La proposition de loi visant à renforcer la lutte contre la maltraitance animale concerne ce qui est pour l'homme l'un des grands enjeux du XXIe siècle : son environnement, au sens large. Qu'il s'agisse des espèces animales ou de la planète, nous l'avons trop longtemps considéré comme notre chose. Il est aujourd'hui grand temps de le protéger sous ces deux aspects, et de retrouver ainsi la plénitude de notre humanité.
Au début des années 2000, le concept « une seule santé » a résumé en quelques mots une notion théorisée depuis plus d'un siècle : santé humaine et santé animale sont interdépendantes, de surcroît liées aux écosystèmes dans lesquels elles coexistent. Notre santé dépend de celle du règne animal, qui découle à son tour de celle des végétaux. La crise sanitaire que nous traversons nous le rappelle : notre existence dépend et continuera de dépendre de la nature. Cela doit nous inciter à toujours plus d'humilité et de bienveillance envers le monde qui nous entoure.
Souvenons-nous du chemin parcouru depuis la loi dite Grammont du 2 juillet 1850, instaurant des sanctions à l'encontre de « ceux qui auront exercé publiquement et abusivement des mauvais traitements envers les animaux domestiques ». S'ensuivront la création en 1963 du délit d'acte de cruauté envers un animal, la reconnaissance de la sensibilité des animaux, en 1976, par l'article L. 214-1 du code rural, le durcissement de leurs conditions de vente en 1999. Le 16 février 2015 constitue l'une des grandes dates concernant les droits des animaux : l'article 515-14 du code civil établit qu'ils sont « des êtres vivants doués de sensibilité ». Plus récemment, en 2020, l'annonce de la fin de la castration à vif des porcelets marque une nouvelle avancée notable. Cette proposition de loi s'inscrit donc dans un long cheminement, celui de la considération pour les animaux et de l'évolution normative et juridique qui, petit à petit, permet de mieux les protéger.
La cause animale est aujourd'hui devenue centrale et incontournable. Au cours d'échanges et de rencontres dans ma circonscription, j'ai pu constater que le sujet de la protection animale était aussi l'objet d'un véritable engagement citoyen. Dans le refuge Caresse de tigre, à Arelaune-en-Seine, des animaux vieillissants, fatigués par une vie passée loin de leur environnement naturel, trouvent ainsi le réconfort et la douceur. L'action résolue de l'association Biker animal force, dans la ville de Barentin, permet quant à elle d'accompagner et de soigner les animaux et de stériliser des chèvres. N'oublions pas, enfin, le développement des élevages et des poulaillers bio et ouverts, qui permettent de mieux respecter la vie animale.
Cet engagement de nos concitoyens, dans ma circonscription ou ailleurs, démontre que la cause animale progresse et que les consciences s'éveillent. Prendre soin des animaux, c'est faire preuve d'humanité globale, et nous devons encourager cette ambition. Avec l'amélioration des conditions de détention des animaux de compagnie et des équidés, le renforcement des sanctions dans la lutte contre la maltraitance des animaux domestiques ou encore l'arrêt de la maltraitance d'espèces sauvages utilisées à des fins commerciales, ce texte permet, en l'état, de lutter efficacement contre différentes formes de maltraitance animale. Il permettra notamment d'interdire les spectacles itinérants d'animaux sauvages et contribuera à une meilleure protection des animaux de compagnie.
Veillons néanmoins à ce que certaines propositions, apparaissant à première vue comme pleines de bon sens, soient bien accompagnées des moyens permettant de garantir leur bonne mise en oeuvre. Je pense en particulier à l'article 4, qui vise à généraliser la stérilisation des chats errants par voie d'arrêté pris par le maire de la commune concernée. Notre groupe sera vigilant à ce que les moyens accordés aux communes soient proportionnels à l'ampleur du phénomène constaté dans leur territoire. Évitons au bloc communal la mauvaise surprise de se voir confier des missions sans les ressources adéquates. Je pense que nous aurons l'occasion d'y revenir.
En tout état de cause, tel qu'il a été présenté par ses auteurs, ce texte constitue un premier point d'équilibre important. Certains auraient préféré aller plus loin ; certains auraient au contraire aimé limiter les mesures prohibitives ou coercitives ; d'autres auraient souhaité les différer, bien évidemment ; mais l'examen en commission a permis d'apporter des précisions et de renforcer l'ambition du texte. Comme les auteurs de cette proposition de loi, le groupe Socialistes et apparentés peut l'affirmer avec force : la souffrance animale est insupportable et doit être combattue.
J'emprunterai ma conclusion à Robert Badinter, qui rappelait en 2019, lors du colloque « Droits et personnalité juridique de l'animal », que « la prise en compte des animaux a fait dans notre société des progrès considérables. On peut s'en réjouir d'autant plus que ça n'est pas toujours le cas en ce qui concerne les êtres humains eux-mêmes. »