Intervention de Jean-Louis Bricout

Séance en hémicycle du jeudi 11 février 2021 à 9h00
Respect des principes de la république — Article 21

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaJean-Louis Bricout :

Nous sommes nous aussi, au sein du groupe Socialistes et apparentés, attachés à l'école de la République, comme beaucoup d'entre nous certainement. Mais nous sommes surpris que l'article 21, dont nous discutons aujourd'hui, soit utilisé comme le principal outil d'un texte visant à lutter contre le séparatisme. Alors que les motifs religieux restent exceptionnels dans le cadre de l'instruction à domicile – IAD – , vous utilisez un marteau pour écraser une mouche. Moins de 5 000 enfants sont scolarisés à domicile pour des motifs religieux, soit moins de 10 % des élèves concernés par ce type d'enseignement. Le ministère l'a reconnu lui-même en novembre 2020, dans une étude portant sur l'instruction à domicile : il estime que les cas d'enfants exposés à un risque de radicalisation et repérés à l'occasion du contrôle de l'instruction au domicile familial sont exceptionnels. Nous regrettons donc l'amalgame qu'établit l'article 21 entre l'IAD et le séparatisme.

Cette disposition aura pour aussi pour conséquence l'inscription en milieu scolaire d'élèves supplémentaires – 29 000, selon l'étude d'impact citée dans la version initiale du texte – , ce qui impliquera nécessairement le recrutement d'enseignants à hauteur de 840 équivalents temps plein dans le premier degré et 337 dans le second degré, alors que, monsieur le ministre, vous supprimez encore actuellement des postes dans nos territoires pour la rentrée prochaine !

Une fois de plus dans cette loi, vous n'utilisez pas, avec ce marteau, le bon outil. La lutte contre les séparatismes aurait dû consister à appliquer le principe d'autorisation avant tout aux établissements hors contrat. Comment s'assurer que l'on ramène dans le giron de la République les enfants qui en sont éloignés, en se focalisant sur l'instruction en famille tout en maintenant l'existence d'établissements hors contrat ? Il existe en France environ 1 500 établissements de ce type, accueillant un effectif de 85 000 élèves – en hausse de 15 % en 2019. Là est le vrai risque : le refus d'aller au bout des choses, en instaurant un système d'autorisation ou bien une contractualisation obligatoire, aboutira à ce que le vrai problème se pose dès demain dans les établissements hors contrat.

Nous estimons essentiel que l'État garantisse le respect, par l'ensemble des établissements d'enseignement en France, du droit des élèves à l'éducation, et impose des exigences minimales en matière d'enseignement. Je rappellerai à cet égard ce qu'a dit notre collègue André Chassaigne : cet article suscitera des conflits et provoquera des souffrances pour les familles, alors qu'elles ont besoin de sérénité face à des choix pédagogiques qui leur sont quelquefois imposés par la situation de leur enfant. Monsieur le ministre, j'espère que vous reviendrez sur l'article 21.

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