Intervention de Gérard Collomb

Réunion du mardi 17 octobre 2017 à 16h30
Commission des affaires étrangères

Gérard Collomb, ministre d'État, ministre de l'intérieur :

Vous savez, messieurs Leroy et Hutin, que les services de renseignement ont été profondément remaniés il y a quelques années à la suite des dysfonctionnements constatés précisément lors de l'affaire Merah. La direction générale de la sécurité intérieure (DGSI) et les services du renseignement territorial ont été entièrement réorganisés. Le fonctionnement de nos services s'est très grandement amélioré, et en technicité et en nombre d'agents, les effectifs ayant été considérablement renforcés. Je ne prétends pas que tout soit parfait et que nous contrôlions entièrement la situation, mais quand on mesure le nombre d'attentats déjoués grâce à l'action des services, on comprend qu'ils sont très actifs – et ils coopèrent assez étroitement avec les services étrangers. À ce sujet, je reviens un instant sur le récent débat sur le projet de loi renforçant la sécurité intérieure et la lutte contre le terrorisme. « Vous n'avez qu'à judiciariser », nous ont dit certains – mais cela n'est pas possible puisque les informations nous sont transmises par des sources de renseignement étrangères que nous ne pouvons évidemment dévoiler au risque, sinon, qu'elles se tarissent. C'est pourquoi la rédaction du texte était indispensable dans la version qui a été adoptée par votre Assemblée la semaine dernière.

Nous nous préoccupons beaucoup de la lutte contre la cybercriminalité. Le député européen Arnaud Danjean a été chargé de mener les travaux du comité de rédaction de la revue stratégique de défense et de sécurité nationale. Il faut combiner le renseignement de terrain, autrement dit l'information « à bas bruit » – et l'intérêt de la police de sécurité du quotidien sera aussi de faire remonter ces indications – et des éléments technologiques tels que des saisies de contenus. La commission des lois de votre Assemblée peut se renseigner sur les techniques mises en oeuvre ; pour les avoir vues opérées, je puis vous dire qu'elles sont assez sophistiquées. Nous essayons de garder une longueur d'avance sur les cybercriminels pour déjouer leurs pratiques délictueuses, qu'il s'agisse de détournements de fonds, de trafic d'armes ou de stupéfiants ou, bien sûr, de terrorisme.

Je ne suis pas directement chargé, monsieur Hutin, d'élaborer les listes « noire » et grise ». Je vous dirai si l'information peut être divulguée ou si elle est réservée aux services.

J'en viens aux entreprises. Nous sommes dans un État de droit et, à la suite de la plainte déposée par l'ONG Sherpa en novembre 2016 à l'encontre du cimentier franco-suisse Lafarge-Holcim au sujet de ses activités en Syrie, une information judiciaire contre X a été ouverte par le parquet de Paris le 9 juin 2017, notamment des chefs de « financement d'une entreprise terroriste », de « mise en danger de la vie d'autrui » et de « soumission de plusieurs personnes à des conditions de travail et de rétribution incompatibles avec la dignité de l'homme ». L'affaire est à l'instruction et il ne m'appartient pas de la commenter mais la justice est saisie et elle suit son cours. Il n'y a pas d'impunité dans notre pays : quand il existe des chefs d'accusation, une enquête est ouverte et des mises en examen peuvent être prononcées. L'aboutissement de l'enquête montrera à quoi s'en tenir au sujet de l'entreprise Lafarge-Holcim.

Je suppose que vous avez fait allusion, monsieur Hutin, à l'artiste performeur contestataire russe arrêté il y a deux jours à Paris après une nouvelle performance. Mis à part qu'il se promenait nu sur la voie publique, , il a en effet aspergé d'essence deux fenêtres encadrant l'entrée d'une succursale de la Banque de France avant d'y mettre le feu, ce qui est plus gênant. Une plainte a été déposée contre lui, le parquet est saisi et l'on verra quelles suites judiciaires seront données à cet incident..

Pour qu'un étranger puisse être reconduit dans son pays d'origine, un laissez-passer consulaire est nécessaire. Certains pays en accordent beaucoup, d'autres, dont je ne vous donnerai pas la liste, vraiment très peu. Je prends contact avec tous mes homologues des pays considérés pour expliquer que nous délivrons des visas à leurs ressortissants mais que s'ils persistent à ne pas nous donner les laissez-passer consulaires qui nous permettent de reconduire à la frontière leurs ressortissants en situation irrégulière, nous réduirons le nombre des visas délivrés. Nous sommes passés à une phase assez active.

Au sujet des Albanais, vous avez raison. Une série d'organisations mafieuses sont à l'oeuvre qui restent dans les pays d'origine et qui dépêchent des petites mains partout en Europe. Il faut remonter et démanteler les filières, qui impliquent des nationalités très diverses, même si certaines sont plus présentes que d'autres. C'est ainsi que, le mois dernier, à Lyon, a été arrêté un pasteur évangéliste qui était à la tête d'un réseau d'immigration clandestine et de prostitution de très jeunes femmes africaines…

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