Je souhaiterais évoquer la situation du Camp-Est, centre pénitentiaire de la Nouvelle-Calédonie. Ainsi que vous l'avez considéré, cette prison n'est pas épargnée par la surpopulation, avec un taux d'occupation colossal culminant à 136 % sur l'ensemble de l'établissement, à 196 % dans la maison d'arrêt des hommes – et une belle égalité des sexes puisque ce taux atteint 200 % chez les femmes.
Les agents de l'administration pénitentiaire nous ont indiqué que la situation ne faisait que s'aggraver, car ce taux d'occupation était de 168 % en 2016 : un cap inquiétant a donc été franchi. Une corrélation avec la proximité de la prochaine consultation référendaire et une exacerbation des tensions susceptibles d'en résulter n'est certes pas à exclure.
À ce constat vient malheureusement s'ajouter celui d'un sous-effectif chronique de personnels : les détenus ne sont surveillés que par 140 personnes, toutes catégories confondues, soit 25 le jour et 10 la nuit. Il n'y a ni équipes de fouille ni équipe de transfèrement ; quant aux extractions, elles sont compliquées par des contraintes matérielles caractéristiques des outre-mer. Il n'y a pas non plus d'équipes d'intervention et de sécurité, ce qui provoque un profond sentiment d'insécurité chez les personnels. Le Camp-Est détient d'ailleurs de sombres records en matière de mutineries et d'évasions.
Toutefois, la perspective de la construction d'un centre pénitentiaire dans le Nord apporte quelque espoir, car la Nouvelle-Calédonie est longue de 400 kilomètres, soit la moitié de l'Hexagone, et, comme pour la Corse ou le Pays basque, l'éloignement rend plus difficile la visite des familles. Or il est notoire que le rapprochement familial contribue largement à faciliter la réinsertion après l'incarcération.
Nous pouvons enfin espérer une augmentation des personnels.
Par ailleurs, notre environnement n'est pas seulement particulier sur le plan géographique, il l'est aussi sur le plan juridique, de nombreuses compétences étant exercées par le territoire ou par les collectivités locales. De son côté, l'État détient la compétence régalienne sans pour autant disposer des moyens législatifs et financiers propres à améliorer la préparation à la réinsertion, ce qui se traduit par un taux de récidive de 70 % à 75 %.
Conduisez-vous, madame la Contrôleure générale, une réflexion particulière sur le contexte ultramarin, la Nouvelle-Calédonie n'étant pas seule concernée par ces tropismes locaux ? Singulièrement pour la Nouvelle-Calédonie, et bien que l'État ne soit pas compétent dans l'ensemble du procès, ne pourrait-il pas proposer des mécanismes d'accompagnement ? Sans aller jusqu'à l'imposer, ne pourrait-il pas, en s'exonérant du contexte réglementaire en vigueur, suggérer aux collectivités territoriales néocalédoniennes l'institution de travaux d'intérêt général, qui font défaut, ou de soutenir financièrement à cet effet des entreprises locales ?