La séance est ouverte.
La séance est ouverte à quinze heures.
Monsieur le Premier ministre, beaucoup d'efforts sont demandés aux Français, la pauvreté augmente et les salaires stagnent. Pendant ce temps, le monde de la finance continue sans vergogne de délocaliser ses bénéfices dans des paradis fiscaux, dans des pays où les taux d'imposition sont nuls, parmi lesquels le Luxembourg, pays membre de l'Union européenne.
Grâce à leur formidable travail, des journalistes dénoncent le fait que 6 500 milliards d'euros d'actifs financiers s'y trouvaient, protégés par une myriade de sociétés offshore et par des schémas d'optimisation fiscale tout à fait légaux. Ces entreprises n'ont pas de bureau, n'emploient pas de salariés, ne produisent rien mais siphonnent nos richesses, celles des salariés français et le budget de la nation, en permettant à des multinationales, telles que LVMH, Kering, Apollo ou Amazon de délocaliser leurs plus-values sans payer d'impôt sur ces dernières.
Par ailleurs, 15 000 Français détiendraient 100 milliards d'euros d'actifs dans ce paradis fiscal. Quand j'entends la ritournelle selon laquelle il faudrait, au nom des traités européens, payer la dette liée au covid-19, je me dis qu'il faudrait d'abord arrêter la concurrence fiscale entre pays européens. Il serait juste aussi de demander aux multinationales de payer tous leurs impôts en France, comme le font d'ailleurs la très grande majorité des petites entreprises.
Monsieur le Premier ministre, allez-vous demander aux services fiscaux d'enquêter sur ces grandes fortunes et ces multinationales qui pillent la richesse produite par le monde du travail ? Allez-vous enfin mettre à l'étude la proposition de loi déposée par les députés communistes qui vise à prélever à la source les bénéfices des multinationales avant qu'ils ne soient délocalisés dans les paradis fiscaux ?
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR, FI et sur quelques bancs du groupe SOC
Vous nous avez interrogés au sujet de l'enquête publiée par les journalistes du Monde et quinze autres organes de presse, relative à un certain nombre d'actifs et d'avoirs placés au Luxembourg.
Il y a 20 millions d'euros d'évasion fiscale, mais à part ça, tout va bien !
Cette enquête repose sur l'analyse des données des bénéficiaires actifs, c'est-à-dire les propriétaires réels des sociétés inscrites au registre du commerce et des sociétés. L'administration fiscale fait elle-même usage de ces données puisque la France a fait de la transparence des bénéficiaires actifs l'une de ses priorités. C'est à son initiative qu'un registre centralisé et public a été constitué en 2016 au niveau européen, ce qui nous permet de nous appuyer sur un outil répertoriant plus de 3,5 millions d'entreprises, de personnes morales, de trusts ou de fiducies qui ont recours à ces montages internationaux.
Je précise que l'administration fiscale française travaille étroitement avec l'autorité compétente du Luxembourg : lorsque nous leur adressons une demande d'information en matière d'impôts directs, le délai de réponse moyen s'élève à trois mois et demi, ce qui, en comparaison avec d'autres pays, est un résultat plus qu'honorable.
Depuis 2016, grâce à l'échange automatique prévu dans le cadre des accords internationaux, le nombre d'informations reçues sur les particuliers n'a fait que croître : si nous avons obtenu 240 000 informations en 2016, nous en avons reçu 355 000 en 2019, soit une croissance de 48 %. Cela nous permet de mener les contrôles les plus adéquats possibles pour lutter contre l'optimisation et les placements illicites.
J'ajoute qu'en matière de lutte contre l'évasion fiscale internationale, les résultats de la France sont en hausse : entre 2018 et 2019, les contrôles ont porté sur 5,7 milliards d'euros d'actifs contre 5,1 milliards précédemment, soit une augmentation de 12 %. S'il reste énormément de travail à accomplir en la matière, soyez assuré de la mobilisation de toute l'administration fiscale.
Monsieur le ministre, vous ne vous attaquez pas à la guerre fiscale que mènent des pays de l'Union européenne contre la France. Au Luxembourg, le taux d'imposition sur les dividendes est de 0 % quand il s'élève à 30 % pour nos PME. Telle est la guerre fiscale qui pille les richesses de notre pays !
Applaudissements sur les bancs du groupe GDR.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, en juillet 2017, à peine élu, le Président Macron nous promettait qu'il n'y aurait plus de fermetures de classes dans les écoles primaires rurales.
Pourtant, dès février 2018, le Gouvernement décidait d'importantes fermetures pour la rentrée suivante.
Nouveau revirement : le 27 mars dernier sur TF1, vous-même promettiez qu'il n'y aurait aucune fermeture de classe primaire en milieu rural, sauf avec l'accord explicite des maires. Vous le justifiiez très logiquement par les circonstances exceptionnelles liées à la crise sanitaire.
Or on nous annonce de multiples fermetures à la rentrée prochaine dans toute la France : …
… quarante-deux dans le Vaucluse, quarante en Haute-Marne, trente-trois dans l'Ain – je parle sous le contrôle du président Abad – , trente dans les Vosges, trente-deux dans les Côtes-d'Armor, département dont j'ai l'honneur d'être l'élu.
Comment voulez-vous que les Français aient encore confiance dans la parole publique quand vous revenez aussi rapidement sur vos promesses ? Qu'est-ce qui a vraiment changé depuis l'an dernier ? La pandémie serait-elle éradiquée ? Pensez-vous qu'en entassant des enfants, toujours plus nombreux dans des classes, la distanciation sociale sera respectée ? Ne prononcez-vous pas, une fois de plus, des propos contradictoires et inaudibles, qui sont parfois révoltants ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Je vous le demande très simplement, monsieur le ministre : respectez les engagements que vous avez pris publiquement !
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Les promesses ont été faites et elles ont été tenues, vous le savez.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
Les promesses qui ont été faites, vous les connaissez, et elles sont inédites dans l'histoire de la République. Premièrement : ne pas fermer une seule école rurale sans l'accord du maire. Et elle vaut encore : si vous me citez l'exemple d'une école qui aurait fermé sans l'accord du maire, nous la rouvrirons.
Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Il est tout à fait exact que, pour la rentrée 2020, le Président de la République s'est engagé à quelque chose de totalement inédit, …
… à savoir qu'aucune classe ne serait fermée sans l'accord du maire. Nous avons tenu cette promesse,
Plusieurs députés du groupe LR font un signe de dénégation
ce qui nous permet de battre aujourd'hui des records historiques de taux d'encadrement puisque, depuis 2016, le Gouvernement ne cesse de créer des postes – plus de 7 000 – dans le premier degré alors même qu'il y a 195 000 élèves de moins. Le taux d'encadrement ne cesse donc de s'améliorer, y compris dans votre département des Côtes-d'Armor, où il y a plus d'ouvertures que de fermetures.
Vous jouez sur les peurs, en dénonçant la moindre fermeture de classe mais sans mentionner, bien entendu, les ouvertures. Si nous faisions le contraire, nous serions des démagogues, parce que cela voudrait dire que certaines classes compteraient beaucoup d'élèves et d'autres peu. Vous le savez, il faut procéder à un rééquilibrage permettant, même dans les écoles où nous fermons des classes dans votre département, d'avoir au plus vingt-et-un élèves par classe.
Monsieur le député, soyons raisonnables ! La priorité donnée à l'école primaire est clairement définie et nous permet de disposer du meilleur taux d'encadrement que la France ait jamais connu.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Je constate, monsieur le ministre, que vous n'avez pas nié toutes ces fermetures. Or elles sont très dangereuses. En effet, si vous supprimez une classe d'une école rurale qui en comprend trois, chacune disposant, en moyenne, de quatre niveaux, il ne restera plus que deux classes. À terme, cela signifie qu'on condamne l'école et vous le savez très bien, parce que vous êtes un spécialiste de ces questions. Je pense aux enfants, à leurs parents, aux maîtres, aux directeurs et directrices d'école, à tous ceux qui défendent nos écoles, en particulier aux élus ruraux, lesquels ne constatent qu'une chose : des engagements ont été publiquement pris et ne sont pas tenus.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
Ma question, à laquelle j'associe mon collègue de Marmande, Alexandre Freschi, s'adresse à M. le ministre de l'intérieur. Depuis plusieurs jours, des crues d'une rare ampleur ont inondé de nombreuses communes du sud-ouest de la France. Après la Garonne, c'est la Charente et ses affluents qui ont envahi Saintes et les communes environnantes en Charente-Maritime.
Tout d'abord, permettez-moi de m'associer à la détresse des familles victimes des inondations, et à leur désarroi face à une situation d'une gravité exceptionnelle, sans précédent depuis 1994. Depuis vendredi dernier, j'ai eu l'occasion de me rendre dans de nombreuses communes douloureusement touchées et de mesurer l'ampleur des dégâts. J'ai également pu mesurer à quel point les services de l'État ont su se mobiliser rapidement et efficacement.
Je tiens, à cette occasion, à rendre hommage, au nom de la représentation nationale, à l'ensemble des acteurs : élus, sapeurs-pompiers, gendarmes, policiers, militaires, bénévoles de la sécurité et de la protection civile et membres de la Croix-Rouge qui n'ont jamais compté leurs efforts pour sauver des vies et porter secours à la population.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et SOC.
Je voudrais également saluer les riverains qui ont fait preuve d'une grande solidarité et d'entraide à l'égard des sinistrés. Je remercie tout particulièrement Mme Bérangère Abba, secrétaire d'État chargée de la biodiversité, pour sa présence et son soutien au nom du Gouvernement, ce lundi 8 février. Enfin, j'ai une pensée sincère pour nos commerçants et restaurateurs, déjà durement touchés économiquement depuis un an en raison de la crise sanitaire, qui vivent une nouvelle épreuve. Qu'ils soient assurés de toute notre détermination pour les aider à surmonter ces difficultés.
Monsieur le ministre, une fois la décrue terminée, la question du nettoyage, des réparations et parfois des reconstructions des dommages subis se posera. Elle doit être notre priorité. Aussi pouvez-vous nous assurer que l'état de catastrophe naturelle sera déclaré le plus rapidement possible, afin de permettre aux nombreux sinistrés d'obtenir une indemnisation dans les plus brefs délais ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe Dem.
À votre suite, je voudrais rendre hommage aux agents publics, aux pompiers, aux policiers et aux gendarmes, aux agents des préfectures, aux agents des collectivités locales, aux agents de la fonction publique hospitalière, ainsi qu'à tous les bénévoles et à tous ceux qui sont intervenus aux côtés des élus locaux pour affronter la catastrophe que connaît votre région, à la suite d'intempéries très importantes.
La mobilisation des acteurs locaux comme nationaux, les messages de prévention, et la collaboration entre les collectivités locales et l'État, par l'intermédiaire du corps préfectoral que je remercie ici, ont permis, malgré les difficultés très importantes, d'éviter des drames encore plus graves, notamment de nombreux drames humains.
Ainsi que vous l'avez rappelé, M. le Premier ministre et Mme la secrétaire d'État se sont rendus sur place : ils ont ainsi constaté la mobilisation des acteurs et les difficultés rencontrées. Sous l'autorité du Premier ministre, Mme la ministre de la transition énergétique, Barbara Pompili, et moi-même sommes en mesure de vous annoncer que d'ici à vendredi, l'état de catastrophe naturelle sera décrété et permettra à l'ensemble du sud-ouest de bénéficier des justes aides pour reconstruire ce beau territoire.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM et quelques bancs du groupe Dem.
Mme la ministre chargée de la mémoire et des anciens combattants, Geneviève Darrieussecq, a appelé mon attention sur le nécessaire accompagnement de la part des services de l'État, afin de pouvoir reconstruire, réparer et permettre aux populations de vos territoires, vis-à-vis desquelles la nation exprime son entière solidarité, de surmonter les difficultés rencontrées.
Madame la ministre chargée des collectivités territoriales, la crise sanitaire a confirmé le rôle fondamental des collectivités territoriales dans la lutte contre la pandémie. Elles ont été un rouage essentiel dans l'application des mesures sanitaires et économiques, et leurs interventions ont parfois permis de pallier les carences de l'État.
Les derniers mois ont mis en évidence les limites et les lourdeurs d'un système trop centralisé et trop administré. À l'automne dernier, madame la ministre, vous aviez présenté les grandes lignes du projet de loi de réforme territoriale, dit 4D – relatif à la décentralisation, la déconcentration, la différenciation et la décomplexification. Mais, plus les mois avancent, plus l'ambition de cette réforme se rabougrit, au point que l'on parle désormais de son enterrement.
Le 9 janvier dernier, le Premier ministre indiquait que ce ne serait « ni une révolution ni un nouvel acte de la décentralisation ». Contrairement aux arguments avancés, je crois qu'il est urgent de moderniser notre organisation, pour aller vers plus de proximité et moins de verticalité. En Corse, par exemple, les relations entre l'État et les collectivités se sont dégradées, et il serait souhaitable qu'à l'avenir l'État examine les voeux et les initiatives de l'exécutif territorial et de l'Assemblée de Corse dans un esprit de coconstruction.
Sans doute faudrait-il revenir à l'esprit qui a présidé au discours du candidat Macron à Furiani : écoute des territoires et des élus, prise en compte des spécificités, le candidat ayant même évoqué « l'émancipation de la Corse ».
Ma question est donc simple : La réforme territoriale du projet de loi 4D sera-t-elle menée à terme avant la fin du quinquennat ?
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LT.
Vifs applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.
Sourires.
Le projet de loi est effectivement très attendu sur le terrain par les élus locaux, en témoigne leur importante participation aux nombreuses réunions de concertation organisées dans toutes les régions par ma ministre de tutelle, Jacqueline Gourault. Vous le savez, plus de 2 000 élus de toutes les collectivités ont été rencontrés et consultés dans le cadre de l'élaboration de ce texte.
Le projet de loi 4D répondra en priorité au besoin de différenciation qui s'exprime unanimement dans tous les territoires et sur tous les bancs de cette assemblée. L'objectif est d'adapter nos politiques à la spécificité de chaque territoire et ainsi de favoriser l'équité territoriale que nous recherchons tous.
Ce besoin de différenciation s'exprime tout particulièrement en Corse. Je n'ai pas oublié les débats de 2016 sur l'île-montagne, auxquels je participais comme député. Des évolutions sont envisageables, mais seulement dans la limite de ce que permettent la loi et la Constitution. Si elles font l'objet d'un consensus parmi les élus locaux de Corse, des mesures pourront être présentées, notamment en matière d'adaptation de l'urbanisme. Nous étudierons évidemment vos propositions avec beaucoup d'attention.
Vous le savez, le Sénat a déjà posé une première pierre en votant le projet de loi organique relatif à la simplification des expérimentations par les collectivités locales, texte que l'Assemblée nationale examinera à son tour début mars.
Le projet de loi 4D a aussi vocation à poursuivre le processus de décentralisation et à proposer des mesures de simplification de l'action publique locale. Il contiendra des mesures qui améliorent l'efficacité des politiques publiques du quotidien pour, par exemple, renforcer la qualité des routes ou encore perfectionner des dispositifs d'insertion professionnelle.
En ce qui concerne son examen, comme l'ont déjà indiqué le Premier ministre et Jacqueline Gourault, le calendrier parlementaire de ce premier trimestre 2021 est évidemment consacré à des textes apportant une réponse immédiate à la crise que traverse notre pays. Le calendrier parlementaire de l'année 2021 dans son ensemble est très chargé et n'est pas encore entièrement défini. Naturellement, nous vous tiendrons informés dès que celui-ci sera fixé.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Nous prenons acte de votre non-réponse sur le fond. Les questions, que nous nous posons tous, de la ventilation des compétences entre l'État central et les territoires, du millefeuille administratif, de la meilleure prise en compte de cette diversité économique, culturelle, sociale et géographique qui fait la richesse de la France, restent donc en suspens. Nous constituons ici une mosaïque de tous les territoires français…
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LT.
Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, la crise sanitaire que nous traversons bouleverse nos habitudes, notre vie quotidienne, et nous plonge dans un malaise de plus en plus prégnant. Cependant, elle doit aussi nous faire réfléchir, nous amener à nous remettre en question, afin d'anticiper plutôt que de subir.
Lorsque l'on observe les autres pays, on constate des solutions nouvelles, comme à Madrid où un hôpital, le Zendal, a été construit en 100 jours et peut accueillir jusqu'à 1 000 malades atteints du covid-19. Certes, il n'y a pas de bloc opératoire ni d'ascenseur dans cette infrastructure, seulement des lits, des médecins et des infirmières. Le Zendal a été bâti à proximité de l'aéroport, avec des modules de cinquante lits pour optimiser le suivi des patients et identifier plus rapidement une dégradation soudaine de l'état de leur système respiratoire. Autre innovation : le système d'aération, qui renouvelle l'air quatorze fois par heure.
Cette solution pourrait permettre de désengorger nos hôpitaux saturés et de leur redonner des marges de manoeuvre pour programmer des opérations courantes. À l'heure actuelle, 64,5 % des lits des services de réanimation français sont occupés par des malades atteints du covid-19 et nous savons bien que c'est le risque de saturation qui peut entraîner le confinement du pays.
Monsieur le ministre, en juin dernier, vous avez annoncé que 12 000 lits de réanimation seraient disponibles en cas de besoin. Où sont-ils ? Nous savons qu'aucun nouveau lit de réanimation n'a été ajouté à ceux existants.
Était-ce simplement un coup de communication ?
Ma question est donc simple : envisagez-vous la création d'une structure telle que le Zendel pour notre pays ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LR.
Je vous remercie de votre question. Vous avez raison, il faut pouvoir innover dans le secteur hospitalier. Vous l'avez dit, l'Espagne l'a fait. Ce pays fait d'ailleurs face à une demande accrue de soins, que nous suivons de près. Je me suis récemment entretenu avec ma nouvelle homologue espagnole pour discuter de nos éventuels besoins respectifs. Nous avons également discuté avec le Portugal, pays auquel nous avons tendu la main pour l'aider à affronter une période de vague épidémique.
Ne croyez pas, madame la députée, qu'il n'y a pas d'innovation en France. Si vous vous rendez dans certains hôpitaux, vous découvrirez toutes les innovations qui y sont menées par les équipes médicales et paramédicales. Par exemple, sachez qu'un nombre croissant d'unités de réanimation ont installé, parfois même dans le hall de leur service, des structures pour la réadaptation précoce de patients longtemps intubés ou trachéotomisés, avec de la kinésithérapie spécialisée pour leur permettre de rentrer plus vite chez eux.
L'innovation en France concerne aussi le lien entre la médecine de ville et l'hôpital, qui s'est considérablement consolidé au décours de la pandémie et à l'occasion de la deuxième vague, avec des prises en charge précoces par de l'oxygénothérapie à domicile ou des protocoles partagés pour l'administration de certains médicaments, de sorte de retarder les admissions à l'hôpital.
De la même manière, l'amélioration des pratiques et des traitements dont nous disposons, à l'instar de l'Optiflow – administration d'oxygène à très fort débit – , nous permet l'économie d'environ 400 à 500 lits de réanimation, lesquels n'ont plus à être occupés par des patients atteints du covid-19.
L'innovation est partout, aussi bien en France qu'à l'étranger.
Je vous donnerai donc la même réponse que lors de la première et de la deuxième vague. Les lits supplémentaires de réanimation sont déployés en fonction de nos besoins, en transformant des lits de soins intensifs, en transformant des blocs opératoires, en transformant des unités de médecine en unités covid-19 et des unités de réadaptation en unités de médecine. Le nombre de lits de réanimation disponibles ne sera jamais l'unique indicateur pour confiner le pays. Les marqueurs qui comptent sont la santé des Français, le nombre de décès évitables et le nombre de cas graves. Aller en réanimation, ce n'est jamais anodin et nous devons tout faire pour l'éviter.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Nous ne vous demandons pas de transformer, mais de créer et de construire.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LR.
Monsieur le ministre des affaires étrangères et de l'Europe, la démocratie, telle que la voix de la France la défend en Europe et dans le monde, est menacée. Nous l'avons vu la semaine dernière en Birmanie. Nous le voyons aussi depuis quelques semaines en Russie, ainsi que dans d'autres pays.
Dimanche 7 février, a eu lieu la Journée internationale de solidarité avec la Biélorussie. Cette date correspondait aux six mois d'existence d'une résistance pacifique contre la spoliation des résultats de l'élection présidentielle ; six mois ininterrompus de lutte malgré la répression – il y a plus de prisonniers que de jours de résistance – , malgré les menaces directes et indirectes sur les familles ou les emplois, malgré la pandémie et malgré le froid. Il est important que la France n'oublie pas ces résistants.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe Dem.
Cela fait également six mois que la Pologne et, surtout, la Lituanie se montrent exemplaires. Elles offrent un appui politique en accueillant le Conseil de coordination, et soutiennent les associations, les exilés et les étudiants. La plus grande université biélorusse se trouve chez nous, à Vilnius. Ces deux pays portent la voix de la diplomatie européenne. À cet égard, Svetlana Tikhanovskaïa nous a demandé de nous montrer plus courageux en tant qu'Européens. Être plus courageux en tant qu'Européens, n'est-ce pas aussi dépasser nos divergences et résoudre cette crise ?
Monsieur le ministre, quelles actions précises la France soutient-elle au bénéfice du peuple biélorusse ? Quelles initiatives prenons-nous en faveur de la société civile, particulièrement des étudiants, des médias libres et des exilés ?
La parole est à M. le ministre délégué chargé du commerce extérieur et de l'attractivité.
La position de la France et des Européens est sans ambiguïté concernant la Biélorussie. Nous souhaitons absolument que la répression et la violation des libertés démocratiques cessent. Nous ne reconnaissons pas la légitimité d'Alexandre Loukachenko. Nous condamnons ses pratiques et l'Union européenne a émis des sanctions. En effet, quatre-vingt-quatre responsables impliqués dans les fraudes électorales et la répression ont été condamnés, dont Alexandre Loukachenko et sept entités. Les sanctions seront élargies si ces pratiques perdurent dans le temps.
La répression exercée par le pouvoir ne peut pas continuer et nous appelons les autorités biélorusses à libérer les prisonniers politiques et cesser les interpellations et les poursuites pénales arbitraires. C'est la raison pour laquelle nous attendons également que le régime instaure un dialogue politique avec la société civile, qui paye un lourd tribut et dont nous soutenons la mobilisation. Nous avons d'ailleurs renforcé notre appui financier aux universités, aux médias libres et aux étudiants. Dans cette crise, la France soutiendra toute solution politique répondant aux aspirations profondes du peuple biélorusse.
Monsieur le Premier ministre, nous l'avons tous constaté, le froid de l'hiver s'aggrave. Ce n'est pas une surprise, Météo France avait alerté. Nous savons depuis plusieurs semaines que le vortex polaire a dévié sa trajectoire et qu'il passe à présent sur nos régions.
Le froid, vous vous en doutez, est aussi une calamité sociale. Les pauvres gens vont souffrir davantage encore. Il y a dans notre pays 300 000 personnes sans domicile fixe, dont 30 000 enfants. 2 000 personnes meurent de la rue chaque année. Le froid glacial sera sans pitié à leur égard. Monsieur le Premier ministre, que comptez-vous faire pour eux ? Demanderez-vous aux préfets de réquisitionner les bâtiments vides autant que de besoin ?
Applaudissements sur les bancs du groupe FI et sur plusieurs bancs du groupe GDR.
Il existe 7 millions de logements passoires thermiques en France. C'est là que vivent la plupart des 10 millions de pauvres de notre pays. Un Français sur trois renonce à se chauffer, faute d'argent. Monsieur le Premier ministre, que comptez-vous faire pour eux ? Peut-on décider de l'attribution gratuite des premiers mètres cubes de gaz et de celle des premiers kilowattheures d'électricité ?
Monsieur le Premier ministre, la France pour laquelle le froid est un ennemi mortel est la France qui, déjà, a faim. C'est la France des 8 millions de personnes dépendant de l'aide alimentaire. Des centaines d'étudiants et de pauvres qui ont faim font la file, chaque soir, pour un plat chaud. Ils attendront bien mal par -10o C. Pensez-vous ouvrir des lieux de restauration collective pour juguler cette famine ?
Monsieur le Premier ministre, êtes-vous conscient de l'urgence ? Pensez-vous, comme nous, que c'est l'heure de la fraternité qui a sonné en France pour les plus pauvres ? Comment y répondez-vous ?
Applaudissements sur les bancs des groupes FI et GDR.
J'ai, comme le Gouvernement, parfaitement conscience des phénomènes de détresse que vous venez de décrire et de rappeler. C'est la conjoncture, la France subit une phase de grand froid, mais aussi les affres de la crise sanitaire, de la crise sociale et économique qui en résulte et des difficultés de tout ordre qu'elle occasionne, notamment à l'endroit des plus démunis et des plus faibles de nos concitoyens.
Ce Gouvernement et cette majorité ne sont pas restés inactifs face à cette situation et ces cas dramatiques. J'ai reçu à plusieurs reprises – je les rencontrerai d'ailleurs encore – les associations caritatives, qui sont en première ligne et auxquelles je voudrais, en votre nom à toutes et tous, rendre un vibrant hommage pour leur action au quotidien.
Applaudissements sur tous les bancs.
Je rappelle, monsieur le président Mélenchon, que nous les soutenons de manière active et financière, que nous sommes à leurs côtés et à leur écoute pour faire face aux situations d'urgence auxquelles elles sont confrontées.
La campagne hivernale – c'était le début de votre question – a commencé le 17 octobre dernier. Depuis cette date – soyons très précis pour la représentation nationale – , nous avons ouvert pour les sans-abris 20 000 places d'hébergement supplémentaires, ce qui porte leur nombre à 200 000. Cela constitue un record, auquel s'ajoutent les 100 000 places, dont le nombre est aussi en augmentation, au sein des CADA – centres d'accueil pour demandeurs d'asile.
Hier, Emmanuelle Wargon, ministre déléguée chargée du logement, a demandé aux préfets d'engager le plan grand froid pour s'occuper de toutes les situations dramatiques causées par l'aggravation des conditions climatiques.
Je vous rappelle tous les dispositifs que nous avons instaurés, et que la représentation nationale a votés, en faveur des plus démunis.
Vous avez parlé des queues qui se forment pour accéder à l'aide alimentaire ; j'en suis aussi choqué que vous, en particulier quand on y voit les plus jeunes de nos concitoyens, étudiants mais pas seulement. Nous avons décidé, je vous le rappelle, que tous les étudiants doivent pouvoir prendre deux repas par jour dans les CROUS, à 1 euro.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ainsi que sur plusieurs bancs du groupe Dem.
Frédérique Vidal et moi-même avons donné toutes les instructions nécessaires pour que cette mesure entre progressivement dans les faits. Inédite dans l'histoire de notre République, elle est, j'en suis sûre, approuvée sur tous les bancs de cette assemblée.
Oui, mesdames et messieurs les députés, croyez-le bien : c'est une cause nationale qui nous réunit tous. Le Gouvernement agit et continuera de le faire !
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM ainsi que sur plusieurs bancs du groupe Dem.
Face à l'ampleur de la pandémie que nous subissons depuis un an déjà, le Gouvernement a été contraint d'instaurer de nouvelles règles pour lutter contre la propagation de la maladie – confinements, fermetures administratives… Elles ont eu des répercussions sur notre économie, qui était pourtant en pleine croissance. Aussi, pour soutenir les entreprises durant cette période inédite, avez-vous, avec les parlementaires, adopté rapidement des mesures inédites par leur ampleur comme par leur coût. Les dispositifs que sont le chômage partiel, le fonds de solidarité, les reports et annulations de cotisations ou les prêts garantis par l'État ont permis de limiter très fortement le nombre des dépôts de bilan des entreprises françaises et ont protégé les salariés.
