Je pense, en tout cas, que les critères de placement en détention provisoire doivent être mieux respectés.
S'agissant des mères détenues, je confirme qu'elles peuvent garder leurs enfants avec elles dans le lieu de détention jusqu'à l'âge de dix-huit mois, exceptionnellement jusqu'à deux ans. Ce débat est très complexe, car il confronte deux injonctions contradictoires : est-il plus dramatique de séparer un bébé de quelques jours de sa mère, ou de le faire vivre dans une prison avec sa mère ?
Je n'ai pas la réponse à cette question ; il me semble simplement que, lorsque les nurseries sont bien organisées, ce qui est le cas à Fleury-Mérogis – comme, généralement, dans les nurseries de quelque importance, les petites nurseries posant plus de problèmes –, cela se passe plutôt bien. Reste qu'il n'est jamais bon pour un enfant de passer les premiers mois de sa vie dans une prison. Si la famille peut prendre l'enfant en charge, cela peut-être préférable, mais, hélas, c'est rarement le cas. À l'occasion d'un colloque auquel j'ai participé, j'ai entendu des spécialistes considérer qu'en tout état de cause, à partir du moment où l'enfant commence à marcher, c'est-à-dire vers un an, il n'est pas souhaitable qu'il vive dans l'univers carcéral.
Nous ne disposons pas d'études statistiques relatives aux problèmes psychologiques des personnels pénitentiaires. Toutefois, dans le rapport que nous avons consacré à ces agents il y a quelques mois, nous avons proposé la mise en place de pratiques de supervision. Nous l'avons proposée pour tous les traumatismes auxquels les surveillants sont susceptibles d'être confrontés, notamment lors de situations de violences ou de suicides – on se suicide sept fois plus en prison qu'à l'extérieur, proportion considérable –, car si le suicide est dramatique pour le détenu et sa famille, il l'est aussi pour le gardien qui découvre un corps pendu dans une cellule.
Cette pratique peut recevoir plusieurs appellations, comme « groupe de parole », par exemple. Malheureusement, les surveillants n'y recourent que très peu, comme si rencontrer le psychologue de l'établissement ou un interlocuteur extérieur constituait une preuve de faiblesse, ce qui est d'ailleurs emblématique de l'image du gardien de prison véhiculée dans l'imaginaire collectif. Il est donc souhaitable que l'administration pénitentiaire s'emploie à généraliser cette pratique.
Enfin, la prison peut-elle être salutaire ? Vaste question… C'est parfois le cas, lorsqu'une première peine d'emprisonnement a été prononcée et que l'intéressé ne récidive pas. Mais je ne suis pas en mesure de vous répondre sur le plan général. En revanche, les conditions actuelles de la détention causent beaucoup plus de dégâts qu'elles n'apportent d'éléments positifs ; c'est une certitude.