… ne disposent pas des moyens techniques de contrôle – nous en avons beaucoup discuté en commission spéciale. L'utilisation du code INSEE par l'éducation nationale serait un progrès considérable : cette procédure permettrait de rapprocher les fichiers des caisses d'allocations familiales des fichiers fiscaux, afin de détecter les enfants non scolarisés ne relevant pas de l'IEF.
La deuxième erreur est de nature juridique. L'article 21 constitue une atteinte disproportionnée à la liberté d'enseignement, puisqu'il veut conditionner à une déclaration préalable et à un renforcement des critères l'exercice d'une liberté fondamentale. Le Conseil constitutionnel n'a pas tranché explicitement, puisqu'il n'a jamais été saisi de ces questions, mais sa jurisprudence concernant l'enseignement privé, que l'on pourrait assez facilement transposer, reconnaît que l'instruction, publique ou privée, est une liberté fondamentale. Le Conseil d'Etat, lui, a une jurisprudence claire. Que lit-on dans son avis du 19 juillet 2017 « Association '' Les Enfants d'Abord'' et autres » ? « Le principe de la liberté de l'enseignement, qui figure au nombre des principes fondamentaux reconnus par les lois de la République, implique la possibilité de créer des établissements d'enseignement, y compris hors de tout contrat conclu avec l'État, tout comme le droit pour les parents de choisir, pour leurs enfants, des méthodes éducatives alternatives à celles proposées par le système scolaire public, y compris l'instruction au sein de la famille. »
Je suis également étonné que peu de collègues aient cité la défenseure des droits, dont les conclusions sur l'article 21 sont accablantes. Jugez-en à travers ces morceaux choisis. Première observation : « Quant à l'objectif visé, tout d'abord. En effet, la place de ces dispositions dans ce projet de loi interroge sur la possibilité qu'elles soient motivées par des seuls impératifs sécuritaires plutôt qu'au regard de l'intérêt supérieur de l'enfant. À ce titre, la loi viendrait remettre en cause l'instruction à domicile de nombreux enfants aux besoins fondamentaux desquels elle répond pourtant de manière satisfaisante. »
Deuxième observation : « Quant à sa nécessité et sa proportionnalité ensuite : d'une part, et sous toutes réserves, l'étude d'impact n'apporte aucun élément clair et aucune visibilité sur les profils des enfants et des familles concernées actuellement par l'instruction à domicile et sur le risque de prosélytisme au sein de l'instruction dans la famille » – et les recherches que j'ai faites montrent que pas un des terroristes condamnés n'a été éduqué dans ce cadre.
« D'autre part », poursuit-elle – c'est sa troisième observation – , « la loi du 26 juillet 2019 pour une école de la confiance vise déjà à clarifier et resserrer l'encadrement des contrôles pédagogiques de l'instruction dans la famille. Il semblerait utile de commencer par faire le bilan du renforcement des modalités et du contenu des contrôles introduit par cette loi. D'autant qu'un vade-mecum » – texte intéressant que vous avez sans doute tous lu – « a été élaboré très récemment par le ministère de l'éducation nationale, de la jeunesse et des sports pour présenter le cadre législatif et réglementaire du contrôle de l'instruction en famille. ». Et elle formule ensuite plusieurs réserves, dont celle sur la constitutionnalité de la disposition.
Des justifications du Gouvernement reste l'argument selon lequel sept des pays membres de l'Union européenne ont interdit l'IEF. Je me suis livré à une petite recherche historique. Vous nous citez l'Allemagne, monsieur le ministre, mais savez-vous par qui a été interdite l'instruction en famille ?