Malgré tout cela, certains de nos entrepreneurs perdent espoir. J'ai eu l'occasion de discuter avec de nombreux artisans et commerçants qui ont envie de poursuivre leurs activités, mais qui s'essoufflent. J'ai ici une petite pensée pour Karim, gérant de salle de sport, ou encore Yolande, gérante d'une parfumerie dans une galerie commerçante. Les exemples sont nombreux de ces entrepreneurs courageux qui continuent de se battre, mais n'ont plus de perspectives. Pour les avoir eus en ligne, je peux vous dire que certains risquent d'en arriver à des extrémités dramatiques.
Face à cette situation, vous avez missionné le réseau APESA – aide psychologique aux entrepreneurs en souffrance aiguë – qui tient, depuis le mois d'avril 2020, une cellule d'écoute dotée d'un numéro vert. En un mois, cette plateforme a reçu plus de 1 200 appels. Mais après un an de crise, les perspectives et la confiance en l'avenir s'amenuisent. Je peux en témoigner, la détresse est de plus en plus forte chez nos entrepreneurs les plus touchés.
Quelles mesures supplémentaires le Gouvernement envisage-t-il de prendre pour sauver nos entrepreneurs de la détresse psychologique ?
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM, Dem, Agir ens et LT.
C'est désormais une évidence, mais il faut toujours la rappeler et vous avez eu raison de le faire : les conséquences économiques de la crise sanitaire que nous connaissons sont fortes, comme les conséquences psychologiques pour tous ceux qui sont privés de leur activité professionnelle, mais aussi de leurs loisirs. Personne ne méconnaît les effets de l'isolement, de la restriction des relations sociales.
En ce qui concerne les entrepreneurs, nous avons instauré des dispositifs, vous l'avez dit, inédits et massifs. Le fonds de solidarité représente aujourd'hui plus de 14 milliards d'euros, et ce sont près de 400 000 entreprises qui ont par exemple bénéficié du fonds de solidarité pour la perte d'activité du mois de décembre. Nous avons modifié ce fonds à quinze reprises, et nous le modifierons encore, pour tenir compte des charges fixes. Nous avons déployé des dispositifs de chômage partiel, de prêts garantis par l'État, d'exonérations de cotisations – autant de mesures sans précédent qui doivent permettre à notre économie et à nos entreprises de passer le cap de la crise.
Mais ces aides ne remplacent pas le travail, l'attachement à un métier, le contact avec les clients et, tout simplement, avec la vie. C'est la raison pour laquelle nous avons pris d'autres dispositions ; c'est ce qui nous a guidés lorsque nous avons décidé que les activités de vente à distance et de click and collect, en mauvais français, pouvaient être maintenues puisque, de cette façon, on poursuit une activité professionnelle, on établit un contact humain, et cela répond quelque peu à la détresse des entrepreneurs.
Nous avons prévu un numéro vert, vous l'avez rappelé, en lien avec l'APESA : le 0805 655 050 met les entrepreneurs en difficulté en relation avec une cellule d'assistance et d'écoute. Pour ceux qui sont le plus en détresse, une consultation psychologique est possible.
Enfin, avec Alain Griset et Agnès Pannier-Runacher, nous mobilisons l'ensemble des réseaux professionnels, des organisations professionnelles, pour contacter tous ceux qui peuvent l'être. Partout où c'est possible, il faut du soutien, du contact, de l'accompagnement personnel et moral. Nous essayons d'être auprès de chacun.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe Agir ens.
Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, en 2013, jeune député de l'Isère, vous rédigiez un rapport intitulé « La filière du sang en France ». Outre la détermination des besoins nationaux et des réponses à leur apporter, vous deviez réfléchir à l'équilibre économique de la filière. Vous aviez alors fait le choix d'une concertation large avec l'ensemble des acteurs – professionnels, usagers, associations.
Mais ça, c'était avant ! Maintenant, vous êtes ministre du nouveau monde, et la concertation, ce n'est plus trop votre truc. Vos politiques sont à l'opposé de vos intentions d'alors : les acteurs de l'Établissement français du sang sont exclus du Ségur de la santé, alors que leurs métiers ne sont ni suffisamment valorisés, ni justement rémunérés. Pire encore, un dimanche, vous promulguez un décret qui ampute le budget de l'EFS de 10 millions d'euros – mais c'était sans compter sur l'oeil avisé de la présidente du groupe Socialiste, Valérie Rabault.
Ce service public était convalescent ; vous êtes en train de l'euthanasier en fragilisant ses personnels comme les associations de donneurs. Pourtant, les défis sont devant nous : la disparition des points de collecte est devenue insupportable, alors que les donneurs sont au rendez-vous. Il vous faut maintenant favoriser le recrutement de nouveaux médecins, devenus rares dans nos territoires – ils disparaissent dans l'Aisne, mon département. Il vous faut massifier la formation des infirmiers à l'entretien préalable au don, et travailler à maintenir les collectes grâce à la télémédecine.
Monsieur le ministre, s'il n'est pas rare que vous tourniez le dos à vos convictions et à vos engagements, s'il vous plaît, ne le faites pas avec l'Établissement français du sang, pas avec ses personnels, pas avec nos donneurs. L'organisation de la filière est un modèle de déontologie, le don du sang un symbole du bénévolat ; les donneurs sont la fierté de la France solidaire et désintéressée.
Monsieur le ministre, allez-vous restituer les 10 millions d'euros ? Quand allez-vous répondre aux demandes de concertation ?
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC et GDR.
La situation financière de l'Établissement français du sang est un sujet indépendant, pardon de vous le dire, de plusieurs autres que vous avez abordés dans votre question.
Saluons ensemble, évidemment, l'ensemble des donneurs de sang dans notre pays, dont la mobilisation permet chaque année de soigner 1 million de malades ; saluons la gratuité, l'anonymat, le bénévolat. Je l'ai écrit dans un rapport, vous l'avez voté, nous étions alors voisins de banc, je m'en souviens très bien ; et, je vous rassure, mes convictions n'ont absolument pas changé.
L'année dernière, sur un ton moins polémique que j'avais apprécié et reconnu, ce que je dis d'autant plus facilement qu'il s'agit de votre présidente de groupe, Mme Valérie Rabault, très bonne députée…
Sourires. – Applaudissements sur les bancs du groupe SOC.
Eh oui, on peut se dire des choses sans s'envoyer des méchancetés à la figure, monsieur Bricout, surtout quand on a été voisins de banc pendant des années comme nous l'avons été ! Mais peu importe, c'est votre droit.
Mme Rabault m'avait signalé une baisse des dotations sur reprise de TVA, qui pouvait mettre en danger l'Établissement français du sang. Elle peut en témoigner, j'avais appelé le soir même et j'étais revenu sur la décision prise avant mon arrivée au ministère.
Mme Valérie Rabault approuve.
Si vous voulez la réponse, laissez-moi parler…
Cette question est complexe : les modalités de financement de l'EFS ont été déstabilisées par un changement de régime de TVA, qui était appliqué depuis vingt ans mais qui contrevenait au droit européen. Il y a eu un accompagnement financier de l'État à hauteur de 80 millions d'euros, commencé au cours du mandat précédent, avec une feuille de route visant à l'amélioration de l'organisation de l'EFS et permettant un retrait progressif de l'État une fois sa mission remplie. L'année dernière, ce n'était pas possible, car l'EFS avait engagé des surdépenses liées à l'épidémie de covid-19. Je m'en étais entretenu avec le directeur de l'établissement, M. François Toujas, et nous sommes convenus d'un report.
Aujourd'hui, les conditions sont remplies, et nous pouvons respecter cette feuille de route – que vous avez participé à écrire, monsieur le député ! Si l'un de nous tourne le dos à ses convictions, ce n'est pas moi. Rassurez-vous, je continuerai d'accompagner, la France continuera d'accompagner l'Établissement français du sang comme les donneurs du sang bénévoles. C'est la richesse de notre pays et c'est notre honneur collectif.
Il me reste trois secondes : c'est peu pour applaudir nos donneurs de sang.
Applaudissements sur les bancs des groupes SOC, GDR ainsi que sur de nombreux bancs du groupe LaREM et sur plusieurs bancs du groupe LR.
Monsieur le Premier ministre, l'exception culturelle française a vécu, malheureusement. Quand allez-vous vous décider à déconfiner la culture, à rouvrir les lieux de culture, tout particulièrement les musées et les monuments historiques ? Des tribunes, des lettres ouvertes, des appels pressants se sont multipliés ces derniers jours pour demander des perspectives. J'ai moi-même écrit à votre ministre de la culture en ce sens, avec plus de quarante-cinq de mes collègues députés du groupe Les Républicains.
Il y a quatre semaines déjà, le 12 janvier, devant la commission des affaires culturelles, Mme Bachelot affirmait que les musées et monuments historiques pourraient « faire l'objet d'une réouverture encadrée » et que « les responsables de musées [… ] se [disaient] prêts à déterminer de nouvelles jauges, de nouveaux modes de fonctionnement ». Nous y sommes. Ce travail a été fait. Tout est prêt, mais rien ne vient. On nous parle maintenant de décrue, de stabilisation des conditions sanitaires. Mais, monsieur le Premier ministre, le Président de la République l'a dit : nous devons apprendre à vivre avec le virus. Il sera là longtemps encore, et il y aura d'autres variants. Vivre, c'est aussi avoir un accès direct aux joyaux de notre patrimoine, à nos oeuvres d'art, à nos musées, à nos monuments historiques !
Vous ne pouvez pas reporter sans cesse, et sine die, la réouverture des musées et des monuments historiques, en inventant la Saint-Glinglin politique. Déconfinez ces lieux de culture ! Arrêtez de vitrifier l'accès aux oeuvres d'art et aux joyaux du patrimoine. Il ne nous reste que les écrans et cela ne peut plus durer. Déconfinez, monsieur le Premier ministre, les musées et les monuments historiques !
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement.
Je commence par vous prier d'excuser l'absence de ma collègue Roselyne Bachelot, qui assiste en ce moment à l'hommage rendu à l'immense Robert Hossein, qui nous a quittés le 31 décembre dernier.
Nous voulons tous que les musées rouvrent le plus vite possible, parce que nous voulons tous que l'épidémie recule le plus vite possible. Vous avez été députée européenne, et nous avons siégé ensemble, ici à l'Assemblée nationale, sur les bancs de la commission des affaires culturelles : je vous sais très attentive à ce qui se passe chez nos voisins européens. Vous savez que les musées sont fermés en Allemagne, au Royaume-Uni, au Portugal, aux Pays-Bas… Certains, me direz-vous, ont rouvert.
Mais la question qui se pose, c'est de savoir si, à un moment où les variants, que vous avez vous-même cités, changent la donne, à un moment où la situation est fragile, nous pouvons en toute responsabilité rouvrir des lieux de destination, prenant ainsi le risque de voir l'épidémie repartir et d'avoir à reconfiner. Je m'étonne que vous fassiez cette proposition ; elle illustre la difficulté pour tout le monde à gérer ce sujet, puisque des responsables de votre propre groupe politique, comme M. Ciotti, appellent, eux, à reconfiner ! D'un côté, vous appelez à reconfiner, de l'autre, vous appelez à rouvrir les musées…
La situation est difficile, vous le savez bien. Le Premier ministre l'a dit la semaine dernière : dès lors que les conditions sanitaires le permettront, les musées seront les premiers lieux que nous rouvrirons…
… parce que les Français sont viscéralement attachés à leur culture, parce que la culture, c'est l'âme de la France. C'est aussi notre conviction.
Dans l'intervalle, nous travaillons avec eux ; nous avons dégagé 7 milliards d'euros pour les soutenir. Hier encore, Roselyne Bachelot et Olivier Véran ont organisé une réunion pour construire des protocoles et établir des jauges. Croyez bien que nous serons au rendez-vous. Dès que la situation sanitaire le permettra, les musées pourront rouvrir et les Français pourront retrouver ces lieux de culture.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Monsieur le ministre des solidarités et de la santé, depuis plus d'un an, le monde entier est en proie à une pandémie exceptionnelle. En France, ce sont plus de 3 millions de nos concitoyens qui ont été touchés. Grâce à l'engagement de nos soignants, que je tiens à remercier ici, et grâce à notre système de santé, l'immense majorité des personnes contaminées ont pu guérir intégralement. Néanmoins, je souhaite évoquer deux catégories de patients qu'il convient de soutenir.
La première, c'est la catégorie de celles et ceux qui ont contracté une forme grave de la maladie durant leur activité professionnelle. Certes, la dissémination globale du SARS-CoV-2 rend complexe l'imputation, mais nous savons que des critères de surexposition existent malgré les équipements de protection. Les soignants constituent la majorité de cette catégorie, mais nous ne devons pas oublier les autres professions.
La seconde, c'est celle de ceux qui sont affectés par le « covid long ». C'est cette fois toute la population qui peut être concernée par cette pathologie encore mal connue, qui se manifeste par des symptômes multiples, neurologiques, cardiaques, respiratoires, psychiques. Des milliers de personnes en souffrent et doivent être diagnostiquées, car elles n'ont pas toujours présenté initialement une forme grave de la maladie.
Afin de garantir une meilleure connaissance de cette affection et de proposer un parcours de soins adapté en vue d'une guérison, la majorité présidentielle de l'hémicycle souhaite proposer une solution pérenne dans le cadre des travaux menés par Patricia Mirallès et moi-même. Lorsqu'il s'agit de santé, la réparation pécuniaire présentée par certains comme la solution à tous les maux ne semble pas à la hauteur : les Français ne veulent pas une compensation, mais bien la guérison, grâce à la connaissance, à la reconnaissance et à la bienveillance thérapeutiques.
Monsieur le ministre, pouvez-vous détailler les mesures que vous avez prises afin de permettre la reconnaissance du covid-19 comme maladie professionnelle pour les personnes affectées par le virus ? Par ailleurs, pouvez-vous préciser l'état actuel des connaissances sur le covid long ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Merci pour votre question double qui me permet d'apporter une double réponse.
De manière dérogatoire et totalement inédite, le Gouvernement a décidé d'accorder la reconnaissance automatique du covid-19 comme maladie professionnelle pour tout soignant ayant été malade du covid-19 et présentant des séquelles respiratoires, seules séquelles identifiées comme telles. « Automatique », cela veut dire qu'il n'y a pas de démarche d'imputabilité : sans chercher à savoir si le soignant a été contaminé au travail ou non, on considérera que c'est le cas, ce qui permettra une reconnaissance automatique.
En outre, le cadre régulier de reconnaissance comme maladie professionnelle fera l'objet d'une enquête et d'une expertise rapides par les médecins compétents, comme c'est le cas pour toutes les autres maladies professionnelles, afin de permettre aux soignants et aux non-soignants de faire reconnaître comme maladie professionnelle une infection par le covid-19 ayant entraîné des séquelles. De nombreux dossiers ont été déposés et je me suis engagé à ce que nous apportions une réponse sous trois mois à chaque dossier complet parvenu au comité.
Le deuxième sujet que vous abordez est éminemment important : on l'appelle le covid long. Des hommes et femmes infectés par le covid-19, parfois sous une forme sévère, parfois non, conservent des séquelles respiratoires ou cardiaques ou souffrent de fatigabilité, d'insomnies, d'irritabilité, de maux de tête… Je regarde beaucoup ce qui se passe à l'étranger : on y parle aussi de covid long, avec des symptômes résiduels dont on ignore la durée et la cause anatomique, même si des théories sont actuellement en cours de validation par les scientifiques.
Au sein de mon ministère, la direction générale de la santé et la DGOS – direction générale de l'offre de soins – ont développé et continueront de développer des filières de prise en charge polyvalentes et pluriprofessionnelles permettant l'intervention de kinésithérapeutes, de psychologues – là où ils sont nécessaires – et de médecins spécialistes – cardiologues, pneumologues – , afin d'identifier ces situations, de les prendre en charge sans abandonner personne et d'apporter toutes les réponses nécessaires. Mais, là aussi, la science a besoin de faire son oeuvre.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Monsieur le Premier ministre, mardi 17 novembre 2020, vous répondiez à ma question en commission d'enquête sur la gestion et les conséquences dans toutes ses dimensions de l'épidémie de covid-19. Je vous cite : « Vous avez évoqué un traitement précoce. Je ne sais pas de quoi il s'agit. En tout cas, je n'en connais pas. » Vous feigniez alors d'ignorer l'existence de centaines de médecins qui soignent leurs patients avec des traitements qui fonctionnent. Oui, des traitements ambulatoires précoces : chaque jour, des médecins y ont recours en toute responsabilité.
Monsieur le Premier ministre, ma question sera précise : allez-vous enfin consacrer des moyens à la prévention de la covid-19, notamment par la vitamine D et les thérapies précoces, à la hauteur du zèle que vous mettez à vacciner et à limiter les libertés des Français ?
M. Jean Lassalle applaudit.
Madame la députée, je voudrais vous être agréable…
Sourires sur plusieurs bancs.
Je vous jure que je fais mon maximum.
Vous avez tour à tour vanté, dans l'hémicycle, les mérites de traitements dont leurs promoteurs eux-mêmes considèrent désormais qu'ils n'étaient pas efficaces ; vous y avez vanté le non-port du masque comme étant une solution de liberté à la limite d'être protectrice contre le virus ; vous avez nié tant la deuxième vague que la possibilité d'une troisième vague ; vous niez la stratégie vaccinale, ou du moins, je crois, vous vous y attaquez assez durement – je ne peux plus vous lire, car vous m'avez bloqué sur Twitter sans que j'aie jamais eu d'interaction avec vous ; c'est dommage, mais je lis la presse. Je n'ai pas vu les documentaires auxquels vous avez participé, mais la presse, là encore, s'en est fait l'écho, déplorant qu'une représentante de la nation puisse participer à des documentaires de nature complotiste.
Madame la députée, chacun est libre, dans l'hémicycle, de son intervention. Je suis libre de ma réponse ; vous l'avez.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.
Oui, nous attendons un vaccin sûr et efficace, mais la stratégie vaccinale est insuffisante. Chaque mois qui passe, ce sont des centaines de vies que nous pourrions sauver. Vous continuez à nier, pour des raisons qui nous échappent et qui échappent aux Français, le droit de chacun à être soigné. L'Inde, le Brésil, la République dominicaine et l'Argentine, pour ne citer qu'eux, utilisent l'ivermectine, l'azithromycine, l'hydroxychloroquine,
Exclamations sur les bancs du groupe Dem
la vitamine D et le zinc. Les hôpitaux restent vides dans ces pays. Croyez-vous un seul instant que les attaques médiatiques mettant en scène des journalistes ou des sociétés privées de conseil qui se découvrent des compétences médicales peuvent empêcher les médecins de soigner ? Fidèles au serment d'Hippocrate, les médecins ont le devoir de soigner. Rien, encore moins des décrets…
M. le président coupe le micro de l'oratrice, dont le temps de parole est épuisé.
Merci, madame la députée. Nous remercions également l'ensemble des pharmaciens qui distribuent les médicaments auxquels vous venez de faire allusion…
La parole est à M. le ministre.
Pardon, madame la députée, mais je ne peux pas vous laisser utiliser le micro de l'Assemblée nationale pour formuler des recommandations ou des prescriptions médicales potentiellement délétères, d'autant plus que l'association des médicaments dont vous parlez est contre-indiquée dans le Vidal. Vous avez étudié la médecine : vous savez que ces contre-indications sont formulées pour des interactions médicamenteuses dangereuses. Je ne voudrais pas que les Français qui nous regardent pensent qu'ils peuvent faire leur popote dans leur cuisine.
Applaudissements sur les bancs du groupe LaREM.
Nous avons heureusement des pharmaciens qualifiés, formés et dévoués, très loin d'être les « épiciers » dont vous avez parlé avant-hier – image qui avait scandalisé la profession, comme quoi je ne suis pas le seul à être parfois outré par vos propos. Madame la députée, je vous en supplie : faites attention à ce que vous dites, car des gens pourraient suivre vos conseils.
Vous aussi, faites attention ! Vous avez dit tout et son contraire. Souvenez-vous des masques !
On l'a vu quand Donald Trump parlait de l'eau de Javel ou de la lumière : les gens cherchent des réponses, et ils vont parfois vers celles qui leur semblent cohérentes. Même le président du Brésil, Jair Bolsonaro, a dit il y a quatre jours lors d'une conférence de presse : « Au pire, j'ai donné des placebo, je n'aurai tué personne. » Vous êtes désormais la seule en politique à tenir ce discours. Évidemment, nous accompagnons les médecins, et la recherche thérapeutique avance : des études intéressantes sont en cours sur l'oxygène, la cortisone, les anticoagulants, la vitamine D, et même sur l'ivermectine ; sur les anticorps monoclonaux, les interférons… Mais, s'il vous plaît, attendez que la science ait démontré qu'ils sont efficaces et qu'ils ne présentent pas de danger pour l'homme.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.
Monsieur le Premier ministre, dès le mois d'avril dernier, nous vous alarmions sur la détresse de la jeunesse en utilisant l'expression « génération sacrifiée ». Depuis, vous avez élaboré un plan de vingt-six mesures pour tenter de répondre à ce problème. Mais ces mesures sont-elles à la hauteur de la détresse qui envahit toute une génération ?
Je ne le crois pas, d'abord parce qu'elles s'adressent toutes au même public : celui des jeunes entrant sur le marché de l'emploi, or toute la jeunesse est loin de se trouver dans ce cas. Chaque jeune est unique : il y a ceux qui cherchent leur premier emploi et pour qui ce moment est crucial, mais il y a aussi tous ceux qui sont encore dans un système de formation et qui, vous le savez aussi bien que nous, se trouvent dans une situation désespérée. À ceux-là, vous répondez d'une manière trop complexe et trop dispersée – sur vingt-six mesures, il y en a sûrement une vingtaine de trop.
Sans polémiquer sur le sujet, mon sentiment est que la gravité de la situation appelle à beaucoup plus d'efforts. Le Gouvernement doit mobiliser la nation tout entière : les administrations, les collectivités territoriales, les entreprises, les citoyens ; toutes les forces vives de la nation. Nous parlons d'une jeunesse désoeuvrée, esseulée, avec un horizon rétréci ; nous parlons d'un mal-être profond ; nous parlons d'idées suicidaires, de rêves qui s'effondrent. Les questions concrètes sont nombreuses face à la dégradation des conditions d'enseignement. Allez-vous garantir la valeur des diplômes ? Pourquoi n'avoir pas prévu un report des conventions pour que les étudiants puissent faire leur stage ultérieurement, en France ou à l'étranger ? Pourquoi ne pas avoir créé, à l'image du fonds de solidarité, un fonds étudiant pour tous les jeunes qui ne trouvent pas de petit boulot cette année alors qu'ils en avaient un avant la crise ?
Votre action ne peut pas laisser de côté tout un pan de la jeunesse. Nombreuses sont les idées et les initiatives qu'il faut encourager, qu'il s'agisse d'hébergement, de cours de soutien ou de formations expresses qualifiantes. Nombreux sont les acteurs professionnels ou associatifs qui pourraient aider. Il faut clarifier les rôles entre Pôle emploi et les missions locales, il faut créer une task force permanente dédiée à la jeunesse au sein du Gouvernement… Bref, se mobiliser plus que jamais pour éviter une génération aux illusions perdues. Monsieur le Premier ministre, le ferez-vous ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Nous sommes évidemment d'accord sur le point de départ de votre question : il y a un problème pour la jeunesse, pas seulement en France, mais dans le monde entier, du fait de l'épidémie. Nous sommes aussi d'accord pour dire avec vous, et avec le Président de la République, que la jeunesse est notre priorité. Nous l'avons affiché très clairement à travers les mesures d'ampleur prises, comme vous le demandez, par plusieurs acteurs du Gouvernement, à commencer par Élisabeth Borne avec le plan « Un jeune, une solution », dont les premiers résultats sont importants. Par exemple, il y a eu plus d'apprentis en 2020 qu'en 2019. C'est très rare, et vous ne trouverez pas ce chiffre dans d'autres pays.
Deuxième exemple : il y a eu moins de décrochages en 2020 qu'en 2019 en France. Enfin, aujourd'hui, les lycéens de France vont au lycée, ce qui n'est pas le cas dans la plupart des pays d'Europe. La situation française est difficile, à l'image de celle du reste du monde, mais nous apportons des réponses pour essayer d'améliorer les choses. Nous sommes d'accord avec votre description des difficultés de la jeunesse, mais il est plus important encore de bâtir ensemble son lendemain. C'est ce qu'a fait Frédérique Vidal en annonçant, avec le Premier ministre et le Président de la République, le retour progressif des étudiants à l'université, en tenant compte des critères sanitaires, et c'est ce que nous continuerons à faire en tenant un discours positif pour la jeunesse.
Sur tous les bancs de l'Assemblée, on devrait s'attacher à définir un avenir positif pour la sortie de crise. C'est ce que nous faisons dans le domaine universitaire ; c'est ce que nous faisons en matière d'emploi, en prenant des mesures qui permettent l'embauche de jeunes dans des proportions qui n'étaient pas atteintes auparavant ; c'est ce que nous devons faire en bâtissant la société du futur dans un discours qui devrait unir la classe politique. Ne cherchons pas la polémique – ce n'est d'ailleurs pas ce que vous avez fait – et asseyons-nous autour de la table pour voir ce que nous pouvons proposer pour l'avenir des jeunes.
Ma question s'adresse à Jean-Baptiste Lemoyne, secrétaire d'État chargé du tourisme, des Français de l'étranger et de la francophonie.
En temps normal, les circonscriptions montagnardes verraient affluer des vacanciers, des familles, des touristes étrangers. En temps normal, les stations de montagne seraient remplies de skieurs et de saisonniers. En temps normal, elles auraient réalisé 70 % du chiffre d'affaires indispensable à leur équilibre économique. Mais nous ne sommes pas en temps normal, et le contexte sanitaire bouleverse l'équilibre de nos territoires. L'État y répond avec force par un soutien exceptionnel et adapté aux pertes subies par les acteurs de la montagne.
Saluons ces mesures qui leur permettent de tenir, pendant ces mois décisifs, face à la baisse de la fréquentation et à la limitation des activités. Mais n'oublions pas qu'en plus de ne pas gagner d'argent, les commerces de montagne en perdent : des centaines de pharmacies, de commerces alimentaires et de magasins d'équipement supportent des charges fixes particulièrement élevées en montagne. L'accompagnement de ces commerces dans les semaines à venir sera déterminant pour entamer la prochaine saison.
Le plan de relance de la montagne lancé par le Gouvernement ne fait que traduire sa volonté de préserver l'avenir de territoires au potentiel extraordinaire, et les parlementaires de la montagne se mobiliseront autour d'objectifs forts : transition écologique, compétitivité, tourisme des quatre saisons et protection des ressources. Monsieur le secrétaire d'État, quelles mesures pour redonner aux acteurs de la montagne du souffle aujourd'hui et de l'élan demain ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
La parole est à M. le secrétaire d'État chargé du tourisme, des Français de l'étranger et de la francophonie.
Effectivement, nous ne sommes pas en temps normal. C'est ce qui ne nous a pas permis de donner aux acteurs de la montagne de la visibilité sur l'ouverture des remontées mécaniques. La contrepartie de cette contrainte est que nous leur avons donné de la visibilité sur le soutien que nous allons leur apporter.
