Je suis très heureux pour une fois d'avoir la même position que notre collègue Genevard.
Je veux ici m'opposer à l'administration de biens de rapport par les associations cultuelles parce que notre laïcité publique, pour reprendre le titre d'un ouvrage majeur d'Émile Poulat, ce n'est pas le fruit d'un deal entre les cultes et la République. Je ne suis pas d'accord avec la philosophie de la contrepartie qui imprègne les alinéas 5 et 6 parce que, comme nous tous sur ces bancs, j'ai une haute idée de notre république. Or celle-ci implique l'arrachement unilatéral du peuple français à l'influence religieuse à laquelle pourraient être soumises les décisions publiques et la compétence du législateur et nous interdit d'accorder des contreparties à des sections du peuple français.
L'une des intentions de ce chapitre est de distinguer plus clairement les associations cultuelles des autres associations. Mais l'alinéa 5 de l'article 28 tend au contraire à brouiller cette distinction en permettant à des associations cultuelles de ne pas se consacrer exclusivement à leur objet, à savoir le culte. N'étant pas soumises à l'impôt sur les libéralités, elles seront d'ailleurs considérablement avantagées par rapport à d'autres acteurs de l'immobilier.
Sincèrement, est-ce ce qu'auraient voulu les rédacteurs de la loi de 1905 ? Je ne le crois pas. Le fait de permettre aux associations cultuelles de posséder des immeubles acquis à titre gratuit ou de les administrer pour en retirer des revenus locatifs est contraire, non pas à une disposition mineure de la loi de 1905, mais à sa philosophie générale.
Monsieur le rapporteur général, si vous nous avez fait voter en commission spéciale un amendement visant à plafonner la valeur des immeubles acquis à titre gratuit, c'est parce que vous savez que la disposition comporte un risque important. Alors que votre intention est sans doute d'opérer un rééquilibrage entre différents cultes – ce qui, au passage, n'est pas le rôle de notre État laïc et libéral – , vous allez au contraire creuser un fossé : ceux qui sont aujourd'hui avantagés, pour des raisons historiques ou autres, le seront encore davantage demain avec l'application de cet article.
Comment allez-vous réguler l'action de certains mouvements religieux qui peuvent présenter un caractère sectaire, comme nous le voyons dans d'autres pays du monde, notamment au Brésil ? Les associations cultuelles doivent-elles pouvoir bâtir des empires immobiliers comme certaines le font dans d'autres États, avec les conséquences néfastes que nous connaissons ? Ce n'est pas notre conviction. Que le culte s'occupe du cultuel et que les acteurs de l'immobilier s'occupent de l'immobilier !
Le 22/02/2021 à 19:58, Laïc1 a dit :
Les associations cultuelles sont des associations à but lucratif ?
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