Nous poursuivons aujourd'hui l'examen du sixième projet de loi relatif à l'état d'urgence sanitaire. Comme le ministre des solidarités et de la santé et moi-même l'avons rappelé à plusieurs reprises, les mesures de police sanitaire que le Gouvernement a dû prendre depuis le premier trimestre 2020 ont heureusement permis de juguler drastiquement la propagation de ce virus qui bouleverse tant nos vies. Les deux périodes de confinement que nous avons vécues, le couvre-feu, le port du masque et plus généralement la limitation des rassemblements, que chacun s'impose en responsabilité, auront permis – et continuent de permettre – d'éviter la saturation de notre système de santé, en particulier des services de réanimation.
Notre préoccupation quotidienne est le respect d'un nécessaire équilibre entre la protection essentielle pour sauver des vies et les adaptations que nous prenons pour assurer que nos vies en aient plus que le seul nom. Sauver des vies sans que la vie s'arrête, voilà notre responsabilité, et elle est immense.
Protéger les plus fragiles, à commencer par nos aînés, c'est mon devoir et c'est notre devoir à tous, parce que la fraternité n'est pas un mot abstrait, tout juste bon à orner les bâtiments publics. C'est une exigence concrète, quotidienne, et nous n'avons pas choisi autre chose depuis le début de cette épidémie. Le Gouvernement est pleinement conscient des sacrifices que chacun a consentis pour nous permettre de tenir ensemble. Les efforts de chacun ont permis d'éviter le pire.
Pour autant, cette épidémie continue de sévir dans le monde entier, et notre pays n'est pas épargné. Si les dernières mesures que nous avons su prendre ont porté leurs fruits, l'émergence de nouveaux variants change la donne. Elle nous fait craindre une circulation virale plus rapide, plus difficile à contrôler. Nous devons être en mesure d'y faire face pleinement, pour ne pas créer une épidémie dans l'épidémie. C'est pourquoi il paraît essentiel de nous armer face à cette menace grandissante.
Pour lutter contre ces variants, notre réponse passe notamment par l'augmentation significative des capacités de séquençage et le déploiement de kits PCR criblant les variantes connues à date, par un renforcement des mesures de contact tracing lors de toutes les investigations de cas suspectés ou confirmés, ainsi que par des actions de renforcement de l'isolement, avec l'intervention d'infirmières à domicile auprès des cas positifs aux variants.
L'état d'urgence sanitaire est déclaré depuis le 17 octobre 2020 sur l'ensemble du territoire national et, à la demande du Gouvernement, il a été prorogé par le Parlement jusqu'au 16 février 2021 par la loi du 14 novembre dernier. En dépit de ces efforts, la situation sanitaire demeure préoccupante et l'évolution prévisible de l'épidémie de covid-19 nous amène à demander au législateur une prorogation de l'état d'urgence sanitaire jusqu'au 1er juin 2021.
Cette date a fait l'objet de débats et, si l'on peut bien sûr regretter que les deux chambres n'aient pu trouver un accord, je comprends aussi ce qui vous a pleinement mobilisés lors de la réunion de la commission mixte paritaire. Je salue la position de votre commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République, position qui permet au Gouvernement d'agir en responsabilité jusqu'à cette échéance, et qui se veut équilibrée au regard de la situation actuelle et de ce qu'elle suppose.
Ces choix ne sont jamais faciles. On ne prend pas de telles décisions sans les mesurer pleinement, dans toutes leurs dimensions sanitaires, sociales, économiques – humaines en somme. C'est encore cet impératif de responsabilité, que nous devons aux Français, qui nous pousse à prendre toutes les mesures possibles pour que le confinement ne soit plus que la mesure de dernier recours pour sauver nos capacités hospitalières et éviter que les vies de nos concitoyens ne soient mises en péril.
Je veux dire aux Français et à leurs représentants ici présents que je mesure leur lassitude – je la partage pleinement – , mais aussi que la brutalité de la crise nous impose des mesures que nul n'aurait imaginé devoir prendre dans les perspectives les plus difficiles, parce que, oui, ce que nous vivons aujourd'hui relevait de l'impensable il y a un an. C'est au regard de ces éléments que je salue le travail de la commission des lois pour revenir sur les principales mesures permettant au Gouvernement d'agir en responsabilité. Je pense en particulier au rétablissement de la date de fin de régime de l'état d'urgence sanitaire au 1er juin 2021. Nous souhaitons tous que ce régime d'exception soit le plus bref possible, mais nous devons être en mesure d'agir.
De la même façon, je salue le rétablissement par la commission des lois de l'échéance de fin de mise en oeuvre des systèmes d'information de lutte contre l'épidémie au 31 décembre prochain. Cette période supplémentaire va nous permettre de parer à toute éventualité, mais aussi, sur le plan technique et scientifique, de mesurer toutes les évolutions en cours à date. Concrètement, ces outils permettent aujourd'hui que plus de 93 % des cas index et 85 % des cas contacts soient joints dans les vingt-quatre heures par l'assurance-maladie. C'est primordial.
À nouveau, le Gouvernement souhaite donc fixer un cap, que nous révisons à mesure que la situation évolue, mais qui donne une échéance, une orientation. C'est un enjeu démocratique et nous nous y tenons. Reste que l'évolution de la situation nous a imposé de repousser progressivement cette échéance. Nous nous en serions bien passés, vous, moi, nous tous ici, comme les Français.