Le Premier ministre a reçu à trois reprises…
… les acteurs de la montagne, …
… les élus, les acteurs économiques et les associations représentant tout l'écosystème de la montagne : cela a permis, je crois, de préparer une double réponse, au plus près des besoins du terrain. Celle-ci se déploie dans le temps, d'abord pour parer à l'urgence, ensuite dans le cadre d'un plan d'investissement, pour assurer le rebond.
Tout d'abord, face à l'urgence, il était important de prendre en compte la spécificité de l'économie montagnarde, puisque le chiffre d'affaires réalisé pendant les quelques mois de la haute saison permet de faire vivre des familles entières pendant toute l'année.
Ce matin est donc paru, au Journal officiel de la République française, le décret relatif au fonds de solidarité, qui prend en compte tous les commerces, des stations comme des vallées, leur permettant de prétendre à un certain nombre d'indemnisations.
Par ailleurs, nous avons veillé à ce que les remontées mécaniques puissent bénéficier d'un dispositif ad hoc, qui a fait l'objet d'échanges nombreux avec la Commission européenne et les professionnels de santé. En effet, les élus avaient signalé l'absence d'indemnisation pour ces pertes d'activité ; celle-ci est désormais prévue. Nous n'avons pas oublié non plus les résidences de tourisme.
Bref, nous nous attachons à combler tous les trous dans la raquette afin de faire vivre la montagne, malgré les difficultés qu'elle rencontre, et nous avons bon espoir d'y parvenir. Grâce au plan d'investissement que nous coconstruirons avec vous, nous visons même un véritable rebond et la reconquête de la première place dans ce domaine. Ne cédons pas au fatalisme ; nous le devons aux grands anciens, …
… comme Gaston Maulin, dont nous allons commémorer la disparition, survenue il y a deux ans.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Monsieur le ministre de l'agriculture, la fondation Nicolas-Hulot pour la nature et l'homme a publié, ce matin, une étude qui fait état de l'ensemble des financements publics et privés destinés à l'agriculture, montrant que 10 % sont fléchés vers l'agroécologie et 1 % vers la réduction des pesticides.
Une controverse s'est installée, que je ne souhaite pas alimenter, puisque j'ai passé des années à essayer de réconcilier, dans l'exercice de mes différentes fonctions, les milieux de l'écologie et de l'agriculture, en cherchant la voie d'une médiation et d'un chemin de progrès.
Point de querelle, donc, sur les indicateurs QSA – quantité de substances actives – et NODU – nombre de doses unités – , sur les mesures annuelles, qui dépendent des conditions pédoclimatiques et économiques, sur les moyennes décennales ou sur les substances classées CMR – cancérogènes, mutagènes et reprotoxiques – , entre autres, mais une réalité : nous ne sommes pas au rendez-vous de la promesse de 2009 ; nous ne l'avons pas été durant la précédente législature, ni pendant les années perdues de celle qui est en cours, et nous devons nous regarder en face.
La fondation Nicolas-Hulot pour la nature et l'homme, au-delà des controverses qui occupent les réseaux sociaux, pose une vraie question : la puissance publique dans son ensemble a-t-elle été au rendez-vous ? Les paysans, le monde agricole, eux, oui. Une révolution agricole est engagée, pour les producteurs et les consommateurs. La science est au rendez-vous. La part des solutions de biocontrôle a doublé dans la phytopharmacie du monde agricole. Pourtant, la puissance publique n'est pas au rendez-vous.
Monsieur le ministre, j'ai trois questions à vous poser, afin de sortir de l'« écolo-bashing » comme de l'« agri-bashing ».
Premièrement, sommes-nous capables de faire du plan stratégique national de la politique agricole commune le moyen de rééquilibrer les aides publiques de la politique agricole commune, au service d'une véritable agroécologie systémique ?
Deuxièmement, sommes-nous capables d'instaurer une véritable politique de régulation du foncier, pour favoriser l'installation des jeunes et le renouvellement des générations ? Sans cela, il n'y aura pas d'agroécologie et de solution pour sortir de la dépendance à la chimie.
Mme Valérie Rabault et M. Fabien Roussel applaudissent.
Enfin, sommes-nous capables de réconcilier science et démocratie, de réhabiliter le plan écophyto, actuellement en panne, et de nous donner comme objectif, pour la santé des hommes et de la terre, de nous remettre autour de la table et de travailler ensemble ?
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC ainsi que sur quelques bancs des groupes GDR et LaREM. – Mme Yolaine de Courson applaudit également.
Monsieur Potier, je saluerai d'abord votre courage et celui de beaucoup de vos collègues.
Vous avez le courage de ne jamais opposer, comme vous venez de le dire, agriculture et environnement ; vous avez le courage de faire des propositions constructives sur le foncier – vous savez à quel point j'y adhère – , sur le plan stratégique national de la politique agricole commune et sur la science. « Point de querelle », dites-vous, et il faut aussi du courage pour cela.
Où est le courage ? Dans les discours d'incantation ou dans les actes, dans le travail, à raison de cinquante-cinq heures par semaine, de nos agriculteurs, grâce auxquels jamais un produit n'a manqué sur nos étals ?
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem. – M. Yannick Favennec applaudit également.
Où est le courage ? Chez ceux qui font parler les chiffres comme ils l'entendent ou chez les acteurs de la réalité que vous avez rappelée ? Depuis dix ans, la quantité de produits phytosanitaires a été réduite de 36 %, celle des produits classés CMR de 70 % , alors que celle des produits de biocontrôle a été multipliée par deux.
Où est le courage ? Dans le simplisme…
… ou dans la prise en compte de la complexité de la réalité et du monde du vivant ? Beaucoup de députés, tous groupes politiques confondus, ont fait un travail remarquable sur le glyphosate, filière par filière.
Où est le courage ? Dans le « y a qu'à, faut qu'on » de la subvention ou dans la création de valeur ? Car la transition agroécologique doit créer de la valeur environnementale, mais aussi économique.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe FI.
Monsieur le député, je suis sûr que nous partageons ce courage, qui n'appelle ni angélisme, ni compassion, ni aveuglement, mais, comme vous l'avez dit, raison et science, dans le cadre d'un débat démocratique.
J'adresse donc un grand merci à nos agriculteurs et à toutes celles et ceux qui jamais n'opposeront agriculture et environnement. Avançons ensemble !
Mêmes mouvements.
Sans ce courage, nous ne ferons que favoriser l'importation de produits tout en dégradant notre propre agriculture.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM, Dem, Agir ens et UDI-I.
Monsieur le ministre de l'intérieur, nous avons tous vu les images du passage de la tempête Justine en Nouvelle-Aquitaine. Elles sont impressionnantes, et les dégâts engendrés par les crues sont considérables. Je remercie d'ailleurs M. le Premier ministre et Mme la secrétaire d'État Bérangère Abba, qui se sont rendus sur place.
En Gironde, chez moi, de commune en commune et de réunion de crise en réunion de crise, les efforts déployés sont admirables. Des élus locaux aux sapeurs-pompiers en passant par la gendarmerie, sans oublier le corps préfectoral, chacun se démène aux côtés des habitants et la solidarité joue à plein régime. Je l'ai constaté : l'action menée est formidable.
Permettez-moi de vous remercier, monsieur Darmanin, d'avoir annoncé tout à l'heure la déclaration de l'état de catastrophe naturelle – c'était l'objet de ma première question.
Nous devons maintenant réfléchir à plus long terme. En dépit des efforts inédits, sous la présente législature, pour combattre le dérèglement climatique, celui-ci est une réalité, et les crues sont de plus en plus fréquentes et de plus en plus fortes. Pour les populations concernées, il faut amplifier l'effort de pédagogie.
En zone inondable rurale, les anciens savent comment affronter ces inondations, comment se mettre à l'abri et mettre à l'abri leurs biens. Ce n'est pas nécessairement le cas des nouveaux arrivants, et leur manque d'information a amplifié les dégâts. Il faut y remédier en travaillant avec les maires, qui oeuvrent au plus près des citoyens.
N'est-il pas temps de demander aux communes situées dans des zones inondables, telles que définies par le plan de prévention du risque inondation, d'instaurer une véritable éducation au risque ? Par exemple, il faudrait leur demander d'installer de manière systématique – et ce pourrait même être obligatoire – une signalétique spécifique aux entrées de ville et de village, afin d'alerter et d'informer les populations sur les risques encourus ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem.
Madame Mette, comme je l'ai indiqué à votre collègue M. Ardouin, à la demande du Premier ministre et en lien avec le ministère de Mme Pompili, l'état de catastrophe naturelle pourra être déclaré dès vendredi pour un certain nombre de communes, dès lors qu'elles auront déposé un dossier en ce sens.
J'invite d'ailleurs les élus de Gironde et, de manière plus générale, ceux de l'Ouest dont les territoires ont été touchés par la tempête Justine à déposer ces dossiers – les services préfectoraux se tiennent à votre disposition. Cela permettra le déclenchement très rapide de l'état de catastrophe naturel : nous y sommes très attachés.
Je souhaite à mon tour souligner l'aide apportée par les élus locaux, le corps préfectoral et l'ensemble des agents de l'État et des collectivités locales. Votre question concerne aussi la prévention. Nous menons, Mme la ministre Pompili et moi, un travail en la matière, et nous avons annoncé de nouvelles mesures à Rouen, après le désastreux accident de l'usine Lubrizol. Dès 2022, un système d'information du public par diffusion cellulaire – c'est-à-dire par les téléphones portables – sera notamment disponible, permettant d'envoyer des SMS à toute la population, afin de l'informer, …
… en cas de catastrophe – qu'il s'agisse d'intempéries ou d'accidents comme celui de Lubrizol, qui, hélas, se produisent parfois sur le territoire national. C'est très important pour sauver des vies mais aussi des biens, comme vous l'avez dit.
Mme la ministre Pompili a également diligenté une mission d'inspection et une mission de réflexion sur les risques, sur leur prévention, sur l'éducation à ceux-ci et sur la bonne intelligence avec les élus locaux lors du déclenchement des plans qui leurs sont consacrés. La télévision, la radio et les SMS, bien sûr, permettront de remplacer, du moins partiellement, les sirènes pour une bonne information des populations. Je sais que nous menons ce travail très important de concert avec la représentation nationale.
Applaudissements sur les bancs du groupe Dem. – M. Rémy Rebeyrotte applaudit également.
Madame la ministre de la culture, dans un an, nous célébrerons les 400 ans de la naissance de Jean-Baptiste Poquelin, comédien et dramaturge emblématique, dont l'oeuvre irrigue depuis maintenant des siècles la culture et l'esprit français. Par-delà la célébration de cet artiste exceptionnel, nous rendrons hommage à un héritage fondamental, qu'il convient d'appeler la « légende Molière ».
Pour marquer cet anniversaire d'une mesure forte et symbolique, Francis Huster, sociétaire de la Comédie-Française, a demandé sa panthéonisation au Président de la République. Or, depuis bientôt deux ans, cette proposition reste sans réponse. Comment l'expliquer ?
Il s'agit en effet d'obtenir une reconnaissance symbolique, celle du caractère intemporel des pièces de Molière et de la place centrale de son oeuvre parmi celle des grands hommes et des humanités françaises, tels que Victor Hugo, Émile Zola, Alexandre Dumas. Ce serait un symbole aussi pour tous ceux qui aiment la langue de Molière, pour sa richesse et son expressivité.
Homme de théâtre jusqu'à son dernier souffle, Molière a payé sa fidélité à son art : il a été rejeté par l'Église de l'époque, et n'a pu reposer dans la sépulture digne qu'il méritait. En lui permettant de rejoindre ainsi les grands hommes, nous témoignerions du rôle essentiel de son art dans la vie artistique et culturelle française.
Cette première entrée au Panthéon d'un comédien serait aussi un signal puissant adressé au monde du spectacle vivant et de la culture, qui paye un si lourd tribut, en ces temps de crise.
Or, à ce jour, le ministère de la culture est resté muet sur cette demande. Pouvons-nous compter sur vous pour intervenir auprès du Président de la République, afin que Molière repose enfin parmi les grands hommes, au Panthéon ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LR. – Mmes Agnès Thill et Valérie Six applaudissent également.
La parole est à M. le secrétaire d'État auprès du Premier ministre, porte-parole du Gouvernement.
Madame Kuster, je vous prie de nouveau d'excuser l'absence de Mme Roselyne Bachelot, et vous remercie pour votre question, qui permet d'introduire ce débat dans l'hémicycle.
Nous interroger sur notre histoire, notre culture, notre république, c'est montrer que nous sommes bel et bien vivants. Dans le contexte actuel nous avons besoin de ces débats, riches, pour les Français, pour nous rassembler.
Molière, vous l'avez dit, est un monument de la culture française, une part de chacune et chacun d'entre nous. Oui, madame la députée, la question que vous soulevez est légitime et le voeu voté à l'unanimité par le Conseil de Paris vendredi dernier, qui reprend une initiative défendue depuis deux ans par le comédien Francis Huster, mérite toute notre attention.
Depuis 1885, les personnalités qui entrent au Panthéon représentent un engagement en faveur des principes hérités de 1789 et du progrès humain, défendus par la République. Avec Émile Zola, ce sont Les Rougon-Macquart qui sont entrés au Panthéon, mais aussi l'homme qui prit la plume pour Dreyfus. Avec Victor Hugo, ce n'est pas seulement l'esprit de Gavroche et des révolutionnaires de Quatrevingt-treize qui sont entrés, mais aussi le combat contre la peine de mort.
Sans conteste, l'oeuvre de Molière contribue au rayonnement de la France : nous partageons votre conviction. Cela étant, une panthéonisation, c'est d'abord un parcours, un échange, un débat avec les historiens, les spécialistes de l'auteur et de son époque. Cette proposition, comme toutes les autres, sera donc étudiée dans le cadre de la politique mémorielle définie par le Président de la République, qui a pour but de construire une mémoire de l'intégration républicaine partagée par tous les Français.
Au-delà de l'entrée au Panthéon, une des belles manières de rendre hommage à ce génie français qu'est Molière est de faire vivre son oeuvre, d'en transmettre inlassablement le goût aux jeunes générations.
Nul doute que le 400e anniversaire de sa naissance servira cet objectif. En 2022, ses textes seront partout en France et dans le monde, dans les théâtres, les écoles et les bibliothèques. Dans un premier temps, donc, comme le disait Molière, « Faisons bien les honneurs au moins de notre esprit. »
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Monsieur le secrétaire d'État, si un tel voeu a été adopté à l'unanimité au Conseil de Paris, c'est parce que j'en ai moi-même fait la proposition.
Exclamations sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Ce que nous avons réussi à la mairie de Paris, nous devons pouvoir le réussir ici.
Monsieur le Premier ministre, on aimerait en savoir plus sur le fameux cabinet privé McKinsey & Company,
« Ah oui ! » et applaudissements sur plusieurs bancs des groupes GDR et FI
qui a joué un rôle central dans l'élaboration de la stratégie vaccinale, et peut-être dans son pilotage.
On aimerait en savoir plus sur la plus-value de ces cabinets, sur leur rôle, sur leur approche, sur leurs orientations, sur les conseils qu'ils prodiguent. On aimerait vérifier leur travail, pouvoir consulter leurs rapports et leurs notes. On aimerait savoir combien ils touchent précisément,
« Oui ! » sur plusieurs bancs du groupe GDR
pour quelles tâches et sur quels sujets.
On aimerait savoir pourquoi on ne s'appuie pas sur les ressources de la fonction publique. On aimerait également savoir quelles sont les règles éthiques qui président au choix de ces cabinets. On aimerait savoir, par exemple, s'ils payent en France tout l'impôt qu'ils devraient payer. On aimerait savoir s'il arrive qu'ils proposent des conseils gratuits, …
… en espérant un retour sur investissement, et s'il arrive qu'on accepte. On aimerait savoir quelles sont les informations qui leur sont communiquées. On aimerait savoir s'il y a des allers et retours entre la haute fonction publique et ces officines. On aimerait savoir si vous prévoyez d'employer un cabinet de consultants pour évaluer le recours aux cabinets de consultants.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes GDR et FI.
On aimerait d'ailleurs savoir quel rôle ces cabinets ont joué et jouent dans la réforme de l'État, en se demandant s'il s'agit de conseil ou d'influence. En effet, faire appel à eux revient à privatiser le coeur de l'État régalien ; cela s'inscrit dans une logique de « managérisation » de la fonction publique, dévaluée et dessaisie de ses missions institutionnelles.
La démonstration n'est pas faite des bienfaits de cette technocratie libérale et verticale, loin s'en faut.
On aimerait donc savoir s'il est bien raisonnable de leur confier une part de notre santé.
En un mot, comment justifiez-vous le recours accru à des cabinets privés dans la conduite des politiques publiques qui sont au service de l'intérêt général ? Êtes-vous prêts à faire toute la transparence en cette matière ?
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI ainsi que sur plusieurs bancs du groupe SOC.
Parfois, quand on ignore, on redoute. Vous parlez de transparence, de connaissance, de compréhension, et vous aimeriez savoir. J'ai déjà répondu à plusieurs questions au Gouvernement sur le sujet ; je pourrais aussi vous proposer de regarder dans les archives de l'État : y compris dans les gouvernements auxquels les communistes ont participé, il n'a pas été rare du tout que les ministères, et pas seulement celui de la santé, fassent appel à des sociétés privées de conseils.
Les archives de la Ve République montrent l'existence d'un système dit de carrousel, permettant d'impliquer successivement des entreprises privées différentes, …
… qui aident et conseillent les structures d'État pour mener des opérations particulières, telles que la vaccination, ou d'autres opérations beaucoup plus discrètes et beaucoup plus récurrentes.
Oui, monsieur le député, on a du talent dans le privé ! On a du talent dans le secteur privé, comme dans le secteur public. Quand on ne travaille qu'avec les services publics, on nous reproche de ne pas faire appel au privé, …
… mais quand on fait appel au privé, on nous demande pourquoi le public ne remplit pas la mission, et quand on fait appel aux deux, on dénonce le trop grand poids de l'un ou de l'autre.
Protestations sur les bancs du groupe GDR.
Ce que je peux vous dire, c'est qu'il y a des règles, lesquelles sont évidemment respectées, notamment en matière de transparence.
Monsieur Pierre Dharréville, nous nous connaissons bien.
Je sais que vous êtes ouvert d'esprit,
Exclamations sur les bancs du groupe GDR
que vous cherchez à comprendre, et manifestement vous ne comprenez pas.
Mêmes mouvements.
Je vous proposerais bien volontiers de passer à mon ministère et de rencontrer les équipes qui y travaillent – pourquoi pas ? Vous observerez le rôle du cabinet de conseil sur lequel vous m'interrogez. Ce rôle ne concerne pas du tout la conduite de la stratégie vaccinale : il est, par exemple, d'appeler les cent hôpitaux pivots pour savoir s'ils ont bien reçu les doses du vaccin AstraZeneca ; si ce n'est pas le cas, de vérifier si le camion est bien parti de l'entrepôt, et s'il n'est pas parti de l'entrepôt, de vérifier si les laboratoires ont livré les doses en temps et en heure, puis d'élaborer des tableaux de bord pour nous permettre, par exemple, de vous dire aujourd'hui que près de 70 % des personnes âgées résidant en EHPAD ont bien été vaccinées.
Exclamations sur les bancs des groupes GDR et FI.
Tout ce travail est accompli par des opérateurs publics et privés, pour mettre toutes les compétences au service de l'État – selon moi, c'est l'essentiel.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
Votre réponse concerne le domaine de la santé. Je répondrai favorablement à votre invitation
MM. Ugo Bernalicis et Jean-Luc Mélenchon applaudissent
… car je crois que notre assemblée serait bien inspirée de mettre son nez dans ces questions, dont nous avons à connaître.
Applaudissements sur les bancs des groupes GDR et FI ainsi que sur quelques bancs du groupe SOC.
Au nom des membres du groupe UDI et indépendants, j'appelle votre attention, monsieur le ministre de l'éducation nationale, sur les fermetures de classes annoncées, notamment en milieu rural.
À Énencourt-Léage, village de ma circonscription, l'école compte deux classes seulement : une de maternelle réunissant vingt-deux élèves appartenant aux trois niveaux, et une classe d'élémentaire avec les cinq niveaux – CP, CE1, CE2, CM1 et CM2 – et trente-deux élèves.
Ce cas n'est pas rare : il se rencontre dans de nombreuses communes. Voilà à quoi conduisent les fermetures de classes en zone rurale, alors que, dans mon exemple, il faudrait au contraire ouvrir une classe pour avoir dix-huit élèves par classe. J'ai tourné les chiffres dans tous les sens ! Les fermetures ont d'autres conséquences redoutables – comme les fuites vers le privé et les enseignants non remplacés – , auxquelles s'ajoutent les restrictions prévues à l'instruction en famille, qui aboutiront à une augmentation du nombre d'élèves par classe.
Certes les classes à niveaux multiples sont fantastiques et développent mille compétences, certes le professeur d'école est polyvalent, mais une classe de cinq niveaux et trente-deux élèves ne sert pas l'intérêt des élèves. Quant au tutorat, je vous assure qu'il a ses limites. La réussite scolaire est mise de côté, au profit d'une logique comptable ; on est loin du dédoublement, comme le disent les gens.
Nous avons donc entendu avec intérêt l'intervention au Sénat, le 3 février, de la secrétaire d'État chargée de l'éducation prioritaire, qui affirmait : « Depuis la rentrée de 2020, aucune fermeture de classe ne s'est faite dans les communes de moins de 5 000 habitants sans l'accord du maire. Il n'y a pas de raison que cela change. » À l'en croire, il n'y aurait donc pas de fermetures de classes dans les communes de moins de 5 000 habitants – je parle bien de classes, et non d'écoles. Monsieur le ministre, pouvez-vous nous confirmer cette affirmation officielle, qui réjouira les élus et les parents d'élèves ?
M. Grégory Labille applaudit.
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Nous sommes d'accord sur la nécessité de défendre l'école rurale, et c'est ce que nous faisons.
Toutefois, personne ne peut ignorer, en arrière-plan, la baisse démographique que connaît la France en général,
Exclamations sur les bancs du groupe LR
les zones rurales en particulier. Nous devons tous la prendre en considération. Malgré cette baisse, nous avons continué à créer des postes dans le premier degré : il y a donc moins d'élèves – 200 000 environ depuis 2016 – , mais plus de professeurs – près de 7 500 postes ont été créés dans le même temps. Dans le département de l'Oise, que vous avez cité, 19 postes ont été créés, alors même que le nombre d'élèves ne connaît pas d'augmentation susceptible de justifier ce chiffre.
Cela étant, il est possible d'observer les situations au cas par cas, notamment l'exemple que vous avez évoqué : il n'est pas normal qu'une classe d'école primaire regroupe plus de trente enfants. Le comité technique spécial départemental se réunit cet après-midi, …
Les conseils départementaux de l'éducation nationale sont des chambres d'enregistrement, vous le savez très bien : ils ne servent à rien !
… donc toutes les affirmations énoncées aujourd'hui peuvent faire l'objet de modifications jusqu'au dernier jour avant la rentrée, car nous voulons être pragmatiques et ajuster les situations au fur et à mesure.
L'école rurale devrait susciter l'union nationale. Elle n'a jamais connu de politique aussi favorable que celle que nous menons, alors que le contexte n'a jamais été aussi difficile puisque la démographie est défavorable. Notre stratégie consiste à attirer les familles, grâce à la création de postes, ainsi qu'à une politique qualitative : il faut le répéter, l'école primaire rurale fait davantage réussir les enfants que l'école primaire en général. Le plan de relance participe également à cette politique, avec les mesures en faveur de la rénovation thermique ou de l'équipement numérique des écoles rurales, en soutien des collectivités locales. Donc oui, il y a des perspectives pour l'école rurale, et oui, nous travaillons au cas par cas pour éviter que les ouvertures ou fermetures de classes provoquent des situations aberrantes.
Est-ce une blague ? Vendredi soir, comme bon nombre d'élèves, mes enfants m'ont fait la surprise de rentrer avec un mot de l'école, m'imposant de les y envoyer dès lundi matin avec un masque chirurgical, et non plus avec un masque en tissu. Nous nous sommes retrouvés à courir dans un hypermarché bondé, un samedi, pour y acheter des masques chirurgicaux junior, à 7 euros la boîte.
Exclamations sur les bancs du groupe LaREM.
Résultat : hier, des enfants sont venus avec des masques chirurgicaux pour adultes, donc inadaptés, ou ont été refoulés des écoles car ils portaient un masque en tissu. Évidemment, personne ne s'est demandé si toutes les familles auraient les moyens de cette dépense supplémentaire.
Vous nous annoncez qu'il ne suffit pas d'acheter des lits chez Ikea pour ouvrir des lits de réanimation. Tant mieux : premièrement, achetons français, et deuxièmement, le groupe La France insoumise vous demande depuis neuf mois d'auditionner les 180 000 infirmiers diplômés d'État qui ont changé de profession
Applaudissements sur les bancs du groupe FI
pour savoir à quelles conditions ils reviendraient travailler dans nos hôpitaux ; idem pour les 40 000 soignants extra-frontaliers, parmi lesquels on compte des médecins. Et vous, vous parlez de lits Ikea : est-ce une blague ?
Vous venez de vous rendre compte que vous ne pouviez pas utiliser sans compter les étudiants aides-soignants, infirmiers, IBODE – infirmiers de bloc opératoire diplômés d'État – , et IADE – infirmiers anesthésistes diplômés d'État – , alors vous les renvoyez en formation. Mon groupe parlementaire vous avait prévenu : les formations ne sont pas surfaites. Plus d'étudiants en renfort : on ferme administrativement des lits de réanimation, en pleine période pandémique ! Est-ce une blague ? Si gouverner, c'est prévoir, quand allez-vous écouter nos préconisations, prévoir, prévenir et planifier ?
Applaudissements sur les bancs du groupe FI. – M. Jérôme Lambert applaudit également.
Permettez-moi de profiter de votre question pour lancer un appel. Vous avez raison, madame la députée : un grand nombre de soignants dans notre pays, diplômés, qui ont donc eu la vocation du métier, n'exercent plus. J'en parlais ce matin encore avec Mme de Montchalin,
Exclamations sur les bancs du groupe LR
ministre de la transformation et de la fonction publiques ; grâce à l'attractivité retrouvée des métiers du soin, notamment dans le secteur hospitalier, nous voulons permettre aux infirmières qui ont quitté l'hôpital il y a quelques années d'y revenir.
Les conditions de travail ont évolué, les accords du Ségur ont augmenté le total sur la feuille de paye,
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM. – Protestations sur les bancs du groupe FI
et il augmentera davantage encore pour les infirmiers et pour les aides-soignants. Nous travaillons à la fameuse revalorisation indiciaire des grilles ; j'avais annoncé que cet indicateur atteindrait environ 35 euros par soignant, il sera plus proche des 50 euros en moyenne. Nous travaillons à la reprise de dette des hôpitaux et, à la demande du Premier ministre, à la création de 15 000 postes supplémentaires de soignants. Pour que ce ne soit pas du vent – car je vous ai entendue – , un indicateur mensuel vous permettra, comme à chacun des Français, de suivre le nombre de postes créés et le nombre de postes vacants qui auront trouvé des soignants, pour bien soigner.
La dynamique est en marche, …
… et je me permets de vous répondre également en évoquant le fameux périmètre du Ségur, c'est-à-dire la question des soignants qui n'avaient pas été oubliés, mais qui ne faisaient pas partie de ceux pour lesquels des revalorisations étaient initialement prévues.
Exclamations sur les bancs du groupe FI.
