Monsieur le Premier ministre, dès le mois d'avril dernier, nous vous alarmions sur la détresse de la jeunesse en utilisant l'expression « génération sacrifiée ». Depuis, vous avez élaboré un plan de vingt-six mesures pour tenter de répondre à ce problème. Mais ces mesures sont-elles à la hauteur de la détresse qui envahit toute une génération ?
Je ne le crois pas, d'abord parce qu'elles s'adressent toutes au même public : celui des jeunes entrant sur le marché de l'emploi, or toute la jeunesse est loin de se trouver dans ce cas. Chaque jeune est unique : il y a ceux qui cherchent leur premier emploi et pour qui ce moment est crucial, mais il y a aussi tous ceux qui sont encore dans un système de formation et qui, vous le savez aussi bien que nous, se trouvent dans une situation désespérée. À ceux-là, vous répondez d'une manière trop complexe et trop dispersée – sur vingt-six mesures, il y en a sûrement une vingtaine de trop.
Sans polémiquer sur le sujet, mon sentiment est que la gravité de la situation appelle à beaucoup plus d'efforts. Le Gouvernement doit mobiliser la nation tout entière : les administrations, les collectivités territoriales, les entreprises, les citoyens ; toutes les forces vives de la nation. Nous parlons d'une jeunesse désoeuvrée, esseulée, avec un horizon rétréci ; nous parlons d'un mal-être profond ; nous parlons d'idées suicidaires, de rêves qui s'effondrent. Les questions concrètes sont nombreuses face à la dégradation des conditions d'enseignement. Allez-vous garantir la valeur des diplômes ? Pourquoi n'avoir pas prévu un report des conventions pour que les étudiants puissent faire leur stage ultérieurement, en France ou à l'étranger ? Pourquoi ne pas avoir créé, à l'image du fonds de solidarité, un fonds étudiant pour tous les jeunes qui ne trouvent pas de petit boulot cette année alors qu'ils en avaient un avant la crise ?
Votre action ne peut pas laisser de côté tout un pan de la jeunesse. Nombreuses sont les idées et les initiatives qu'il faut encourager, qu'il s'agisse d'hébergement, de cours de soutien ou de formations expresses qualifiantes. Nombreux sont les acteurs professionnels ou associatifs qui pourraient aider. Il faut clarifier les rôles entre Pôle emploi et les missions locales, il faut créer une task force permanente dédiée à la jeunesse au sein du Gouvernement… Bref, se mobiliser plus que jamais pour éviter une génération aux illusions perdues. Monsieur le Premier ministre, le ferez-vous ?