Les personnels intervenant dans les EHPAD ont effectué un travail considérable, hors norme, l'an passé. Ils ont prouvé de la plus belle des manières l'importance de leurs missions, ce qui justifierait une plus juste rémunération et toute notre reconnaissance pour prendre ainsi en charge la vieillesse – celle des autres, celle de nos proches et un jour peut-être la nôtre.
La crise sanitaire a révélé et amplifié la crise organisationnelle, systémique, qui touche les EHPAD. Si beaucoup a déjà été dit aujourd'hui, je souhaite vous rapporter le témoignage de Juliette, 78 ans, afin de tirer quelques enseignements pour la suite du confinement des EHPAD, qui dure depuis mars 2020.
Juliette, retraitée de la catégorie C de l'éducation nationale, a pu être accueillie, après quelques mois d'attente, dans un EHPAD géré par le CCAS – centre communal d'action sociale – de Toulouse.
Sa pension additionnée à la pension de réversion de son époux, décédé à la fin de 2012, lui permet exactement de payer ses mensualités. C'est une chance, car cela évite de faire peser une contrainte financière sur ses proches qui ont dû se résoudre, la mort dans l'âme, à la voir rejoigne une maison de retraite, l'évolution de la maladie d'Alzheimer ne lui permettant plus de vivre seule à son domicile.
Dans l'instantanéité d'un échange, Juliette raisonne très bien. Elle se dit plutôt heureuse, dans la continuité d'une vie tranquille, mais elle exprime aussi très clairement la différence entre ce que l'on pourrait appeler la vie biologique et la vie biographique.
Les moments qu'elle vit le plus intensément, sans équivoque, sont ceux passés avec ses cinq petits-enfants. Deux vivent à Paris et ne l'ont pas vue depuis Noël 2019, alors qu'ils étaient habitués à la voir à chaque période de vacances. Trois vivent à 500 mètres de l'EHPAD et l'ont vue à peine quelques heures depuis mars 2020.
Tout le monde s'accorde à souligner qu'il importe de protéger la vie, mais de quelle vie parle-t-on ? Celle de nos cellules ? La question est de savoir ce que nous vivons, comment nous le vivons et avec qui. Il ne suffit pas d'être en vie dans un EHPAD.
Juliette sera vaccinée la semaine prochaine, à peine un an après le séquençage par le professeur Zhang Yongzhen de ce nouveau virus – un exploit. Elle n'a pas idée de toutes ces polémiques, de toutes ces querelles. Juliette a toujours détesté les piqûres, mais là, elle n'hésite pas : si celle-ci lui permet de revoir ses petits-fils et petites-filles, elle sera très heureuse.
Le 22/01/2021 à 07:48, Laïc1 a dit :
"Tout le monde s'accorde à souligner qu'il importe de protéger la vie, mais de quelle vie parle-t-on ? Celle de nos cellules ? "La question est de savoir ce que nous vivons, comment nous le vivons et avec qui. Il ne suffit pas d'être en vie dans un EHPAD."
Biologiquement vivant, mais socialement mort... Et cela touche tous les citoyens. Il n'y a pas que les élus qui ont le droit de vivre.
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