Nous touchons au but d'un accord majoritaire avec les syndicats, et je souhaite ardemment qu'il aboutisse. Je parle de nombreux soignants du secteur hospitalier, des SIAD – services hospitaliers de soins à domicile – , et d'autres.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Vraiment, les choses sont en train de bouger, madame la députée ; accompagnez-nous, lancez l'appel avec nous, je sais que votre motivation première est de poursuivre ces objectifs, et je ne doute pas que vous serez extrêmement utile en cette période.
Après le Ségur, il y a toujours des démissions dans les hôpitaux. Hélas, les chiffres parlent d'eux-mêmes.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Que l'on se suicide à 11 ans en direct sur TikTok ou que l'on soit un président des États-Unis battu aux élections, nous courons tous le risque d'être blessés ou de blesser sur les réseaux sociaux. Aujourd'hui, journée internationale de sensibilisation aux usages du numérique des jeunes, 150 pays se mobilisent. Pourquoi les jeunes, alors que nous aurions tous besoin d'une telle formation ? Parce que les jeunes sont les premières victimes ; de plus en plus tôt, ils sont seuls face à leur écran.
Monsieur le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports, je connais votre engagement contre le cyberharcèlement, l'endoctrinement et les fake news. Votre action et celle de votre ministère en ont fait la preuve. Je pense par exemple à la plateforme d'apprentissage et de certification des compétences numériques Pix, qui améliore les compétences et permet l'évaluation des progrès dès la classe de cinquième. Pourtant, 38 % des enfants de 9 à 12 ans utilisent un réseau social, 56 % des 11-20 ans ont été victimes d'actes de cyberviolence et 24 % reconnaissent en avoir commis.
Il faut semer la graine de la citoyenneté numérique plus tôt et arroser cette graine tout au long de la scolarité pour que s'implantent durablement les racines qu'elle produira. Nous voulons donc aller plus loin, d'abord en généralisant le permis internet, lequel n'est délivré – en CM2, par des gendarmes et policiers – qu'à un quart des enfants, malgré une mobilisation exceptionnelle depuis 2013. Nous souhaitons aussi que Pix s'attache davantage à la promotion des usages positifs et à la prévention des risques qu'à la maîtrise technologique d'internet.
Nous sommes nombreux, et pas seulement au sein du groupe La République en marche, à penser qu'il y va autant de la santé des jeunes que de la démocratie. L'éducation ne changera pas tout, bien sûr, mais rien ne changera sans l'éducation. Vous le voyez, monsieur le ministre, nous partageons les mêmes préoccupations. Pensez-vous, dès lors, pouvoir aller plus loin, avec nous, dans la sensibilisation aux bons usages d'internet ?
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM.
La parole est à M. le ministre de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports.
Vous évoquez le sujet, essentiel, de la maîtrise d'internet et de la création d'une cybercitoyenneté. Comment notre civilisation, quoique de plus en plus technologique, peut-elle être de plus en plus humaine aussi ? C'est le défi que doit relever notre génération, et que nous transmettrons à celles qui la suivront. C'est pourquoi on n'en fera jamais trop en la matière.
Vous avez évoqué la question du harcèlement, en reconnaissant que le Gouvernement y travaillait beaucoup, avec d'ailleurs plusieurs députés. Depuis trois ans, nous avons progressé : le harcèlement scolaire est en recul en France, même si ce n'est jamais dans des proportions suffisantes. Par contre, le cyberharcèlement n'a pas baissé : comme dans le reste du monde, il a augmenté avec le confinement, et nous devons lutter plus que jamais en ce domaine.
Nous devons bien entendu lutter en ce qui concerne la régulation des grandes plateformes numériques, mais aussi en matière de formation, d'éducation, comme vous l'avez dit. Sur ce point également, le Gouvernement a beaucoup agi ces derniers temps ; les états généraux du numérique ont également permis des avancées et le Parlement est une source d'inspiration.
Avec le certificat Pix, qui s'inscrit désormais dans le cursus scolaire, nous avons introduit une certification des compétences numériques obligatoire pour les élèves de troisième et de terminale, même s'il faut probablement aller plus loin, comme vous l'avez dit. La citoyenneté numérique doit en effet être envisagée dès l'école primaire, aussi bien à travers toutes les possibilités offertes par le numérique – comme le développement du numérique en milieu rural – que des risques qu'il comporte.
La prévention civique à l'égard d'internet, c'est-à-dire la capacité à se mouvoir de manière responsable sur la toile, doit désormais s'apprendre dès le plus jeune âge. C'est pourquoi je suis très ouvert à la proposition que vous faites, et sur laquelle il faut encore travailler, de certifier, à l'issue des cycles de l'école primaire, la capacité à se mouvoir sur internet de manière civique, responsable et sans courir de risque personnel.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM et sur quelques bancs du groupe Dem.
Madame la ministre déléguée chargée du logement, les allocataires viennent de percevoir leur APL – aide personnalisée au logement – pour le mois janvier. Pour certains d'entre eux, trop nombreux, le montant de cette aide a fondu comme neige au soleil. Ainsi les étudiants, les jeunes actifs ou les personnes en contrat de professionnalisation sont lésés par l'entrée en vigueur de votre réforme.
Très concrètement, depuis le 1er janvier 2021, les aides personnalisées au logement sont calculées sur les douze derniers mois et réévaluées tous les trois mois. Or le mode de calcul précédent présentait deux avantages : un montant d'aide stabilisé sur l'année d'ouverture des droits, calculé sur les revenus de l'année n-2 – le plus souvent nuls ou presque nuls pour les jeunes ménages – et un reste à vivre amélioré par le cumul transitoire des premiers revenus du travail, parfois irréguliers, avec une aide au logement favorable et encore stable.
Avec votre réforme, destinée à éviter les effets d'aubaine, beaucoup de nos concitoyens ont ainsi eu la très mauvaise surprise de constater des baisses importantes, voire la perte totale de leur aide personnalisée au logement.
D'ailleurs, si vous avez décalé à deux reprises l'entrée en vigueur de la réforme des aides au logement, c'est parce qu'elle ne contribue pas à mieux protéger les jeunes, notamment les jeunes en alternance ou les nouveaux entrants sur le marché du travail, qui voient subitement leurs ressources amputées de 30 %, alors même qu'ils vivent avec de petits salaires et doivent régler des loyers importants.
N'étant pas soumis au régime des étudiants, les personnes sous contrat de professionnalisation sont également largement touchées par cette réévaluation faite sur la base des douze derniers mois. Même des étudiants dont la situation n'a pas changé constatent une baisse de leur APL.
Pourtant, lors de la discussion du projet de loi de finances pour 2020, le groupe Socialiste et apparentés avait alerté avec insistance sur les conséquences de ce nouveau mode de calcul, proposant de maintenir un régime dérogatoire pour les moins de 25 ans, calé sur le dispositif applicable aux apprentis. Ce dispositif coûterait 90 millions d'euros.
En l'absence d'un minimum jeunesse, que le Gouvernement refuse, beaucoup de jeunes perdent le bénéfice d'une aide de stabilité pour se lancer dans la vie !
Applaudissements sur quelques bancs des groupes SOC et GDR. – Mme Muriel Ressiguier applaudit également.
La crise nous affecte durement, et elle affecte en particulier les étudiants, les jeunes salariés et les demandeurs d'emploi. Le Gouvernement, qui n'y est bien évidemment pas insensible, se mobilise pour activer tous les leviers afin de mieux les protéger, en premier lieu grâce à la prolongation de la trêve hivernale de deux mois, puisqu'elle prendra fin le 1er juin prochain, et non le 1er avril.
Comme vous l'avez indiqué, monsieur le député, Emmanuelle Wargon a, sous l'autorité du Premier ministre, conduit une réforme du régime des APL. Il ne s'agit pas de faire des économies, mais de mieux adapter, au plus vite, le montant des APL à la situation réelle des bénéficiaires.
M. Gaël Le Bohec applaudit.
Le calcul des APL est désormais effectué sur la base des revenus contemporains, et non plus des revenus de l'année n-2.
Nous avons porté une attention particulière à la situation des jeunes en menant cette réforme. Ainsi, le niveau d'APL perçu par les étudiants, salariés ou non, n'est pas modifié par la réforme : il est même en augmentation pour les étudiants salariés, avec la fin de dégressivité de l'APL avec les revenus. Si le niveau d'APL de certains étudiants diminue, cela s'explique, soit par un changement de situation, soit par une erreur, et il convient alors que l'intéressé contacte dans les plus brefs délais la CAF – caisse d'allocations familiales – dont il relève. Les stagiaires et les jeunes en contrat d'apprentissage conservent un système avantageux puisque seule la part de leurs revenus qui excède le SMIC est prise en compte dans le calcul de l'APL.
Certes, les jeunes actifs qui débutent dans la vie active et obtiennent un travail verront leur niveau d'APL diminuer plus rapidement qu'avec l'ancien système. Toutefois les jeunes salariés et alternants de moins de 25 ans, rémunérés jusqu'à 1,1 SMIC et sous contrat depuis moins de 18 mois, pourront bénéficier d'une prime de 1 000 euros, versée par Action logement, pour les aider à accéder à un logement autonome.
Vous pouvez le constater, monsieur le député, le Gouvernement est pleinement mobilisé pour accompagner la jeunesse de notre pays dans l'accès au logement.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Soutien aux entreprises multi-activités
Ma question, qui s'adresse à M. le ministre de l'économie, des finances et de la relance, porte sur la nécessité de mieux prendre en compte la multi-activité par le fonds de solidarité.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
Dans la décision politique, dans sa mise en oeuvre administrative, le risque d'une approche déshumanisée n'est jamais totalement absent. Pour ne pas parler uniquement de seuil, de structure juridique, de chiffre d'affaires, permettez-moi, monsieur le ministre, de donner à cette question une incarnation. Au moment de vous l'adresser, je pense à Maud et à Benoît, qui vivent à Mornay-sur-Allier, dans le Cher. Il y a quelques années, leur exploitation agricole a connu des difficultés : ils ont alors pris leur courage à deux mains, et ils n'en manquent pas !
Maud s'est lancée dans une formation de reconversion, avec tout ce que cela comporte de fatigue, d'heures de route, de sentiment de tenter le tout pour le tout, sans oublier le poids d'un investissement de 400 000 euros. Puis la ferme-auberge a ouvert, et le succès a rapidement été au rendez-vous. Les comptes de l'exploitation agricole sont revenus dans le vert grâce au restaurant. Les prêts contractés ont commencé à être remboursés.
Mais la covid est arrivée et, avec elle, les mauvaises surprises. Le couple a redoublé de travail, mais l'administration fiscale leur a signifié, l'hiver dernier, qu'ils n'étaient pas éligibles au fonds de solidarité. Pourquoi ? Pour une question juridique : leur activité de restauration n'étant pas séparée du GAEC – groupement agricole d'exploitation en commun – , lequel génère un chiffre d'affaires, ils se sont trouvés exclus du dispositif.
Au-delà de l'exemple de Maud et de Benoît, des fermes-auberges, mais aussi des bars tabac, des épiceries-bars, bref, des commerces multi-activités, souvent en ruralité, sont exclus du fonds de solidarité. Ils ont une particularité commune, celle d'avoir une activité ouverte qui génère du chiffre d'affaires mais peu de résultat, tandis que celle qui les faisait vivre a été fermée administrativement.
Quelles évolutions envisagez-vous, monsieur le ministre, pour que ces activités, qui le méritent, puissent bénéficier du fonds de solidarité nationale ?
Applaudissements sur les bancs du groupe Agir ens ainsi que sur plusieurs bancs des groupes LaREM, UDI-I et LT. – Mme Émilie Bonnivard applaudit également.
Vous avez raison, monsieur le député de rappeler que le fonds de solidarité est un dispositif très large. Je viens de le dire, il a déjà permis de verser plus de 14 milliards d'euros d'aides au bénéfice de presque 2 millions d'entreprises, ce qui est considérable et permet d'accompagner l'essentiel du tissu économique.
Le Gouvernement a apporté de nombreuses modifications au fonds de solidarité, s'agissant tant du nombre de salariés maximum par entreprise que du chiffre d'affaires. Plus récemment, nous avons proposé une alternative entre un montant versé par le fonds plafonné à 10 000 euros, ou correspondant à 20 % du chiffre d'affaires du mois de référence. De la même manière, Bruno Le Maire, Alain Griset et moi-même nous efforçons de mieux prendre en compte les entreprises qui ont des charges fixes importantes : je pense notamment aux exploitations de sport indoor.
Vous avez évoqué la question des entreprises multi-activités – fermes-auberges, bars-tabac, multiservices. Une difficulté juridique se pose pour elles, comme vous l'avez noté, soit lorsque les activités sont confondues au sein d'une même structure, soit lorsque l'une des activités exercées, qui se trouve être la principale, n'est pas éligible.
Le Gouvernement a apporté une première réponse à cette difficulté en faisant en sorte que le code APE – activité principale exercée – de l'entreprise ne soit pas une référence absolue : à cet égard, vous appelez, monsieur le député, à ne pas déshumaniser les choses et vous avez raison. Nous voulons et nous faisons en sorte que les services de la DGFiP – direction générale des finances publiques – tiennent compte de l'activité principale quand bien même celle-ci ne correspondrait pas au code APE. Ainsi, 15 % des entreprises perçoivent des aides alors que, d'un point de vue strictement administratif, elles n'y sont pas éligibles.
Il reste des entreprises, à l'instar de celle que vous avez évoquée, dont les activités sont peu rentables. Le Gouvernement a sollicité une étude des dossiers au cas par cas : nous craignons en effet que le fait d'apporter une réponse trop large n'induise des effets d'aubaine trop importants pour d'autres secteurs. Nous continuons donc à travailler et à instruire les dossiers : dans l'attente, nous les faisons examiner au cas par cas, et nous regarderons l'ensemble des exemples que vous avez évoqués.
Monsieur le Premier ministre, la France, pays de la gastronomie, voit, depuis le début de l'épidémie, ses restaurants fermés, avec des conséquences économiques et sociales dramatiques.
Les restaurants, qui sont par définition des espaces de liens sociaux, sont supposés être des foyers de contamination du virus.
Pourtant, rares sont les études scientifiques qui permettent de le démontrer. Ainsi, nos voisins italiens et espagnols ont à nouveau ouvert leurs restaurants. Sans vouloir les imiter, ni prendre et faire prendre des risques inconsidérés à nos concitoyens, la France ne devrait-elle pas prendre l'initiative d'une étude scientifique à ce sujet ?
À Marseille, le Collectif de l'avenir, composé de restaurateurs et de cafetiers, mais aussi de médecins et de chercheurs du pôle d'infectiologie de l'AP-HM – Assistance publique-Hôpitaux de Marseille – , du bataillon des marins-pompiers et d'avocats. Ce collectif propose la mise en place d'une expérimentation sans précédent pour étudier scientifiquement la circulation du covid-19 dans quelques restaurants pilotes.
Cette expérimentation, menée en lien avec l'ARS – Agence régionale de santé – de la région PACA – Provence-Alpes-Côte d'Azur – , permettrait de connaître la réalité de la circulation du virus et de ses variants dans les restaurants, puis de définir un protocole sanitaire grâce auquel ces derniers pourraient ouvrir en toute sécurité. Je soutiens, avec Martine Vassal, présidente de la métropole Aix-Marseille-Provence, Renaud Muselier, président du conseil régional de Provence-Alpes-Côte d'Azur, Jean-Luc Chauvin, président de la chambre de commerce et d'industrie Aix-Marseille-Provence – CCIAMP – , ainsi qu'un grand nombre d'acteurs du territoire marseillais, cette démarche innovante et porteuse d'espoir. Vous savez combien les Français en ont besoin aujourd'hui.
Dans les années à venir, monsieur le Premier ministre, nous devrons apprendre à vivre avec le virus et ses variants. Il est indispensable que la France soit pionnière en se fondant sur une étude scientifique qui permette de protéger notre art de vivre à la française. Ma question est donc simple : soutiendrez-vous cette expérimentation ? Seriez-vous prêt à y prendre part pour envisager une réouverture des restaurants en toute sécurité dans les meilleurs délais ?
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Vous avez raison, monsieur le député, de souligner qu'il faut vivre avec le virus. Au vu de la durée de la pandémie, du nombre de personnes qui ont dû arrêter leur activité, même accompagnées par l'État, il est légitime de vouloir reprendre une vie la plus normale possible. Bien sûr, les Français aspirent à retourner au théâtre, au cinéma ou dans les restaurants, à écouter des concerts, à reprendre une activité sportive en salle comme à l'extérieur. Les Français sont comme tous les autres. Je suis un Français comme tous les autres et je n'aspire qu'à permettre à la France de retrouver la vie la plus normale possible et de vivre dans les meilleures conditions possibles avec le virus.
Je tends toujours la main lorsque des propositions me sont faites en matière de protocole, pour accompagner des démarches et expérimenter un certain nombre de choses, comme c'est notamment le cas dans le domaine culturel, avec des concerts ou des soirées dansantes destinées à des personnes qui font le test avant d'entrer. J'accompagne systématiquement ces démarches et je prendrai connaissance du protocole que vous avez évoqué, qui peut être intéressant.
Sachez, monsieur le député, que nous n'avons plus besoin de preuves scientifiques pour savoir que, hélas, les restaurants figurent parmi des lieux dans lesquels on se contamine le plus, et ce malgré toute la bonne volonté, la meilleure volonté, la meilleure implication des restaurateurs. Il existe à cet égard des études françaises, allemandes, italiennes, américaines. Vous évoquez des pays où les restaurants, dites-vous, sont ouverts. Sachez qu'en Espagne, à part une région, me semble-t-il, les bars et les restaurants sont fermés dans la plupart des territoires. De plus, si les restaurants sont ouverts dans certains pays, ils étaient fermés la semaine dernière, en raison d'un confinement. De la même manière, la France a vu ses restaurants ouverts, puis fermés, puis à nouveau ouverts et à nouveau fermés : tout dépend de la circulation du virus.
Nous avons fait, monsieur le député, la cruelle expérience de la difficulté de réguler un certain nombre d'activités, notamment dans la métropole marseillaise. Je ne reviens pas sur l'épisode du début de la deuxième vague à la sortie de l'été.
Exclamations de plusieurs députés du groupe LR.
Nous devons évidemment rester prudents, mais nous devons être innovants, être offensifs et permettre de créer les conditions pour retrouver une vie normale. Je vous propose donc de m'adresser le protocole de votre projet : j'en prendrai connaissance et, si les conditions sont réunies pour envisager de le tester, pourquoi pas ? Ce n'est pas un oui, ce n'est pas un non, c'est un peut-être, mais nous avons aussi besoin de « peut-être » dans la période actuelle.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Avant d'appeler la dernière question, je vous rappelle que la séance ne sera pas suspendue à l'issue des questions au Gouvernement. Nous procéderons immédiatement au vote sur le projet de loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire.
Le scrutin est annoncé dans l'enceinte de l'Assemblée nationale.
Situation de l'entreprise FM Logistic dans l'Yonne
Ma question s'adresse à M. Bruno Le Maire, ministre de l'économie, des finances et de la relance.
L'impact de la crise sanitaire sur l'organisation et l'activité des sociétés n'est plus à démontrer : la grande majorité d'entre elles déclarent une baisse de leurs ventes et de leur chiffre d'affaires.
Les crises successives ont poussé les entreprises à s'adapter à leur nouvel environnement en modifiant leur offre, en proposant de nouveaux produits ou services, en réorganisant leur logistique ou encore en établissant de nouveaux partenariats. Malheureusement, certaines d'entre elles n'ont pas encore réussi à entamer leur diversification et sont extrêmement sensibles aux soubresauts économiques que nous subissons depuis un an.
Tel est le constat amer que j'ai dû faire dans l'Yonne : après l'usine SKF – au sujet de laquelle mon collègue André Villiers s'était exprimé dernièrement – , c'est au tour de l'entreprise FM Logistic d'annoncer que son site, situé à Savigny-sur-Clairis, dans ma circonscription, fermera d'ici à la fin de l'année, ce qui condamnera au chômage plus de 200 salariés et intérimaires. Ayant tout misé sur un seul client, Carrefour, cette grande entreprise pâtit de son absence totale de stratégie de développement. Faut-il rappeler que le site de 57 000 mètres carrés dont il est question, inauguré il y a seulement deux ans, avait bénéficié du soutien de l'État pour la formation de ses personnels ?
Je ne peux me résoudre à voir disparaître plus de 350 emplois directs et indirects en raison de la fermeture du site. Les salariés ne pourront pas tous accepter un reclassement, en raison notamment des nouvelles distances à parcourir pour aller travailler.
Cet exemple montre la nécessité d'accélérer encore la diversification de notre tissu économique et industriel. Comment le Gouvernement compte-t-il agir pour que les aides exceptionnelles versées en ce moment permettent également aux sociétés concernées de se repositionner sur le marché concurrentiel ? De surcroît, les aides perçues ne pourraient-elles pas être reprises afin de soutenir les salariés ? Enfin, le Gouvernement peut-il m'assurer de son soutien sur ce dossier et s'engager à réunir les parties prenantes afin d'obtenir un maintien de l'entreprise sur site, grâce à une diversification de sa clientèle, dont elle a plus que jamais besoin ?
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes Dem et LaREM.
Vous avez raison, madame Crouzet, d'insister sur l'importance du secteur de la logistique, qui représente 10 % du produit intérieur brut et 10 % de l'emploi salarié en France, puisqu'il emploie plus de 1,8 million de personnes.
Nous sommes au fait des difficultés rencontrées par l'entreprise FM Logistic à Savigny-sur-Clairis. Elle y est confrontée à une situation particulière, que vous avez décrite : une dépendance très forte vis-à-vis d'un client, qui n'a pas renouvelé son contrat. À l'heure où nous parlons, l'entreprise n'a pas trouvé de nouveaux clients qui lui permettraient de poursuivre son activité. Elle nous garantit – ses représentants ont eu l'occasion de le dire notamment à mon collègue Jean-Baptiste Lemoyne – qu'elle met tout en oeuvre pour préserver l'emploi, le site et l'activité. Dans la période difficile que nous connaissons, le Gouvernement, en particulier Élisabeth Borne, veille à ce que les salariés soient parfaitement accompagnés. Je note que l'entreprise a pris contact avec les services de l'État.
Face à cette situation, vous appelez de vos voeux la mobilisation des services de l'État et du Gouvernement, notamment pour accompagner les salariés. Demain se tiendra une table ronde, à laquelle Jean-Baptiste Lemoyne aurait évidemment participé de manière tout à fait utile si elle avait eu lieu à un autre moment de la semaine. Vous y serez présente, je le sais. Jean-Baptiste Lemoyne et mon ministère ont demandé au préfet du département d'y porter la parole de l'État.
Nous mettrons tout en oeuvre pour accompagner les salariés et pérenniser le site. Ces difficultés étant liées à des questions de stratégie, le plan de relance que nous mettons en oeuvre doit aussi apporter des réponses, au-delà de cette entreprise, en matière de diversification, de renouvellement et de modernisation des activités.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM.
L'ordre du jour appelle le vote, par scrutin public, sur l'ensemble du projet de loi prorogeant l'état d'urgence sanitaire (nos 3836).
Il est procédé au scrutin.
Voici le résultat du scrutin :
Nombre de votants 484
Nombre de suffrages exprimés 471
Majorité absolue 236
Pour l'adoption 278
Contre 193
Le projet de loi est adopté.
Applaudissements sur plusieurs bancs du groupe LaREM. – Exclamations sur les bancs du groupe LR.
Suspension et reprise de la séance
La séance, suspendue à seize heures cinquante, est reprise à dix-sept heures, sous la présidence de Mme Laetitia Saint-Paul.
Les élections locales sont une composante essentielle de la démocratie parce qu'elles sont un moment démocratique pour les Français. Ils élisent des élus de proximité, qu'ils ont souvent l'occasion de connaître et de rencontrer ; ils choisissent aussi à cette occasion des élus qui exerceront des compétences qui touchent à la vie quotidienne, que ce soit la solidarité s'agissant des départements ou encore l'emploi, l'attractivité, l'activité économique s'agissant des régions.
Ces élections essentielles de la démocratie locale étaient prévues pour mars prochain. L'épidémie de covid-19 nous oblige, vous le savez, à proposer le report à juin 2021 du renouvellement général des conseils départementaux, des conseils régionaux et des assemblées de Corse, de Guyane et de Martinique.
Pourquoi reporter le double scrutin qui était prévu pour mars prochain et rallonger le mandat des conseillers départementaux et régionaux ? Un tel report des échéances électorales n'est évidemment jamais une décision facile. Celle-ci est directement et exclusivement liée au contexte pandémique que nous traversons.
Pour prendre cette décision touchant au report du scrutin, le Gouvernement a d'ailleurs souhaité bénéficier de tout l'éclairage nécessaire. C'est pourquoi le Premier ministre a confié le 23 octobre dernier à M. Jean-Louis Debré, ancien président du Conseil constitutionnel, …
… une mission visant à étudier si et dans quelles conditions pourraient se tenir les élections départementales et les élections régionales dont le législateur avait fixé la date à mars 2021.
Je tiens, au nom du Gouvernement, à saluer le travail réalisé par M. Jean-Louis Debré…
… et le rapport qu'il a remis au Premier ministre le 13 novembre dernier. Dans un court laps de temps, il a en effet consulté toutes les forces politiques comme des associations d'élus locaux.
Son analyse est ainsi exempte de tout esprit partisan…
… et son rapport intègre les recommandations du Conseil scientifique sur la question du covid-19. Il a permis, je crois, d'aboutir à un diagnostic partagé sur le sujet essentiel qu'est le scrutin dans une démocratie, après avoir étudié différentes possibilités et plusieurs scénarios de report, il estime « raisonnable » – c'est le terme même employé par M. Jean-Louis Debré – que ce double scrutin se tienne au mois de juin 2021.
Les recommandations de ce rapport sont claires, elles sont pragmatiques. Le Gouvernement les a donc suivies en proposant ce projet de loi qui tend à reporter les élections départementales et régionales au mois de juin prochain. Nous pensons qu'il faut donner de la lisibilité, aux électeurs et aux électrices, aux candidats et aux candidates ainsi qu'aux élus sortants concernés par cette échéance.
Le Gouvernement entend que ces élections se tiennent en juin prochain et fait tout pour cela. Le Gouvernement partage d'ailleurs pleinement cet objectif de lisibilité pour chacun, notamment pour les maires et pour les préfets qui organisent ces élections. C'est pourquoi, si le Parlement adopte le report des élections régionales et départementales à juin prochain, le décret de convocation des électeurs sera pris dès la promulgation de la loi, et ce décret proposera d'organiser le scrutin le 13 et le 20 juin prochains.
Seule la loi peut décider d'un éventuel nouveau report à une autre date que juin prochain ce que, je le dis très clairement, le Gouvernement ne souhaite pas.
Cela supposerait que les conditions sanitaires ne se soient pas améliorées. En tout état de cause, le Parlement sera parfaitement informé de la situation sanitaire par le biais d'un rapport qui lui sera remis au plus tard le 1er avril 2021.
Tout est donc mis en oeuvre pour que ce double scrutin puisse se tenir dans les meilleures conditions possible les 13 et 20 juin prochains.
Je partage l'objectif, poursuivi par la commission des lois et par les députés aux travers des différents amendements qui ont été déposés – et, pour certains d'entre eux, adoptés – sur ce texte, de permettre au plus grand nombre d'électeurs de prendre part au double scrutin de juin prochain et de choisir ainsi librement leurs représentants au sein des collectivités territoriales.
