Intervention de Marlène Schiappa

Séance en hémicycle du lundi 8 février 2021 à 21h00
Respect des principes de la république — Article 14

Marlène Schiappa, ministre déléguée chargée de la citoyenneté :

N'ayant pas encore pu donner l'avis du Gouvernement sur l'amendement, je me permets de préciser qu'il est défavorable.

Je réponds à la question soulevée par M. de Courson. Comme l'a rappelé la rapporteure, l'expression « vivre en état de polygamie » existe dans la loi depuis les années 1990. Depuis lors, il n'y a jamais eu de jurisprudence contradictoire, ni de problème d'interprétation, dans aucune décision que ce soit. Il est manifeste pour le législateur, pour les juristes et pour tous les services concernés que « vivre en état de polygamie en France », c'est être marié avec plusieurs personnes qui résident en France.

Les lois que nous élaborons concernent des faits qui se passent en France, des aspects de la vie de notre pays. Nous visons donc bien la situation que j'ai décrite.

Monsieur Pancher, on estime que 20 000 à 30 000 adultes vivent en état de polygamie en France. Si nous avons décidé d'introduire dans le texte des dispositions pour mieux lutter contre la polygamie, c'est parce qu'elle est un drame pour les femmes, qu'elle entrave leurs droits. Je rappelle que nous parlons ici non de situations individuelles, mais d'un système fondé sur la domination masculine, qui fait perdre des droits aux femmes.

Le mariage, régi par le code civil, distinct d'une relation libre, ouvre un certain nombre de droits, en matière d'héritage – nous en avons discuté précédemment – , de filiation, de pension de réversion. Or, dans une union polygame, les droits des femmes sont amoindris ; c'est une violence qui leur est faite.

Les femmes victimes de la polygamie sont souvent étrangères et parfois très jeunes. Nous voulons les protéger. Nous avons reçu cette semaine au ministère de l'intérieur de nombreuses associations qui travaillent avec elles, notamment le Groupe pour l'abolition des mutilations sexuelles – GAMS – , Excision, parlons-en ! , Regards de femmes. Parfois, ces jeunes filles ne savaient même pas qu'elles allaient rejoindre en France un homme qui y était déjà marié avec une ou plusieurs autres femmes.

Il est fondamental de mieux protéger ces femmes et de défendre leurs droits. Il y a plusieurs années, la République française a interdit la polygamie, en introduisant dans son droit la notion de « vie en état de polygamie ». Aujourd'hui, elle se donne les moyens d'aller plus loin, dans l'intérêt de toutes ces femmes qui subissent cette situation.

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