M. Jean François Mbaye interroge M. le ministre d'État, ministre de l'intérieur, sur la situation de l'Aquarius, bateau de sauvetage agissant en mer Méditerranée. Le 23 septembre 2018, l'Aquarius, navire affrété par les ONG SOS Méditerranée et Médecins sans Frontières, accueillait à son bord 58 personnes, 58 vies humaines, sauvées des eaux grâce à son intervention. Si ce sauvetage, preuve d'un altruisme sans bornes, n'est pas le premier fait d'armes de son équipage, la question se pose désormais de savoir s'il s'agissait là du dernier. Une fois de plus confronté à d'immenses difficultés dans sa quête d'un mouillage, l'Aquarius doit également faire face au retrait de son pavillon panaméen, lequel lui interdit désormais de naviguer légalement dans les eaux internationales. À cette situation regrettable, viennent s'ajouter les commentaires inadmissibles de certains élus n'hésitant pas à qualifier l'équipage de l'Aquarius de « passeurs », créant ainsi un parallèle aussi fallacieux qu'inacceptable entre des réseaux criminels exploitant la misère et des personnels motivés par la seule volonté de porter secours à des êtres humains en danger de mort. Si les obligations internationales en matière de sauvetage des personnes en mer sont connues, de même que les turpitudes de certains des partenaires européens, des vies humaines ne sauraient être sacrifiées sur l'autel de la diplomatie européenne. La France ne peut le permettre. Selon le rapport annuel de l'Agence des Nations unies pour les réfugiés, 16,2 millions de personnes dans le monde ont fui leur pays en 2017. Le nombre de déplacés en dehors de leur pays a atteint un nouveau record, jamais égalé auparavant. Parmi les pays hôtes, la Turquie abritait le plus grand nombre de réfugiés, accueillant 2,8 millions d'entre eux. Viennent ensuite le Pakistan, le Liban, l'Iran, l'Éthiopie, la Jordanie, le Kenya, l'Ouganda, l'Allemagne et le Tchad. Le constat est sans appel : 10 pays accueillent environ 56 % des réfugiés. Il s'agit là d'une responsabilité bien trop lourde pour des pays qui, exception faite de l'Allemagne, connaissent de grandes difficultés de développement. Au regard des chiffres actuels et à venir sur les personnes déplacées dans le monde, il est à la fois urgent et nécessaire d'apporter une solution durable. L'assistance aux naufragés ne devrait en aucun cas faire l'objet de telles tergiversations, qui ne font par ailleurs que retarder la prise de décision qui s'impose. La constante répartition des personnes naufragées entre les différents pays européens n'est qu'un palliatif à une situation récurrente, et met une fois de plus en exergue les ambiguïtés et les limites de la politique migratoire, tant sur le plan européen que national. Si sa nature reste à déterminer, ces considérations réclament une intervention française. La seule autorisation d'aborder les côtes françaises constituerait un geste fort à l'adresse de l'Europe, mais également à l'endroit du reste du monde, le geste d'une France déterminée, confiante en l'efficacité de son droit migratoire, mais surtout d'une France humaine, à rebours des logiques mortifères du populisme. Ainsi, il lui demande solennellement de lui faire connaître les intentions de la France concernant le sort de l'Aquarius, ainsi que sur ses missions actuelles et à venir.
La France participe depuis le début de la crise migratoire à la prise en charge des flux de migrants arrivant en Europe : outre la participation aux programmes européens de relocalisation à partir de la Grèce et de l'Italie de 2015 à 2018 et l'accueil des demandeurs qui arrivent spontanément sur notre territoire depuis lors, la France a également accueilli des personnes en besoin de protection secourues en mer depuis juin 2018. S'agissant de ce dernier point, dans le cadre de six opérations différentes menées depuis juin 2018, la France a accueilli 350 personnes au titre des missions de solidarité envers l'Espagne, Malte et l'Italie pour la prise en compte des migrants secourus en mer. Les personnes accueillies par la France ont systématiquement fait l'objet au préalable d'entretiens pour évaluer leur besoin de protection, s'assurer qu'ils répondaient effectivement aux critères du droit d'asile et veiller à ce que leur présence en France ne pose pas de difficulté au regard de l'ordre public. A leur arrivée, elles ont été hébergées dans le dispositif national d'accueil des demandeurs d'asile et se sont vu reconnaitre très rapidement le statut de réfugié. Ces opérations sont financées avec le concours de financements européens, puisque les Etats-membres participant à la relocalisation reçoivent pour chaque personne accueillie un forfait qui permet de couvrir les frais liés au voyage à et à l'accueil en France. Compte-tenu des opérations de sauvetage ayant eu lieu durant l'été 2018, la Commission européenne a décidé de poursuivre, au titre de la solidarité, l'appui aux Etats-membres volontaires pour prendre en charge ce type d'opérations. Enfin, la France entend, dans le cadre des négociations européennes en cours sur la réforme du Paquet « Asile », plaider pour qu'un dispositif pérenne de solidarité puisse être mis en place à l'échelle de l'Union européenne avec l'objectif de permettre un accueil digne des demandeurs d'asile en besoin de protection secourus en mer et d'organiser un retour rapide de ceux dont la demande ne relève pas de l'asile.
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