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Hubert Wulfranc
Question N° 13067 au Ministère de la transition écologique et solidaire


Question soumise le 9 octobre 2018

M. Hubert Wulfranc attire l'attention de M. le ministre d'État, ministre de la transition écologique et solidaire, sur le projet d'ordonnance « visant à favoriser l'innovation technique et architecturale » découlant de l'article 49 de la loi pour un État au service d'une société de confiance dans le domaine des normes de performance énergétique et environnementale. Cette ordonnance en cours d'élaboration est chargée d'établir le contour du « permis d'expérimenter » qui permettra aux maîtres d'ouvrage de proposer des projets de constructions contenant des solutions d'effet équivalent aux dispositions constructives applicables. Les maîtres d'ouvrage usant de ce dispositif seraient tenus d'apporter la preuve de l'atteinte de résultats équivalents aux dispositions constructives auxquelles ils dérogeraient. Missionné par le Gouvernement pour identifier les normes pouvant faire l'objet du droit à dérogation dans le cadre du permis d'expérimenter, le Conseil supérieur de la construction et de l'efficacité énergétique (CSCEE) a constitué plusieurs groupes de travail sous l'autorité de la direction de l'habitat, de l'urbanisme et des paysages relevant du ministère de la transition écologique et solidaire. Le groupe de travail dédié à la performance énergétique et environnementale a rendu à l'unanimité un avis indiquant que les normes relatives à la performance énergétique étant d'ores et déjà libellées sous forme d'obligation de résultats, aucune norme en la matière n'est susceptible de faire l'objet du « permis de faire », dénomination antérieure du « permis d'expérimenter ». Or, à l'occasion de la réunion de synthèse des différents groupes de travail qui s'est tenue le 12 juin 2018, l'Union sociale pour l'habitat a demandé par écrit à la DHUP, de bien vouloir intégrer les articles L. 111-9 et L. 111-10 du code de la construction et de l'habitation au dispositif du « permis de faire » contredisant ainsi les conclusions du groupe de travail performance énergétique et environnementale. La législation prévoyant des obligations de résultats, et non de moyens, en termes de respect d'objectifs de performance énergétique et environnementale, la position de l'USH ne peut s'analyser que comme une volonté de réduire ses exigences. En effet, les maîtres d'ouvrage disposent déjà de toutes facultés en termes de solutions techniques pour atteindre les objectifs normatifs assignés. Cette demande de l'USH, conséquence vraisemblable de la réduction des fonds propres des bailleurs sociaux liée à la baisse des allocations personnalisées au logement, serait synonyme, si elle aboutissait, d'un moins disant qualitatif sur le patrimoine locatif social. Une fois la brèche ouverte, les acteurs de l'habitat privé s'engouffreraient dans celle-ci pour proposer des logements de moindre qualité énergétique et environnementale. En outre, si la législation prévoit la délivrance d'une attestation d'effet équivalent, celle-ci pourrait être délivrée par un détenteur d'un certificat de qualification en matière de maîtrise d'œuvre dans le domaine considéré, rémunéré par le maître d'ouvrage, et non pas par les services de l'État pour ce qui relève dispositions tenant à la performance énergétique. Cette faculté laisse planer davantage encore un doute sur le respect des objectifs de performance énergétique et environnementale sur l'ensemble des projets de constructions. Par conséquent, il lui demande quelles dispositions entend prendre le Gouvernement pour assurer un haut niveau d'exigence énergétique et environnementale pour l'ensemble des projets de constructions, y compris ceux relevant du dispositif « permis d'expérimenter ».

