La question apparemment technique qu'aborde M. Bothorel est très importante pour ce qui est de la régulation et de la capacité de l'autorité judiciaire à bloquer certains sites. Actuellement, lorsque l'autorité judiciaire décide de bloquer l'accès à un site pour les internautes français, elle s'adresse aux fournisseurs d'accès à internet – Orange ou Free – , qui bloquent le site par l'intermédiaire de la box de connexion à internet dont dispose l'usager. La demande de M. Bothorel souligne le fait, qui doit tous nous préoccuper quant à l'efficacité et à l'effectivité de ce que nous votons, que certains nouveaux protocoles de connexion à internet ne permettent pas à la boîte de connexion de voir passer le flux, donc de savoir que vous êtes en train de vous connecter à un site interdit. Ainsi, le procédé technique de connexion offre de très nombreux moyens de contourner les blocages décidés par la justice : si nous nous contentons de dire que l'autorité judiciaire peut enjoindre à un fournisseur d'accès à internet le blocage d'un site, nous laisserons échapper 90 % du trafic, notamment parce que la configuration des navigateurs interdit aux fournisseurs d'accès de voir passer le trafic.
Cet amendement, qui semble très technique, soulève donc, en réalité, la question de l'utilité des mesures que nous votons : nous aurons beau voter une mesure, si elle n'a pas visé techniquement les bons intermédiaires, elle n'aura aucune effectivité. C'est une question essentielle.
L'amendement de M. Bothorel pose cependant deux problèmes. Le premier tient à ce qu'il vise l'autorité administrative sans donner au juge la même latitude – latitude dont il devrait pourtant disposer ; le deuxième, à la qualification juridique des personnes visées, l'amendement ayant pour objet de ne pas limiter le dispositif aux seuls fournisseurs d'accès à internet. En effet, si la formule « toute personne susceptible d'y contribuer » proposée par M. Bothorel prend en compte la multiplicité des intermédiaires – sans entrer dans le détail des protocoles employés sur le web – , elle pose néanmoins un problème de définition juridique des acteurs.
La rapporteure et le Gouvernement partagent la volonté de trouver une rédaction permettant d'atteindre l'objectif visé, qui est de bloquer certains sites. Monsieur Bothorel, je vous propose donc de retirer votre amendement, étant entendu que nous nous engageons à trouver, dans le cadre de la navette parlementaire, une nouvelle écriture d'une partie de l'article, afin de répondre à l'objet de votre amendement.