Intervention de éric Dupond-Moretti

Séance en hémicycle du jeudi 14 janvier 2021 à 9h00
Conclusions du rapport de la commission d'enquête sur les obstacles à l'indépendance du pouvoir judiciaire

éric Dupond-Moretti, garde des sceaux, ministre de la justice :

Cette orientation me semble surtout poser des difficultés au regard de la dualité de missions confiées aux magistrats du parquet. Ceux-ci sont soumis aux mêmes devoirs d'impartialité que les magistrats du siège et développent librement à l'audience les observations « qu'ils croient convenables au bien de la justice », pour reprendre la formule du code de procédure pénale. Ils sont aussi chargés de la mise en oeuvre de la politique pénale, qui participe des politiques publiques du Gouvernement et qui relève de la responsabilité exclusive du garde des sceaux.

Concernant les autres propositions de réforme constitutionnelle, je suis très partagé. Je peux ainsi vous rejoindre sur la proposition consistant à inscrire dans la Constitution que le Conseil supérieur de la magistrature peut se saisir d'office de toute question relative à l'indépendance de l'autorité judiciaire. Je rejoins également la proposition de la commission d'enquête de renforcer les pouvoirs d'investigation du CSM, à quelques nuances près.

En revanche, je ne partage pas la proposition visant à inscrire dans la Constitution que tout magistrat pourra saisir le CSM s'il estime que son indépendance ou son impartialité est mise en cause. Cela entrerait, en effet, en contradiction avec des mécanismes qui existent déjà : les magistrats ont la possibilité de saisir le collège de déontologie des magistrats de l'ordre judiciaire, sur toute préoccupation d'ordre déontologique.

J'ai toujours dit que l'indépendance ne peut pas être synonyme d'irresponsabilité. Je considère que les garanties statutaires accordées doivent être consolidées, par un renforcement des obligations déontologiques et du régime de responsabilité des magistrats. Voulez-vous quelques chiffres ? Depuis 2015, 1 369 justiciables ont adressé une plainte au Conseil supérieur de la magistrature : trente-neuf d'entre elles ont été déclarées recevables, trois ont abouti à une procédure disciplinaire : zéro, vous m'entendez bien, zéro condamnation.

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