Intervention de Alain Tourret

Séance en hémicycle du mardi 19 janvier 2021 à 15h00
Élection du président de la république — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaAlain Tourret, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

Nous sommes réunis pour examiner un projet de loi organique dont le principal objet est de garantir le bon déroulement de la prochaine élection présidentielle qui se rapproche un peu plus de nous, jour après jour.

Il nous est proposé de respecter un principe cardinal en matière électorale : si nous procédons à quelques réglages rendus nécessaires pour actualiser les dispositions du code électoral à l'élection présidentielle, nous n'en modifions pas les principales règles. En effet, toute autre initiative pourrait soulever des interrogations parmi les citoyens sur les motivations du législateur et affecter la sincérité du scrutin.

C'est donc un texte pondéré et utile que notre commission a examiné et adopté, dans la grande majorité des votants. Tous les groupes présents se sont en effet accordés sur l'importance de l'élection présidentielle et il n'est pas superflu de souligner, comme l'a fait Mme la ministre déléguée, le rôle de clef de voûte du président de la République dans le cadre de cette élection. La prudence s'impose en la matière et toute modification des règles de l'élection doit avoir été au préalable examinée avec attention et précision, après consultation des différents groupes politiques et après avoir fait de l'expérimentation l'une des règles essentielles de toute modification du code électoral.

L'importance de cette élection se traduit également par le niveau des normes qui en régissent les modalités. Comme vous le savez, les principales règles relatives à l'élection présidentielle sont fixées par l'article 7 de la Constitution et par la loi organique du 6 novembre 1962. Toutefois, aussi singulière cette élection soit-elle, tant au regard des enjeux de la politique nationale qu'elle emporte, que de la participation électorale qu'elle suscite, de nombreuses mesures communes à l'ensemble des élections lui sont également applicables.

La loi organique renvoie ainsi aux articles concernés du code électoral, qui déterminent notamment les conditions dans lesquelles se déroulent la campagne électorale et les opérations de vote. Or, si le Conseil constitutionnel admet qu'une loi organique puisse renvoyer à des dispositions législatives ordinaires, il demande au législateur de mentionner expressément la version de ces dispositions qui s'applique. En effet, la modification d'une loi ordinaire ne peut entraîner d'elle-même celle d'une loi organique, à moins de contrevenir à la hiérarchie des normes.

Par conséquent, la loi organique du 6 novembre 1962 comprend un dispositif dit « compteur » qui détermine la version des dispositions législatives ordinaires applicables à l'élection présidentielle. En cas de modification de celles-ci ou d'introduction de dispositions nouvelles, il convient d'actualiser ce compteur et de prévoir, le cas échéant, de nouveaux renvois.

C'est l'un des principaux objets du présent projet de loi organique, qui comprend des aménagements relativement modestes recommandés par le Conseil constitutionnel et la CNCCFP, avec l'appui du Conseil d'État dont l'avis a été sollicité. S'il traite d'un événement et d'un sujet éminemment politique pour les raisons que j'ai citées, il s'agit d'un texte technique, dit de réglage, présenté par le Gouvernement un an avant le prochain scrutin présidentiel, comme le veut l'usage.

Ce texte soumet à votre examen quatre articles. L'article 1er vise à fixer à dix semaines avant la date du premier tour de l'élection présidentielle la publication du décret de convocation des électeurs. Ce délai doit garantir aux candidats un temps suffisant pour recueillir leurs parrainages et éviter que cette publication ne soit soumise aux aléas du calendrier de l'activité gouvernementale.

L'article 2 comporte plusieurs objectifs. En premier lieu, le report, au plus tard au 1er janvier 2027, de la transmission par voie électronique des parrainages au Conseil constitutionnel, mesure adoptée par le législateur en 2016. En effet, la France ne dispose pas, à ce jour, d'outil numérique suffisamment sécurisé pour permettre de recourir à cette faculté à l'occasion de la prochaine élection présidentielle et le Conseil constitutionnel a, lui-même, recommandé de différer l'application de cette mesure, pour éviter tout risque de fraude.

Deuxièmement, la liste des articles du code électoral applicables à l'élection présidentielle est actualisée, afin de prendre en compte diverses modifications législatives intervenues depuis la dernière révision de la loi organique du 6 novembre 1962 et d'effectuer les coordinations nécessaires.

Afin de faciliter les contrôles, la transmission à la CNCCFP, par voie dématérialisée, des comptes de campagne et des reçus de dons des candidats est rendue désormais obligatoire.

De plus, le vote par procuration des personnes détenues, expérimenté dans le cadre des élections européennes de 2019 et qui devait s'appliquer lors des élections départementales et régionales, s'appliquera dès la prochaine élection présidentielle.

L'article 3 actualise, quant à lui, le compteur de la loi organique du 6 novembre 1962, en prévoyant que les dispositions législatives ordinaires applicables à l'élection présidentielle sont celles en vigueur à la date de publication de la présente loi organique.

Il convient, par ailleurs, de prendre en considération la déterritorialisation des procurations, à savoir la possibilité pour un mandataire de voter pour un mandant même s'il n'est pas inscrit sur les listes électorales de la même commune. Cette mesure s'appliquera au prochain scrutin présidentiel. Pour être resté plus de trente-six ans maire de ma commune, je dois vous dire que cette faculté est considérée comme un grand progrès.

Enfin, l'article 4 prévoit des coordinations à la loi organique no 76-97 du 1er janvier 1976 relative aux listes consulaires et au vote des Français établis hors de France pour l'élection du président de la République, ainsi qu'un assouplissement des règles de remplacement des membres des commissions de contrôle des listes électorales consulaires.

La commission des lois a adopté plusieurs amendements de coordination ou de précision rédactionnelle, qui n'ont pas modifié le fond des dispositions proposées dans le présent projet de loi organique. Nous avons débattu de sujets intéressants, comme le recours aux procurations ou la participation électorale, qui nous ont conduits à rappeler que le principal objectif de l'élection reste d'abord, surtout et avant tout, de parvenir à un résultat sincère. Une forte participation dans des conditions qui alimenteraient le doute sur la sincérité des opérations représenterait un danger pour notre démocratie. Je me félicite, à ce titre, que nous ayons, les uns et les autres, la volonté d'assurer la sincérité du scrutin, c'est l'essence même des voies démocratiques qui nous réunissent. Bien évidemment, nous approuverons le projet de loi organique qui nous est soumis.

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