Je n'ai pas à réagir à la première partie de votre intervention, mais je répondrai volontiers à vos questions portant sur mon rôle de Contrôleur général des lieux de privation de liberté. Nous allons célébrer cette semaine, par un colloque, le dixième anniversaire de la création de l'autorité indépendante que je préside. Sa mission, définie par la loi du 30 octobre 2007, consiste à s'assurer que les droits fondamentaux des personnes privées de liberté par une décision de l'autorité publique sont respectés, en détectant tout dysfonctionnement éventuel dans un lieu de privation de liberté qui causerait une atteinte aux droits fondamentaux des personnes qui s'y trouvent.
Il n'existe pas de liste de droits fondamentaux, mais une conjonction de droits résultant de plusieurs textes, qu'ils soient nationaux, telle la Déclaration des droits de l'homme, ou internationaux, telle la Convention européenne des droits de l'homme. Notre rôle est donc de repérer les dysfonctionnements éventuels et, surtout, d'empêcher qu'ils ne se reproduisent. Pour cette raison, le Contrôleur général des lieux de privation de liberté est un « mécanisme national de prévention », instrument dont chaque pays membre de l'Organisation des Nations Unies doit se doter. Cet intitulé signifie que notre rôle n'est pas tant de régler la situation entre un détenu et la prison – nous le ferons par notre action – que de prévenir la répétition des dysfonctionnements détectés. Les droits fondamentaux des détenus sont légion, à commencer, bien sûr, par le droit à la vie et à l'intégrité physique, mais aussi le droit au maintien des liens familiaux, le droit à la santé, le droit à l'éducation, le droit à l'activité, tous droits consacrés par l'ensemble des textes auxquels je faisais référence.
Les prisons ont évidemment pour rôle de garder les détenus qui ont été condamnés par la justice, mais aussi, conformément aux dispositions de la loi pénitentiaire du 24 novembre 2009, de préparer leur sortie et leur réinsertion. Or, le fonctionnement actuel des prisons françaises est tel que la mission de réinsertion assignée aux prisons par la loi ne peut plus être remplie ; la surpopulation carcérale et l'état des prisons l'empêchent. Il en résulte que les détenus n'ont pas seulement payé leur dette à la société : malheureusement, ils sortent de prison encore plus désocialisés qu'ils y sont entrés. C'est le noeud du problème.