Intervention de Pascal Brindeau

Séance en hémicycle du jeudi 25 mars 2021 à 21h00
Lutte contre les individus violents lors de manifestations — Discussion générale

Photo issue du site de l'Assemblée nationale ou de WikipediaPascal Brindeau, rapporteur de la commission des lois constitutionnelles, de la législation et de l'administration générale de la République :

Je remercie les orateurs pour leur contribution à ce débat. Je rappellerai l'état d'esprit dans lequel nous avons travaillé. D'abord, comme tous l'ont redit, nous sommes viscéralement attachés à la liberté fondamentale de pouvoir manifester et exprimer collectivement ou individuellement une opinion politique. Personne, d'ailleurs, à une ou deux exceptions près, n'a remis en question notre bonne volonté. Ensuite, nous n'opposons pas le fait que le juge judiciaire soit le garant des libertés individuelles – qui est un principe constitutionnel – avec certaines exceptions déjà prévues par les textes. Ceux qui l'ont évoqué à l'appui de leur argumentation l'ont reconnu. Or ces exceptions permettent, en fin de compte, de respecter la liberté fondamentale du plus grand nombre au détriment d'une prétendue liberté fondamentale de quelques-uns.

Je préfère ce bémol mis au strict respect de la séparation entre autorité judiciaire et autorité administrative s'il permet que des manifestants pacifiques puissent continuer de manifester et que des fauteurs de troubles, des délinquants, des casseurs soient empêchés d'agir. Car, nous le savons, l'interdiction judiciaire prononcée par le juge est aujourd'hui quasi inopérante, quasi inusitée et nous laissons, par faiblesse ou peut-être par lâcheté, finalement, des individus aller dans les rassemblements pacifiques, se constituer en black blocs pour casser du flic, casser du mobilier urbain, des vitrines, provoquant la plus grande sidération chez tous nos concitoyens.

L'argument de la possible inconstitutionnalité a été invoqué, notamment, par le représentant du groupe La République en marche. Je répète ce qu'on a pu dire à l'occasion de l'examen des textes précédents : nous sommes le Parlement, nous sommes les représentants élus du peuple.

Nous n'avons pas, lorsque nous faisons des propositions, à nous autocensurer par avance en spéculant sur la constitutionnalité ou l'inconstitutionnalité du dispositif que nous défendons. Vous l'avez constaté : notre proposition s'appuie, grief par grief, sur les recommandations du Conseil constitutionnel.

Je conteste l'analyse selon laquelle j'interprète la décision du Conseil constitutionnel lorsque j'affirme qu'il n'avait pas remis en question le principe de l'interdiction administrative. Il a clairement indiqué au paragraphe 21 de sa décision que le législateur, en voulant instaurer une interdiction administrative de participer à une manifestation, a « poursuivi l'objectif de valeur constitutionnelle de sauvegarde de l'ordre public ». C'est la portée de cette interdiction qui a été censurée. Le Conseil constitutionnel invitait donc, en quelque sorte, le législateur à revoir sa copie. C'est précisément ce que nous voulons faire ce soir en soumettant cette proposition de loi.

Si d'aventure l'amendement de suppression qui est sur le point d'être examiné était adopté, j'en conclurais que ceux qui tiennent des discours dans lesquels ils affirment leur soutien aux manifestants pacifiques et leur volonté de lutter contre les fauteurs de troubles, les casseurs et les black blocs, se satisfont, en réalité, du statu quo actuel, qui n'est qu'un état de lâcheté.

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