Je salue notamment les initiatives très concrètes de votre rapporteur, dont je voudrais saluer le travail et l'engagement pour faciliter la campagne électorale. C'est le sens de l'amendement qui, adopté par la commission, tend à donner accès à un numéro vert gratuit
Exclamations sur les bancs du groupe LR
aux frais du candidat, afin de lui permettre de répondre aux questions posées par les électeurs.
Le Gouvernement entend lui aussi mettre en oeuvre les mesures nécessaires pour leur permettre d'exercer ce droit et ce devoir de citoyen. Il s'agit ainsi de concilier la sécurité sanitaire et la tenue d'un scrutin dans les conditions les plus parfaites de liberté, d'équité, de sincérité,
M. Sébastien Jumel s'exclame
en évitant tout risque inconsidéré de fraude électorale.
Ainsi, le Gouvernement a entendu les arguments renouvelés de votre rapporteur et de la commission en faveur de l'instauration d'une double procuration, c'est-à-dire de la possibilité, pour une personne, d'être mandataire de deux électeurs. Toutefois, seul le contexte épidémique justifierait cette possibilité, qui doit donc être strictement limitée au double scrutin de juin prochain.
En tout état de cause, le Gouvernement partage votre souci de permettre à tous les citoyens de prendre part à ce scrutin. D'ailleurs, plusieurs mesures sont en cours de préparation dans cet objectif, visant par exemple à sécuriser la tenue des bureaux de vote. Des mesures vont être prises pour limiter le risque sanitaire pour les personnes qui s'y rendent. Je voudrais en rappeler ici très brièvement les principes, qui bénéficient désormais d'une expérience de mise en oeuvre dans plusieurs protocoles sanitaires : limiter les contacts par un aménagement des bureaux de vote, mettre à la disposition des membres du bureau de vote et des électeurs le matériel de protection sanitaire nécessaire ou encore éviter que la carte d'électeur ne passe de main en main.
Au-delà de ces aménagements sanitaires, le Gouvernement a adopté des mesures réglementaires pour faciliter l'exercice du vote. Tout d'abord une téléprocédure sera ouverte pour permettre l'obtention d'une procuration qui sera complémentaire de la procédure papier. Même s'il restera nécessaire de se rendre au commissariat ou à la gendarmerie, la démarche sera simplifiée et l'information du citoyen sera améliorée puisqu'il sera informé que la commune a bien pris en compte sa demande.
En outre, un décret pris après avis du Conseil d'État facilitera l'organisation du double scrutin pour les communes, donc pour les électeurs. Vous le savez, la jurisprudence du Conseil constitutionnel sur ce double scrutin est très stricte. Il faut par exemple dédoubler les bureaux de vote pour ne pas créer de confusion dans l'esprit des électeurs.
Tout en respectant ce principe, le Gouvernement a donc prévu les aménagements suivants pour juin prochain : les fonctions de président et de secrétaire du bureau de vote seront mutualisées, tout en conservant un niveau suffisant de surveillance des opérations électorales. Dans les cas où les deux bureaux pour les deux scrutins sont ouverts dans la même salle, les isoloirs seront mutualisés.
Dans les bureaux dotés de machines à voter, les deux scrutins pourront être organisés sur la même machine et tous les membres du bureau de vote seront mutualisés. Enfin, dans le contexte de l'épidémie de covid-19 où les personnes âgées sont plus vulnérables, il est proposé que, en l'absence d'assesseurs, l'électeur le plus jeune soit désigné par défaut puis, s'il manque encore un assesseur, l'électeur le plus âgé.
En plus de ces aménagements, qui doivent aider les communes comme les électeurs, le ministère de l'intérieur hébergera sur son site les professions de foi des candidats qui le souhaitent. Il n'y aura bien sûr pas de suppression du support papier pour les candidats qui souhaitent le conserver.
S'agissant de la campagne électorale, le support électronique permettra un accès sûr, d'un point de vue sanitaire, à l'information.
En outre, et toujours pour rendre possible une campagne électorale dynamique malgré l'épidémie, mais aussi pour tenir compte de l'allongement de la période de campagne, le Gouvernement propose dans ce projet de loi une augmentation des dépenses électorales en majorant les plafonds de dépenses autorisées de 20 %. Notre objectif commun, c'est bien que les citoyens participent le plus massivement possible au scrutin des 13 et 20 juin prochains, sans risque pour leur santé ou pour la maîtrise de l'épidémie, si elle devait être encore active au printemps prochain.
À cet égard, le Gouvernement prévoit des aménagements qui permettront la tenue de ce double scrutin en juin prochain, sans pour autant prendre un risque de fraude ou de déficit de confiance dans le résultat.
Vous le savez mieux que personne, mesdames et messieurs les députés, les élections sont le fondement même du fonctionnement de notre démocratie, et ce au niveau local comme au niveau national. Dans la situation inédite où la pandémie de covid-19 nous a plongés, un report de quelques mois – et de quelques mois seulement – de ces élections nous a semblé être une nécessité. Avec les préfets et avec les maires, qui organisent concrètement les élections dans les territoires, nous donnerons donc aux Français la possibilité de choisir leurs élus départementaux et leurs élus régionaux en juin prochain, en toute sécurité et en toute sérénité, je l'espère.
Applaudissements sur les bancs des groupes LaREM et Dem.
La parole est à M. Rémy Rebeyrotte, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République.
Notre pays traverse depuis bientôt un an une crise sanitaire sans précédent. L'épidémie de covid-19 a bouleversé nos vies personnelles et notre vie collective. Nous en subissons aujourd'hui encore les effets dans le contexte de l'état d'urgence sanitaire. Il s'agit d'une réalité à laquelle nous ne pouvons pas nous soustraire et qui entraîne des conséquences pour le calendrier électoral. Cependant, s'il faut, bien sûr, s'adapter à ces nouvelles circonstances, notre démocratie ne peut pas être mise entre parenthèses.
Sous le contrôle vigilant du Conseil constitutionnel, le suffrage doit être universel, régulier, sincère et équitable. Le respect de ces exigences doit nous éclairer, afin de nous permettre de déterminer dans quelle mesure le calendrier électoral a vocation à être modifié à l'épreuve de la crise sanitaire actuelle, avec un souci de sécurité du vote de clarté et sans confondre vitesse et précipitation.
Conformément aux préconisations émises par le Conseil scientifique, je rappelle que nous avons déjà décidé du report de plusieurs séances électorales dans un esprit de consensus et en accord avec le Sénat. Il en fut ainsi du second tour des élections municipales, reporté de mars à juin 2020, des élections consulaires, reportées de mai 2020 à mai 2021, ou encore des élections législatives, sénatoriales et municipales partielles, qui vont être organisés progressivement jusqu'au 13 juin 2021.
Le présent projet de loi portant report du renouvellement général des conseils départementaux, des conseils régionaux et des assemblées de Corse, de Guyane et de Martinique, s'inscrit dans cette perspective. Il fait suite au rapport remis en novembre dernier au Premier ministre par M. Jean Louis Debré, ancien président de notre assemblée et du Conseil constitutionnel.
Faisant suite à de nombreuses auditions, les conclusions du rapport sont claires : le report des élections régionales et départementales au mois de juin 2021 constitue la meilleure option, tant au regard des impératifs sanitaires, qu'il convient évidemment de prendre en compte, que de la nécessité de ne pas déséquilibrer de façon excessive notre calendrier électoral. Le Conseil scientifique remettra, pour éclairer l'exécutif et le législatif sur l'état sanitaire du pays, un rapport qui ne sera pas en soi une clause de revoyure automatique.
Je me félicite que la date de juin 2021 bénéficie d'un large consensus politique. Le report des deux tours de scrutin de mars à juin 2021, que je vous proposerai par un amendement d'acter symboliquement dans le titre de ce projet de loi, constitue l'objet principal du texte.
Dans sa rédaction initiale, ce texte comportait quatre articles. Sans remettre en cause le report en juin 2021, le travail accompli par nos collègues sénateurs a multiplié par trois le nombre d'articles. Si certains ajouts et modifications apparaissent plutôt opportuns, d'autres semblent moins judicieux, voire moins en rapport avec le texte. L'examen en commission des lois mercredi dernier a ainsi permis d'adopter vingt-trois amendements venant de tous les bancs, afin de procéder à un certain nombre d'ajustements que j'estime, en tant que rapporteur et à la suite d'une dizaine d'auditions, tout à fait nécessaires. Permettez-moi d'en dire quelques mots.
À l'article 1er, la proposition du Sénat visant à fixer à mars 2022 l'échéance des prochain mandats régionaux et départementaux va dans le bon sens. En revanche, je ne crois pas que le législateur doive empiéter sur la compétence du pouvoir réglementaire en fixant la date exacte de la tenue du scrutin. Une telle précision relève du Gouvernement dans le cadre du décret de convocation des électeurs, mais je me réjouis, madame la ministre déléguée, que vous nous ayez annoncé il y a quelques minutes que les dates des 13 et 20 juin prochains avaient été retenues. Il était nécessaire, pour nous mais surtout pour ceux qui ont la charge d'organiser ces élections et, bien sûr, pour les candidats, de connaître ces dates le plus tôt possible.
Prévue par l'article 1er bis, l'autorisation de recourir à une double procuration, à l'image de ce qui a été pratiqué avec succès lors du second tour des élections municipales de juin 2020, est également bienvenue. Je précise néanmoins qu'il ne s'agit que d'une dérogation justifiée par la crise sanitaire et valable pour les seules élections régionales et départementales des 13 et 20 juin 2021, et qu'elle n'a pas vocation, à ce stade, à se pérenniser hors pandémie.
En revanche, la faculté de déterritorialiser les procurations, ouverte par le Sénat, est aujourd'hui prématurée. Sur ce point, je rejoins les avis de M. Lachaud et de Mme Karamanli…
… qui, en commission, ont souligné que l'ouverture de cette faculté n'était pas nécessairement opportune. En effet, si la déterritorialisation des procurations pourra être instaurée au 1er janvier 2022, grâce à l'adaptation du répertoire électoral unique, les conditions de sécurité informatique requises par cette évolution ne sont pas encore réunies à ce jour.
L'article 2 du projet de loi prévoit que le Gouvernement remettra au Parlement un rapport sur la situation sanitaire au plus tard le 1er avril 2021. Je sais que l'objet de ce rapport a suscité – et suscite encore – des interrogations, allant même jusqu'à alimenter directement des soupçons quant aux intentions du Gouvernement : compte tenu des propos que Mme la ministre déléguée vient de tenir, je crois que les choses sont claires.
Comme l'a très justement rappelé le président Jean-Louis Debré lors de son audition par la commission des lois, ce rapport n'est en aucun cas une clause de revoyure automatique : il s'agit simplement d'un point d'étape permettant d'informer le Parlement sur la situation sanitaire liée à l'épidémie de covid-19. J'ai donc déposé un amendement, fidèle aux préconisations du rapport de Jean-Louis Debré, tendant à préciser que le rapport devra également indiquer, au vu de l'analyse scientifique, les adaptations qu'il conviendrait d'instaurer afin de garantir la sécurité sanitaire de la campagne et du scrutin. Là encore, je vous remercie, madame la ministre déléguée, de vos annonces concernant la sécurisation, le moment venu, des scrutins dont il est question.
À l'initiative de notre collègue Paul Molac, la commission a introduit l'article 2 bis, qui prévoit que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques publie un guide du candidat et du mandataire actualisé et spécifique aux prochaines élections régionales et départementales. Il s'agira d'un outil utile pour améliorer l'accès à l'information sur des sujets pratiques particulièrement importants.
Au regard du report de trois mois de la date du scrutin, l'article 4 du projet de loi prévoit une majoration de 20 % du plafond des dépenses de campagne, et l'article 5 repousse au 17 septembre 2021 la date limite de remise des comptes à la Commission. Cela laissera davantage de latitude aux candidats pour réunir l'ensemble des pièces justificatives relatives au dépôt des comptes.
Lors de l'examen en commission des lois, plusieurs amendements ont été adoptés visant à porter de deux à trois semaines la durée de la campagne officielle – Mme Karamanli, en particulier, avait déposé un amendement en ce sens – et à autoriser la mise à disposition, par les candidats, d'un numéro d'appel gratuit, un numéro vert permettant aux électeurs de les contacter. En effet, lever cette interdiction quelque peu obsolète, qui figure dans le code électoral depuis 1990, pourrait constituer un palliatif utile à l'absence de rencontres physiques entre les candidats et les électeurs.
Sur un tout autre sujet, l'article 4 ter, introduit à l'initiative de notre collègue Isabelle Florennes et du groupe Dem, prévoit que le Gouvernement remet au Parlement, au plus tard le 1er octobre 2021, un rapport sur la possibilité de généraliser le recours aux machines à voter. En effet, pour les communes qui en sont équipées, le renouvellement de ces machines est soumis, depuis 2008, à un moratoire – un moratoire, c'est bien, mais à condition d'en sortir !
Enfin, mes chers collègues, deux sujets introduits dans le projet de loi par le Sénat ont suscité un débat – tout à fait intéressant d'ailleurs.
Premièrement, le Sénat a introduit les articles 6 et 6 bis relatifs à l'organisation des campagnes électorales audiovisuelles. L'article 6 bis, dont la portée a été renforcée en commission, me semble particulièrement pertinent : pour inciter les électeurs à voter, il prévoit une campagne audiovisuelle institutionnelle en complément de la campagne traditionnelle du ministère de l'intérieur, afin de sensibiliser les électeurs au rôle des conseils régionaux et départementaux et de les informer des dates et modalités de ces scrutins.
En revanche, l'article 6, qui tendait à imposer aux chaînes de service public la diffusion de clips de campagne, a été supprimé en commission. Nous considérons que l'obligation de diffusion des clips de campagne à la télévision pour les élections régionales n'est pas opportune, tant pour des motifs techniques, qualitatifs et logistiques, qu'en raison de la réduction corrélative du temps d'antenne consacré aux débats dans les émissions régionales de France 3. En effet, il me semble préférable de privilégier les émissions de débat à la diffusion de clips, dont les conditions de production resteraient à définir. La réalisation des clips dans les délais prévus ne serait d'ailleurs pas sans difficulté. Je tiens à saluer au passage le fort engagement de France Télévisions pour faire naître la démocratie locale sur ses antennes, comme en témoignent les 240 débats organisés par France 3 à l'occasion du second tour des élections municipales, en juin 2020.
Deuxièmement, le Sénat a introduit les articles 8 et 9, que nous vous proposons de supprimer.
Le texte adopté par la commission, que nous examinons aujourd'hui, me semble atteindre un point d'équilibre : moyennant quelques ajustements rédactionnels supplémentaires, je suis convaincu que notre assemblée, et plus généralement le Parlement, parviendra à s'accorder sur l'ensemble des dispositions du projet de loi qui, eu égard à la crise sanitaire que nous traversons, s'avèrent aussi légitimes qu'indispensables.
Applaudissements sur plusieurs bancs des groupes LaREM et Dem.
Nous examinons aujourd'hui un projet de loi visant à reporter les élections départementales et régionales, ainsi que des assemblées de Corse, de Guyane et de Martinique. Ces élections devaient initialement se tenir en mars prochain mais, en raison de la crise sanitaire, le texte tend à les reporter au mois de juin et à définir les modalités d'organisation de la campagne et du scrutin.
Au nom du groupe Agir ensemble, je souhaite rappeler l'importance de ces élections : les élus qui s'y engagent permettent de faire vivre nos collectivités. Je salue donc les femmes et les hommes qui soutiennent la rénovation d'un collège, d'un lycée ou de nos routes, coordonnent des plans d'aide sociale à l'enfance, aux personnes âgées et aux personnes rencontrant un aléa de la vie, déploient des plans d'aide aux entreprises et à la formation, ou accompagnent EHPAD et hôpitaux dans la difficile période que nous vivons. Vous savez, mes chers collègues, à quelle instance se rattachent ces compétences, mais tant de nos concitoyens l'ignorent ! Il y a un immense travail de pédagogie à entreprendre pour clarifier la situation.
Je souhaite également, au nom de mon groupe, rappeler la nécessité de tout mettre en oeuvre pour maintenir ces élections au mois de juin : n'ajoutons pas une crise démocratique à la crise sanitaire, économique et sociale.
Je suis ravi de toutes les dispositions prévues dans le projet de loi pour assurer la protection des votants, et je fais confiance aux maires et à leurs équipes pour organiser au mieux ces élections, dans le respect des gestes barrières. Compte tenu du double scrutin et de la nécessité de limiter le nombre de personnes dans les bureaux, notre groupe proposait de faciliter l'organisation des élections en autorisant la réduction du nombre d'isoloirs : merci, madame la ministre déléguée, d'avoir formulé la même proposition.
Nous allons vivre une campagne peu ordinaire, nous pouvons donc en profiter pour innover dans nos moyens de communication. Ainsi, je salue l'ajout, par le Sénat, de dispositions visant à renforcer les émissions à caractère électoral sur France Télévisions et Radio France. Pour une grande partie de la population, les missions des différentes collectivités territoriales sont mal connues : nous devons prendre ce sujet à bras-le-corps, car c'est notre démocratie qui est en jeu. À ce titre, l'allongement de la durée de la campagne officielle de douze à dix-neuf jours va dans le bon sens.
S'agissant des différentes modalités de vote – électronique ou par correspondance – , notre groupe n'a pas de position unanime : si certains émettent des doutes quant à la possibilité de réaliser des changements dans un délai si court, le groupe reste intéressé à ce que des modes alternatifs soient étudiés. À titre personnel, je tiens à vous alerter sur la fracture numérique de nos territoires : avant d'imaginer un vote électronique, il est nécessaire de résoudre cette injustice.
Par ailleurs, si le déploiement des machines à voter, en place dans certaines villes depuis 2018, semble satisfaisant, nous regrettons l'absence d'évaluation. À ce titre, la demande émise par le groupe Dem d'un rapport au Gouvernement sur la généralisation du recours aux machines à voter est légitime. Il serait d'ailleurs souhaitable que ce rapport aborde également la pertinence des autres modes de scrutin.
Lors de son audition par la commission des lois, Jean-Louis Debré a souligné que le rôle des collectivités locales était méconnu de nos concitoyens. Je l'ai remarqué aussi et, au vu de l'importance – que j'ai déjà évoquée précédemment – des conseils régionaux et départementaux comme des assemblées locales dans l'aménagement du territoire, je déplore également ce manque d'intérêt. Il est important que nous tentions d'en comprendre les raisons.
Pour ma part, je crois que nos concitoyens aiment le scrutin direct : ils souhaitent avoir un représentant responsable de leur territoire. C'est pourquoi j'ose rappeler ici l'idée de créer des conseillers territoriaux : mieux identifiés par nos concitoyens, ils seraient chargés des politiques départementales et régionales sur un territoire donné. Cela créerait un lien entre les compétences des deux collectivités. Sans doute cela ouvrirait-il également plus de possibilités de mutualisation, comme en matière d'entretien des collèges et des lycées. À mes yeux, la proximité des élus locaux est essentielle pour assurer l'efficacité de leur action sur un territoire. Et quelle victoire ce serait de parvenir à réduire le fameux millefeuille !
Le dernier point que je voulais évoquer portait sur les dates de ces scrutins, mais vous y avez déjà répondu, madame la ministre déléguée : je vous remercie d'avoir pris une décision, et j'ai bien noté qu'ils auront lieu les 13 et 20 juin. Le groupe le groupe Agir ensemble soutient la volonté de tenir les élections départementales, régionales et des assemblées de Corse, Guyane et Martinique en juin, et votera donc en ce sens. Nous espérions que nos préoccupations seraient prises en considération, elles l'ont été : merci beaucoup.
M. Rémy Rebeyrotte, rapporteur, et Mme Maud Petit applaudissent.
Nous examinons aujourd'hui le projet de loi, adopté par le Sénat, prévoyant le report des élections régionales et départementales en juin. Des reports d'élection, nous en avons déjà connu : ce fut le cas en 2008, lorsque les élections municipales avaient été reportées pour assurer la cohérence du calendrier électoral, et plus récemment, en juin dernier, avec le report du second tour des élections municipales, qui n'avait pas pu avoir lieu en mars en raison de l'émergence de la pandémie de la covid-19. Cette pandémie a non seulement bouleversé notre vie économique, sociale et culturelle, mais aussi notre vie démocratique, touchant à la fois l'organisation des élections et le fonctionnement de nos institutions. Qu'elles soient nationales ou locales, celles-ci se sont adaptées au gré de l'évolution de l'épidémie, et fonctionnent aujourd'hui dans des conditions que l'on peut collectivement considérer comme relativement satisfaisantes. Quoi qu'il en soit, la vie démocratique, tant locale que nationale, doit continuer malgré l'évolution du virus : ainsi, si nous pouvons accepter le principe du report d'élections au nom des conditions sanitaires, il nous est impossible d'imaginer que la protection de la santé de nos concitoyens, pour fondamentale qu'elle soit, entraîne la mise entre parenthèses de la vie démocratique pour une durée indéterminée.
Car, en s'en tenant à ce principe, on pourrait imaginer une proposition de report des élections régionales et départementales à un moment où la situation sanitaire le permettrait. Mais alors, quid de l'élection présidentielle si, en 2022, un rebond épidémique, de nouveaux variants ou une nouvelle épidémie venaient à bouleverser encore les conditions d'organisation de cette consultation, pourtant majeure pour notre pays ? Ce n'est pas imaginable. Jean-Louis Debré l'a d'ailleurs souligné lorsqu'il a rendu son rapport, en précisant qu'il était utile et prudent d'envisager un report des élections en juin, mais qu'il ne fallait pas aller au-delà – et, en tout état de cause, pas au-delà de la prochaine élection présidentielle et des législatives qui la suivront.
Mais ce n'est pas ce que prévoit le projet de loi, et vous venez de confirmer, madame la ministre déléguée, qu'un décret sera publié par le Gouvernement pour organiser et convoquer les élections les 13 et 20 juin.
Jean-Louis Debré préconise d'ailleurs que le second tour n'ait pas lieu durant le dernier week-end de juin, ce dont nous avions constaté les inconvénients, l'an dernier, à l'occasion des élections municipales ; peut-être la proximité du début des vacances n'était-elle pas la seule cause du taux d'abstention que nous avons alors enregistré, mais elle a pu y contribuer. Cette année encore, quelques-uns de nos concitoyens seraient très heureux de pouvoir partir en vacances le plus tôt possible, pourvu que la situation sanitaire leur permette de le faire dans de bonnes conditions : les dates sont donc importantes.
Par ailleurs, votre engagement de publier le décret dès la promulgation du texte nous convient. Nous en déduisons que notre amendement visant à ce que cette publication intervienne au plus tard six semaines avant la convocation des électeurs en vue du premier tour devrait être adopté sans difficulté, puisqu'il correspond finalement aux mesures que vous auriez prises.
Un autre enjeu de ce texte réside dans l'organisation non pas tant des conditions du scrutin – cela, nous savons le faire – que de celles de la campagne.
Celle-ci doit en effet pouvoir se dérouler dans les meilleures conditions, alors que les réunions publiques à grande échelle, ou encore le porte-à-porte, seront sans doute compliqués. Des avancées ont été réalisées à la fois par le Sénat et dans le cadre de l'examen en commission. Parmi les quelques propositions que, pour notre part, nous avons faites, j'insiste sur la possibilité de sponsoriser de la publicité sur les réseaux sociaux. Bien qu'elle continue de susciter le désaccord, j'aimerais que nous en discutions, car il s'agirait là d'un canal essentiel pour permettre aux candidats de s'exprimer auprès de leurs concitoyens. Nonobstant ces controverses, le groupe UDI et indépendants soutiendra le texte.
Je commencerai par citer l'avant-propos – je ne suis pas allé très loin dans sa lecture – du rapport de Jean-Louis Debré sur ces élections départementales et régionales : « La sincérité des scrutins suppose que la campagne qui les précède se tienne, pour quelques mois, en dehors d'une loi d'état d'urgence sanitaire votée par le Parlement. » Or nous venons d'entériner, il y a peut-être trente minutes, la prorogation de l'état d'urgence sanitaire au moins jusqu'au 1er juin. C'est désormais un fait, alors qu'a été rappelée à plusieurs reprises l'impossibilité d'un scrutin sans campagne ; une élection sans campagne, c'est un moment où l'on se retrouve pour mettre un bulletin dans une urne, ce n'est pas une élection.
Il est donc nécessaire que nous puissions faire campagne. Des propositions ont été faites en ce sens : porter à dix-neuf jours la durée de la campagne officielle, créer un numéro vert – je passerai sur les numéros verts pour ne pas être désagréable. Dont acte ; c'est toujours ça de pris. Tout le monde est d'accord sur le fait que le scrutin ne peut se tenir en mars ; tout le monde, y compris nous, espère qu'il aura lieu en juin ; mais comment informer les citoyennes et les citoyens ? J'ai compris les spots publicitaires de France Télévisions, qu'il faudrait d'ailleurs généraliser : que pourrait-on faire de plus ? Impossible de se rendre sur les marchés, même si cela ne représente pas grand-chose. Le porte-à-porte vous donnerait de sérieuses chances de vous faire jeter d'un peu partout, non seulement, comme d'habitude, parce que vous faites de la politique, …
… mais aussi en raison du covid-19.
Je parle de réalités concrètes. Vous êtes aussi, du moins je l'espère, des militants de terrain, comme moi : vous voyez bien que ce sera compliqué ! Ce que l'on appelle le « R 39 », d'après l'article du code électoral qui en réglemente le remboursement, c'est-à-dire les impressions et affichages de la campagne officielle, inclut notamment la circulaire envoyée aux électeurs trois ou quatre jours avant le scrutin. Pourquoi ne pas prévoir deux circulaires, une au début de la campagne, une à la fin ? Je me rends bien compte que cela représente un coût ; nous n'avons d'ailleurs pas pu déposer d'amendements en ce sens, car ils seraient tombés sous le coup de l'article 40 de la Constitution. En revanche, cela permettrait d'assurer l'égalité entre les candidats, qui glisseraient leur propagande dans la boîte aux lettres de tous les citoyens inscrits sur les listes électorales : « Voilà ma trombine, voilà mes colistiers, voilà ce que j'ai à dire et ce que je vous propose. »
Nous essayons tout simplement d'imaginer ce qui pourrait permettre de pallier le fait que cette campagne ne sera pas une campagne comme les autres, normale, habituelle. Il y a bien évidemment les réseaux sociaux : je ne vais pas vous conseiller d'y être plus présents, car nous avons une longueur d'avance en la matière, ce qui nous donne un avantage comparatif. Pour autant, une campagne ne peut se limiter à ces réseaux.
Même si je l'aurais apprécié, je comprends que l'on ne puisse, en l'état actuel de notre réglementation, imposer des débats portant sur les élections régionales aux chaînes d'information en continu, par exemple. Nous en sommes donc réduits à l'audiovisuel public – et encore, seulement pour des spots – pour informer de ce que sont nos départements, nos régions, de leurs compétences respectives.
M. Jean Lassalle applaudit.
Il faut réfléchir aux moyens d'avoir davantage d'audience !
