M. Yannick Haury interroge M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur sur les conclusions de la Commission d'enquête sénatoriale sur l'état des forces de la sécurité intérieure. Le rapport publié au mois de juillet révèle un profond malaise et mal-être des forces de l'ordre avec un risque important de suicide ou de troubles psycho-sociaux. Le quotidien des agents, notamment leurs rythmes de travail et leur vie de famille ont été fortement affectés par l'accroissement de leurs missions consécutives aux attaques terroristes et à la crise migratoire. Il est constaté aussi une dégradation, ces dernières années, des conditions matérielles dans lesquelles ils exercent leurs missions. S'il convient de noter que des efforts ont déjà été fournis par le Gouvernement depuis une année, il devient nécessaire de les accroître au regard de la situation actuelle. La mission des forces de l'ordre est essentielle et il faut rendre hommage à ces femmes et ces hommes qui la remplissent tant elle est difficile et importante pour la population. Aussi, il souhaite connaître les intentions du Gouvernement en la matière et notamment les grandes orientations qui seront arrêtées prochainement suite aux conclusions de ce rapport.
Depuis 2013, la gendarmerie nationale s'est résolument engagée dans une démarche de prévention des risques professionnels et notamment de prévention des risques psychosociaux (RPS) et d'amélioration de la qualité de vie au travail au profit de l'ensemble de ses personnels militaires comme civils. Cette démarche, conduite localement par 51 commissions locales de prévention – repose sur l'identification des situations professionnelles fragilisantes et la réduction de leur impact sur la santé des personnels. Sa finalité est d'identifier les facteurs de RPS propres à chaque organisme tout en réunissant et exploitant les pistes d'action préventives et correctives proposées par les personnels directement concernés. La prévention du risque suicidaire en gendarmerie nationale s'inscrit dans le cadre plus global de la prévention des risques professionnels – notamment des RPS – construite sur 3 niveaux de prévention (primaire : réduire le risque / secondaire : former et préparer aux conséquences du risque / tertiaire : éviter l'aggravation et réparer les dommages causés). Lors de la réunion de la commission nationale de prévention du 15 mars 2018, le directeur général de la gendarmerie nationale a réaffirmé sa volonté de poursuivre les efforts engagés sur cette problématique sur les trois axes suivants : - axe 1 : poursuivre et renforcer la politique de prévention des RPS engagée depuis 2013 ; - axe 2 : former l'encadrement et sensibiliser l'ensemble des personnels ; - axe 3 : renforcer l'accompagnement et la prise en charge psychologique des personnels. Les conditions de vie et de travail des gendarmes et de leurs familles constituent l'une des priorités du Gouvernement. À ce titre, un effort budgétaire est donc porté sur l'immobilier, dans le cadre de la programmation ministérielle (2018-2020). Dotée de 101 M€ en 2018 et de 105 M€ pour les années suivantes, cette enveloppe permettra de traiter les opérations prioritaires de construction, de réhabilitation et de restructuration, de maintenance et d'entretien du parc, en particulier sur les logements. Sur cette somme, 15 M€ seront également consacrés au renforcement de la sûreté passive des casernes domaniales. En 2019, 61 M€ seront consacrés au renouvellement du parc automobile. Cette somme permettra l'acquisition de 2 800 véhicules légers (deux et quatre roues). Le renouvellement du parc automobile devrait se poursuivre à un rythme régulier sur l'ensemble du quinquennat. Sous réserve d'obtenir un abondement budgétaire correspondant, des caméras mobiles pourraient être commandées afin d'équiper les unités territoriales de gendarmerie en 2019. À ce stade, les marges de manœuvre en gestion sont contraintes, la réserve de précaution de l'année 2018 ayant notamment porté sur les crédits initialement dédiés aux équipements individuels et aux systèmes d'information et de communication. Le sujet du suicide est également une préoccupation majeure de la police nationale, qui conduit de longue date une politique volontariste en la matière. Depuis 1996, la direction générale de la police nationale est dotée d'un service de soutien psychologique opérationnel, qui compte 89 psychologues cliniciens répartis sur l'ensemble du territoire. Les psychologues proposent des consultations pour les agents rencontrant des difficultés et apportent une aide aux responsables souhaitant mettre en place un système d'accompagnement psychologique après un événement potentiellement traumatique. Pour améliorer la détection des personnels en difficulté, la réactivité et la prise en charge au niveau local, un « programme de mobilisation contre le suicide » a été lancé fin 2017. Plusieurs groupes de travail, chargés de décliner de manière concrète ses mesures, devraient achever leurs travaux durant le premier trimestre 2019. La direction générale de la police nationale agit également sur les causes « socio-organisationnelles » du suicide. Le management, la communication interne et les relations interpersonnelles sont à cet égard des enjeux clairement identifiés, de même que la formation. Le ministre de l'intérieur, qui a fait de l'amélioration des conditions de travail des policiers une de ses priorités, suivra avec la plus extrême attention la mise en œuvre du programme de mobilisation contre le suicide. Plus largement, la réponse au « malaise » qui a pu s'exprimer dans la police nationale passe aussi par les mesures prises par le Gouvernement pour renforcer les moyens et surtout redonner du sens à la vocation des policiers. Il convient à cet égard de rappeler que la sécurité a été érigée par le Gouvernement au rang de priorité. Ainsi, après une hausse de 1,5 % en 2018, le budget des forces de sécurité intérieure de l'Etat augmentera encore en 2019 de 2,6 %, soit 335 M€ supplémentaires. Le budget dédié aux équipements atteindra 236 M€ pour les deux forces, permettant aux policiers et aux gendarmes d'être mieux équipés et surtout mieux protégés. Sur le plan immobilier en particulier, si important pour les conditions de travail, les crédits d'investissement permettent pour la police nationale également un effort majeur, qu'il s'agisse de travaux de rénovation, de réhabilitation ou de constructions neuves, avec un budget « immobilier » de près de 200 M€ par an au titre de la programmation triennale 2018-2020. La signature d'un protocole d'accord avec les organisations syndicales du corps d'encadrement et d'application de la police nationale en décembre, qui ouvre la voie à une amélioration et une modernisation des conditions de travail et de rémunération des policiers, témoigne de la volonté du Gouvernement de reconnaître l'engagement exceptionnel des policiers.
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