Intervention de Nadia Essayan

Séance en hémicycle du jeudi 28 janvier 2021 à 9h00
Accessibilité des magasins de la grande distribution aux personnes en situation de handicap — Présentation

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaNadia Essayan, rapporteure de la commission des affaires économiques :

Monsieur le président, madame la secrétaire d'État chargée des personnes handicapées, monsieur le président de la commission des affaires économiques, mes chers collègues, nous sommes réunis pour examiner la proposition de loi déposée par le groupe du Mouvement démocrate (MoDem) et démocrates apparentés, texte dont j'ai l'honneur d'être la rapporteure, qui est intitulée, depuis son passage en commission, « proposition de loi visant à améliorer l'accessibilité des personnes en situation de handicap aux magasins de la grande distribution et aux centres commerciaux ».

Pour vous expliquer ma démarche, j'aimerais tout d'abord revenir aux origines de la proposition de loi. Initialement, « l'heure silencieuse » est une expérimentation de terrain qui a vu le jour dans ma circonscription, à Vierzon. À la demande de la mère de Clémence, une adolescente autiste non verbale, le supermarché local a accepté d'instaurer, une fois par semaine, une heure silencieuse au cours de laquelle les lumières sont tamisées, la musique et les annonces sonores interrompues et le bruit des appareils électroniques diminués, afin de permettre à la jeune fille de faire sereinement ses courses avec son accompagnatrice, le mardi après-midi.

Les troubles du spectre autistique – TSA – étant encore malheureusement trop méconnus du grand public, il faut rappeler que la visite d'un supermarché peut se transformer en une véritable épreuve pour les personnes qui en sont atteintes. En effet, nombre d'entre elles souffrent d'une hypersensibilité sensorielle qui rend les lumières vives et l'environnement sonore propres aux zones commerciales très difficiles à vivre : ce sont, pour elles, de véritables agressions. En France, environ 700 000 personnes sont concernées par un trouble du spectre autistique. Pour Clémence, la jeune fille dont je vous parlais, l'heure silencieuse a permis une véritable amélioration, que j'ai moi-même eu la chance de pouvoir observer.

Après le succès de cette expérimentation locale, également instaurée dans d'autres supermarchés, certaines enseignes ont choisi de généraliser le dispositif. À partir de cette réussite, j'ai donc décidé de déposer une proposition de loi visant à généraliser l'heure silencieuse. J'ai conduit un travail de concertation avec les acteurs du commerce et les associations compétentes, que je remercie pour leur implication, leur esprit de dialogue et leur volonté d'agir.

Dans le cadre du travail que j'ai mené en tant que rapporteure de la proposition de loi, j'ai pu mesurer combien les difficultés pour accéder aux commerces et centres commerciaux étaient encore une réalité pour de nombreuses personnes en situation de handicap – et ce, quel que soit le handicap. La loi du 11 février 2005 pour l'égalité des droits et des chances, la participation et la citoyenneté des personnes handicapées a consacré un principe : l'accessibilité de tout, à tout, pour tous. Celui-ci est d'ailleurs très clairement énoncé à l'article L. 111-7 du code de la construction et de l'habitation. Mais plus de quinze ans plus tard, malgré les nombreux efforts des acteurs privés et des pouvoirs publics, qu'il faut saluer, le constat est sans appel : ce principe ne se traduit toujours pas pleinement dans les faits.

Si les agendas d'accessibilité programmée, que le législateur a validés en 2014, ont permis de nombreuses avancées, ils n'ont pas répondu à tous les problèmes et, aujourd'hui encore, la moitié des ERP, les établissements recevant du public, ne répondent pas aux normes d'accessibilité, telles que définies par la loi du 11 février 2005.

J'ai donc pris la décision d'élargir l'objet de ma proposition de loi, et je suis heureuse que, lors de son examen, la semaine dernière, tous les membres de la commission des affaires économiques m'aient suivie. Nos débats ont été passionnants et passionnés, et l'adoption du texte à l'unanimité montre que les commissaires ont été convaincus de la pertinence de ma proposition pour avancer vers une société plus inclusive et plus juste : je les en remercie très vivement. La version de la proposition de loi que nous avons adoptée en commission, issue d'un amendement que j'ai déposé, cosigné par l'ensemble de mon groupe, élargit considérablement le champ du texte initial, qui ne visait que l'heure silencieuse, lui donnant une ambition nouvelle.

Le texte que nous avons adopté remplace le dispositif de l'heure silencieuse par une négociation entre le monde associatif et les acteurs économiques concernés pour qu'ils progressent ensemble sur les questions d'accessibilité aux commerces de plus de 1 000 mètres carrés et centres commerciaux. La concertation, menée en lien avec le Gouvernement, doit aboutir dans un délai de dix-huit mois à compter de la promulgation de la loi, à l'issue desquels le Gouvernement rendra compte à la représentation nationale des mesures arrêtées et de leur calendrier d'application. À ce titre, je remercie Mme Sophie Cluzel, secrétaire d'État chargée des personnes handicapées, M. Alain Griset, ministre délégué chargé des petites et moyennes entreprises, ainsi que leurs équipes, avec qui nous avons longuement échangé sur les modalités et les objectifs de cette concertation. Je sais que la secrétaire d'État mettra tout en oeuvre pour qu'elle soit menée dans les temps, et dans un double esprit de dialogue et d'efficacité au service des plus fragiles.

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