Enfin, j'avoue en toute humilité être impliqué dans la campagne des régionales. Ma foi, je ne cesse de me demander comment je vais faire ! Je me rends sur les plateaux de télévision, comme tout le monde ; mon statut de parlementaire me donne l'avantage de pouvoir le faire : c'est une distorsion de concurrence, qui au demeurant joue en ma faveur, mais passons. Bref, on comprend bien que c'est compliqué. Je mets tout cela sur la table afin que nous puissions, à nous tous, réunir le maximum d'éléments et de conditions qui rendent cette campagne acceptable, qui fassent dire que nous sommes bien dans une démocratie. En effet, qu'est-ce qui est le plus démocratique : se retrouver avec une participation aux élections régionales qui avoisine les 30 %, …
… et déplorer dans cet hémicycle que pas grand-monde n'est venu voter, ou faire en sorte que ces élections aient lieu dans de meilleures conditions ?
Je pose la question : j'ai bien conscience que le faire ne résout pas les problèmes. Au passage, je vous ai soumis quelques propositions ; peut-être, par exemple, pourrait-on progresser concernant le doublement de la circulaire : je ne pense pas qu'il soit nécessaire, pour cela, de modifier la loi. Je veux qu'il soit tenu compte de ces éléments.
Nous venons d'adopter la prorogation de l'état d'urgence sanitaire, et l'on nous explique par ailleurs que la propagation du variant pourrait connaître un pic en mars ou en avril, en plein coeur de la campagne, au moment où l'on approche du scrutin. Tout cela doit être pris en considération ! On n'empêchera pas la tenue du scrutin, évidemment ; je suis pour qu'il se tienne en juin, …
Mme Clémentine Autain applaudit.
Quelle que soit leur nature, les élections constituent le coeur de notre démocratie. La légitimité de nos institutions en dépend, et même notre possibilité de discuter ici : si nous n'étions pas élus, nous ne serions pas fondés à le faire.
Décider d'un report de ces élections n'est donc pas anodin : cela demande concertation et réflexion. C'est pourquoi nous saluons le travail de la commission présidée par Jean-Louis Debré. La situation que nous vivons n'est pas forcément inédite, mais assez exceptionnelle : elle appelle la question de ce report ; notre débat se trouve tout à fait légitime.
Compte tenu des reports de seconds tours survenus en 2020 et des incertitudes liées à la situation sanitaire, le groupe Libertés et territoires se rallie au report au mois de juin des scrutins initialement prévus en mars. En revanche, nous ne pourrions accepter un report plus tardif, qui les situerait après les élections présidentielles et législatives, car dans ce cas les mandats des actuels conseillers régionaux et départementaux seraient prolongés d'au moins un an et demi. Non seulement cela créerait une anomalie démocratique, mais l'inversion du calendrier serait perçue comme une manipulation politique, interprétée comme témoignant d'une volonté que l'élection du Président de la République reste, à terme, la seule possible. La défiance de nos concitoyens envers nos institutions s'en trouverait accrue. Aux États-Unis, au Portugal, l'élection présidentielle a pu avoir lieu ; la Roumanie a organisé des législatives en décembre dernier ; les élections au parlement de Catalogne ont lieu dimanche : la France ne peut faire figure d'exception parmi les démocraties.
Par ailleurs, nous accueillons favorablement la possibilité d'une double procuration, mesure de bon sens dans un contexte sanitaire qui empêche nombre de personnes de se déplacer, même si elle ne suffira sans doute pas pour remédier à la faible participation anticipée. Après discussion, nous avons écarté l'idée que les procurations fassent l'objet d'une déterritorialisation – je profite de l'occasion pour placer ce mot que nous nous sommes tant amusés à prononcer.
M. Rémy Rebeyrotte, rapporteur, acquiesce.
Elle demeure tout de même intéressante à l'échelle d'un secteur géographique : le département pour les élections départementales, la région pour les régionales ; il n'aurait aucun sens que des Alsaciens puissent voter en Bretagne, par exemple, ou des gens du Nord en Catalogne.
Sourires.
Je sais, monsieur Schellenberger : nous sommes tous des Français de l'extérieur !
Toutefois, nous déplorons un manque de visibilité concernant les modalités d'organisation du scrutin. Je regrette que ma proposition d'institutionnaliser la réunion, à intervalles réguliers, d'un comité de liaison entre le Gouvernement, les groupes parlementaires et les principaux partis politiques ait été rejetée. Notre groupe considère que les processus électoraux auxquels les citoyens vont être appelés à participer nécessitent de la transparence, de la concertation, afin de susciter la confiance. Nous regrettons également que la commission ait supprimé les dispositions prévoyant la diffusion de clips de campagne pour les élections régionales sur les chaînes du service public, notamment France 3, ce qui permettrait pourtant une présentation plus équitable des candidats, et surtout de véritables campagnes, centrées sur les enjeux de l'élection.
Nous avons bien entendu notre rapporteur : ce qu'il a dit au sujet des débats doit effectivement être mis dans la balance. Jean-Félix Acquaviva et moi-même défendrons cependant un amendement visant à ce que des programmes du service public de la communication audiovisuelle soient consacrés à expliquer non seulement le rôle des conseils régionaux et départementaux, comme cela figure déjà dans ce projet de loi, mais aussi celui des assemblées à statut particulier de Corse, de Martinique et de Guyane. En outre, nous saluons l'adoption en commission de notre amendement visant à ce que la Commission nationale des comptes de campagne et des financements politiques publie un guide du candidat et du mandataire actualisé, spécifique aux élections régionales et départementales de juin 2021, tenant compte de la situation sanitaire et des dispositions du présent texte. La dernière mise à jour du guide disponible en ligne remonte en effet au 21 janvier 2020, c'est-à-dire avant le contexte épidémique.
Je termine, madame la présidente. Pour toutes ces raisons, dans la mesure où le mois de juin sera maintenu comme période du report des élections départementales et régionales, notre groupe soutiendra majoritairement ce texte.
Applaudissements sur les bancs du groupe LT et sur quelques bancs du groupe Dem.
Nous venons d'exprimer notre position sur le texte relatif à la prorogation de l'état d'urgence : nous sommes défavorables aux mesures exorbitantes du droit commun, et nous avons souligné à cette occasion que le pays, en cette période de crise sanitaire, ne souffrait pas d'un excès mais d'un défaut de démocratie. Étant donné la crise que nous traversons, il aurait été plus judicieux, plus légitime, de multiplier les occasions de respiration démocratique, de collégialité dans la prise de décision ; il aurait été plus efficace, plus pertinent, de s'appuyer sur l'intelligence des acteurs de terrain, notamment des élus locaux : maires, conseillers départementaux, conseillers régionaux.
Vous n'avez pas fait ce choix : peut-être est-ce l'une des explications de la crise sans précédent que nous traversons et du fait que nos concitoyens l'acceptent aussi mal. Nous militons pour qu'on ne mette pas la démocratie sous cloche, mais pour qu'elle s'exprime pleinement. J'ai en tête l'entourloupe que fut le décalage du second tour des élections municipales. Je fais partie de ceux qui pensaient qu'il fallait qu'elles aient lieu : d'abord parce que le résultat était mauvais pour vous, ce qui fait toujours plaisir à voir ;
Sourires sur les bancs du groupe LR
ensuite parce que l'on avait besoin que les maires soient au travail afin de prendre soin des habitants, de démontrer que la proximité était efficace, utile, vitale en cette période de crise. La même observation vaut pour les conseillers régionaux ; c'est la raison pour laquelle je résume ainsi la position de mon groupe : le rapport Debré, tout le rapport Debré, rien que le rapport Debré.
J'entends aujourd'hui la ministre déléguée nous dire de ne pas nous inquiéter car, dès que la loi sera promulguée, le Gouvernement publiera un décret contenant les dates que nous avons effacées du texte. C'est un engagement fort devant le Parlement, et nous serons évidemment très vigilants à ce qu'aucune nouvelle entourloupe ne vienne le remettre en cause. Jean-Louis Debré a dit lui-même qu'un report du deuxième tour des élections régionales pour des raisons sanitaires serait une démarche anticonstitutionnelle, de nature même à porter atteinte aux équilibres de la démocratie en République. Nous serons très vigilants sur ce point.
M. Jean Lassalle applaudit.
J'en viens au sujet de la réussite des élections. Bien sûr, comme vous l'avez proposé, il y aura du gel, des masques et le matériel nécessaire pour organiser les bureaux de vote. Les maires savent le faire mais c'est aussi bien si l'État les y aide. N'oublions pas cependant que, pour que le vote se déroule dans de bonnes conditions, il faudra vacciner, protéger et réarmer l'hôpital. Si la grande majorité de nos concitoyens sont vaccinés d'ici le mois de juin, comme le Premier ministre s'y est engagé, les élections devraient se dérouler dans de bonnes conditions. C'est aussi un pari que nous devons faire.
Je souhaite enfin insister sur un sujet qui me préoccupe : les sortants risquent de se retrouver dans une situation avantageuse. Tous les quatre matins, ils participent à des inaugurations et se valorisent avec le FEDER – Fonds européen de développement régional – , les fonds du plan de relance ou encore les contrats de plan État-région, que vous avez décidé de faire voter avant le mois de juin, c'est-à-dire avant le scrutin. Les régions vont ainsi signer des contrats de plan avec l'État : autrement dit, les marcheurs sont au service des présidents sortants quels qu'ils soient. Cette situation est peut-être une illustration du « en même temps », mais elle est préoccupante ! La question de l'équité entre les candidats face au scrutin doit donc être posée. Elle dépend de l'espace médiatique ouvert mais aussi de l'existence de conditions de campagne équitables pour l'ensemble des candidats, ce qui suppose peut-être d'innover. Nous, les cocos, ne faisons pas vraiment campagne avec les numéros verts ou bleus…
… mais en rencontrant les gens. Je ne conçois pas de campagne au cours de laquelle nous n'irions pas convaincre les habitants en frappant aux portes et en allant sur les marchés serrer des mains, pour confronter les points de vue sans avoir peur de se faire engueuler.
M. Jean Lassalle applaudit.
Ces conditions seront évidemment perturbées par la situation sanitaire. Pourtant, on ne peut pas se satisfaire d'une campagne numérisée et aseptisée – d'une campagne de start-uper, en quelque sorte. N'étant pas un start-uper de l'élection, je pense qu'il faut créer les conditions d'une véritable campagne électorale. Voilà les éléments de vigilance que le groupe communiste aura à l'esprit en votant ce projet de loi ; nous veillerons absolument à ce que, dans sa concrétisation, l'entourloupe ne soit pas à tous les étages.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – MM. Ugo Bernalicis et Jean Lassalle applaudissent également.
C'est assez rare pour le souligner : il y a un relatif consensus au sujet de ce texte. C'est heureux car, pour une décision aussi lourde qu'un report d'élections, ce consensus était évidemment nécessaire.
La crise sanitaire que nous vivons depuis maintenant près d'un an nous contraint à des efforts et à des aménagements indispensables dans notre vie quotidienne. Dans ce contexte, l'organisation d'une campagne électorale et la tenue d'élections au mois de mars paraissaient peu souhaitables. Un large consensus parmi les familles politiques s'est d'ailleurs exprimé en ce sens, après la consultation menée par Jean-Louis Debré.
Il est néanmoins essentiel que la vie démocratique puisse suivre son cours. Le débat démocratique doit pouvoir avoir lieu et nous devons garantir aux Français la possibilité de s'exprimer dans les urnes le plus sereinement possible. Le Gouvernement propose donc, au travers du projet de loi que nous examinons, de reporter les élections régionales et départementales, initialement prévues en mars, au mois de juin prochain. À cet égard, nous nous satisfaisons des annonces que Mme la ministre déléguée a faites aujourd'hui quant aux dates précises des scrutins. Il était en effet indispensable de donner une visibilité aux électeurs et aux candidats – en particulier pour que ces derniers s'organisent en vue de leur campagne électorale. Les dates des 13 et 20 juin semblaient les plus consensuelles.
Nous considérons que nous devons collectivement nous organiser et nous mobiliser pour permettre que les élections se tiennent effectivement à ces dates et éviter tout nouveau report. Bien sûr, nous ne pouvons prédire ce que sera la situation sanitaire en juin prochain, mais les quelques mois supplémentaires dont nous disposerons devraient être précieux pour le déploiement de la campagne vaccinale et la lutte contre l'épidémie. La fin du printemps, caractérisée par des conditions météorologiques habituellement plus clémentes, devrait également permettre la tenue d'une campagne électorale adaptée aux circonstances.
C'est la raison pour laquelle le groupe LaREM apportera évidemment son soutien à ce texte. Souhaitant que les scrutins se tiennent en juin, la majorité a travaillé à des évolutions en ce sens, qui permettent notamment d'aller à la rencontre des électeurs. Malheureusement, la campagne électorale et militante ne pourra probablement pas se dérouler dans des conditions tout à fait ordinaires. Si les grandes réunions publiques en intérieur ne peuvent se tenir, il faudra garantir autant que faire se peut aux candidats la possibilité d'aller à la rencontre de leurs concitoyens en extérieur.
Pour répondre à ces circonstances exceptionnelles, le texte comporte plusieurs innovations. Il prévoit notamment un allongement de la campagne électorale, portée de deux à trois semaines, afin de faciliter l'accès aux informations électorales des candidats et de laisser davantage de temps à nos concitoyens pour en prendre connaissance, par exemple par le biais des panneaux d'affichage électoraux. Le texte adopté en commission permet aussi de lever l'interdiction de l'utilisation des numéros verts par les candidats. Comme le Sénat, nous avons voté en commission l'élargissement des modalités de vote, en particulier avec la faculté offerte à chaque citoyen de porter deux procurations lors de ces élections. Nous augmentons ainsi la possibilité, pour les personnes vulnérables ou âgées qui ne souhaiteraient pas se déplacer lors des scrutins, de voter normalement.
Ceci étant dit, je veux rappeler que le bon déroulement du scrutin et l'élargissement des modalités de vote dépendront de notre capacité à garantir l'absence de fraude ainsi qu'une organisation simple du vote, comme nous en avons l'habitude. Nous devons éviter tout risque d'altération de la sincérité du scrutin ou de la perception qu'en auraient les électeurs. C'est la raison pour laquelle nous nous satisfaisons du refus par la commission des lois de la mise en place d'un système hybride et complexe de procurations partiellement déterritorialisées, tout comme des possibilités d'un vote anticipé, d'un vote électronique ou d'un vote par correspondance. Il nous faut accorder plus de temps à ces réflexions et ne pas agir avec précipitation, car rien ne serait pire pour notre organisation démocratique, en ces temps de crise, que les soupçons de fraude ou de vote faussé.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe LaREM. – M. le rapporteur applaudit également.
Les deux textes dont nous sommes saisis cet après-midi posent tous les deux la question du fonctionnement de notre vie démocratique en période de crise sanitaire. Lorsqu'il s'oppose à la prorogation, telle quelle, de l'état d'urgence sanitaire et lorsqu'il s'interroge sur les problèmes de démocratie locale que pose le présent texte, le groupe Les Républicains ne se demande qu'une chose : comment associons-nous nos concitoyens et leurs représentants au pilotage et aux décisions publiques en temps de crise ?
Le choix que nous faisons de décaler les élections départementales et régionales doit nous conduire à envisager que la question se pose de nouveau si la crise sanitaire venait à perdurer.
Ce qui semble acceptable pour des élections locales serait-il acceptable pour les élections présidentielles et législatives dans un an ?
Aurions-nous le culot, en quelque sorte, de considérer que nous pourrions rallonger le mandat présidentiel ou législatif ? C'est une question difficile lorsqu'on est soi-même concerné, mais elle touche à un impératif : nous ne pouvons pas toucher à la périodicité d'un mandat électoral. Ce n'est pas notre rôle. La démocratie repose sur le principe de la périodicité et du renouvellement régulier du mandat électoral, qui doit primer sur beaucoup de choses.
Nous avons aujourd'hui un débat au sujet du décalage de cette date, mais le choix du moment auquel le rapport de Jean-Louis Debré lui a été commandé excluait de facto une première hypothèse, qui aurait sans doute été la plus démocratique : celle de la tenue du scrutin en temps et en heure, en mars. En réalité, en demandant en toute fin d'année 2020 à Jean-Louis Debré de produire un rapport sur le sujet, le Président de la République a d'emblée écarté la possibilité de tenir le scrutin en mars, comme cela aurait dû être le cas.
Avant son audition à l'Assemblée nationale, Jean-Louis Debré n'a d'ailleurs pas hésité à souligner, notamment lors de son audition au Sénat, certaines pressions dont il a fait l'objet de la part de hauts responsables de la majorité, pour qu'il propose de décaler le scrutin au-delà de 2022.
Cela aurait constitué un renversement complet du paradigme démocratique de notre État et de notre République, et aurait été à nos yeux tout à fait inacceptable.
Les conclusions du travail de Jean-Louis Debré nous semblent équilibrées. Le calendrier qui prévoit de tenir les élections départementales et régionales en juin est acceptable et constitue une forme de compromis, mais nous serons très attentifs à la formulation du rapport qui doit être remis en avril : il est hors de question, pour le groupe Les Républicains, que ce rapport ouvre la possibilité d'une clause de revoyure.
Ce rapport doit présenter les mesures mises en place pour que le vote puisse avoir lieu, et non déterminer si l'on peut ou non voter. Il faut que la vie démocratique se poursuivre, comme c'est le cas dans toutes les grandes démocraties qui nous entourent. Il n'y a pas de raison que, dans ce domaine, la France soit moins performante que les autres pays.
Permettez-moi enfin de m'interroger sur la façon dont sont traitées les élections partielles et de souligner encore notre vigilance face au risque que constitue ce rapport. Je pense au département de mon collègue Pierre-Henri Dumont, le Pas-de-Calais, où une circonscription attend la tenue d'une élection législative partielle, alors que la plus importante commune de cette même circonscription vient de connaître un renouvellement municipal anticipé en raison d'une situation de carence. L'élection municipale a donc lieu mais pas l'élection législative, qui concerne une ministre déléguée du Gouvernement.
Tels sont, mes chers collègues, les points auxquels nous serons très attentifs. Nous avons en effet déjà connu un précédent quinquennat au cours duquel aucun scrutin n'avait été épargné par la main de la majorité socialiste, et nous ne voudrions pas que les héritiers de la majorité socialiste que sont les membres de La République en marche ne viennent encore chercher à bouleverser le coeur de la démocratie en touchant à tous nos scrutins.
Applaudissements sur les bancs du groupe LR.
Ce projet de loi portant renouvellement général des conseils départementaux, régionaux et des assemblées de Corse, de Guyane et de Martinique est important pour la vitalité démocratique de notre pays, car, comme a pu le dire Jean-Louis Debré lors de son audition par notre commission, on ne confine pas la démocratie. La démocratie a triomphé des tyrannies modernes. Elle a résisté à des crises majeures. Elle est une force pour affronter les vents mauvais. C'est pourquoi nous devons tout faire pour la préserver, la renforcer et la dynamiser. Le report dans un délai raisonnable, c'est-à-dire au mois de juin, des prochaines élections, s'inscrit dans cet objectif. Aussi le groupe Mouvement démocrate (MODEM) et démocrates apparentés soutient-il le projet de loi que nous examinons aujourd'hui.
J'ai bien noté, madame la ministre, que vous mentionniez les dates des 13 et 20 juin prochains, ce dont nous nous félicitons. Pourquoi juin et pas septembre, ou après les élections présidentielles ? Les raisons de ce choix sont multiples, et notamment liées au déroulement de la campagne électorale, qui serait plus que jamais difficile et inaudible en plein été, à la nécessité de ne pas donner de coloration politique à ces élections visant à désigner des représentants locaux, mais aussi au non-sens que constituerait le fait de consacrer les deux premières années du prochain quinquennat à un enchaînement d'élections – présidentielle, législatives, départementales, régionales, sénatoriales partielles et européennes.
Si le calendrier du report de ces élections au mois de juin semble faire consensus, nous devons aussi avancer ensemble vers la meilleure organisation possible de ce rendez-vous électoral. Pour cela, deux objectifs doivent nous guider : d'une part, assurer des conditions sanitaires optimales pour le déroulement des opérations de vote ; d'autre part, lutter contre l'abstention. Pour mémoire, au second tour des élections municipales de juin 2020, le taux d'abstention était de près de 59 %, soit environ vingt points de plus qu'en 2014. La démocratie doit vivre, les électeurs doivent pouvoir s'exprimer. C'est pourquoi il est essentiel de sécuriser et de faciliter les opérations de vote malgré la pandémie, et de rassurer ainsi nos concitoyens pour les inciter à aller voter.
Ce moment démocratique qui, je le souhaite, intéressera les Français pendant plusieurs semaines, sera d'autant plus important qu'ils ont le sentiment de voir se défaire le lien qui unit chacun d'eux à la nation. Nous le constatons, la relation entre représentants et représentés est en crise, et nous devons tout faire pour que la pandémie ne l'aggrave pas. Nous devons saisir l'occasion de ce contexte difficile pour réinventer et moderniser nos modes de scrutin.
Notre groupe a déposé des amendements en ce sens, mais la plupart ont été déclarés irrecevables…
… tant en commission qu'en séance, ce que nous regrettons vivement. Je pense notamment à un amendement déposé en commission, visant à proposer l'expérimentation du vote blanc. Le vote blanc, par lequel un électeur exprime son refus d'opérer un choix entre les candidats en lice, tout en accomplissant son devoir électoral est un acte volontaire, porteur d'un message électoral : il indique une volonté de se démarquer du choix proposé par l'élection. Pourtant, le vote blanc est toujours assimilé au vote nul, alors que ce sont des votes différents. Les prochaines élections nous donnaient l'occasion d'expérimenter la prise en compte du vote blanc.
Un autre enjeu important est celui du vote à distance, que ce soit par correspondance ou par voie électronique. Sur ce point, notre amendement en commission visant à demander une expérimentation a été déclaré irrecevable, de même que notre demande de rapport sur sa mise en oeuvre. Il est pourtant essentiel d'avancer sur ce sujet. En effet, dans le contexte de pandémie que nous connaissons, l'expérimentation du vote à distance aurait permis de limiter l'abstention liée à la crainte d'une contamination dans un bureau de vote et, dans la perspective des élections de 2022, nous aurions ainsi disposé d'un test grandeur nature dont nous aurions pu tirer des enseignements. À défaut d'expérimentation, un rapport sur la transformation de notre mode de scrutin, sa modernisation et les difficultés à surmonter pour permettre à chacun d'exercer son droit de vote nous paraissait indispensable. Enfin, un amendement visant à ce que le CSA puisse contrôler les réseaux sociaux a également été déclaré irrecevable. Le seul de nos amendements ayant été déclaré recevable est celui relatif à la déterritorialisation des procurations.
Puisque le temps presse, mes chers collègues, je conclus en vous indiquant que notre groupe votera en faveur de ce texte, tout en regrettant qu'il n'ait pas été l'occasion d'avancer sur certains sujets qui nous tiennent à coeur et qui constituent des enjeux d'une acuité particulière depuis que la covid-19 est brutalement apparue dans nos vies.
Applaudissements sur quelques bancs du groupe Dem.
Le texte dont nous discutons est celui adopté par nos collègues du Sénat, lesquels, contre l'avis du Gouvernement, avaient prévu par amendement que le second tour aurait lieu au plus tard le 20 juin. Pris par surprise il y a un an par la pandémie, nous sommes aujourd'hui en mesure de prendre des dispositions sanitaires pour que ces scrutins aient bien lieu au plus tard le 20 juin. Car nous ne pouvons pas laisser la pandémie décider pour les Françaises et les Français, nous ne pouvons pas laisser la démocratie dépendre des aléas d'une crise avec laquelle nous allons peut-être devoir vivre longtemps.
Dans notre pays, la source du pouvoir est le suffrage universel, ce qui rend nécessaire que celui-ci s'exerce de façon régulière. Notre position consiste à tenir bon sur le mois de juin, ce qui suppose des précautions sanitaires très strictes. Le report doit être mis à profit pour organiser une campagne officielle radiotélévisée pour les élections départementales et régionales, faciliter les procurations des personnes malades ou vulnérables, et convaincre nos concitoyens de l'importance de ce scrutin dans leur vie de tous les jours – je rappelle que les départements sont compétents en matière d'action sociale et de gestion des collèges, tandis que les régions le sont en matière de transports, d'économie et de gestion des lycées. C'est l'occasion de rappeler que, dans le cadre de la démocratie de proximité, les élus départementaux et régionaux exercent une mission déterminante pour toutes et tous.
À l'initiative de notre collègue sénateur Jean-Pierre Sueur, un amendement visant à ce que les sondages d'opinion des prochaines élections régionales et départementales soient plus encadrés a été adopté : il est proposé que, dans un souci de transparence, les instituts de sondage et les médias précisent la marge d'erreur pour chaque sondage publié. Il importe de redire que les électrices et les électeurs ont l'issue des élections entre leurs mains, et que celle-ci n'est en rien déterminée par les estimations, qui ne constituent qu'une photographie des opinions et des préférences à un moment donné.
Le report des élections n'est qu'une solution de court terme, qui ne peut pas être indéfiniment reproduite : la démocratie ne peut être mise entre parenthèses. Le groupe Socialistes et apparentés proposera plusieurs amendements visant à donner plus de visibilité aux candidats, à encadrer les délais de convocation des élections, à anticiper les effets d'une prolongation du mandat à horizon de six ans et à réduire le délai de validation des comptes de campagne en l'absence de contentieux.
Les amendements proposés visent ainsi à prévenir les difficultés car, si celles-ci ont un caractère technique, ce projet a, lui, une dimension politique. Nous souhaitons éviter que, comme lors des élections municipales de 2020, une interruption de trois mois entre les deux tours aggrave l'abstention et pose la question du déséquilibre entre les sortants et leurs concurrents, la crise sanitaire ne permettant pas une campagne normale et sereine.
Si le texte revu par le Sénat prévoit, en son article 2, que les conditions de sécurité sanitaire feront l'objet d'un rapport public, rien n'indique que l'appréciation des risques par la population sera la même. Si le texte prévoit bien des dispositions de nature à faciliter le vote par procuration et le déroulement des opérations, un jour ou l'autre se posera la question du développement de la participation des citoyens aux élections selon d'autres modalités. Ni le vote par correspondance, qui a déjà été mis en oeuvre, ni le vote à distance, qui suppose des conditions de sécurité nouvelles, ne sont pour l'heure évoqués, ce que nous regrettons.
Pour ce qui est du vote à distance et du vote par internet, nous devons faire bouger les choses. À l'issue des travaux de la mission sur l'identité numérique que j'ai eu l'honneur de présider, notre assemblée a adopté des recommandations visant à développer l'identité numérique. Elle a demandé à l'État de fixer un objectif ambitieux de déploiement de la carte d'identité numérique à échéance de moins de cinq ans, afin de combler le retard français en la matière. Une cinquantaine de recommandations ont été adoptées, il convient désormais de leur donner corps et de faire évoluer nos élections.
La France peut devenir un modèle de participation électorale électronique dans de bonnes conditions de sécurité. Les contraintes résultant de la pandémie doivent nous conduire à accélérer le déploiement de l'identité numérique de manière à anticiper les risques de nouvelles pandémies ou d'autres événements. À défaut, il est à craindre que l'on constate demain un effritement, voire un effondrement de la participation de nos concitoyens aux élections. Notre groupe votera donc ce texte, tout en appelant l'attention de notre assemblée sur les besoins d'évolution et d'amélioration du mode de scrutin.
Applaudissements sur les bancs du groupe SOC. – M. Sébastien Jumel applaudit également.
La discussion sur les textes relatifs à l'organisation des scrutins est fondamentale pour l'exercice du droit de vote, droit essentiel dans toute démocratie. Le présent projet de loi portant report du renouvellement général des conseils départementaux et des conseils régionaux, s'inscrit dans la logique des conclusions de la mission confiée à l'ancien président de notre assemblée, M. Jean-Louis Debré.
