décomposent ainsi : 11,4 milliards d'euros pour le soutien aux salariés, dont 11 milliards pour l'activité partielle – soit 4,4 milliards d'euros supplémentaires par rapport à la version initiale du PLF – et 400 millions pour le soutien aux permittents, comme l'avait annoncé Élisabeth Borne ; 7,6 milliards pour le soutien aux entreprises, dont 7 milliards pour le fonds de solidarité et 600 millions pour des secteurs particulièrement touchés par la crise – comme le sport, à travers notamment l'Agence nationale du sport – , la culture et les stations de montagne ; 1 milliard d'euros enfin pour les aides au paiement des cotisations.
S'ajoutent à ces crédits, 2,5 milliards d'euros destinés à financer notamment : des mesures de soutien spécifiques pour les jeunes, à hauteur de 202 millions d'euros ; un soutien de 66 millions d'euros au groupe La Poste, afin de garantir le niveau des ressources allouées aux commissions départementales de présence postale territoriale et au contrat national de présence postale ; les 250 millions de soutien aux aéroports dont vient de parler le ministre de l'économie ; la recapitalisation de l'Agence française de développement à hauteur de 500 millions d'euros ; l'achat de matériel sanitaire pour 430 millions d'euros ; 120 millions d'euros d'avance de trésorerie enfin, au titre de la campagne de l'aide alimentaire.
Nous vous proposerons également de réévaluer de 336 millions d'euros le montant du prélèvement sur recettes en faveur de l'Union européenne, ainsi que d'adopter une compensation de 300 millions d'euros pour les pertes de recettes d'exploitation aérienne et 130 millions destinés à un nouvel abondement de l'allocation aux adultes handicapés. Enfin, nous avons à inscrire 1 milliard d'euros de crédit d'impôt pour les bailleurs, au titre du dispositif adopté successivement par votre assemblée et par le Sénat.
Les mesures nouvelles que nous présentons aideront donc chaque entreprise, dans tous les secteurs, même si j'entends les demandes spécifiques à certaines activités. Ces soutiens complètent les mesures massives déjà existantes. Ainsi, pour donner à chaque jeune une solution, le plan de relance prévoyait-il 6,7 milliards d'euros ; il sera encore renforcé pour accompagner chacun.
La révision du déficit et du scénario macroéconomique nous conduit aussi à revoir le ratio d'endettement public, qui atteindrait 122,4 % du PIB en 2021, après 119,8 % en 2020, quand nos prévisions initiales reposaient sur une dette de 117,5 % en 2020 et de 116,2 % en 2021.
Vous allez donc, je l'espère, adopter un texte très enrichi par rapport au projet que nous avions déposé au départ. J'en profite pour vous remercier pour le travail intense que vous avez fourni et qui va se poursuivre dans les prochains jours.
Par vos différentes interventions et les amendements que vous avez déposés et fait adopter, vous avez fait vivre un véritable débat, permettant d'améliorer le texte sur plusieurs points majeurs. Je tiens à souligner qu'à ce moment du débat parlementaire, les trois quarts des amendements adoptés sont d'origine parlementaire, et je me réjouis de ce ratio, qui reflète un travail commun pour la construction de cette loi de finances.