Intervention de Muriel Pénicaud

Séance en hémicycle du jeudi 23 novembre 2017 à 9h30
Renforcement du dialogue social — Après l'article 4

Muriel Pénicaud, ministre du travail :

La vague de libération de la parole qui déferle depuis un mois est salutaire. Elle fait prendre conscience à beaucoup d'entre nous de l'ampleur d'un phénomène qui concerne tous les domaines, aussi bien l'école que la rue, le secteur public que le secteur privé.

L'État et l'ensemble des acteurs mettent en place une série d'actions pour lutter contre le harcèlement sexuel. Dans le champ de l'entreprise, l'arsenal juridique, comparé à celui dont sont dotés d'autres pays, est complet. Je rappelle que la peine encourue par un auteur de harcèlement sexuel est de deux ans d'emprisonnement et 30 000 euros d'amende. Les entreprises ont l'obligation de prévenir le harcèlement et de faire respecter les règles républicaines qui l'interdisent.

Mais, nous le savons, la loi ne suffit pas ; elle n'a pas empêché le phénomène d'atteindre une ampleur très inquiétante. En effet, sept femmes sur dix disent ne pas oser porter plainte ou ne signalent pas les agissements dont elles sont victimes. Et lorsqu'elles l'ont fait, quatre femmes sur dix considèrent que cela n'a pas débouché sur une solution positive, qu'il ne s'est rien passé ou, pire, que cela s'est retourné contre elles – ce qui d'ailleurs pousse les autres à se taire. Malgré cette peur de parler, les recours existent et l'Inspection du travail a été saisie l'année dernière de 2 400 cas.

Tous les acteurs doivent se mobiliser. Sans parler des personnes coupables de harcèlement, l'entourage, souvent, ne se rend pas compte de la gravité du sexisme ordinaire. Celui-ci crée un terreau qui peut mener au harcèlement. Tous, managers, organisations patronales, organisations syndicales, salariés, proches, doivent prendre conscience de ce phénomène. C'est parce que le sexisme ordinaire, condamnable dans la loi, est toléré qu'il est particulièrement facile de dériver vers le harcèlement.

L'une des difficultés, dans ce domaine, est l'apport des preuves nécessaires au traitement judiciaire. C'est pourquoi il faut mettre tous nos efforts dans la prévention, afin que les victimes sachent à qui s'adresser – numéro vert, représentant syndical, DRH, médecin du travail, inspection du travail – et dans la sensibilisation, afin que certaines situations ne soient plus considérées comme acceptables par l'entourage.

J'ai saisi officiellement les partenaires sociaux, leur demandant de faire des recommandations pour le 15 décembre. Si des dispositions législatives venaient à être proposées, elles pourraient s'intégrer au projet de loi sur la sécurisation des parcours professionnels. Mais je ne veux pas préjuger du travail des partenaires sociaux. C'est pourquoi, tout en vous rejoignant sur la nécessité d'agir sur le sujet, j'émets un avis défavorable sur cet amendement.

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