L'« option raisonnable » – pour reprendre les termes de son rapport– d'un report des élections précitées de mars à juin 2021 nous paraît effectivement souhaitable. La situation sanitaire de notre pays étant toujours incertaine, il est important de veiller à ce que l'organisation des élections se fasse dans des conditions permettant de concilier les principes constitutionnels de sincérité et de périodicité du scrutin avec celui de la préservation de la santé de nos compatriotes.
Nul ne souhaite en effet revivre l'épisode du premier tour des élections municipales, marquées par une abstention record, due en grande partie à la peur du virus. Cependant, nul ne saurait tolérer que le calendrier électoral soit régulièrement modifié sans que cela soit justifié par un motif impérieux d'intérêt général. Selon certaines rumeurs, ces échéances électorales pourraient être reportées après les prochaines élections présidentielles et législatives. Outre le signal négatif que constituerait cette solution en matière de respect des règles démocratiques, elle serait exposée à un risque d'inconstitutionnalité pour méconnaissance du principe de périodicité raisonnable du scrutin. Le risque d'une crise politique majeure ne serait alors pas à exclure.
L'argument sanitaire, s'il est fondamental, ne peut servir d'unique base à une décision politique. D'autres élections, notamment la récente élection présidentielle au Portugal, ont d'ailleurs pu se tenir en dépit d'une situation sanitaire encore aléatoire. Dans ces conditions, nous réaffirmons la nécessité que les rendez-vous démocratiques fondamentaux que sont les élections puissent se tenir en juin prochain.
Cependant, le texte qui nous est soumis suscite certaines inquiétudes, notamment quant au contenu de l'article 4 ter. Cet article, introduit par amendement, fait ressurgir, sous couvert de la simple présentation d'un rapport au Parlement, le spectre de la généralisation du recours aux machines à voter. La date butoir du 1er octobre 2021 choisie pour la remise de ce rapport illustre la volonté des promoteurs de ces dispositions de permettre une utilisation plus massive des machines à voter dès les prochaines élections présidentielle et législatives.
Si un moratoire sur le déploiement des machines à voter a été décidé en 2008, avec pour effet de geler le périmètre des communes autorisées à se doter de ces outils de vote, c'est précisément parce que ce type de matériel peut poser de sérieuses difficultés. Leur inconvénient majeur réside dans le fait que les électeurs se retrouvent dans l'impossibilité de procéder à un contrôle de la légalité du suffrage. On pourrait également évoquer la question du vote par correspondance qui, s'il devait être adopté, faciliterait grandement la fraude. À l'heure où une part croissante de nos compatriotes se détournent du vote, comme en témoigne l'augmentation constante du taux d'abstention, il est totalement déraisonnable d'accentuer cette crise de confiance démocratique en recourant massivement à un dispositif de vote présentant un risque accru de fraude et susceptible de mettre à mal le principe sacré du caractère secret du vote.
Comme l'histoire nous l'a montré à plusieurs reprises, nos institutions sont fragiles. La confiance ne se décrète pas, elle se mérite. Pour redonner confiance à nos concitoyens dans nos institutions, nous devons avant tout les respecter. Sur ce point comme sur d'autres, le Parlement doit être le garant du respect de notre vie démocratique.
J'appelle maintenant, dans le texte de la commission, les articles du projet de loi.
J'aimerais, madame la ministre, monsieur le rapporteur, chers collègues, vous faire part d'une conviction et de deux suggestions.
La démarche du Gouvernement est la bonne, j'en suis convaincu. On ne peut pas, d'un côté, demander à nos concitoyens de vivre avec le virus et, de l'autre, laisser penser que nous, autorités publiques, ne savons pas organiser les élections. Les États-Unis ont élu leur président et, sauf catastrophe absolue entraînant un confinement, il faut évidemment faire en sorte qu'elles puissent avoir lieu.
Ma première suggestion concerne la profession de foi, dont le rapport Debré a souligné l'importance, car c'est un document que chaque électeur a entre les mains. Pour les élections régionales, je ne sais pas si vous maintiendrez le nombre de pages à deux mais, si tel est le cas, il me semblerait bon de donner l'autorisation à chacune des listes de décliner un contenu localisé, la maille la plus faible étant l'intercommunalité. Ce n'est en effet pas la même chose de dire aux électeurs que l'on va soutenir les universités et de leur expliquer quels projets précis sont envisagés au niveau du département. Cela permet d'illustrer les grandes orientations par des exemples concrets. Cela ne poserait aucun problème matériel…
… puisqu'il y a aussi des professions de foi pour la maille cantonale.
Ma deuxième suggestion porte sur le nombre de bureaux de vote. Le fait qu'il y en ait deux pose problème, notamment pour le recrutement des assesseurs dans certaines communes. En outre, pour les électeurs, cela a une incidence en termes de temps : ce n'est pas la même chose de prendre cinq minutes ou deux heures pour voter. À ma grande surprise, lorsque j'ai pointé cette question lors de l'audition de Jean-Louis Debré devant la commission des lois, un collègue du Grand Lyon a souligné que la concomitance des élections municipales et intercommunales avait posé des problèmes dans cette zone urbaine. Pourriez-vous, madame la ministre, étudier l'hypothèse du passage à un seul bureau de vote ? Tirant le fil jusqu'au bout, j'évoquerai même la possibilité qu'il n'y ait qu'une seule urne : il y aurait, par exemple, des enveloppes bleues contenant des bulletins imprimés en bleu pour les régionales et des enveloppes jaunes contenant des bulletins imprimés en jaune pour les départementales.
Les électeurs sauraient s'y retrouver et n'auraient qu'à signer deux fois. Cette réduction du nombre des bureaux de vote serait en outre plus conforme aux impératifs sanitaires.
Permettez-moi de réfléchir un peu avec vous. De deux choses l'une, soit cette pandémie est vraiment aussi grave que nous le constatons tous les jours – qui ne connaît pas un proche passé très près de la mort ou décédé – et il faut s'interroger sur les dates ; soit les vaccins sont très au point – quoique cela ne me semble pas être le cas, au vu des contestations dont ils font l'objet et de l'incertitude qui les entoure – , et les élections régionales et cantonales pourront se tenir en juin, car tout sera « clean » au mois d'avril. Pour ma part, je ne vois pas les choses ainsi.
J'ai été un des très rares à dire, quinze jours avant les municipales, qu'il fallait les reporter – mais aucun média ne me relaie plus et pour porter ma voix, je dois m'en tenir aux réseaux sociaux. Et qu'a-t-on vu ? Le Premier ministre Édouard Philippe a fait une déclaration hallucinante à la télévision pour demander aux personnes de plus de soixante-dix ans de ne pas aller voter, ce qui ne s'était jamais produit !
Que se passera-t-il au mois de juin ? Rappelons que deux votes sont prévus le même jour alors que la démocratie est plus faible que jamais dans notre pays, que je ne sais qui a décidé que seuls trois ou quatre partis avaient le droit de participer aux débats, les autres ne jouant qu'un rôle accessoire. Il suffit de se remémorer ce à quoi on a assisté l'an dernier lors des municipales pour en avoir une toute petite idée. Moi, je suis favorable à un report des élections régionales au mois de septembre 2022.
Nous sommes globalement satisfaits d'avoir ce débat sur un texte qui clarifie la situation, alors que les choses sont restées longtemps en suspens. Cela a suscité beaucoup d'interrogations, surtout parmi les élus et les candidats, me répondra-t-on, et j'en conviens, mais aussi dans la population, alors que nous approchons de la date initiale à laquelle les élections auraient dû se tenir. Il était grand temps de prendre une décision s'agissant de ces scrutins et nous regrettons qu'elle n'ait pas été prise plus tôt. Cela aurait évité de laisser se développer certaines spéculations et des interrogations sur la tenue de la campagne électorale et les comptes de campagne.
Après le vote sur ce texte, il sera nécessaire de diffuser rapidement et massivement des informations en direction des Français, pour qu'ils comprennent que c'est fin juin qu'ils seront appelés aux urnes et qu'ils se préparent en conséquence. Cela devra être fait avant même que les candidats commencent à communiquer sur leurs programmes.
La remise, en avril, du rapport du conseil scientifique sera un moment important s'agissant de la pédagogie dont il nous faut faire preuve. Les candidats seront déjà engagés dans leurs campagnes électorales et il ne faudra pas laisser penser qu'il est encore possible de changer de cap. Les Français, très attachés à la démocratie et à leurs élus locaux, en particulier au niveau des départements où les enjeux sont moins politisés, pourraient sinon être dégoûtés de la façon dont nous gérons les institutions et adopter des réflexes dont nous ne voulons pas.
Commençons par la bonne nouvelle annoncée par la ministre : les élections auront lieu les 13 et 20 juin. Voilà enfin une date ferme et définitive pour tous ceux qui veulent participer d'une manière ou d'une autre et pour nos concitoyens désireux d'exercer leur droit de vote.
Comme de nombreux collègues, j'ai déposé un amendement visant à déterritorialiser les procurations mais, s'agissant des moyens de renforcer la participation, je regrette vivement que le Gouvernement n'ait pas souhaité ouvrir d'autres débats à l'occasion de ce texte. Je pense bien évidemment à la reconnaissance du vote blanc. Le candidat Emmanuel Macron avait dit combien il était attaché à ce qu'il soit mieux reconnu et il est dommage que le Gouvernement se refuse toujours à avancer dans cette voie.
M. Jean Lassalle applaudit.
Je regrette également que le Gouvernement n'ait pas voulu accepter, dans les communes volontaires uniquement, les expérimentations portant sur le vote par anticipation, modalité qui fonctionne très bien dans d'autres pays comme le Portugal ou le Canada. Il ne suscite pas les mêmes difficultés que le vote par correspondance et peut constituer une réponse parmi d'autres.
Je fais partie des députés qui se refusent à baisser les bras quand il s'agit du taux de participation aux différents scrutins.
Nous en venons aux amendements
La parole est à M. Alain David, pour soutenir l'amendement no 2.
Je me réjouis que Mme la ministre ait repris la date du 13 juin que nous avions avancée. Maintenant, il convient de l'inscrire dans l'article 1er. Le contexte sanitaire peut laisser craindre un report, et il faut donner des assurances à chacun. Comme plusieurs groupes l'ont souligné en commission, il convient donc de donner de la visibilité à ces scrutins le plus tôt possible. Les acteurs, dans leur ensemble, doivent pouvoir se préparer en toute quiétude, notamment l'État et les communes qui ont à organiser les scrutins et les listes de binômes de candidats.
Nous ne pensons pas qu'il soit opportun de figer dans la loi la date exacte du premier tour de scrutin. Il s'agit d'une compétence qui relève du pouvoir réglementaire, dans le cadre du décret de convocation des électeurs que devra prendre le Premier ministre.
L'article 1er adopté par la commission des lois fixe clairement le calendrier : les deux tours auront bien lieu en juin, et Mme la ministre s'est engagée fermement sur les dates du 13 et 20 juin. Je vous demande donc de bien vouloir retirer votre amendement, monsieur David. À défaut, mon avis sera défavorable.
Je sais que ces dates sont importantes pour les députés comme pour les sénateurs. M. le rapporteur a insisté, permettez-moi de le dire, pour que le Gouvernement les précise aujourd'hui devant la représentation nationale, et M. le ministre de l'intérieur et moi-même avons voulu répondre à sa demande. Elles sont donc désormais publiques et correspondent d'ailleurs aux souhaits exprimés par plusieurs d'entre vous, qui avez insisté sur les grandes difficultés qu'aurait suscitées le choix du dernier dimanche de juin. Nous demanderons à M. David de bien vouloir retirer son amendement, car la fixation de ces dates relève non de la loi mais d'un décret qui sera pris par le Gouvernement.
Si Mme la présidente m'y autorise, je vais aussi répondre aux diverses questions soulevées par les orateurs inscrits sur l'article 1er.
S'agissant des documents servant à la propagande électorale, il n'est pas possible d'en modifier le volume ou le nombre de pages car les contrats avec les prestataires sont déjà passés. Chaque candidat est évidemment libre d'y faire figurer le contenu qu'il voudra.
En ce qui concerne les bureaux de vote, il y aura deux bureaux distincts mais avec des équipes mutualisées. Prévoir une seule urne pour les deux élections serait inconstitutionnel et entraînerait des problèmes de lisibilité, notamment au moment du dépouillement.
J'en viens au temps qu'a pris le Gouvernement pour travailler au report de ces élections. Nous avons respecté les délais liés aux procédures institutionnelles et parlementaires. La mission a été confiée à M. Jean-Louis Debré mi-octobre, le Conseil d'État a été saisi après la remise de son rapport ; le projet de loi a été présenté en conseil des ministres en décembre, il a été discuté en séance publique au Sénat le 26 janvier et votre assemblée en débat aujourd'hui. Le travail suit son cours, sans retard ni précipitation de la part du Gouvernement, lequel, vous le savez, n'a pas la possibilité – et il ne le souhaite d'ailleurs pas – de décider seul du report des élections. Le sujet est suffisamment important pour notre démocratie pour que nous suivions chaque étape du temps institutionnel et parlementaire.
Je le répète, je considère comme une avancée le fait que la ministre s'engage à inscrire les dates dans un décret, mais deux questions juridiques se posent.
Qu'est-ce qui empêcherait qu'une loi portant report des élections des conseillers régionaux et départementaux précise la date du premier tour et indique une date butoir pour le second tour ? Je ne crois pas que ce serait inconstitutionnel puisque la modification desdites dates est l'objet même du projet de loi, mais j'attends des arguments me démontrant le contraire.
Par ailleurs, malgré l'engagement que vient de prendre la ministre devant notre assemblée, une inquiétude subsiste : en n'inscrivant pas ces deux dates dans le marbre de la loi, l'exécutif pourrait-il, se fondant sur la situation sanitaire, décider de reporter à nouveau ces élections sans avoir à revenir devant le Parlement ?
Je me réjouis de la dignité de ce débat difficile. En revanche, pour ce qui est de trouver une solution, il nous reste encore beaucoup à réfléchir. Je ne ferai pas reproche au Gouvernement de ne pas avoir ouvert le débat plus tôt, c'eût été impossible. Mais maintenant qu'il est ouvert, nous devons prendre le temps de la réflexion. À défaut, nous risquerions de partir vers des considérations totalement stratosphériques.
Le refroidissement soudain de la planète durant quelques semaines va-t-il permettre au virus de s'incruster plus longtemps que prévu ? Qui peut le savoir ? Le Conseil d'État ? Le Gouvernement ? L'Assemblée nationale, le Sénat ? Je ne le sais pas.
J'ai participé en tant que candidat à bon nombre d'élections dans ce pays – à part les sénatoriales et les européennes, je pense les avoir toutes faites.
Combien de fois mon mandat n'a-t-il pas été raccourci, parce qu'il fallait se caler sur un nouvel agenda ! Il m'est arrivé qu'il soit réduit de trois ans ; la dernière fois, je n'ai même pas su quand il s'achevait.
Ne faisons donc pas des élections régionales et départementales l'alpha et l'oméga. Les départements sont tenus, avec ce qu'il leur reste, et les régions fonctionnent, ni mieux ni moins bien qu'auparavant.
L'amendement no 2 n'est pas adopté.
Je suis saisie de cinq amendements identiques, nos 10, 11, 18, 44 et 57.
La parole est à Mme Emmanuelle Anthoine, pour soutenir l'amendement no 10.
Je demande à mon tour le maintien de la date limite introduite par le Sénat pour l'organisation du second tour des élections. Certes, connaître la date du premier tour est important, mais celle du second tour l'est tout autant. En matière électorale, préciser les dates des scrutins est essentiel, non seulement pour les sénateurs ou pour les députés, mais pour tout un chacun.
Fixer la date des premier et deuxième tours est une manière de sécuriser les élections. En arrêtant un calendrier, lisible à la fois des candidats et des électeurs, vous donnez plus de visibilité aux élections. La volonté de reporter les élections doit s'inscrire dans un cadre clair et transparent, qui comprend la fixation de dates précisées dans la loi.
L'amendement no 11 de Mme Valérie Bazin-Malgras est défendu.
La parole est à M. Raphaël Schellenberger, pour soutenir l'amendement no 18.
Cet amendement vise à rétablir la rédaction du Sénat sur l'article 1er, en précisant la date de convocation des deux tours des élections départementales et régionales.
En temps normal, le décret de convocation des élections est pris environ six mois avant la date de celles-ci. Nous avons eu, à la fin de l'année dernière, une période d'incertitude durant laquelle nous nous attendions à ce que le décret soit pris par votre ministère ; le temps passant, les informations ont progressivement évolué jusqu'à ce que nous apprenions qu'il n'y aurait pas de décret mais que vous attendiez les conclusions du rapport du président Jean-Louis Debré.
Nous souhaitons éviter toute forme d'incertitude et le plus simple, selon nous, reste de figer ces dates dans la loi. Nous faisons bien la différence entre le domaine de la loi et celui du règlement. Cette rédaction est issue du travail du Sénat et, même si elle ne fixe pas, à proprement parler, les dates des 13 et 20 juin comme étant celles des scrutins, elle arrête une date butoir, le 20 juin au plus tard, pour le déroulement du second tour. Cela signifie que vous pourriez organiser les élections avant, même si nous convenons que les dates des 13 et 20 juin sont parfaites.
Il me semble essentiel qu'à l'issue de la navette parlementaire les dates des élections soient connues ; il y va de la compréhension et de la perception du scrutin par nos concitoyens et donc du bon fonctionnement de la démocratie locale.
La parole est à M. Matthieu Orphelin, pour soutenir l'amendement no 44.
Cet amendement visait à préciser les dates des élections départementales et régionales ; c'est chose faite grâce à l'engagement fort, ferme et définitif de Mme la ministre déléguée : 13 et 20 juin. Cela confère de la lisibilité à cet événement important de la vie démocratique. Cela permettra en outre à chacun d'entre vous de participer au tournoi de volley du SCO Angers, qui se tiendra le 27 juin
Rires sur l'ensemble des bancs
… vous pourrez y participer ; j'espère même vous y voir ! Mais réservons les deux dimanches précédents aux élections.
L'amendement no 44 de M. Matthieu Orphelin est retiré.
Merci pour votre invitation en Maine-et-Loire. La parole est à M. Sébastien Jumel, pour soutenir l'amendement no 57.
En inscrivant la date butoir des élections dans la loi, on en favorise la lisibilité, c'est vrai, mais le décret le permet également ; on crée surtout les conditions pour que, dans le cas où la situation sanitaire serait d'une gravité telle qu'elle ne permettrait pas la tenue du scrutin, vous deviez consulter à nouveau, de façon obligatoire, le Parlement.
Ce qu'un décret fait, un autre peut le défaire, notamment en période d'état d'urgence, qui donne au Gouvernement des prérogatives exorbitantes de droit commun. Alors qu'en inscrivant la date butoir dans la loi, vous seriez contraints, si les conditions n'étaient pas réunies pour mener à bien les élections, de revenir vers le Parlement et d'obtenir un nouveau consensus pour les convoquer. Voilà notre préoccupation.
Nous n'avons pas de doutes quant à l'engagement de la ministre déléguée d'organiser les élections les 13 et 20 juin. Mais nous avons un doute sur le fait que le Parlement soit à nouveau consulté, dans l'éventualité où les conditions ne seraient pas réunies pour que les élections se tiennent. C'est pourquoi nous demandons le rétablissement de l'amendement du Sénat.
Même argument que précédemment. Demande de retrait ou avis défavorable.
J'entends qu'il est important de donner de la visibilité et c'est bien la raison pour laquelle le Gouvernement a souhaité, dans le cadre du débat à l'Assemblée nationale, préciser les dates des élections départementales et régionales, qui sont désormais connues des députés mais aussi de l'ensemble de la population.
Je ne crois pas en revanche que les inscrire dans la loi, au-delà de la question constitutionnelle, renforcerait cette visibilité, que la loi renforce déjà par ailleurs, puisqu'elle précise bien que les élections se tiendront au mois de juin – je l'ai déjà dit et je le répète très clairement puisque la question est posée de nouveau.
Dans tous les cas, ce n'est pas le souhait du Gouvernement mais quand bien même ce le serait, il ne lui serait pas possible de modifier les dates des élections et de décider qu'elles ne se dérouleraient plus au mois de juin, sans revenir devant le Parlement.
Votre demande est donc pleinement satisfaite : d'une part, en ce qui concerne l'annonce des dates et, d'autre part, parce que, si d'aventure une catastrophe que personne ne souhaite survenait et que les élections ne pouvaient pas avoir lieu en juin, le Gouvernement aurait l'obligation de saisir le Parlement et d'ouvrir le dialogue parlementaire pour en modifier les dates.
M. Jean Lassalle applaudit.
Nous connaissons désormais les dates et nous avons la confirmation que, grâce à ce qui est inscrit dans la loi et par votre engagement, vous êtes obligés de revenir devant le Parlement pour les modifier, si besoin est – même si nous ne l'espérons pas.
Néanmoins, vous n'avez pas encore apporté de réponse à la question évoquée par notre collègue Raphaël Schellenberger, concernant les élections législatives partielles qui doivent avoir lieu à Paris et dans le Pas-de-Calais. Pensez-vous possible, madame la ministre déléguée, de les organiser au mois de juin, puisque la fenêtre de tir est très courte : je rappelle que si une élection n'est pas organisée d'ici le mois de juin dans ces deux circonscriptions, il n'y en aura plus avant 2022 ?
Cela signifie qu'il n'y aura pas de député, pendant deux ans, dans la sixième circonscription du Pas-de-Calais. Est-il possible d'organiser trois élections le même jour, oui ou non ? Avez-vous des éléments à nous apporter sur cette question ? Et pouvez-vous prendre un engagement, comme vous venez de le faire concernant les dates des élections départementales et régionales, sur la tenue de ces élections législatives partielles avant les élections locales puisque, vraisemblablement, il ne sera pas possible de les organiser au même moment ?
M. Raphaël Schellenberger applaudit.
Merci, madame la présidente. Je ne vais pas abuser de votre élégance, et ce sera ma dernière prise de parole. Madame la ministre, je suis d'accord avec vous et vous témoignerez du fait que cela n'arrive pas souvent. Cependant, je ne vois pas ce qui, aujourd'hui, vous autorise à penser que nous pourrions organiser ces élections au mois de juin. Quand je dis que je suis d'accord avec vous, c'est sur le fait qu'il faudra se revoir si, par malheur, elles ne devaient pas avoir lieu.
Il serait plus clair pour tout le monde de les reporter, dès maintenant, au mois de septembre 2022.
Sourires sur les bancs du groupe LR.
En effet, équipés comme nous le sommes, comment allons-nous faire pour voter ? Où en est le vote électronique ? On parle du Portugal ou des États-Unis, mais les élections dans ces pays ont-elles été des succès tels que nous puissions nous en inspirer ? Est-ce que cela n'a pas laissé de traces, par hasard ?
Au fond, nous pourrions avoir la solution, comme au rugby ou au football, de regarder les équipes candidates voter, tandis que les spectateurs – c'est-à-dire les électeurs – les suivraient à la télévision ! Je le dis avec humour, mais il faut que nous y réfléchissions. C'est la première fois que notre pays est confronté à une situation grave. Il n'y a donc pas photo : si l'on dispose d'un vaccin sûr et qu'au mois de juin tout a disparu, alors, vous aurez eu raison. Mais je n'en suis pas certain, et c'est pourquoi je plaide avec passion pour qu'on reporte les élections au mois de septembre 2022.
Les amendements identiques nos 10, 11, 18, 44 et 57 ne sont pas adoptés.
Je suis saisie de deux amendements, nos 53 et 35, pouvant être soumis à une discussion commune.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 53.
Par cet amendement, nous souhaitons mieux encadrer les délais de convocation des élections départementales et régionales, afin notamment d'améliorer la visibilité du calendrier pour les candidats. C'est pourquoi le présent amendement fixe une date limite de prise du décret de convocation, au plus tard une semaine après la publication du rapport prévu à l'article 2, qui évaluera les conditions de l'organisation du scrutin au regard de la situation sanitaire.
Cela permettra aux binômes et aux listes de candidats de disposer d'un délai raisonnable entre la date de convocation des électeurs et la date limite de dépôt des candidatures, pour mieux se préparer.
Cet amendement vise tout simplement à inscrire dans la loi la date de publication du décret convoquant les électeurs, afin d'instaurer un maximum de clarté et d'assurance.
Vous allez être pleinement satisfaites, chères collègues, par ce qu'a annoncé Mme la ministre déléguée, puisque l'engagement pris devant notre assemblée se traduira par la publication du décret de convocation des électeurs très peu de temps après la promulgation de la présente loi et donc bien avant ce que vous pouviez défendre en la matière.
Le décret aura vocation à être publié au cours des prochaines semaines, c'est-à-dire avant la remise du rapport prévu à l'article 2 et avant les six semaines précédant la date du scrutin, ce qui correspond à la règle de droit commun prévu par le code électoral. Par conséquent, demande de retrait, ou avis défavorable.
Même avis.
J'ai entendu les engagements pris pour les 13 et 20 juin. Si je calcule bien, cela vous conduirait à prendre un décret au plus tard le 8 avril. Pouvez-vous nous indiquer si vous avez prévu de prendre le décret annonçant les dates des scrutins à cette date-là, au plus tard ?
Les amendements nos 53 et 35, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.
La parole est à Mme Marietta Karamanli, pour soutenir l'amendement no 3.
Il vise à supprimer l'alinéa 2, qui prévoit la prorogation des mandats jusqu'en mars 2028. Sur le principe, nous ne sommes pas opposés aux reports : comme nous l'avons expliqué en commission, nous avons un souci de visibilité et d'anticipation. Cette pratique n'est pas inédite – les élections municipales prévues en 2007 ont ainsi été reportées en 2008 pour la même raison que celle qui nous occupe aujourd'hui – , pour autant, elle n'est pas automatique : les élections municipales de 1995 se sont ainsi déroulées en juin, six semaines après l'élection présidentielle, tandis que les élections cantonales de 1988 ont eu lieu fin septembre, quatre mois après l'élection présidentielle. Ce qui est nouveau, dans le cas présent, est le caractère très anticipé de la décision du report.
Nous avons déjà eu ce débat en commission, madame Karamanli. Votre amendement vise à supprimer la date d'échéance des prochains mandats régionaux et départementaux, fixée par le Sénat à mars 2028. Nous avons retenu la proposition du Sénat, car l'échéance qu'il propose nous semble judicieuse : elle permet de revenir au droit commun – c'est-à-dire à un mandat de six ans, avec des élections concomitantes en mars – dès 2028, et non en 2033 comme le prévoyait la rédaction initiale de l'article 1er.
Sur le fond, il me paraît nécessaire de fixer dès à présent la durée des prochains mandats ; en l'occurrence, elle s'élèverait à six ans et neuf mois. Il est en effet important, pour les candidats, de savoir pour quelle durée ils s'engagent. En l'absence d'une telle indication dans la loi, les prochaines élections régionales et départementales auraient lieu en juin 2027, c'est-à-dire exactement à la date normalement prévue pour les élections législatives, et seulement six semaines après l'élection présidentielle. Cela contraindrait le législateur à prévoir, au cours des prochaines années, la durée du mandat des futurs conseillers régionaux et départementaux. Par honnêteté vis-à-vis des candidats, il convient plutôt d'y procéder dès à présent dans la loi, avec un souci légitime de visibilité.