Réponse émise le 22 janvier 2019

L'article 49 de la n° 2018-727 du 10 août 2018 pour un État au service d'une société de confiance (dite « ESSOC ») autorise le Gouvernement à prendre deux ordonnances afin de faciliter l'innovation technique et architecturale. La première ordonnance publiée le 30 octobre 2018 vise à faciliter la réalisation de projets de construction et à favoriser l'innovation. Elle vient cadrer les modalités selon lesquelles les maîtres d'ouvrage peuvent réaliser des projets de construction en mettant en œuvre des solutions d'effet équivalent aux dispositions constructives applicables à l'opération. Ces solutions ne seront autorisées que sous réserve d'apporter la preuve de l'atteinte de résultats équivalents aux dispositions constructives auxquelles il est dérogé. Cette ordonnance est prise dans l'attente d'une seconde ordonnance qui a pour objectif de réécrire le code de la construction et de l'habitation selon une logique de résultats et dont l'entrée en vigueur est prévue d'ici 15 mois. Les solutions d'effet équivalent ne peuvent en aucun cas aboutir à une baisse de la performance que l'application de la réglementation en vigueur permet d'atteindre et ce, quel que soit le domaine ciblé. Les opérations s'inscrivant dans la démarche de l'ordonnance I ne subiront aucunement une dégradation de leur performance énergétique. Il en est de même pour les autres dispositions constructives entrant dans le champ d'application de cette ordonnance. Il semble nécessaire de rappeler qu'au cours de la concertation menée avec les acteurs en lien avec le conseil supérieur de la construction et de l'efficacité énergétique (CSCEE), un groupe de travail fut spécifiquement dédié à la question de la performance énergétique et environnementale des bâtiments. Il a été convenu dans ce groupe de travail d'exclure du champ de l'ordonnance les domaines suivants : la réglementation thermique par élément pour les bâtiments existants, les objectifs de résultats de la réglementation thermique pour les bâtiments neufs (besoin bioclimatique - Bbio, la consommation d'énergie primaire - Cep et la température intérieure conventionnelle - Tic) et les dispositifs d'attestation du respect de la réglementation. Il sera précisé dans le décret d'application que les exigences de résultats déjà inscrites dans la réglementation thermique pour les bâtiments neufs ne pourront pas faire l'objet de solution d'effet équivalent. Ce même groupe de travail du CSCEE a établi la pertinence de conserver la thématique de la thermique du bâtiment dans le champ de l'ordonnance, compte tenu d'exigences de moyens qu'elle contient : exigence de 1/6 de parois vitrées, dont l'objectif sous-jacent correspond à des apports solaires minimaux ; exigence de chauffage qui peut être superflue pour un bâtiment dont la conception bioclimatique est particulièrement poussée (bâtiment passif) ; éventuelle dérogation à des éléments du moteur de calcul si ces derniers s'avèrent insuffisants pour évaluer le réel potentiel du bâtiment. Le groupe de travail a également insisté sur la nécessité de respecter les directives européennes et tous les objectifs de résultats visant à maximiser la sobriété des bâtiments, limiter des consommations en énergie primaire, assurer le confort d'été et la perméabilité à l'air des bâtiments. Enfin, il a été rappelé que la non-performance énergétique pouvait être un motif d'impropriété à destination (engageant la garantie décennale), ce qui représente une sécurité quant au maintien de la qualité de conception énergétique des bâtiments. Le contrôle prévu par l'ordonnance I est multiple et renforcé par rapport au droit commun. Le premier contrôle a lieu avant la demande d'autorisation d'urbanisme par un organisme indépendant du projet qui vérifie l'équivalence de résultat atteint par la solution proposée. Selon la thématique sur laquelle porte la solution d'effet équivalent, cet organisme peut être : un contrôleur technique agréé, le centre scientifique et technique du bâtiment (CSTB), le centre d'études et d'expertise sur les risques, l'environnement, la mobilité et l'aménagement (Cerema) ou un bureau d'étude qualifié par un organisme agréé par le comité français d'accréditation (COFRAC). Ainsi, la compétence de l'organisme délivrant l'attestation est assurée. Tout au long des travaux, un contrôleur technique s'assure de la bonne mise en œuvre de la solution et en atteste auprès de l'autorité compétente à l'achèvement des travaux. Le projet reste par ailleurs soumis au contrôle régalien des règles de construction (CRC). Tout ce processus est de plus sécurisé par les régimes d'assurances des acteurs ainsi que par le respect de l'indépendance des entités de contrôle vis-à-vis du projet. Pour toutes ces raisons, les acteurs qui se sont montrés inquiets à l'idée d'une baisse de la qualité énergétique des bâtiments peuvent être rassurés.

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