M. François Ruffin attire l'attention de Mme la ministre des solidarités et de la santé sur la fraude aux cotisations sociales. Il s'appuie pour cela sur la situation de Philippe Pascal, ancien inspecteur de l'Urssaf. Son cas, de notoriété publique, a largement été évoquée, ces dernières semaines, dans les médias (Mediapart, La Provence, Libération, L'Humanité, Le Dauphiné, entre autres). En décembre 2010, Philippe Pascal, alors en charge de la lutte antifraude dans le Vaucluse, est mandaté par sa direction pour contrôler un hôtel et un restaurant, alors propriété d'un homme d'affaires local influent, par ailleurs dirigeant de plusieurs autres sociétés. Le contrôle met au jour de nombreux délits : travail dissimulé, double comptabilité, faux bilans, abus de biens sociaux, prise illégale d'intérêts La procédure se solde, en février 2011, par la mise en examen du dirigeant d'entreprise et de son fils pour « abus de biens sociaux, recel d'abus de biens sociaux, faux bilan, travail dissimulé et harcèlement moral », ainsi qu'un redressement fiscal de 750 000 euros. Les problèmes de Philippe Pascal commencent alors. En novembre 2011, quelques jours après la notification du redressement, un 4x4 cherche à le percuter sur la chaussée. En mai 2012, un ami qu'on a confondu avec lui parce qu'il sortait de son domicile est passé à tabac. Quarante-cinq jours d'ITT lui sont prescrits. En mars 2013, le véhicule de Philippe Pascal est volé puis retrouvé à l'entrée de l'Urssaf, son lieu de travail, agrémenté d'un panneau où est écrit « Tire-toi vite ». À chaque fois, une plainte est déposée mais classée sans suite. Début 2014, Philippe Pascal se plaint auprès de la nouvelle direction régionale de l'Urssaf du manque de soutien dont il bénéficie, alors que son travail a depuis treize ans toujours été loué par ses supérieurs. Il reçoit alors une convocation devant un conseil de discipline pour « manque de discernement » et « dénigrement de sa hiérarchie ». Le dirigeant d'entreprise va alors porter plainte, à trois reprises, contre Philippe Pascal. La première pour corruption, classée sans suite. Une autre pour atteinte à la présomption d'innocence, dans laquelle le dirigeant a été débouté en première instance puis en appel, et condamné à verser 2 000 euros de dommages et intérêts à Philippe Pascal. La dernière procédure vise Philippe Pascal pour « recel d'enregistrement privé ». L'inspecteur de l'Urssaf avait en effet en sa possession un enregistrement du dirigeant, effectué par un salarié, où le chef d'entreprise reconnaissait avoir enfreint la loi. Selon l'article 40 du code de procédure pénale, Philippe Pascal a transmis cet enregistrement à sa hiérarchie. Cet acte lui vaut d'être visé par une plainte de l'avocat du dirigeant d'entreprise. Le procès, initialement prévu en mai 2016, a été repoussé quatre fois, et récemment encore parce que l'un des trois avocats du plaignant avait mal au dos. La situation que vit depuis sept ans Philippe Pascal, aujourd'hui retraité, lui a valu d'être entre autres victime d'un épuisement professionnel, de trois séjours aux urgences pour malaises cardiaques, et d'effectuer un séjour en clinique psychiatrique, après avoir perdu quinze kilos. Dans le même temps, les procédures pénales déposées par la gendarmerie, l'inspection du travail et la police pour travail dissimulé, prise illégale d'intérêt, abus de biens sociaux, faux bilans, faux et usage de faux et intimidation n'ont à ce jour pas encore été traitées par le parquet d'Avignon. Ce cas peut avoir valeur d'exemple. Alors que la Cour des comptes a estimé en 2014 (source le Figaro) que la fraude aux cotisations sociales représentait, chaque année, une perte de 20 à 25 milliards d'euros pour l'État, il lui demande ce que compte faire son ministère pour améliorer le soutien de l'État à ses propres agents chargés de contrôler les entreprises et quel appui, symbolique et concret il apportera à M. Philippe Pascal, que l'on ne qualifiera même pas de « lanceur d'alerte » mais simplement de fonctionnaire soucieux de bien faire son travail. Il lui demande si un autre inspecteur de l'Urssaf, ou de toute autre administration de contrôle, osera- désormais mener à bien ses missions au vu des conséquences personnelles que cela peut engendrer sur sa santé.