Notez, par ailleurs, que la proposition initiale du Gouvernement aurait conduit à organiser six scrutins en 2027, ce qui n'aurait pas été neutre pour les finances communales. En tant qu'ancien maire, je peux témoigner qu'il est assez coûteux d'organiser des scrutins. La démocratie n'a pas de prix, mais elle a un coût ! Les élections pèsent sur les budgets de fonctionnement des collectivités. C'est une raison supplémentaire pour privilégier une échéance des mandats en mars 2028. Avis défavorable.
Même avis.
Permettez-moi de revenir sur ce sujet qui a suscité un important débat en commission. Il est certes arrivé que des mandats soient prorogés, mais jamais les décisions n'ont été prises avec autant d'anticipation qu'aujourd'hui : pour les élections municipales de 2007, par exemple, la prolongation n'a été décidée que quinze mois avant la date prévue du scrutin, par la loi du 15 décembre 2005. Si le report est donc possible en principe, l'alinéa 2 anticipe beaucoup trop : il prolonge des mandats avant même que les conseillers concernés soient élus ! Cela nous paraît véritablement problématique. Si cela est nécessaire, nous pourrons toujours nous réunir en temps utile et décider d'un report.
Je partage les propos de M. le rapporteur, qui souhaite maintenir la proposition du Sénat. La périodicité, dont nous avons tant parlé, présente deux caractéristiques, à commencer par la saisonnalité : nous avons l'habitude de voter au printemps pour les élections locales. L'expérience du scrutin régional de décembre 2015 n'a d'ailleurs guère été concluante : les conditions de la campagne et du vote n'étaient pas optimales, et ne s'inscrivaient pas dans les usages et les habitudes des Français. Or, nous devons nous conformer le mieux possible aux usages et aux habitudes : c'est au printemps qu'on vote pour les élections locales en France.
La seconde caractéristique tient à la durée du mandat : elle est de six ans pour un mandat local, mais souffre quelques exceptions – allongements ou rétrécissements – en cas d'encombrement électoral ; il importe alors que la règle soit connue à l'avance. On ne doit pas découvrir, un an avant le terme normal du mandat, qu'un encombrement électoral oblige à légiférer. La mesure proposée par le Sénat et reprise par M. le rapporteur relève donc du bon sens. Elle permet de bien définir la périodicité du renouvellement des mandats locaux.
Je tiens à rassurer Mme Karamanli : si les élections présidentielle et législatives prévues en 2027 devaient être reportées, les parlementaires en débattraient et modifieraient la loi.
Le principe vaut dans les deux sens, madame Karamanli. Vous estimez que la décision peut être prise deux ou trois ans avant l'échéance, si on constate que le calendrier est tenu. Or il me paraît très probable que le calendrier sera respecté : autant anticiper cette hypothèse dès maintenant – sachant qu'en cas de changement du calendrier électoral, le Parlement pourra se saisir de la question. Comme l'a expliqué M. Schellenberger, il est sage de donner de la visibilité sur les mandats des conseillers départementaux et régionaux.
J'ai eu M. Balanant avec moi la semaine dernière, maintenant, c'est M. Rupin !
L'amendement no 3 n'est pas adopté.
L'article 1er est adopté.
Je suis saisie de deux amendements identiques, nos 48 et 67.
La parole est à Mme Emmanuelle Ménard, pour soutenir l'amendement no 48.
Il vise à supprimer les alinéas 2 et 3 de l'article 1er bis, qui instaurent la possibilité, pour un même électeur, de détenir deux procurations. De façon compréhensible, cette disposition est motivée par l'abstention et par la crise sanitaire. Toutefois, la double procuration multiplie par deux le risque de fraude ; c'est d'ailleurs pour limiter ce risque qu'elle était jusqu'à présent interdite. Elle a certes fait l'objet d'une autorisation exceptionnelle lors des dernières élections municipales, mais n'a pas lieu d'être prorogée : par définition, une autorisation exceptionnelle doit rester exceptionnelle ; elle n'a pas vocation à durer. La double procuration n'a donc pas lieu d'être pour les prochaines élections départementales et régionales – d'autant que, comme tout le monde le répète à l'envi dans l'hémicycle, nous devons apprendre à vivre avec la crise sanitaire. Il n'y a aucune raison de prolonger des dispositions qui sont censées être exceptionnelles.
L'amendement no 67 de M. Bastien Lachaud est défendu.
Quel est l'avis de la commission sur ces amendements ?
Vous l'avez dit, madame Ménard : il s'agit bel et bien d'un dispositif de crise, qui n'a pas lieu d'être généralisé. L'objectif est d'encourager la participation malgré la crise sanitaire, dans un cadre strictement motivé par cette dernière. Ce dispositif s'est appliqué lors du second tour des élections municipales, parce que nous étions en période de crise sanitaire ; il s'appliquera lors des élections départementales et régionales, car nous pensons que, malheureusement, la situation sera la même, mais il ne s'agit en aucun cas de généraliser le recours à la double procuration à toutes les élections. Je demande donc le retrait de votre amendement ; à défaut, mon avis sera défavorable.
Même avis.
Si, par extraordinaire, l'état d'urgence sanitaire était prorogé – ce que je ne souhaite pas – et que la crise sanitaire durait encore plusieurs mois, le système de la double procuration pourrait-il s'appliquer à l'élection présidentielle ?
Si la double procuration n'était pas permise jusqu'à présent, c'est parce que le vote est un acte personnel, individuel, entouré d'un certain apparat – à commencer par l'isoloir – qui a du sens. À l'origine, le vote par procuration n'était d'ailleurs autorisé que pour une justification valable – une hospitalisation, par exemple. Il s'est progressivement étendu, si bien qu'on n'hésite plus à donner une procuration parce qu'on est en vacances ou en famille ; en quelque sorte, la procuration a été démonétisée. Le vote est pourtant un acte extrêmement important – nous en convenons tous. D'où mon interrogation : la double procuration est-elle limitée à la période de crise sanitaire, ou a-t-elle vocation à perdurer ? Ne peut-on pas faire différemment ? Pour ma part, je pense que d'autres solutions sont possibles ; je vous ai d'ailleurs soumis une proposition lors de la discussion générale, dont j'espère qu'elle sera examinée avec attention.
Le vote est sacré. Cette sacralisation de la procédure, tous les étudiants en sciences politiques et tous ceux qui ont siégé sur ces bancs savent l'expliquer et connaissent les conséquences qu'elle emporte. Je tiens donc à défendre l'amendement de suppression des alinéas 2 et 3 de l'article 1er bis déposé par mon groupe : il vise à éviter la fuite en avant consistant à banaliser la procuration.
Mme Caroline Fiat applaudit.
Les amendements identiques nos 48 et 67 ne sont pas adoptés.
Je suis saisie de sept amendements, nos 40, 24, 72, 19, 12, 13 et 42, pouvant être soumis à une discussion commune.
Les amendements nos 12, 13 et 42 sont identiques.
L'amendement no 40 de M. Matthieu Orphelin est défendu.
La parole est à M. Pascal Brindeau, pour soutenir l'amendement no 24.
En modifiant le projet de loi, le Sénat a supprimé la nécessité pour le mandant et le mandataire de la procuration d'être inscrits sur la même liste électorale – c'est-à-dire, en pratique, sur la même liste communale. Le sujet a fait débat en commission. La majorité, le rapporteur et le Gouvernement considèrent qu'il serait trop compliqué de supprimer cette condition de territorialité pour les procurations, que cela poserait des difficultés pratiques et serait source d'erreurs, voire de fraudes. Nous pouvons l'entendre, bien que les listes électorales soient désormais issues des données de l'INSEE – Institut national de la statistique et des études économiques – , et par conséquent moins susceptibles qu'auparavant de comporter des anomalies, comme des omissions de radiations.
Nous proposons de lier l'adresse du mandataire à la circonscription électorale de l'élection : pour les élections départementales, le mandataire devrait être inscrit dans une des communes du département ; tandis que pour les élections régionales, il devrait être inscrit dans une des communes de la région. Cela permettrait aux électeurs de confier une procuration à une personne de leur connaissance, qui n'habite pas nécessairement leur propre commune. L'établissement des procurations en serait facilité.
La parole est à Mme Élodie Jacquier-Laforge, pour soutenir l'amendement no 72.
Notre amendement a le même objet que l'amendement de M. Brindeau : pour faciliter le recours aux procurations, le critère de désignation du mandataire doit s'adapter à la circonscription concernée par le scrutin : le mandataire doit habiter dans le même département que le mandant pour les élections départementales, et dans la même région pour les élections régionales. Cette solution permettrait au mandant de donner une procuration à une personne qu'il connaît et en qui il a confiance.
La parole est à M. Raphaël Schellenberger, pour soutenir l'amendement no 19.
Lors du débat sur la déterritorialisation des procurations, nous avons écarté la proposition du Sénat de limiter la procuration au cercle familial, qui posait beaucoup trop de questions et n'était pas forcément pertinente. Absolument rien en effet ne dit que la famille du mandant va voter de la même façon que lui.
Nous proposons que le mandataire soit inscrit dans la même circonscription électorale que le mandant. Il nous semble cohérent qu'il y ait un lien avec le scrutin. Toutes les collectivités étant désormais habituées au répertoire électoral unique, cette disposition, qui permet de raccrocher la pratique de la procuration à la réalité de la construction de la vie sociale dans nos territoires, ne devrait pas poser de problème. Il est parfois plus facile en effet de faire confiance à des gens qui habitent dans la commune d'à côté, parce qu'on partage des idées ou des projets.
Mme Élodie Jacquier-Laforge et M. Ugo Bernalicis applaudissent.
La parole est à Mme Emmanuelle Anthoine, pour soutenir l'amendement no 12.
Cet amendement va dans le sens des amendements précédents. Nous sommes tous convaincus que l'abstention sera la reine des prochaines élections, a fortiori dans la crise épidémique que nous traversons. Alors que l'on connaît l'attachement des électeurs à leur municipalité, les chiffres des dernières élections municipales ont montré que 55,34 % des électeurs inscrits ne sont pas allés voter le 28 juin dernier, contre seulement 36,45 % pour les élections municipales de 2014.
Le virus fait douter les plus vulnérable de la pertinence d'aller voter. On sait bien que ces élections auront lieu dans des conditions difficiles, puisqu'on ne sait pas quelles seront les possibilités de rencontres entre les candidats et leurs électeurs. Aussi faut-il faciliter les procurations. C'est pourquoi nous vous demandons d'accepter la déterritorialisation des procurations.
Les amendements nos 13 de Mme Valérie Bazin-Malgras et 42 de M. Matthieu Orphelin sont défendus.
Quel est l'avis de la commission ?
Vous avez, pour ainsi dire, un temps d'avance, la loi relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique ayant fixé à 2022 la mise en oeuvre de cet objectif de déterritorialisation par le ministère de l'intérieur. Pour l'heure, le dispositif se heurte encore à des difficultés d'ordre technique et opérationnel, mais le ministère nous dit qu'il sera prêt pour l'année 2022. C'est un engagement fort, ladite loi étant très récente, puisqu'elle date du 27 décembre 2019. Des contraintes informatiques liées à l'adaptation du répertoire électoral unique créé en 2018 empêchent à ce jour la mise en oeuvre immédiate de cette réforme, laquelle engendrerait des risques susceptibles d'affecter le bon déroulement des prochains scrutins.
Certes, le Sénat a encadré la déterritorialisation des procurations en exigeant l'existence d'un lien familial entre le mandant et le mandataire : il a dressé la liste des membres de la famille auquel le dispositif aurait vocation à s'appliquer, mais en oubliant les évolutions récentes de la famille, puisqu'il n'est pas question de donner procuration à des demi-frères ou des demi-soeurs – vous voyez donc dans quels débats nous nous serions lancés.
Compte tenu des difficultés liées aux nécessaires vérifications et contrôles qui devront s'opérer, ce dispositif me semble donc prématuré et très complexe à mettre en oeuvre, dans la mesure, notamment, où l'État ne dispose pas encore des moyens informatiques nécessaires, dont il est en train de se doter.
Par conséquent, la commission a émis un avis défavorable sur cet amendement ainsi que sur tous les amendements rétablissant d'une manière ou d'une autre la possibilité d'une déterritorialisation des procurations pour ces prochains scrutins, qu'elle soit étendue au département, à la région ou, bien sûr, au cercle familial. Cela dit, il serait bon de pouvoir envisager cette déterritorialisation, le moment venu.
Je crois avoir oublié de répondre à la question qui m'était posée tout à l'heure sur les élections partielles. Je confirme qu'il ne peut y avoir trois élections le même jour.
En ce qui concerne ces amendements, le rapporteur a rappelé que la loi relative à l'engagement dans la vie locale et à la proximité de l'action publique prévoit déjà qu'un électeur pourra donner procuration à un mandataire inscrit dans une autre commune que la sienne à l'horizon 2022. Comme nous l'avons évoqué précédemment, cela nécessite des mises à jour techniques. L'INSEE et les services du ministère de l'intérieur travaillent d'ores et déjà à adapter les systèmes d'information, mais il faudra laisser le temps aux éditeurs de logiciel d'intégrer ces nouvelles modalités et de les rendre compatibles avec le répertoire électoral unique, qui permet aux communes de gérer leur liste électorale. Ce sera le cas en 2022. Dans l'intervalle, pour les scrutins de 2021, il ne nous est pas matériellement possible – tant pour des raisons techniques que pour des questions de sécurité – d'offrir cette possibilité aux électeurs, qu'il s'agisse de la déterritorialisation totale, qui entrera en vigueur le 1er janvier 2022, ou de la déterritorialisation partielle que vous proposez.
Je rappelle que le Parlement est parfaitement au fait de ces contraintes, puisque le Sénat en a fait état dans son rapport d'information sur le vote à distance qui avait été publié en décembre 2020. Dans ce rapport, il est indiqué que sur le plan opérationnel, la nouvelle version du répertoire électoral unique sera disponible en mars 2021, mais qu'elle devra ensuite être contrôlée pendant une phase dite de qualification qui durera au-delà de juin 2021. À compter de cette date, un délai supplémentaire de six mois sera nécessaire pour adapter l'ensemble des logiciels de vingt-cinq sociétés éditrices qui fournissent aux communes les dispositifs de gestion des listes électorales.
Quant à fixer la date limite de dépôt des procurations trois jours avant le scrutin, cela ne relève pas de la loi mais du décret. Même si nous partageons cet objectif, nous mettrions les communes en grande difficulté en adoptant cette disposition, car elles seraient, techniquement et matériellement, dans l'impossibilité de l'appliquer. Avis défavorable sur ces amendements.
Ceux qui pensent qu'on va réduire la fracture citoyenne avec des gadgets électoraux se trompent. Si les gens ne votent plus, c'est parce que les responsables politiques font le contraire de ce qu'ils avaient dit qu'ils feraient.
Je pense que la déterritorialisation est une porte ouverte aux magouilles. Le maire est garant du bon déroulement des opérations de vote dans sa commune car il a connaissance de la liste électorale et peut avoir la certitude que les procurations sont basées sur le consentement de ceux qui les ont faites.
Élargir la procuration à la circonscription de l'élection concernée signifie qu'on pourra, dans la Manche, choisir un électeur de Dieppe pour voter aux élections régionales. Celui qui connaît dégun dans sa commune, comme on dit à Marseille, pour aller voter à sa place, c'est qu'il est suspect. Cela veut dire que c'est un citoyen inventé pour la circonstance du vote. C'est la raison pour laquelle je suis fermement opposé au fait qu'on puisse dessaisir le maire de sa prérogative de contrôle du bon déroulement des opérations de vote, même quand l'informatique sera au rendez-vous, c'est-à-dire en 2022. Cela me rassure qu'on refuse ces dispositions pour ces élections-là mais je souhaite qu'on les refuse aussi pour toutes les élections à venir.
Applaudissements sur les bancs du groupe FI.
Je veux juste insister sur les difficultés que créerait l'adoption de ces amendements. C'est déjà un défi opérationnel très grand pour l'État et les communes que d'organiser ce double scrutin dans le contexte sanitaire que nous connaissons. Le calendrier adopté fin 2019 prévoit que la déterritorialisation sera mise en place le 1er janvier 2022. Il ne me semble pas opportun de changer les règles à quelques semaines du scrutin.
Comme le rapporteur, je suis par ailleurs assez surpris par les amendements qui permettraient la déterritorialisation uniquement pour les personnes de la famille proche – voilà une certaine conception de la démocratie ! On peut très bien avoir davantage confiance politiquement en un ami qu'en un membre de sa famille proche. Ce serait même une forme d'iniquité entre citoyens que de permettre à certains de donner une procuration à la famille proche et pas d'autres. Pour ces raisons, le groupe La République en marche rejettera l'ensemble de ces amendements.
Je dois confesser que, pour une fois, je ne suis pas d'accord avec mon groupe Les Républicains…
… et que je suis plutôt défavorable, voire totalement défavorable à la déterritorialisation pour les prochaines élections mais aussi pour les suivantes. À cet égard, je rejoins les arguments que vient de développer notre collègue Jumel, non parce que je suis subitement devenu communiste – je vous rassure, je reste fier de mes convictions – mais parce que, comme ancien maire, je suis certain que le maire est le mieux à même de connaître ses administrés. En réalité, quand on cherche à donner procuration à une personne de sa commune, on la trouve.
Vous voulez changer la loi pour 0,01 % de nos électeurs, pour quelques personnes qui ne connaissent pas leurs voisins parce qu'elles viennent juste d'emménager, qu'elles n'ont pas pris la peine ou le temps d'aller les saluer, ou parce qu'elles pensent qu'il est compliqué d'aller expliquer à son voisin ses convictions politiques. Le système des procurations tel qu'on le connaît fonctionne bien, et il ne faut pas déduire du fait qu'il est moins utilisé qu'on le voudrait qu'il marche mal. Ne mettons donc pas en place un nouveau système pour les prochaines élections ; pour la suite, remettons-nous en à un prochain texte de loi, voire à une nouvelle majorité.
Les amendements nos 40, 24, 72 et 19, successivement mis aux voix, ne sont pas adoptés.
Les amendements identiques nos 12, 13 et 42 ne sont pas adoptés.
Je suis saisie de cinq amendements identiques, nos 14, 15, 20, 28 et 41.
L'amendement no 14 de Mme Valérie Bazin-Malgras est défendu.
La parole est à Mme Emmanuelle Anthoine, pour soutenir l'amendement no 15.
En raison de la crise sanitaire, il convient de faciliter l'établissement des procurations et de faire en sorte que les officiers et agents de police judiciaire – OPJ et APJ – puissent se rendre au domicile des personnes qui souhaitent donner une procuration mais qui ne peuvent pas se déplacer.
La parole est à M. Raphaël Schellenberger, pour soutenir l'amendement no 20.
Il vise à créer une mesure d'exception répondant à une crise exceptionnelle. De nombreuses personnes seront victimes du covid-19 et ne pourront pas se déplacer. Dans l'intérêt de nos concitoyens, afin d'éviter d'étendre la maladie, la meilleure solution c'est de permettre aux officiers de se rendre au domicile de la personne pour recueillir la procuration sans forcément qu'elle fournisse certificat médical. Il s'agit de permettre à tous les Français qui pourraient être victimes du covid-19 de voter.
L'amendement rétablit la rédaction du Sénat supprimée par la commission, le rapporteur ayant argué que ce dispositif autorisé dans le cadre de l'état d'urgence n'avait été que très peu été utilisé lors du second tour des élections municipales, le 28 juin, et que, puisqu'il ne servait à rien, il pouvait être supprimé.
Il faut bien mesurer que, si l'on impose à nos concitoyens, qui sont testés positifs à la maladie ou qui sont cas contact, de s'isoler et de prendre des précautions, sans pour autant leur offrir la possibilité d'établir une procuration, nous leur envoyons des messages contradictoires. La proposition du Sénat nous paraît donc de bon sens.
L'amendement no 41 de M. Matthieu Orphelin est défendu.
Quel est l'avis de la commission ?
Tout d'abord, rassurons tout de suite l'ensemble des électeurs en situation de handicap qui ne pourraient pas se déplacer physiquement : la règle n'est pas remise en question. Les OPJ doivent se déplacer à leur domicile, il n'y a donc pas de changement par rapport au droit existant.
L'idée cependant qu'un OPJ puisse se déplacer au domicile sur simple demande et sans justification particulière, outre qu'elle ne nous paraît pas forcément indispensable, implique que l'OPJ soit lui-même testé pour être sûr de ne pas être porteur du covid-19 et de ne pas le transmettre au mandant. Cela complique quelque peu l'organisation.
L'idée est plutôt d'avoir recours à « Ma procuration », le nouvel outil mis en place par le ministère de l'intérieur dans la perspective des prochaines élections, qui permet d'envoyer tous les éléments administratifs très en amont, de telle sorte que l'OPJ pourra les enregistrer tranquillement dans sa base de données pour établir la procuration et qu'il n'aura plus ensuite à se déplacer au domicile du mandant que pour s'assurer de son consentement et obtenir sa signature, pour compléter la procédure.
Auparavant, la visite de l'OPJ à domicile pouvait durer, ce qui n'est pas souhaitable dans le contexte sanitaire actuel. La procédure est désormais plus fluide, et la visite de l'OPJ, très rapide, en attendant d'ailleurs qu'on dispose peut-être un jour des moyens de numériser entièrement les procurations, ce qui n'est pas encore le cas. Dans l'attente, cet outil va déjà simplifier les choses.
On ne peut soutenir sur nos bancs que les OPJ et les personnels de police ou de gendarmerie doivent pouvoir entièrement se consacrer à la sécurité de nos concitoyens et, dans le même temps, adopter sans cesse des dispositions leur ajoutant de nouvelles tâches. On ne peut pas soutenir, en fonction des textes, des arguments pro domo tout à fait contradictoires. Je vous invite à retirer vos amendements ; à défaut, j'émettrai un avis défavorable.
Ces amendements reprennent le dispositif qui avait été prévu pour le second tour des élections municipales. Si le Gouvernement ne l'a pas inscrit dans le projet de loi initial, c'est pour éviter une sollicitation trop importante des forces de l'ordre, qui, vous le savez, sont en première ligne dans la gestion de la crise. Je souscris donc pleinement à tous les arguments évoqués à l'instant par M. le rapporteur.
Je voudrais vous rappeler que plusieurs dispositifs permettent d'ores et déjà de faciliter le recueil des procurations. D'abord, les officiers et agents de police judiciaire se déplacent à la demande des personnes qui, en raison d'une maladie ou d'une infirmité grave, ne peuvent manifestement pas comparaître devant eux. Elles doivent tout simplement fournir un certificat médical qui justifie cette impossibilité.
Ensuite, le dispositif « Ma procuration », qui permettra de dématérialiser en grande partie l'établissement des procurations et sera opérationnel pour le double scrutin, réduira considérablement le temps passé par l'électeur ou l'électrice au commissariat ou à la brigade de gendarmerie. Il va aussi permettre de dégager du temps opérationnel pour les forces de sécurité intérieure.
Enfin, les demandes de procuration peuvent désormais être recueillies dans les lieux accueillant du public, dont la définition sera précisée par arrêté préfectoral. De nombreux dispositifs sont concrètement instaurés par le Gouvernement pour permettre à chacune et à chacun d'établir une procuration. Avis défavorable.
Un système numérique qui permet de « mâcher » le travail me semble plus satisfaisant que le déplacement d'officiers de police judiciaire, dont ce n'est, en ce moment, ni la principale préoccupation ni la mission.
N'oublions pas non plus le risque que des gens, allant de maison en maison, n'attrapent le covid-19 dans l'une d'elles et le diffusent allègrement dans toutes les autres. Ce n'est pas la meilleure des idées et je me rangerai à l'avis défavorable du rapporteur et de la ministre déléguée.
Je maintiens qu'au-delà des intentions, il y a quand même régulièrement sur le terrain des circonstances qui font que l'officier de police judiciaire n'a pas pu passer pour établir la procuration parce qu'il n'en a pas eu le temps ou avait autre chose à faire.
La réalité, c'est qu'on ne peut pas demander à quelqu'un d'autre qu'un officier de police judiciaire d'établir les procurations. C'est un état de fait : lui seul peut attester du contrôle d'identité, de la sincérité de l'établissement du mandat, etc. Ainsi, en période électorale, cela doit être une priorité.
Nous avons tous connaissance de cas d'espèce, parfois nombreux, concernant des gens qui n'ont pas pu établir de procuration parce que l'officier de police judiciaire ne s'était pas déplacé. Nous avons déposé cet amendement pour nous assurer que le ministère de l'intérieur, qui est en charge des forces de police mais aussi de l'organisation des élections, fera de l'établissement des procurations une priorité.
De quels cas parlons-nous ? Monsieur le rapporteur, vous avez souligné que ces amendements proposaient de généraliser la faculté « discrétionnaire » de faire venir chez soi un OPJ pour signer une procuration alors que des dispositions permettent déjà aux personnes malades – et donc aux malades du covid-19 – d'établir une procuration. Je suis d'accord avec vous.
Peut-être dans ce cas faudrait-il préciser ces amendements, pour qu'ils répondent à l'objection de Mme la ministre déléguée, qui soutient que les OP vont crouler sous les demandes, alors qu'on a constaté qu'aux municipales de juin dernier, cela n'avait pas été le cas. Notre proposition concerne les personnes qui sont placées à l'isolement, car, sans être forcément malades du covid-19, elles sont cas contact.
Vous soutenez que toutes les procédures dématérialisées permettront, en amont, de résoudre cette difficulté, alors qu'aujourd'hui, dans l'état actuel de la technique et de notre droit, pour établir in fine la procuration, il faut que la personne rencontre physiquement un OPJ, soit qu'elle se déplace, soit que l'OPJ vienne chez elle. Les cas de personne placée à l'isolement ne sont pas si rares : au mois de juin prochain, il y aura forcément des personnes dans cette situation car elles ont été cas contact.
Lorsqu'on est à l'hôpital, l'OPJ a l'obligation de se déplacer. Si le déplacement sans justificatif devient obligatoire, on ouvre la boîte de Pandore.
Ces amendements ont néanmoins le mérite de souligner que, dans les commissariats, il n'y a ni les moyens ni le temps disponible pour se déplacer. Or, en période de crise sanitaire, il est prévisible qu'il y aura plus de demandes de déplacement qu'en période ordinaire. De quels moyens allez-vous donc doter les OPJ pour leur permettre d'effectuer cette mission obligatoire ?
Par ailleurs, de quels moyens aller vous doter ces OPJ pour se protéger, lorsqu'ils auront l'obligation de se déplacer pour permettre aux cas contact d'établir une procuration ? La procuration, ce n'est pas simplement une possibilité, c'est aussi un droit quand on est dans l'incapacité de voter. C'est même un droit constitutionnel qui, s'il n'est pas respecté, peut altérer la sincérité d'un vote.
Je ne suis pas favorable à ce qu'on inscrive ce dispositif dans le marbre de la loi. En revanche, j'aimerais que le ministre de l'intérieur nous dise quels sont les moyens humains et matériels qu'il déploiera pour permettre l'exercice de ce droit fondamental.
Les amendements identiques nos 14, 15, 20, 28 et 41 ne sont pas adoptés.
L'amendement no 25, repoussé par la commission et le Gouvernement, n'est pas adopté.
L'article 1er bis est adopté.
Prochaine séance, ce soir, à vingt et une heures :
Suite de la discussion du projet de loi portant report du renouvellement général des conseils départementaux, des conseils régionaux et des assemblées de Corse, de Guyane et de Martinique.
La séance est levée.
La séance est levée à dix-neuf heures vingt-cinq.
Le Directeur du service du compte rendu de la séance
de l'Assemblée nationale
Serge Ezdra