Les inspecteurs de l'union de recouvrement pour la sécurité sociale et les allocations familiales, du fait de la spécificité de leurs missions, peuvent être exposés à des situations difficiles entraînant des risques particuliers. L'institution protège ses agents et c'est une de ses premières préoccupations, constamment pris en compte avec le soutien de ses ministères de tutelle. Le protocole d'accord de l'Union des caisses nationales de Sécurité sociale (UCANSS) « relatif aux personnels chargés d'une activité de contrôle au sein de la branche du recouvrement » conclu le 27 février 2009, promeut une protection contre les risques d'agression, quelle qu'en soit la nature, qui s'articule autour de plusieurs axes : des actions d'identification des risques d'agression (un protocole vise toutes les agressions, commises par un tiers à l'organisme à l'occasion ou du fait de missions de contrôle, qu'elles soient verbales, comportementales ou physiques) ; l'amélioration de la connaissance des risques, chaque incident fait l'objet d'un signalement auprès de l'employeur par le salarié concerné. La protection passe également par des actions de prévention des risques d'agression : des formations spécifiques sont dispensées au profit des salariés participant à des activités de contrôle. Le comité d'hygiène, de sécurité et des conditions de travail établit, à l'appui des fiches de signalement d'incident, un recensement des mesures susceptibles de limiter les risques d'agression. Enfin, il est prévu des mesures de réparation des dommages et accompagnement en cas d'agression. Outre le droit de retrait octroyé au salarié par les dispositions légales en vigueur, diverses mesures viennent enrichir le dispositif d'accompagnement : l'employeur étant tenu à une obligation de sécurité à l'égard de ses salariés, il doit souscrire à leur bénéfice, un contrat d'assurance incluant l'indemnisation de tout dommage assurable résultant de l'agression de la part de tiers. L'employeur prend en charge la procédure de défense du salarié ainsi que les frais afférents, y compris les frais d'avocat. L'organisme employeur se constitue partie civile dès lors qu'un salarié ou ses ayants droit déposent une plainte consécutive à une agression survenue dans l'exercice de ses fonctions. Le salarié peut, s'il le souhaite, bénéficier en cas d'agression physique ou d'incident entrainant des séquelles corporelles et/ou psychiques, d'un soutien psychologique, étant précisé que cet accompagnement par du personnel qualifié est proposé par l'organisme en lien avec le médecin du travail. Ce protocole d'application impérative pour l'ensemble des organismes de la branche recouvrement fait l'objet d'un suivi annuel de l'Instance nationale de concertation sous l'égide de l'UCANSS. Enfin, un bilan des situations d'agression remontées par les organismes est établi à destination des partenaires sociaux, lors des rencontres paritaires organisées par l'UCANSS.
1 commentaire :
Le 14/03/2018 à 10:39, Sonate au clair de lune a dit :
Monsieur le Député Ruffin, Question bien pertinente, qui soulève d'autres lièvres..Dans l'attente d'une éventuelle réponse, il faut savoir que le cas de Monsieur Philippe Pascal est hélas loin d'être isolé, trop nombreux depuis bien des années, force est de constater que rien ne change...A titre d'exemple, parmi bien d'autres,le cas de Jacques Verne, Inspecteur des finances, contrôleur d'Etat à la CNAM depuis 1972, dont l'internement en psychiatrie fût "organisé" pour avoir dénoncé des malversations au profit d'élections municipales de l'hiver 1983 à Montpellier..... Cf. Livre " ENFERMEZ LES TOUS, Internements : le scandale de l'abus et de l'arbitraire en psychiatrie", page 226, "pots de vins à la CNAM"(https://www.lexpress.fr/culture/livre/enfermez-les-tous-internements-le-scandale-de-l-abus-et-de-l-arbitraire-en-psychiatrie_807164.html)
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